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• ■
BULLETIN
DE LA
f ^ . 9
SOCIETE NIVERNAISE
DES
LETTRES, SCIENCES ET ARTS.
NEVERS,
IMPRIMER|IE G. VALLIÈRE,
PLAGI Dl U HALLE KT RUK DU RIMPART.
BULLETIN
SOCIÉTÉ NIVÉRNAISE
LETTRES, SCIENCES ET AUTS.
TBOisilaE seru. - Tom ni-. - un- voluiie du u couEcnoN.
A NEVERS
CHB2 MÂZERON, LIBSÀIBii DE LÀ SoClâlÉ, ElTB DD CoUUBEOEi
Et chez U. HORIN-BOUTILLIER, libb^ibe, avenue de i^ Uahe.
1800
SOCIÉTÉ NIVERNAISE
DES LETTRES, SCIENCES ET ARTS.
■Srr^*»^^
COMPOSITION DU BUREAU.
MM. René de Lespinasse, président.
l'abbé BouTiLUER, vice-président.
Henri de Flamare, secrétaire,
Florimond Gautron, pro-secrétaire.
Bricheteau, trésorier»
DuMiNY, hibliotljécaire et archiviste.
Canat #, conservateur du musée de la Porte du Croux.
LuTZ père, arcintecte.
MEMBRES D'HONNEUR.
Mg' rÉvÉauE DE Nevers.
MM. le Préfet de la Nièvre.
le Président du tribunal aviL,
de Toytot #, président honoraire du tribunal civil.
USTE DES AŒMBRES TITULAIRES.
MM.
AssiGNY (Henry d') *, à Nevers. — ^ juillet 1868.
AssiGKY (Frédéric d'), château de Sury, par Saint-Benin-d'Azy. —
4 avril 1878.
Barrau (Léon d'Abbadie de), château du Chazeau, par Imphy. ~
24 juin 1886.
Baudot, à Lanty, par Rémilly. — 29 novembre 1888.
BoRNiOL (Henri de), 70, rue des Saints-Péres, à Paris. — 3o avril 1885.
Beauchène (Paul de), 23, rue du Cirque, à Paris.
Bertaux (Prosper), directeur d'assurances, à Nevers. — 9 juillet 1874.
— VI —
MM.
Berthier-Bizy (baron Charles de), àNevers. — 5 mars 1874.
Berthier-Bizy (le comte Gaspard de), château de Bizy, par Guérigny
— 31 octobre 1889.
Blanc (Hippolyte) ^, ancien chef de division au ministère des cultes, à
Chamenay, par Fourchambault. — 30 mars 1882.
Blandin (Frédéric), ingénieur civil (E. C), à Nevers. — 4 février 1869.
Blaudin-Valière (Albert), à Nevers. — 7 mars 1872.
BoGROS (l'abbé), curé de Marzy. — 9 mai 1872.
BoiTiAT, archiprêtre de la cathédrale, à Nevers. — 27 avril 1882.
BoNNEAU DU Martray ij(j, ingénieur en chef, à Dijon. — 7 octobre 1875 '
BoNNEjOY (docteur) , à Chars - en - Vexin ( Seine - et - Oise). —
28 février 1888.
BouRGOïKG (baron Pierre de), conseiller général, au château de Mouron.
— 27 juin 1889.
BouTEYRE (Roger de), à Munot parla Charité. — 31 décembre 1885.
BouTiLUER (l'abbé), chanoine honoraire, curé de Coulanges-les-Nevers .
— 6 décembre 1861.
BouTROUX (Paul), propriétaire àNevers. — 3 1 juillet 2884.
BouvEAULT ©A., architecte du département, àNevers. — 3 avril 1862.
Bricheteau, banquier à Nevers. — 4 novembre 1880.
Briêre (comte delà), à Imphy. — 31 octobre 1889.
Bruneau (l'abbé), curé de Maux, pat Moulins-Engilbert. — 26 juin 1884.
BusauET, directeur des mines, à La Machine. — 6 novembre 1873.
Cadeau (l'abbé), curé de Livry. — 27 octobre 1881.
Canat (Henri) #, ancien directeur des domaines, à Nevers. —
4 novembre x88o.
Chabannes (comte Henri de), conseiller d'arrondissement, au château
d'Argoulais par Château-Chinon. — 26 janvier 1888.
Chambure (Henri de), château de la Chaux, par [Saulieu (Côte-d'Or). —
6 novembre 1873.
Chapoy (l'abbé), curé d'Aunay. — 30 août 1872.
Charant (colonel de) O. *S, conseiller d'arrondissement, rue d'Auvergne,
àNevers. — 27 juillet 1882.
Charbonnier, gérant du Journal de la Nièvre. — 7 octobre x88o.
Charpentier (docteur), à Prémcry. — 20 avril 1871 .
Charrier (abbé Jules), curé d'AUuy, par Châtillon.
Chastellux (le comte de), château de Chastellux-sur-Cure (Yonne).
— Février 1885.
Cheminade (Emmanuel), à Nevers. — 26 novembre 1885.
— vu —
MM.
CHEVALiER-LAGéNissiÈRE , président du tribunal civil de Mâcon. —
5 décembre 1872.
Col (Charles), rue de la Banque, à Nevers. — 25 janvier 1883.
Damast-d'Anlezy (comte Pierre de) , conseiller d'arrondissement , châ-
teau d'Anlezy. — 31 octobre 1889.
Davamture $ , adjudant de gendarmerie , Nevers.
Dauphin, notaire à Nevers. — 31 octobre 1889.
Debourges (G.)f avocat, 5 , rue de Rémigny, à Nevers. — 22 février 1883 .
Dr euille (comte Raoul de), château de Lépau, par Donzy . — x er mai 1 879 .
Dhbt (l'abbé), licencié ès-lettres, professeur au petit séminaire de
Saint-Cyr. — 28 février 1889.
Delamalle (Jacques), 104, boulevard Haussmann, Paris.
Delost (l'abbé), chanoine honoraire, curé de Château-Chinon. —
4 mars 1869.
Desmoulins, avoué à Nevers. — 27 juin 1889.
Desveaux, colonel d'artillerie, â Autun (Sa6ne-et-Loire).
Deton (Charles), rédacteur en chef dvt Journal de Suâne^i^Loire, à Mâcon.
— 30 octobre 1884.
DojcGERMAiN (comtc René de), à Nevers. — 25 avril 1889.
DuBARBiER (l'abbé), chanoine honoraire, vicaire général, à Nevers. —
4 décembre 1873.
DucouRTHiAL, agent d'assurances, à Nevers. — Janvier 1885.
DuGUÉ O ^M professeur honoraire, à Saint-Saulge. — 29 novembre 1888.
DuMiNY (Edmond), ancien juge de paix, â Nevers, — 2 juin 1881.
EsFEUiLLES (comte Albéric d') #, député, au château d'Espeuilles. —
27 juin 1889.
EspiARD (baron Henri d') château de MaziUe, par Vandenesse. —
7 mai 1874.
Estampes (comte Jean d') , château de Mouchy, par La Charité. —
31 octobre 1889.
Faulopier (Adrien), â Clamecy. — 13 mai 1875.
Ferrier (Henri), peintre, à Prémery. — 20 avril 1871.
FiCHOT (docteur), médecin en chef de l'hospice, à Nevers. —
7 octobre 1880.
Flamare (Henri de), archivbte de la Nièvre. — 23 février 1882.
Fontenay (Edouard de), château de Four-de-Vaux, par Nevers. —
3 avril 1879.
FoucHé (l'abbé), chanoine honoraire, aumônier du lycée, à Nevers
2 décembre 1863.
— VIU —
MM.
Gadoin #, président du tribunal, à Cosne. — 14 janvier 1875.
Gadoin (Léon), à Cosne. — 31 décembre 1885.
Gaulmyn (vicomte Joseph de), château de Rimazoh-, par Souvigny
(Allier). — 29 novembre 1888.
Gautherot, avocat à Paris, $, place Saint-Michel. — 28 février 1889*
Gautron (Florimond), à Nevers. — 23 février 1888.
GiLLOTiN (Théophile), négociant à Nevers. — 28 février 1884.
Girard (l'abbé Gustave), curé de Gimouille. — 2 juin 1881.
GoNAT(Albéric), à Saint-Pierre-le-Moûtier. — 17 août 1874.
Grandpré (Félix de), à Imphy. — 2 juin 1881.
Grincour (André), château de Fontallier, par Saint-Pierre-le-Moûtier.
— 27 juin 1889.
Griveau (Algar), juge honoraire, à Nevers, — 22févrieri883.
GuENEAU (Cyprien), notaire â Brinon.
Mn»« GuENY, château de Dumphlun, par Saint-Benin«d*A«y. —
31 octobre 1889.
GuiLLEMENOT Q'abbé), chanoine honoraire, rue Creuse à Nevers. —
30 octobre 1884.
GuiLLERAND, à Roussy, commune de Salnt-Parize-le-Châtel. -^
24 février 1887.
Hamel DE BREun. (le comte du), au Reconfort par Monceaux«*le-
Comte. — 30 juillet 1885.
HuGON (Edmond), ancien juge, à Nevers. — 3 juillet 1873.
HuRAULT (l'abbé), curé de Saint-Pierre de Nevers, membre fondateur.
— 5 juin 18$ I.
Javillier O a., pharmacien à Nevers. — 9 décembre 187$.
JoLLY (A.), directeur de la Banque de France, à Nevers. — Février 1885 .
JouRDAN (docteur), rue Mirangron, à Nevers. — 27 juillet 1882.
Jullien, employé des ponts et chaussées, à Nevers. — 26 janvier 1882.
La Chesnaye (comte de), à Pouilly-sur-Loire. — 24 février 1887.
La Fargue (comte de) >J<, rédacteur en chef du Moniteur de la NUvrty
à Pougues-les-Eaux. — 30 novembre 1882.
Langellé (Louis-Désiré), ancien notaire, à Pouilly. — 31 décembre 1885 .
Langle de Cary (Charles de), ancien juge, àCorvol d'Embernard. ^
13 mai 1875.
Laplanche (Maurice de), château de la Planche, par Luzy. —
10 janvier 1878.
Laubespik (comte de)*, sénateur, conseiller général, château de Tracy,
par Pouilly. — 9 décembre 187$.
— IX —
MM.
Laugardièrb (vicomte de), ancien conseiller à la cour d*appel, rue Porte-
Saint-Jean, Bourges. — 23 avril 1857.
Lautermat , agent-voyer d'arrondissement en retraite , à Nevers. —
14 juin 1860.
Lavennb db La Montoise (Henri de^, inspecteur principal du chemm
de fer d'Orléans, à Tours. •— 27 mai 1886.
Leblanc-Bellevaux (Auguste), licencié en droit, 19, rue de Moscou,
à Paris, — i« février 1872.
Legrand, ingénieur-agent-vqyer d'arrondissement, à Nevers, •—
3 août 1876.
Lespinasse (René de) >{< Q A., conseiller général, i Luanges, par
Guérigny. — 8 juin 1867.
M«e DE Lespinasse, à Luanges, par Guérigny. — 31 octobre 1889.
LtJTZ (Charles), architecte à Nevers. — Mars 1881 .
Maraïidat (Henri) ^, capitaine en retraite, à Nevers. — Mars 1881 .
Maramdat (Edouard), 10, rue du Sort, à Nevers. — 24 novembre 188 1.
Marcy (Raoul), ingénieur civil à Nevers, conseiller d'arrondissement
du Cher. — 27 mai 1886.
Mariluer (l'abbé), chanoine honoraire, vicaire général, à Nevers. —
4 octobre 1877.
Maron (Albert), 13, rue du Charnier, à Nevers. ^ 2 juin 1881.
Mauduit (comte Robert de), château des Coques, par Chaulgnes. —
30 octobre 1884.
Maumigny (comte de), à Nevers, membre fondateur. — 5 juin 185 1.
Maumigny (vicomte Paul de) ^, rue Creuse, à Nevers. — 28 juin 1883.
Mazeron (Achille), libraire à Nevers. — 25 juin 1885.
Métairie (Abd), conseiller d'arrondissement, à FonÊiye, par Château-
neuf-val-de-Bargis. — 9 juillet 1874.
Mbukier (Paul), ancien avoué, 23, rue du Rempart, Nevers.
MicHOT, libraire â Nevers. — 6 février 1873.
Millien (Achille) >{i, à Beaumont-la*Ferriëre. — 14 juin 1860.
MiRAULT, régisseur â Cours-les-Barres (Cher). — 10 janvier 1866.
MoKor (docteur^ #, conseiller général, âMontsauche. *~ 6 mars 1873.
MoNTAGKON ifi, â Nevers. — 13 février 1879.
M0NTEIGNIER, â Dompierre-sur Nièvre. — 29 août 1872.
MoNTRiCHARD (comte de) ^, château de la Chassdgne, par Magny. —
27 octobre 1881.
MoRiM-BouTiLLiER, libraire à Nevers. — 27 octobre 1881.
MoRLON , conseiller â la cour d'appel, â Bourges. •— 5 décembre 1867.
— X —
MM.
Paignon (Charles), conseiller général , château de Saint-Pierre-dn-
Mont. — 27 juin 1889.
Pannetier (l'abbé), curé d'Arleuf. — 29 août 1872.
M»e Périgot, rue Saint-François-de-Paule, à Nice. — 27 janvier 1890.
Perreau (Paul), notaire à Saint-Benin-d'Azy. — 4 mars 1880.
Perrier (docteur), à La Charité. — 13 novembre 1879.
PoMEREU (vicomte de), conseiller général, au château de Fours, —
27 juin 1889.
PoNROY (Henri), ancien sous-préfet, à Bourges. — 26 juin 1884.
Pot (l'abbé), curé de Magny-Cours. — 14 juin 1860.
Pracomtal (marquis de) ^, conseiller général, au château de Châtillon.
— 27 juin 1889.
Prégermain aîné, château de Gron par Châtillon. — 4 octobre 1877.
QuiRiELLE (Roger de), â La Palisse, Allier. — 28 octobre 1886.
Hambourg (Louis) 4ç, château de la Fcrté , par Chantenay. —
26 décembre 1889.
Hambourg (M«»e Charles), château de Châteauvert, par Clamecy. —
26 décembre 1889.
Rasilly (marquis de) , château de Beaumont, par Saint-Pierre-le-
Moûtier. — 25 juillet 1889.
Régnier (Jacques), négociant à Coulanges-les-Nevers. — 28 fé-
vrier 1884.
Rémuzat (Mm« Hélène de) , 66 , rue Grignan , Marseille. —
31 octobre 1889.
R0BELIN (Albert) , contrôleur des contributions directes, à Nevcrs. —
24 novembre 1881.
Robert (Paul), au château de Sully, par Nevers. — 26 avril 1888.
Robert-Saint-Cyr (docteur Victor), à Nevers. — 30 novembre 1882.
Robert, juge à Cosne.
Roger (Octave) ^, ancien magistrat, à Bourges. — 26 juin 1884.
Rolland (l'abbé), chanoine honoraire, aumônier des Ursulines, Nevers.
— 14 juin 1860.
RosEiMONT (Arthur de), à la Girardière, par Bdleville-sur-Saône (Rhône),
membre fondateur. — 5 juin 185 1.
RosEMONT (Adolphe de), membre fondateur, à Nevers. — 5 juin i8$i.
Roy (l'abbé), curé d'Onlay, par Moulins-Engilbert. — Décembre 1884.
Saglio (Alfred) »R*, â Fourchambault. — 27 juin 1889.
Saint-Phalle (marquise de), château de Montgoublin, par Saint-Benin-
d'Azy. — 25 juillet 1889.
— XI —
MM.
Saint-Vallier (vicomte de) <fi^, château de la Cave, par Saint-Benin-
d'Azy. — ler juin 1876.
Salleix (Amédée), château de la Brangelie, par Ribérac (Dordogne). —
27 mai 1886.
Sarriau, à Cosne. — 7 octobre 1880.
Sa VIGNY DE MoNCORps (comte Charles de) #, sénateur, conseiller
général de la Nièvre, château de Savigny , par Saint-Saulge. —
3 août 1854.
Savigny de Moncorps (vicomte René de) ^, château de Fertot, par
Nevers. — 3 août 1854.
Saulieu (comte Charles de), â Lurcy-le-Bourg, par Prémery. —
24 février 1887.
Sery (l'abbé), curé de Grenois. — 27 octobre 1881.
SouLTRATT (vicomte Roger de), conseiller générai de la Nièvre, château
de Dornes. — 23 février 1888.
Soyer (l'abbé), â Nevers. — 9 janvier 1873.
SuBERT (docteur), Q A., médecin en chef de l'hospice, â Nevers. —
12 janvier 1865.
Teste, château de Vésîgnenx, par Saint-Martin-du-Puy. — Février 1885.
Teste (Alexandre), à Lormes. — 27 octobre 1887.
Thépénier (l'abbé), curé de Saint-Parize-le-Châtel. —7 octobre 1880.
Thévenin (Louis) , ancien directeur de la Pique, â Nevers. —
2 juin 1881.
Tœrsonnier (Paul) # , au château de Trémigny, par Magny. —
27 juin 1889.
Tœrsonnier (Gabriel), au château du Colombier, par Nevers. —
27 juin 1889,
ToYTOT (Ernest de), â Nevers. — 6 février 1862.
Valuère (Gilbert), imprimeur-administrateur du Journal de la Nièvre,
— 23 mai 1889.
UsQuiN (Paul), juge de Paix â Donzy. — 6 avril 1876.
Verne (Charles du), château du Veuillin, par le Guétin (Cher). —
3 mars 1870.
Verne (Victor du), â Nevers. — 9 janvier 1873.
Verne (Auguste du), à Roanne (Loire). — 4 novembre 1880.
Verne (Charles du), château de Poiseux, par Guérigny. — 25 avril 1889.
Veyny (le marquis de) #, rue des Moulins, â Nevers. — 31 mai 1883.
Villefosse (Etienne de), ancien archiviste, membre fondateur. —
5 juin 1851.
— XII —
MM.
ViLLENAUT (Adolphe de), ingénieur civil, château de Vauzelles, par
Nevers. — 13 mai 1869.
ViLLENAUT (Ocuve de), à Nevers. — 27 janvier 1887.
Warmont (docteur), $0, rue du Four-Saint-Germain, Paris.
MEMBRES CORRESPONDANTS.
MM.
Baudoin, architecte à Âvallon.
Blanche, ancien juge.
Blandin, docteur en médecine à Nantes.
Bouchard (E.), avocat à Moulins (Allier).
BoucHARDON, à Saint-Dcnis (Seine).
Boudard, inspecteur des enfants assistés à Gannat.
Brémond d'Ars (le comte de), à Nantes.
Brillaud, inspecteur des écoles primaires à Autun.
BuLUOT, président de la Société éduenne, à Autun.
Bures (de), membre de la Société d'émulation, à Moulins (Allier).
CUAMBRURE (DE), Ôls.
Cirodde, ingénieur des ponts et chaussées.
CouGNY, ancien professeur de dessin, à Bourges.
Desrosiers, professeur an collège de Riom.
DE L'Etoile (le comte), à Moulins (Allier).
Garsonnft *j^, inspecteur d'académie.
Gautherin, statuaire, 1 1 , impasse du Maine, Paris.
Germain, docteur en médecine à Paris.
HuGENOT (l'abbé Victor), à Brion (Indre).
HuMANN, propriétaire à Saint^Loup.
Janicot (docteur), à Pougues.
JuLLiEN, peintre à Paris.
Lapeyre de Crussol, receveur de l'enregistrement.
Lehugeur (Paul), professeur d'histoire à Angers.
G. Marty, géomètre à Toulouse.
Morellet, censeur retraité, à Paris.
Pierredon de Perron (chevalier de; G. »}<, château de Puisséguin
(Gironde). — Reçu titulaire le i« février 1872.
Raynaud ^, aneien recteur.
Senac (de).
Thomas, employé au ministère de la guerre, à Paris.
— xni —
SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES.
1 Comité des travaux historiques et des sociétés savantes.
2 Sodété française d'archéologie.
3 Société phîlotechnique, à Paris.
4 Société éduenne, à Âutun.
5 Société d'agricuhure, de commerce, etc., du département de la
Marne, à Châlons.
6 Sodété archéologique de Sens.
7 Société archéologique et historique, à Orléans.
8 Académie de Reims.
9 Société d'émulation de l'Allier, à Moulins.
10 Sodété des sciences naturelles et historiques de l'Yonne, à Auxerre.
11 Société historique du Cher, à Bourges.
12 Sodété d'émulation de Montbéliard.
I j Société des lettres, à Varzy (Nièvre).
14 Sodété académique du Var, à Toulon.
15 Académie de Mâcon.
16 Académie des sciences et belles-lettres d'Angers.
17 Sodété de l'histoire naturelle, àColmar.
18 Société d'études, à A vallon (Yonne).
19 Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse, à
Guéret.
20 Sodété littéraire de Lyon.
21 Société pour la conservation des monument historiques d'Alsaee,
à Strasbourg.
22 Académie des sciences de Qermont-Ferrand.
23 Sodété académique de Boulogne-sur-Mer.
24 Société des antiquaires du Centre, à Bourges.
25 Académie des sciences, belles-lettres et arts de Marseille.
26 Sodété des sciences, lettres et arts des Alpes-Maritimes.
27 Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers.
28 Commission historique du département du Nord.
29 Société des sciences naturelles et médicales de Seine-et-Oise.
30 Société des sciences et arts de Vitry-le-Français.
3 1 Sodété des travaux de statistique de Marsdllc.
32 Académie du Gard.
;3 Société d'agriculture, belles-lettres, sciences et arts d'Orléans.
34 Sodété archéologique de Rambouillet.
3 5 Société d'histoire naturelle de Toulouse.
36 Société d'agriculture, de commerce et d'industrie du département
du Var, i Draguiguan.
37 Société académique de Cherbourg.
38 Société historique et arcliéologique de Soissons (Aisne).
39 Société d'études des sciences naturelles de Béziers.
40 Société des sciences et arts du Havre.
41 Académie des sciences , belles-lettres et arts de Tarn-ct-Garonne.
42 Académie de la Val-d'Isère, à Moutiers (Savoie).
43 Société historique et archéologique du Périgord.
44 Société nif cnse des sciences naturelles et historiques, à Nice.
45 Société littéraire de Cbmecy (Nièvre).
46 Archives générales de la Côte-d'Or, à Dijon.
47 Société havraise d'étudez diverses, au Havre.
48 Comité archéologique de Senlis, à Senlis.
49 Société historique et archéologique de Langres.
50 Société des archives historiques de la Saintongeet de l'Aunis.
51 Directeur du musée Guimcl, à Lyon.
5a Société des antiquaires de l'Ouest, à Poitiers.
53 Société d'études des Hautes-Alpes, i Gap.
54 Société archéologique de Tarn-et-Geronue. v^ ^ 1
;; Société historique duGâtiitais.
— XV —
REGLEMENT
DU
PRÊT DES LIVRES DE LA BIBUOTHÈaUE DE LA SOCIÉTÉ.
!• Tous les livres appartenant à la Société pourront
être prêtés aux membres titulaires et plus spécialement
ceux qui forment le fonds de Soultrait.
2® Un registre sera créé à cet effet et divisé en plusieurs
colonnes, contenant le titre et le format de l'ouvrage, la
date du prêt, le nom de l'emprunteur ainsi que sa signature
et révaluation du volume.
3*^ Les livres ne seront prêtés que pour un délai maximum
d'un mois, et devront être remis à la porte du Croux.
4® Le bibliothécaire aura seul qualité pour donner et
recevoir les volumes.
50 Au cas où la lettre de rappel du bibliothécaire serait
restée sans réponse, tout nouveau prêt serait refusé au
retardataire.
6<> Le plus grand soin est recommandé pour les livres.
Il y aurait lieu à indemnité dans le cas oti un livre serait
détérioré.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ NIVERNAISE
DBS
LETTRES, SCIENCES ET ARTS.
->W0O#W^
SÉANCE DU 28 JANVIER 1886.
Présidence de M. Roubst^ président.
Étaient présents : MM. Roubet, président;
Fabbé Boutillier, vice-président; E. de Toytot,
secrétaire; Canat^ conservateur du musée;
Duminy, archiviste; Griveau, de Rosemont,
l'abbé Pot, Tabbé Crosnier, Langellé.
M. le Président fait connaître la situation
financière de la Société au 31 décembre I885.
Le solde restant en caisse au 31 décembre, sur
Texercice 1885, s'élève à 559 fr. 32 c.
Le ministre de Tinstruction publique envoie un
questionnaire émanant du Comité des travaux
historiques et scientifiques, dont le titre est ainsi
conçu : Des assemblées générales des commu-
nautés d^habitants en France sous Fancien
régime.
T. m, 3* série, l
— 2 —
M. Tabbé Boutillier donne lecture des princi-
paux chapitres d'une notice historique de M. Tabbé
Charrier, vicaire de Clamecy, sur la Collégiale de
Saint-Martin de Clamecy. Les éléments les plus
importants de ce travail ont été puisés par Tauteur
dans un recueil manuscrit de procès-verbaux
authentiques des visites pastorales des évêques
d'Auxerre et dans les anciens registres de la
fabrique de la collégiale.
Cette intéressante notice sera insérée au
Bulletin.
M. le président Roubet lit une note sur une
inscription de 1626 trouvée dans l'église de
Myennes (1).
M. Roubet continue et termine la lecture de
son travail sur la visite d'Adam Billault à l'abbé
Berthier, prieur-curé de Saincaize.
M. l'abbé Boutillier communique à la Société
les notes publiées par M. Léopold Delisle dans la
Bibliothèque de l'École des chartes (3® livraison
de 1885), sur deux manuscrits : un Éoangéliaire
et un Traité de comput des neuvième et dixième
siècles ; ces précieux documents proviennent de la
cathédrale de Nevers et sont aujourd'hui conservés
à Londres , au British muséum.
Ces manuscrits sont surtout intéressants pour
notre histoire liturgique par les notes nombreuses
qui y ont été ajoutées pendant les dixième,
onzième et douzième siècles.
(i) Le texte en a été publié dans le tome précédent. (3* série^ t. 11^
p. 441.)
M, Tabbé BoutiUier est heureux d'annoncer qu'il
a reçu d'un érudit anglais, M. Edmund Bishop,
le texte des anciens inventaires des livres et orne-
ments de la cathédrale de Nevers, écrits sur les
feuillets 262 et 263 de XÉoangéliaire; il propose
de les publier au Bulletin , en les complétant par
les autres inventaires et les diverses notes qu'il
pourra retrouver.
La Société accueille avec une vive satisfaction
cette proposition.
SÉANCE DU 25 FÉVRIER 1886.
Présidence de M. Roubbt, président.
Étaient présents : MM. Roubet, président;
Tabbé houûWier ^ vice-président ; E. deToytot,
secrétaire; Ganat, conservateur du musée;
Duminy, archiviste ; de Pierredon, de Villenaut,
de Rosemont, H. Maraudât, Gadouin , Griveau ,
Charles Col.
M. Chaubert, peintre à Nevers, offre à la Société
plusieurs fragments de verres blancs, de forme
ronde , dont l'aspect ressemble assez à un fond de
bouteille aplati. Ces verres , vulgairement appelés
cives , datent du seizième siècle et proviennent de
l'église d'Urzy, dont les vitraux ont été récem-
ment réparés.
M. l'abbé BoutiUier rappelle à ce sujet la note
explicative qu'il a donnée dans V Histoire de la
- 4 -
Verrerie de Nevers sur la fabrication de ces
verres en plat, dits verres de Lorraine^ et sur
l'origine de la loupe ou boudiné, produite par le
pontil ou canne du verrier quand il se détache du
plateau de verre. {Bulletin^ 3® série, t. IL p. 261.)
M. Tabbé Boutillier lit ensuite une note du
Répertoire des travaux historiques pendant
Vannée 1883 — (T. III , n^ 3. Livres belges, p. 705,
n^ 3918. Compte-rendu par M. E. Lambrecht), —
sur un ouvrage intitulé Ypriana : Notices, études^
notes et documents sur Ypres, par M. Alphonse
Vandenpeereboom.
Ce volume a pour sous-titre : Ypres et ses
comtes Léliaerts. Son but principal est d'étudier
les modifications subies par les institutions admi-
nistratives, judiciaires et politiques de la commune
dTpres, de 1345 à 1384; à cette époque Tavéne-
ment des ducs de Bourgogne marque la fin de
Tère communale en Flandre. Les Léliaerts étaient
les comtes partisans du lys, c'est-à-dire de la
France. Les deux comtes qui furent ainsi désignés
sont : Louis de Nevers (1323), qui fut tué à Crécy
en 1346, et Louis de Maie (1346- 1384). Pendant
cette période si agitée de l'histoire de la Flandre,
les interventions de la France furent actives et
nombreuses, et elles rencontraient partout Thosti-
lité de l'Angleterre, qui soutenait l'indépendance
de la Flandre par tous les moyens.
Lecture est donnée par M. le Président, des
lettres de M. le Ministre de l'instruction publique
pour la prochaine réunion des sociétés savantes.
— 5 -
La lettre-circulaire du Ministre indique le pro-
gramme des séances et les formalités nécessaires
pour obtenir Tentrée à la Sorbonne et les billets
de voyage à demi-tarif.
M. le président Roubet continue à nous entre-
tenir de ses recherches sur la justice d'autrefois et
lit une étude intitulée : Procès contre le cadavre
de Jeanne Guesdin^ à La Charitésur-Loire ,
en 1699. M. le Président achève ensuite la lecture
de sa très-curieuse notice historique sur les forges
et fourneaux au canton de La Guerche (i).
M. Tabbé Boutillier communique à la Société
deux documents qui lui ont été adressés par
M. GueneaU; receveur des finances à Loudun :
les testaments de Philippe de Moulins, évoque de
Noyon, 31 juillet 1409 ; de Germain des Paillards,
évêque de Luçon, neveu de Philippe de Moulins,
4 octobre 141 8 ; ces deux testaments sont conservés
à la Bibliothèque nationale, où notre collègue les
a copiés.
Voici d'ailleurs en quels termes M. Gueneau
annonce sa communication :
Parmi les six ou sept cents anciennes familles du Niver-
nais dont je me suis occupé, il en est deux qui m'ont
particulièrement intéressé : la première, celle de Moulins,
parce qu'elle est presqu^inconnue ; la seconde , celle des
Paillards, qui a été alliée à la première, parce que sa
filiation est difficile à établir.
La famille de Moulins, qui portait de gueules, à la croix
potée (Tor, paraît originaire de Moulins-Engilbert. A-t-elle
(x) Ce travail a été publié dans le tome précédent, p. 364-413.
- 6 -
possédé l'ancienne seigneurie de Moulins ? Est-ce elle qui
Ta vendue aux comtes de Nevers ? Rien jusqu'à ce jour n'a
répondu à mes interrogations. J^ai, dans le tome VIII du
Bulletin de la Société nivernaise, page 561, indiqué que
Moulins-Engilbert n'avait jamais appartenu aux seigneurs
de Buzançais, comme auraient pu le laisser croire Y Inventaire
des titres de Nevers , page 1 66 , les Armoires de Baluze ,
n" 74, folio 409, etc.; mais, je le répète, rien ne prouve que
la famille de Moulins ait eu des droits sur Moulins. Faut-il
rattacher à cette famille Guillaume de Moulins, damoiseau,
et Agnès, sa sœur, femme de Jean de Bois, qui, en 1284,
vendirent au comte Robert , moyennant 50 livres tournois,
tous leurs biens de Dennecy (Onlay) et de Vénitien (Prépor-
ché){i)?
Renaut de Moulins, écuyer, qui fit hommage en 1296 au
comte de Nevers pour divers héritages sis dans la châtellenie
de Moulins, en faisait-il partie (2} ?
Jean de Moulins, archidiacre de Decize, qui toucha de
i383 à i388 ses gages comme garde des sceaux de la prévôté
de Nevers, doit-il se rattacher à cette famille (3) ?
La seule chose certaine, c'est que Philippe de Moulins, qui
fut secrétaire des rois Charles V et Charles VI et successive-
ment évêque d'Evreux et de Noyon, fonda, en 1378, la
collégiale de Notre-Dame de Moulins- Engilbert dans une
chapelle qu'il fit construire, se réservant pour lui et pour ses
héritiers le droit de présentation ("4). Un actedu 6 juin 1416,
jadis cité par M. Pougault, mais que je n'ai pu rencontrer,
régla Tordre dans lequel ce droit devait passer aux différentes
branches de la famille à mesure de leur extinction. Philippe
de Moulins testa le îi juillet 1409. J'ai pu obtenir des
Archives nationales une copie de ce testament, qui ne parle
pas de Moulins. Une clause contient seulement ceci : Itenij in
(i) Titres de Nevers, p. 523.
(3) Idem, p. 5ii.
(3) Archives de la Côte-d'Or, B. 55o4 et 55o8.
(4; Voir, dans la Monographie de la cathédrale de Nevtrs, le
Register vocatus polio ben^eiorum insignis ecclesice Nivernensis,
- 7 -
partthus unde sumpsimus ortginem similiter distribuantur
mille /ranci auri.
Il ressort de ce testament, fait par un notaire nivernais, en
présence de témoins nivernais, que Philippe de Moulins
n^avait qu'une sœur, Bienvenue, qui épousa un membre de
la famille des Paillards , qu'il désira être inhumé dans
réglîse des Célestins de Paris, qu'il donna abondamment
aux pauvres et que son neveu Germain, évéque de Luçon,
fut son légataire chéri.
Ainsi, le testament de Philippe de Moulins ne
contient aucune mention spéciale au Nivernais, et
il en est de même de celui de Germain des
Paillards.
Pour cette raison la Société, tout en exprimant
sa reconnaissance envers notre érudit et laborieux
collègue, ne croit pas devoir imprimer les textes
qui lui ont été si gracieusement offerts.
M. Tabbé Boutillier pense qu'il est à propos
d'ajouter que d'après le Gallia Christiana et
VHistoire manuscrite des Evêques de Neoers de
Parmentier, un évoque de Nevers, du nom de
Renaud de Moulins, qui n'était encore ç\\x'electùs
au mois d'août 1360 et tint le siège pendant envi-
ron deux ans, était vraiment originaire de Moulins-
Engilbert,
On trouve aux archives du chapitre^ dit cet auteur,
d'ailleurs très-scrupuleux , un acte du vendredi , fête de la
Décollation de saint Jean, iBgB, par lequel il paraît quUl
avait légué à Téglise 2,700 florins d^or, valant 2,050 fr.
d^or, pour faire apprendre la grammaire à douze enfants et
pour quelques services. Il est nommé Reginaldus de Molinis
— 8 -
Engilbertoruntj et il est dit que Philippe de Mcolins, évéque
de Noyon, était son neveu.
Le même Parmentier, un peu plus loin, dans Particle
consacré à Tévéque Robert de Dangeul, ajoute que Philippe
de Moulins , évéque de Noyon , avait fait présent à Péglise
cathédrale de Nevers d'une couronne^dorée, en laquelle avait
été renfermée une^ épine de la vraie couronne de Notre-
Seigneur, plus une grande croix dorée et 460 fr. d'or^
pour quoi^ par reconnaissance, le chapitre avait fondé deux
messes à son intention. [Martyrologe de la Cathédrale,
page 45.)
Cette donation explique pourquoi, dans le testament de
Philippe de Moulins, il n'y a aucun legs à la cathédrale de
Nevers.
SÉANCE DU 25 MARS 1886.
Présidence de M. Roubbt, président.
Étaient présents : MM. Roubet, président;
Tabbé Boutillier, vice -président; de Toytot,
secrétaire; Canat, conservateur du musée;
Duminy, archiviste ; Tabbé Fouché, de Grandpré,
Charles Col, de Flamarej Langellé, le comte de
Maumigny.
Lecture est donnée par M. Canat d'une étude
sur trois objets de Tâge de pierre en silex travaillé,
trouvés sur la commune de Coulanges-les-Nevers
et une autre pièce provenant de la commune de
Fléty (Nièvre).
Cette intéressante étude sera insérée zn Bulletin.
M. le Président donne lecture d'une lettre du
maire de Jailly concernant le portail de Tancienne
église de cette commune.
Ce portail, qui menace ruine, doit être démoli.
Le maire et le conseil municipal seraient dans
la disposition de le vendre.
La Société décide qu'elle ne pourrait qu'acheter
quelques chapiteaux ou pierres isolées, au cas où
leur conservation ou leur intérêt artistique présen-
teraient quelque intérêt.
M. le docteur Monot fonde à Montsauche un
musée cantonal ; il demanderait que la Société
voulût bien accorder à son musée Tenvoi de nos
publications.
La Société décide qu'elle sera heureuse d'en-
voyer le Bulletin à M. Monot , mais il y aura lieu
de statuer à nouveau chaque fois qu'il s'agira d'une
publication spéciale d'une certaine importance.
M. l'abbé Boutillier donne lecture d'un mémoire
fort intéressant, intitulé : Les exercices publics
dans le collège de Nevers avant la Réoolution.
Ce travail, qui répond à une des questions du
programme des sociétés savantes, sera lu par
l'auteur à la Sorbonne et inséré au Bulletin.
■«Ka6>i'
NOTE
SUR TROIS OBJETS EN SILEX TRAVAILLÉS TROUVÉS SUR LA
COMMUNE DE COULANGES - LES - NEVERS ET UNE AUTRE PIÈCE
PROVENANT DE LA COMMUNE DE FLÉTY (nIÈVRe).
Des trois pièces provenant de Coulangcs, la seule vraiment
intéressante est une pointe en forme de feuille de laurier
. T. III, 3* série. 2
— 10 —
retouchée au pourtour sur une seule face. Le dessous {Pré-
sente la face d'éclatement tout unie avec concoïde d4
percussion en saillie à la partie inférieure. Le concoïde en
creux se retrouve sur la face opposée.
La base est carrée et a servi de plan de frappe. L'extrémité
supérieure est pointue. Cette pièce ( pointe de lance ou de
javelot) mesure iio millimètres de longueur et 33 milli-
mètres à sa plus grande largeur.
Elle appartient à la série la plus ancienne de la période
robenhausienne.
La longueur et le peu d'épaisseur de ces pointes nécessi^-
taient un puissant soutien de Pemmanchure. Le sommet de
la hampe devait être à demi entaillé et présentait une langue
de bois plate s amincissant progressivement. C'est sur cette
langue que s'appliquait la face plane de la pointe de silex,
qui était fixée par des ligaments avec interposition de
matières bitumeuses ou résineuses. (Mortillet, le Préhis*
torique.)
Les deux autres pièces paraissent être une scie et un
grattoir, mais elles sont peu caractérisées.
La pièce qui provient de la commune de Fléty est faite
d'une pierre extraite des roches du voisinage de l'endroit oti
elle a été trouvée. Cette pierre est noirâtre, dure, grenue et
d'une médiocre densité.
Ce n'est malheureusement qu'un fragment. Pour se rendre
compte de la forme que devait avoir cet objet dans son
intégrité, il faut le doubler en imagination. On obtient ainsi
un instrument ressemblant à peu près à une hache à deux
tranchants, c^est ce qu'on appelle le casse-tête naviforme.
Les casse-têtes sont de formes très-variées : il y en a d«
discoïdes, de pointus aux deux bouts, de plats ou arrondis
aux deux extrémités, de munis de deux tranchants, de tran-
chant d'un côté et plats de l'autre, etc. Le caractère commun
est d'être percé d'un trou destiné à recevoir un manche.
Ces instruments, à raison de la diversité de leurs formes,
avaient reçu des noms appropriés à leur destination sup*
— II —
posée. On les appelait disques, pics, marteaux, haches
bipennes^ baches^marteaux, marteaux-pics, etc. Mais on a
mtnarqué que les taillants sont toujours mousses, que la
nature tendre et grenue de la pierre s'oppose à ce qu^ils
soient affûtés, enfin que parfois des ornements ont été gravés
aux extrémités, ce qui indique bien qu^elles n'étaient pas
destinées à couper. Ce ne pouvait donc pas être des outils,
mais des armes.
On s^est longtemps demandé comment se pratiquait le
trou qui traverse ces armes; le doute n'existe plus aujour-
d'hui. Divers procédés ont été mis en usage.
Pour les instruments en silex on s'est servi d^un morceau
naturellement percé, se contentant de régulariser l'ouverture
au moyen d'une série de petites percussions.
Pour les autres roches on a employé deux procédés diffé-
rents dont le principe est pourtant le même. Ce principe est
l*usure de la roche par l'intervention du sable et de l'eau. Le
procédé ne diffère que par l'emploi de l'intermédiaire qui
détermine Faction du sable mouillé. Le plus grossier de ces
procédés consiste à faire tourner un corps pointu sur le point
qu'on veut percer, en interposant constamment entre ce corps
et la pierre du sable fin et de Teau. Le corps qu'on fait
tourner n^a pas besoin d^étre dur, ce peut être un simple
morceau de bois. Le bois même a Tavantage de saisir le sable
entre ses fibres et de l'entraîner, ce qui active l'action du
rodage. Pour commencer l'opération , on prépare au point
désigné un petit godet par percussion. Pour l'activer on
pratique le rodage successivement de chaque côté. 11 se forme
ainsi deux cônes creux qui convergent l'un vers l'autre et
qui finissent par se joindre par leur sommet. Des pièces
inachevées ou cassées pendant l'opération ont révélé tous les
détails du procédé. Mais comme il faut, par le rodage, user
entièrement la roche qui se trouve dans le trou , ce procédé
est fort long.
On l'a simplifié en employant au lieu d'un appareil rôdeur
plein un appareil vide à Tintérieur, comme un roseau^ un
— 12 —
morceau de sureau ou un os creux. On n a plus eu alors
qu'à creuser un anneau ; il reste à Tintérieur du tube un
noyau de la roche qui , à la fin de l'opération , se détache, et
donne de prime-saut un trou de la grandeur voulue. Des
pièces à demi faites et des noyaux de rejet ne laissent plus
aucun doute sur l'emploi de ce mode de forage.
Cest incontestablement ce dernier mode qui a été mis en
usage pour la pièce dont il est question ; les trous pratiqués
par le premier procédé conservent toujours la forme de
cônes renversés , tandis qu'ici les parois sont parfaitement
verticales.
CANAT.
SÉANCE DU 29 AVRIL 1886.
Présidence de M. Roubet^ président.
Sont présents : MM. Roubet, président jC^n^it.
conservateur du musée; Duminy, archiviste de
la Société; le comte de Soultrait, l'abbé Crosnier,
Tabbé Soyer, le colonel de Charrant , Adolphe de
Rosemont , le vicomte de Maumigny, Cheminade ,
faisant fonctions de secrétaire.
Lecture est donnée du procès-verbal de la
séance du 25 mars.
Au sujet de Téglise de Jailly, dont il a été
question d'acheter divers objets provenant de sa
démolition, M. de Soultrait exprime Tavis que
cette église, construite en escalier, est surtout
remarquable par son tympan peint; cependant il
n'est pas opposé à l'achat [de quelques chapiteaux.
M. Canat réclame que Ton s'occupe de la sub-
— i3 —
vention à obtenir pour la statue du tombeau de la
comtesse Yolande.
M. le Président annonce qu'à la prochaine
réunion il y aura lieu de renouveler le bureau ; il
déclare qu'il est décidé à ne plus accepter les
fonctions présidentielles, qui assujettissent à une
correspondance assez suivie et à une exactitude
aux réunions qu'il s'est fait un point d'honneur
d'observer scrupuleusement jusqu'ici, et à laquelle
il désire se trouver moins astreint à l'avenir ;
cependant, son intention est toujours de s'oc-
cuper activement de la Société. Les personnes
présentes à la séance font, par l'organe de M. de
Soultrait, de vaines instances pour faire revenir
M. Roubet sur sa résolution.
M. Roubet fait le récit d'un crime de lèse-
majesté divine commis par Claude Mariôn de
Coude, dans l'église Sainte-Croix de La Charité-
sur-Loire. Ce jeune gentilhomme, né à Coude
(canton de La Guerche), se trouvant sans argent
et ayant fait quelques dettes à une auberge de
La Charité , eut la sacrilège idée de dépouiller la
statue de la Vierge de ses riches vêtements et de
voler dans les tabernacles les saints - ciboires avec
leurs custodes. Engagé peu de temps après au
régiment de Nivernais et ayant essayé de vendre
les produits de son crime pour une somme bien
inférieure à leur valeur réelle , il fut dénoncé et
poursuivi devant le présidial de Saint-Pierre-le-
Moustier. Le jugement le condamna à faire amende
honorable, tète et pieds nus devant le porche de
— 14 --
Téglise profanée , à payer une amende , à avoir les
poings coupés et enfin à être brûlé , après avoir
été préalablement étranglé, en considération de
son âge. (Ce malheureux n'avait que dix-huit ans-)
Le Parlement de Paris infirma ce premier juge^
ment sur un seul point et , d'après son arrêt , le
coupable n'eut qu'un poignet de coupé. Ce récit
donne lieu à d'intéressantes remarques sur les
rivalités de juridictions à différentes époques, ainsi
que sur les peines alors en usage. On rappelle qu(&
les terribles supplices de la roue, de l'écartelle-
ment, etc., étaient généralement précédés de la
strangulation du condamné.
M. de Soultrait se propose de communiquer à la
Société le texte d'un édit de Nevers, datant du
milieu du quinzième siècle et prononçant diverses
peines contre les blasphémateurs.
M. Roubet donne ensuite lecture de la courte
notice qui suit, sur un grelot-hochet de l'époque
gallo-romaine :
En prenant l'église de Saint-Etienne de La Guerche comme
point central, il nous est possible de désigner sur divers
rayons, qui ne dépassent point i, 5 oo mètres, remplacement
certain de sept ateliers de céramiques remontant à Pépoque
gallo-romaine.
Parmi les épaves que le hasard nous a fait recueillir nous
signalerons un petit objet en terre cuite que nous appellerons
un grelot-hochet, bien que ces deux mots impliquent un
pléonasme; restituons, s'il le faut, son nom Imncrapidaritim^
Il a la forme d'une boule aplatie ; son diamètre a dix
centimètres et son petit axe mesure quatre centimètres.
L'argile qui le compose est d'une pâte fine^ un peu micacée
— 15 —
et.d^une couleur jaune pâle. Son intérieur renferme quelques
petits cailloux ou peut-être quelques petites balles en terre
cuite, qui font du bruit quand on les agite.
Sans doute ce hochet, destiné à être mis dans la main de
tout jeunes enfants, était, à cause de sa fragilité, muni de
quelques tresses en osier avec un petit manubrium ou
manche de bois.
. Dans les musées de province que j^ai visités^ je n'ai point
trouvé de grelot-hochet.
Le musée du Louvre en conserve un qui vient d'Italie et
que M. François Lenormant a rapporté de Tarente. Il est
aussi en terre cuite, mais plus artistement travaillé que le
nôtre. Il représente un enfant couché dans une barque ou
plutôt dans un berceau, Son intérieur renferme aussi un
caillou ou une balle de terre cuite.
Notre petit monumentum de Tépoque gallo-romaine m'a
paru assez intéressant pour être mentionné en notre Bulletin,
Il se trouve toujours des antiquaires prêts à accepter les corn*
munications les plus minimes avec un attrait ignoré du
vulgaire.
Dans ses savantes recherches , M. Roubet a
encore trouvé parmi les nombreux débris de la
civilisation gallo - romaine d'intéressantes reliques,
notamment des instruments destinés à couper les
briques et d'autres instruments en fer qui , par leur
forme en croissant, indiquent qu'ils servaient de
racloirs aux ouvriers du temps.
On examine avec un vif intérêt des photogra-
phies de châteaux et d'objets d'art de la Nièvre et
du Cher, apportées par M. de Soultrait.
M. le Président annonce la mort de M. l'abbé
Jobert, ancien curé de Corvol - l'Orgueilleux ,
puis aumônier de l'école normale de Varzy.
— i6 —
M. Jobert faisait partie de notre Société depuis
vingt-quatre ans. Il a donné au Bulletin de ï8^
un très-intéressant extrait des manuscrits de dom
Viole, sur l'église de Sainte-Eugénie de Varzy, et
plusieurs autres documents servant à compléter
jusqu'en 1792 Thistoire du monastère de Sainte-
Eugénie , qui fit autrefois la gloire de Varzy. ,
La Société exprime ses sincères regrets de la
perte d'un collègue aussi savant que sympathique-
SÉANCE DU 27 MAI 1886.
Présidence de M. Roubet, président.
Etaient présents : MM. Roubet, président ;
Tabbé Boutillier, vice-président ; Canat, conser-
vateur ; Duminy, bibliothécaire; de Rosemont,
le vicomte de Maumigny, de Ghalvron , Edouard
Maraudât, Blaudin-Valière, Tabbé Marillier, l'abbé
Pot, l'abbé Soyer, Griveau, le docteur Subert,
l'abbé Bonoron , Langellé, Henri d'Assigny, l'abbé
Dubarbier, JuUien, de Flamare et Col, faisant
fonctions de secrétaire.
Le scrutin est ouvert pour le renouvellement des
membres du bureau.
Président: MM. de Soultrait, 17 voix;
Roubet , I ; le baron d'Espiard , 2.
Vice-président: MM. l'abbé Boutillier, 19 voix ;
l'abbé Marillier, i.
— 17 —
Secrétaire : MM. E. de Toytot, 17 voix; de
Villenaut, i ; de Flamare, i.
Pro-secrétaire : M. Morin , 20 voix.
Bibliothécaire : M. Duminy, 19 voix.
Trésorier : M. Bricheteau, 19 voix.
Architecte : MM. Lutz, 19 voix; Bouveault, 1.
C onser Dateur : MM. Canat, 18 voix; E.
Marandat, 2.
M. le Président proclame élus :
MM. de Soultrait, président; Tabbé Boutillier,
vice-président; de Toytot, secrétaire; Morin,
pro - secrétaire \ Duminy, bibliothécaire; Bri-
cheteau, trésorier; Lutz, architecte; Canat ^
conservateur.
Sur la proposition de M. Fabbé Boutillier,
M. Roubet est nommé à l'unanimité président
honoraire.
Sont admis membres de la Société :
M. Raoul Marcy, ingénieur civil, présenté par
MM. Henri d'Assigny et le vicomte de Maumigny ;
M. Henri de Lavenne de La Montoise , chef de
gare de Paris-Orléans, à Paris ;
M. Amédée Falleix, au château de la Brangelie,
commune de Vauxans, par Ribérac (Dordogne) ,
Présentés tous les deux par M. l'abbé Boutillier
et M. de Flamare.
M. Tabbé Boutillier, vice-président, communique
à la Société une lettre de M. de Soultrait, relative
aux formalités à remplir pour faire reconnaître la
Société comme société d'utilité publique.
T. m y 3* série. 3
— i8 —
M. de Soultrait rend compte également des
démarches qu'il a faites à Paris pour obtenir les
fonds nécessaires à la réparation de la statue de la
comtesse Yolande.
M. Roubet^ président, lit à la Société un article
intitulé : Souvenirs de collège.
SEANCE DU 24 JUIN 1886.
Présents : MM. le comte de Soultrait, pré-^
sident ; Tabbé Boutillier, vice-président; Roubet,
président honoraire \ Canat, conservateur du
musée; Ernest de Toytot, secrétaire; Tabbé
Soyer, de Villefosse , de Gharant, Langellé, de
Pierredon , Blanc , Col , JuUien , le docteur
Subert.
M. Roubet, président honoraire, installe M. de
Soultrait , nommé président à la dernière réunion
et prononce le discours suivant :
Messieurs ,
Si la réception présidentielle à laquelle nous sommes
heureux d'applaudir ne comporte point un grand cérémonial,
elle me donne au moins le privilège d^adresser au récipien*^
daire quelques paroles qui ne seront que ^expression affaiblie
de nos sentiments de bonne confraternité.
Dans notre dernière séance nous avions un président à
élire I et sans hésitation, et avec un parfait accord, nous
avons tous offert nos suffrages à notre collègue, bene meritOy
M. le comte Georges de Soultrait, Tun des fondateurs de
notre Société.
— 19 —
' La sympathie ne se commande pas, et, ainsi que j'ai eu
rodcasîon de le dire, ce n'est point sa faute à notre nouveau
président si ses qualités sont d^une nature si attractive.
M. de Soultrait porte un nom cher à notre province. Il est,
il a été et demeurera toujours Nivernais par Fesprit et le cœur.
Ne craignez point, mon très-afifectionné successeur, que je
vienne ici, comme aux grands jours de la haute Académie,
vous adresser des louanges que votre modestie s'empresserait
bientôt de qualifier de négligeables. Je ne veux point aujour-
d'hui rappeler une à une les excellentes productions dans
lesquelles vous avez apporté autant de docte sagacité que de
patient labeur. Je n'ai point à apprécier vos œuvres diverses
que nous aimons , parce qu'elles nous instruisent en conser-
vant le parfum du sol qui vous les a inspirées.
En vous appelant à sa tête, notre Société a voulu encore se
mettre en conformité de justice et de reconnaissance avec
TAcadémie de Besançon, qui avait tenu à honneur de vous
élire pour son président à cette époque oti ce je ne sais quoi,
qui assurément, n^est point le Dieu de la première églogue,
ne vous avait point encore fait de nouveaux loisirs.
Malgré quelques rares et obscurs détracteurs, notre com-
pagnie continue sa marche régulière; et chaque jour,
oublieux des préoccupations et des vicissitudes du temps,
nous voyons de nouveaux adeptes, jeunes et vieux, solliciter
l'honneur de prendre rang parmi nous.
Bientôt, grâce à votre légitime influence, grâce à votre
généreuse initiative, notre Société entendra prodamer son
autcMiomie, avec les privilèges qui en sont l'attribut essentiel.
Acquérant ainsi une stabilité indépendante, elle verra se
développer encore sa prospère vitalité. Plus d'un travailleur
se mettra courageusement à l'œuvre et vous apportera une
précieuse collaboration. Le champ des choses anciennes est
vaste : Quanta notifia antiquitatis ! L^archéologie et notre
histoire locale sont bien loin d'avoir dit leur dernier mot :
r%ine et Pautre doivent être soumises à ce microscope qui
sait opérer des découvertes si inattendues.
— 20 —
Autour de vous. Monsieur le Président, nous r0 foroie-
rons qu^une grande famille; nous serons toujours pr^$ ik
suivre les conseils que dictera votre expérience; nous sofoas
tQujours prêts à puiser au dépôt précieux que vos étudea .et
vos recherches constantes ont su accumuler, à la gloire d^
notre vieux Nivernais.
En terminant, Messieurs, veuillez une fois encore agnéer
tous mes remercîments pour le titre de président honoraire
que vous avez octroyé à mes vieux ans. Dans cette marque de
bienveillance je découvre un lien qui , s^il est possible, mç
rattache encpre à vous; le briser serait de Tingratitude. La
vieillesse a chaque jour quelque chose à apprendre. J'appreor
drai donc encore. Au surplus , je sais trop que ingénia
senibus manent, modo permaneat studium et industria^
Je peux vous accorder le studium, mais point n^aurai la
présomption de vous promettre ce que Cicéron appelle
industria, A son défaut, je ferai toujours preuve de bonne
volonté pour vous servir et vous complaire.
C'est là aussi ce que j^offre de grand cœur à notre président,
en lui faisant Vhommage des mains, comme le prescrivait
notre vieille coutume du Nivernois.
M. le comte de Soultrait remercie son honorable
prédécesseur et toute la Société et donne lecture
d'un discours, programme magnifique d'études et
de travaux, qui est de nature à développer la vie
intellectuelle , littéraire et scientifique dans notre
Société et dans notre province :
Messieurs ,
J^ai eu , dans ma carrière archéologique, quelques petites
satisfactions d^amour-propre, mais rien ne m a rendu plus
heureux que ma nomination à l^, présidence de notre
Société.
— 31 —
-^l^^dôis i'bonneur que vous avez bien voulu me faire, non
à «non tnérire , mais à mon ancienneté dans la compagnie ;
piris vous avez peut-être voulu récompenser plus de quarante
années de recherches et d'études, dont la principale, pour ne
pas dire la seule valeur, est d'avoir eu pour objet notre chère
province.
' Je vous remercie donc vivement et je vous promets de faire
ilKM! possible pour essayer de justifier votre choix.
Mais, Messieurs, si j'accepte avec joie cette présidence, je
suis loin de m'en dissimuler les difficultés.
Je succède à des hommes que je ne remplacerai pas. Notre
pnmier président, Mf' Crosnier, avait dans la science un
nom considérable , et il s'occupait de la compagnie , dont
j'ai eu, avec lui, Thonneur d'être Tun des fondateurs, avec
an zèle seulement égalé par son savoir.
On peut dire que c'est Mr Crosnier qui a posé la Société
nivernaise, à laquelle ses importants travaux ont bien vite
marqué une place distinguée dans le monde scientifique de
nos provinces.
M. Roubet, que je voudrais bien voir encore à la place
qu'il a refusée, sous prétexte d'une vieillesse à laquelle
personne ne peut croire, tant elle est verte et féconde,
M. Roubet, dis-je, a été aussi un président excellent : d'une
exactitude parfaite, d'une grande assiduité, il ne manquait
jamais une séance, et il avait toujours en réserve , pour le
cas d'un ordre du jour peu fourni, un de ces spirituels récits
dans lesquels il sait donner une forme fantaisiste, attrayante
aux gravités de Thistoire et de l'archéologie. Est-il besoin
d'ajouter que votre ancien président avait su se faire aimer
de tous , par une extrême bienveillance et par la gracieuse
aménité de ses relations.
Dieu merci, notre président honoraire ne changera point
«es habitudes, et nous le verrons, comme par le passé,
apporter aux séances de notre compagnie le tribut de ses
cimnaissances si variées et de ses amusantes lectures.
J'ai parlé de l'exactitude et de l'assiduité de M. Roubet.
— 22 —
Hélas ! Messieurs , je crains bien de manquer quelquefois de
ces vertus si essentielles à un président, et la conscience de
mon infériorité, à cet égard comme à bien d'autres, me
préoccupe en prenant place sur ce fauteuil. Depuis que le
Gouvernement m^a rendu à mes chères études, je n^ai plus
que mon domicile nivernais, mais j'ai un peu la passion de
la locomotion, quand la goutte me la permet ; puis la goutte
elle-même pourra bien quelquefois m'empécher de venir à
nos séances. J'aurais donc hésité à accepter le très-grand
honneur que vous avez bien voulu me conférer , sans l'assu-
rance d'être toujours fort bien remplacé soit par notre excel-
lent président honoraire , soit par notre savant et laborieux
vice-président, qui sait trouver le temps de se livrer aux
travaux les plus variés, au milieu des occupations nombreuses
de son saint ministère.
Il y a plus de trente<inq ans, Messieurs, que notre Société
est fondée, et nous pouvons être fiers d^une existence aussi
bien remplie, car peu de sociétés savantes ont produit autant
que nous. La plupart de ces sociétés ont eu des vicissitudes
qui, grâce à Dieu, nous sont inconnues. Plusieurs, après
avoir eu des commencements brillants, ont vu décroître
l'importance de leurs publications ; d'autres ont tout à fait
cessé de donner signe de vie, soit faute de fonds , soit faute
de travailleurs. La Société nivernaise n^a jamais ralenti ses
productions, malgré la modicité de ses ressources, encore
diminuées par le refus d'allocations qui cependant ne pou-
vaient être mieux méritées.
Je viens de relire la liste de nos fondateurs, et en compa-
rant cette liste de quatre-vingt-un noms à celle de nos
membres actuels, je n'ai plus trouvé que treize ouvriers de
la première heure. Heureusement que beaucoup de ceux qui
nous ont abandonnés sont encore de ce monde ; mais que de
pertes n'avons-nous pas à déplorer, que de noms aimés, que
d'hommes qui ont bien mérité du Nivernais par leurs travaux^
par leur sympathie, par leurs soins à seconder nos efforts et à
entretenir la vie scientifique et littéraire dans notre province.
— 23 —
Ne serait^ii pas à propos de donner, non une histoire de
notre compagnie, le mot serait trop ambitieux, mais un
aperçu de ce qu'elle a tait jusqu'à ce jour, un compte-rendu
de cet^e existence académique dont je louais ajuste titre l'heu-
reuse fécondité? Cette analyse permettrait à nos jeunes
confrères de connaître Tœuvre de leurs devanciers sans avoir
à lire de nombreux volumes.
Les membres de la Société peuvent sans doute se servir de
toutes, nos publications; mais notre Bulletin renferme une
masse de documents historiques et archéologiques sur la
province qu^il est difficile de retrouver sans de bien longues
recherches. Une table détaillée de ces volumes serait fort
utile aux travailleurs et même aux simples curieux.
Il y aurait bien d^autres travaux dont je me permettrai de
vous dire quelques mots.
Une bibliographie de la province, dans laquelle seraient,
non pas analysés ni même appréciés , mais seulement indi-
qués, dans Tordre bibliographique généralement adopté, les
ouvrages sur le Nivernais et ceux de tout genre dus à des
auteurs nés dans le pays.
Une biographie, dans laquelle je voudrais voir figurer des
notices sur certaines familles qui, sans avoir fourni des
hommes marquants, ont à leur actif une masse de services
rendus par leurs membres pendant des siècles.
Uneépigraphie complète du département. On s*est tou-
jours vivement préoccupé des inscriptions antiques, mais on
a toujours négligé, je dirai même affecté de mépriser, comme
indignes de toute attention , celles postérieures au dixième
siècle. Et cependant que de documents curieux dans cette
histoire lapidaire relativement moderne, pour le moins aussi
intéressante que celle qui date de Tantiquité !
Un épigraphiste lyonnais du dix-septième siècle, Spon, dit
quelque part qu^on ne s'occupe point des inscriptions du
moyen-âge parce qu'on ne les saurait lire.
La raison est naïve.
Dans les cinq beaux volumes de l'épigraphie du diocèse de
— 24 —
Paris, le regretté baron de Guilhermy a magistralemem
prouvé de quelle importance est cette branche si dédaignée
de Parchéologie.
Faisons donc pour la Nièvre ce que M. de Guilhermy a
fait pour Paris et pour ses environs.
Ce n'est pas tout d^avoir des documents historiques, il faut
savoir où les trouver et pouvoir s'en servir.
L'inventaire officiel des archives départementales nous
donnera la clé du dépôt de la préfecture. M. l'abbé Boutillier
nous a donné celle des archives municipales et hospitalières.
L'Inventaire des titres de Nevers, de Tabbé de MaroUes,
dont vous m'avez fait rhonneur de me confier l'annotation, a
mis à la disposition du public savant bien des richesses his*
toriques. M. de Lespinasse nous ouvre le Cartulaire de La
Charité, Mais que d'autres sources à indiquer !
La publication d'un cartulaire général du Nivernais
serait bien à souhaiter. Je crois vous avoir dit, dans l'une de
nos séances de Tannée dernière, qu'un savant paléographe,
qui est aussi un écrivain distingué, M. le comte de Chastelluz,
a entrepris cet immense travail, dont il a bien voulu m'en-
voyer une partie considérable , la copie d'environ huit cents
chartes.
Je compte bientôt étudier ce volumineux recueil dont ;e
vous entretiendrai. Comme travail de bien moindre impor-
tance, j'ai rintention de vous soumettre une sigillographie
de notre province.
Certaines sociétés savantes, Messieurs, ont pris pour devise
ces mots : Discere non docere,
La modestie est une grande vertu, mais il ne faut pas la
pousser trop loin. Si la mission des sociétés savantes est
d'apprendre, d'étudier, cette mission comprend aussi la diffu-
sion , et pour me servir d'un terme à la mode, la vulgari-
sation du savoir, surtout en tout ce qui concerne la province
qui fait l'objet de leurs études.
C'est rendre un grand service que de donner aux gens du
monde la facilité d'agrandir le cercle de leurs connaissances.
— 25 —
^j^r fournir le moyen de s'instruire, quand ce ne serait
que d^uoe manière superficielle, de leur faire comprendre
Futilité et le charme du travail, de tâcher de leur prouver la
bienfaisante influence qu'un goût d*étude raisonné et suivi
peut exercer sur toute la vie.
c Le moi est haïssable, > a dit Pascal. Permettez-moi
cependant de me citer pour exemple à Tappui de ma thèse. J^ai
4û bien des moments heureux, de véritables joies, de grandes
consolations dans mes chagrins au goût passionné pour les
études archéologiques et historiques, pour les livres, pour les
collections que m^avait inspiré, à Tâge de dix-huit ans , un
camarade, qui est devenu un savant distingué et qui est resté
l'un de mes plus chers amis.
, J^ai noirci pas mal de papier; j'ai écrit quelques livres,
mais je fais bon marché de ces productions, pour lesquelles on
a été beaucoup trop bienveillant , ne leur reconnaissant que
deux mérites incontestables : celui de m'avoir empêché de
devenir un désœuvré ennuyé efpar conséquent fort ennuyeux,
peut-être même un médiocre sujet , et celui d*avoir occupé
agréablement, sinon bien utilement, plus de quarante-cinq
ans de ma vie, et de rester le charme de mes vieux jours.
Eh bien! Messieurs, n^y a-t-il pas pour nous une mission
à remplir dans cet ordre d'idée ? N'y a-t-il pas, j'oserai le
dire, une sorte d'apostolat à exercer en essayant de tirer de
Toisiveté , qui abêtit , des jeunes gens à qui la journée doit
paraître bien longue quand la chasse est fermée; en leur
ouvrant un horizon d'études diverses , car je ne parle pas
exclusivement de l'archéologie, animé par un travail mora-
^ lisateur et bientôt attachant qui ferait une heureuse concur-
rence aux jouissances, bien vides et souvent malsaines, des
cafés et des cercles. Ce qui serait si utile pour les hommes ne
pourrait-il pas le devenir aussi pour les femmes ?
J'ai peu de sympathie pour les bas bleus, mais il me
semble que , sans vouloir faire des jeunes filles des femmes
^ ^vantes, sans prétendre rivaliser avec ces lycées féminins ,
4oAt l'influence ne nous promet rien de bon, il ne serait pas
T. m, 3* série. ^
^
— 26 -
inutile d'inspirer aux femmes le goût des arts et de former ce
goût par quelques notions d'esthétique. Pour les jeunes filles,
)e recommanderais l'archéologie, cette science dont le champ
est si vaste que chacun peut choisir sa voie, selon la nature
et le penchant de son esprit, selon le milieu dans lequel il se
trouve.
Quelle étude plus variée, plus intelligente, plus facile,
plus à la portée de tous, car elle n*a pas besoin d*étre poussée
bien loin , et elle s'étend des antiquités préhistoriques au
mobilier, au costume, aux faïences et aux porcelaines, à ces
bibelots, pour employer ce terme familier, si fort à la mode,
qui sont souvent des objets d'art intéressants.
Cette étude donne un attrait de plus aux voyages , car elle
seule peut permettre de prendre intérêt aux monuments, aux
musées.
N'y a-t-il pas, en outre, un charme entraînant à s'occuper
des demeures où vivaient nos pères , de ces églises, de ces
monastères, témoignage de leur foi vive, de ces châteaux-
forts, pleins de glorieux souvenirs, de ces murailles, de ces
hôtels de ville , remparts et symboles des vieilles franchises
municipales ?
Il y en aurait bien long à dire sans épuiser ce sujet ; mais,
Messieurs, je n'ai pas la prétention de tracer devant vous le
programme d'un cours d'archéologie, qui devrait alors avoir
pour pendant les programmes d'études d'un autre genre;
seulement je me demande si quelques membres de notre
compagnie ne pourraient point entreprendre de traiter dans
des entretiens , dans de petites conférences , les sujets histo-
riques, artistiques, littéraires ou scientifiques qui leur sont
familiers. Ces conférences ont été essayées avec succès dans
quelques villes. Si je ne craignais pas de vous parler encore
de moi, je vous dirais que j'ai fait à Lyon, pendant deux ans,
un petit cours familier d'archéologie à des femmes et à des
jeunes filles, qui n'a pas mal réussi, malgré l'insuffisance du
professeur.
Je ne sais ce que vous penserez de ce projet dont je tous
- 27 -
soumets uoe première idée. Si vous Tapprouviez, il s'agirait
de trouver les voies et moyens.
Il Ëaudrait que notre Société fût de plus en plus le centre
actif de la vie intellectuelle du pays. Pour arriver à ce but
d'une manière complète, elle devrait être tenue au courant
de toutes les découvertes archéologiques faites dans le dépar-
tement. Elle devrait aussi être appelée à donner son avis sur
Topportunité de bien des restaurations, souvent maladroites,
qui parfois équivalent à une destruction.
Il conviendrait de stimuler le zèle de nos confrères
répandus dans presque tous les cantons de la Nièvre, de leur
demander des communications fréquentes et détaillées, de
ks prier de nous signaler même les plus petits faits archéo-
logiques ou scientifiques dont ils auraient connaissance dans
leurs environs.
Ces communications y tout en donnant un aliment inté-
ressant à nos séances, pourraient souvent empêcher la
destruction ou Tenlèvement d^objets curieux et empêcher de
malheureuses restaurations.
Permettez-moi en terminant, Messieurs, de vous recom-
mander ces vertus : l'exactitude et Tassiduité , dont je vous
parlais tout à Theure. Pour que nos séances présentent de
l'intérêt^ il faut que le plus de membres possible y assistent
et prennent part à des discussions qu^il y aurait lieu de faire
naître sur tel ou tel point de nos études.
Nos séances ne sont pas fréquentes , et ce ne sera pas un
bien grand effort pour nos confrères de donner deux heures
par mois à ces réunions dans lesquelles nous tâcherons de
traiter des qnestions aussi variées que possible.
A ce sujet, il me semble que, comme cela se fait dans beau-
coup d'autres sociétés, nos confrères devraient nous entre-
tenir et nous donner lecture de leurs travaux étrangers au
Nivernais. De même que dans une bibliothèque provinciale
on doit donner place à toutes les productions des auteurs du
pays, de même une société ne peut que tirer avantage de cette
cosnaissance complète de la vie littéraire de ses membres.
- 28 -
Enfin, Messieurs, travaillons chacun dans Tordre dMdées
que nous avons choisi. Occupons-nous surtout de notre
province, apportons chacun notre pierre à ce grand édifice de
l'encyclopédie locale, dont chaque société doit avoir à cœur
de doter son pays.
M. le vice-président Boutillier donne connais-
sance d'une lettre de M. Liontard, de Nîmes, qui
demande qu'on lui fasse connaître les noms des
deux faïenciers de Nîmes inscrits sur la liste des
pétitionnaires de 1790, au musée de Nevers.
M. le Président se charge de transmettre à
M. Liontard la réponse à sa question.
MM. de Pierredon et de Toytot présentent
comme membre de la Société M. Léon d'Abbadie
de Barrau. M. Léon d'Abbadie de Barrau est
admis.
M. le Président prend de nouveau la parole et
explique quelles sont les démarches à faire pour
obtenir que notre Société soit reconnue d'utilité
publique. Une délibération doit être prise à cet
effet. Il faut en outre une demande du président
et le dépôt au ministère de cent exemplaires du
règlement de la Société , la liste des membres et
la liste des ouvrages publiés.
Au moment de faire imprimer à nouveau le
règlement de notre Société, M. le Président pense
qu'il y a lieu d'en donner lecture , afin d'insérer les
changements qui auraient pu se produire. Après
discussion, diverses modifications de détail sont
apportées au texte des statuts. Notamment il est
décidé qu'il sera rendu compte dorénavant des
— 29 —
travaux publiés par nos confrères, même en
dehors des études locales, et aussi un compte-
rendu rapide des livres et documents offerts à la
Société.
M. le Président entretient à nouveau la Société
de la question relative à la restauration de la
statue provenant du couvent des Récollets. M. le
comte de Soultrait espère obtenir du ministre les
fonds nécessaires à cette restauration.
M. de Pierredon propose de reprendre les pro-
menades archéologiques que la Société avait
autrefois pratiquées.
La Société s'associe à ce vœu et M. le Président
propose d'organiser dès maintenant une course
semblable. On décide en principe une excursion à
Autun pour le 19 juillet. Il en sera donné avis par
une circulaire aux membres de la Société.
SÉANCE DU 29 JUILLET 1886.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait ,
président; l'abbé Boutillier, vice-président; E. de
Toytot, secrétaire; Duminy, archiviste ; Vdhhé
Pot, l'abbé Fouché, l'abbé Soyer, de Charant,
Julien, Langellé, de Flamare , de Lespinasse,
Léon d'Abbadie de Barrau, de Pierredon, Gri-
veau. Col.
- 3o —
M. Caquet , présenté par MM. Roubet et de
Soultrait comme membre de la Société y est
admis.
M. le Président prend la parole au sujet de
Texcursion archéologique à Autun ; il expose qu'en
raison de l'absence des membres de la Société
éduenne à l'époque projetée , ce voyage est devenu
impossible pour cette année et sera remis à l'année
prochaine.
Il est donné communication d'une circulaire du
ministre de l'instruction publique relativement à
un programme de travaux de statistique.
Une proposition de M. l'abbé Soyer, relative-
ment à un échange de douze volumes du Bulletin
de l'ancienne collection de la Revue des sociétés
savantes y que la Société ne possède pas, contre
V Armoriai de M. de Soultrait, est adoptée.
Lecture est donnée par M. l'abbé Boutillier
d'une copie très-intéressante d'un ancien Inven-
taire des reliques et de l'argenterie de la fabrique
Saint-Martin de Clamecy. Ce travail, dont l'auteur
est M. l'abbé Charrier, sera inséré au Bulletin ,
à la suite de la notice historique sur la collégiale
de Clamecy.
M. de Soultrait lit une pièce de vers, œuvre de
son trisaïeul Pierre Richard de Soultrait, qui
prouve que, dans la première moitié du dix-hui-
tième siècle , il existait à Nevers une société litté-
raire, une sorte de petite académie. Voici cette
pièce de vers :
- 3i -
PLACET PRÉSENTÉ PAR LES MUSES
A MONSEIGNEUR LE DUC DE NIVERNOIS.
Disent en toute humilité :
Calliope, la bien parlante;
Dame Erato , surintendante
De tout balet bien concerté ;
CHo, dont la main bienfesante,
Verse avec libéralité,
Sur chacque fait quelle a cotté
Dose toujours équivalante
De gloire et d'immortalité.
Toutes pucelles soy disantes
Quoique des langues médisantes^
Mais soit mensonge^ ou vérité»
Cela n*auroit pas excité,
Seigneur, la troupe complaignante
A réclamer votre équité.
Une matière plus touchante
Invoque votre autorité.
Hé quoy, seigneur^ dans la cité
Dont vous devez être dotté.
Cité capitale et charmante :
Sou ffrirés- vous qu'en troupe errante ,
Dans une extrême pauvreté,
Qu'en histrions, ou qu^en baccantes ^
Des Muses vos humbles servantes,
Muses qui vous ont alaité,
Muses à vôtre volonté
Toujours soumises, et pliantes,
Soit que pour la légèreté
De quelques idiles galantes,
Ou d'un inpromptu souhaité
Vous les pryés d'estre présentes.
Leur zèle, et leur fidélité.
Ne fait pas languir vôtre attante ;
Et vous croyés avoir chanté.
Lorsque c'est Erato qui chante.-
— 3a —
Que réduite sur le pavé,
Cette troupe chaste, et scavante.
N'ait pas un endroit réservé.
Pour s'abritter, sitôt qu'il vente.
Pendant qu'un réduit ajusté
Des mains de la médiocrité
Borneroit sa cupidité.
Il est vray que vôtre bonté
Sensible à sa mendicité,
Luy permet pendant tout Tété
De chercher sa comodité.
Sur un tréteau qu'on a planté
Exprès pour la bande chantante.
Pour Tété, bon, elle est contente.
Une demeure plus brillante,
Pourroit par trop de vanité,
Corrompre sa sobriété.
Comme un médaillon n'est vanté,
A moins qu'une rouille évidente
N'annonce son antiquité,
Une Muse n'est bien séante ,
Ne paroît dans sa gravité
Qu'elle n'ait un manteau crotté.
D'ailleurs, cette troupe assemblée,
S'ébergeant sous vos maronniers.
Comme pigeons en colombiers.
Comme poulaille en ses pailliers,
N'est-elle pas assés meublée.
Leurs cimes feront leurs dortoirs,
Et leurs ombres leurs promenoirs.
Hé quoy de plus? Mais quand Borée,
Prenant son essort dans les airs ,
Viendra de ces ombrages verds
Disperser l'aimable livrée :
Voila leurs abrits découverts ;
Que fera la troupe éplorée i
Puis au besoin pour des concerts
Qu'on vienne à la bande enrumée,
Chantés, dit-on, faite des vers,
Pour une duchesse adorée ,
Plus brillante que Citerée,
Qui nous prépare à son entrée ,
A voir renaître dans Nevers
— 33 —
Les temps de Saturne et de Rée ;
Que vos lives, vos chalumaux
Expriment par des sons nouveaux,
Ce port charmant, ces ris, ces grâces,
Qui pour toujours suivre ses traces
Ont quitté Citere et Paphos.
Peignés sur tout cet air affable^
Qui tempère la majesté ;
Et qui scait allier laimable
A réclat de la dignité.
Qui le pourroit, la volonté,
Soutient bien la bande zélée,
Mais son zèle , est velléité.
Fait-on sans inhumanité
Chanter une Muse gelée.
Voila ^ seigneur, le cas pressant,
Qui leur fait reclamer vôtre aide,
Mettes les à Tabry du vent.
Fixés le Parnasse ambulant ,
Voila le mal, et le remède.
Dans un coin de vôtre palais.
Pour veu. Monseigneur, qu'il vous plaise
Que pendant Phyver à leur aise,
Uété sous vos arbres au frais,
Les Muses fredonnent en paix.
Oh que pour lors on leur commande
Rondeaux, cantates, virelets,
Balades, madrigaux^ couplets.
Tout sera prest, sans qu^on attende.
Leur demande, et vos intérêts,
Semblent agir à communs frais ;
A présent, seigneur, que la gloire
Guide vos pas aux champs de Mars ,
Et qu*entraîné par la victoire
Vous aftronterés les hasards.
S'il arrivoit que la trompette
Qui doit anoncer vos exploits,
Restât sans vigueur, et muette.
Que Clio soufflât dans ses doigts.
La bande alors seroit honnie.
Et du brocard de félonie
Elle verroit avec douleur,
Qu'on timpanisftt son honneur.
T. in, 3* série, 5
-34-
Pour épargner cette infamie ,
A cette troupe votre amie ,
Il est un seur moyen, seigneur,
Formés en une acadéiue.
Dont vous serés le protecteur.
Ces vers, dit M. de Soultrait, furent écrits vers
1730, à l'époque où Louis-Jules-Barbon Mancini-
Mazarini, qui fut le dernier duc de notre province,
devint possesseur du duché par Tabandon de son
père. On sait que le duc de Nivernois fut un phi-
losophe et un écrivain en prose et en vers, écrivain
très-fécond, mais assez médiocre, il faut bien le
dire. Ce seigneur qui, dès son jeune âge, manifes-
tait des goûts littéraires, avait épousé, en 1730,
Hélène - Angélique - Françoise Philippeaux de
Pontchartrain ; il avait alors un peu plus de qua-
torze ans, et s'il s'était destiné à la carrière
des armes, que sa mauvaise santé le força bientôt
de quitter, il devait faire sa première campagne
seulement en 1734, sous le maréchal de Villars.
Me permettrez-vous, continue M. de Soultrait,
de vous dire quelques mots de l'auteur du (C Placet
des Muses d qui joua un certain rôle à Nevers
pendant le second quart du dix-huitième siècle.
Pierre Richard de Soultrait, écuyer, seigneur de
Soultrait, de Toury-sur-Abron , etc., né à Nevers
en 1682, de Joseph Richard de Soultrait, écuyer,
seigneur de Soultrait, de Lisle-de-Mars^ etc., et
de Claude - Jacquette Sallonnier de Nyon, fut
échevin de Nevers en 1 7 1 2 ; puis il alla se fixer à
Paris, où il prit, dans le monde des écrivains, les
-35-
goûts littéraires qu'il conserva toujours et où il
commença à écrire. Revenu dans son pays en 1723^
il s'y maria à une demoiselle de Bourgoing.
Maire de Nevers , conseiller à la Chambre des
comptes de cette ville, puis à celle de Franche-
Comté, Richard de Soultrait, travailleur infati-
gable, ne cessa de donner cours à ses études
littéraires commencées pendant son séjour à Paris.
Un certain nombre de poésies de lui se lisent dans
le Mercure de France et dans d'autres recueils
littéraires du temps ; l'une de ces poésies, intitulée :
La Jeunesse, fut dédiée à son ami le poète niver-
nais Pierre de Frasnay, qui lui répondit par le
conte : Les Damnés de Neoers.
Les descendants de Pierre Richard de Soultrait
ont conservé presque toutes les œuvres de leur
aïeul, imprimées ou manuscrites, entre autres un
recueil de contes spirituels et bien trouvés , mais
un peu légers, des odes et même une comédie
pas très-bonne , il faut bien le dire.
Richard de Soultrait était l'orateur habituel de
la Chambre des comptes de Nevers : on trouve
dans ses manuscrits le texte de plusieurs de ses
harangues, entre autres de celle qu'il adressa, au
nom de la Chambre , en 1 734 , au duc de Nivernais
revenant d'Italie. Pierre Richard mourut à Nevers
en 1747, laissant une belle bibliothèque, qui fut
malheureusement dispersée par son fils , dont les
goûts étaient tout diflFérents de ceux de son père.
M. de Soultrait entretient ensuite la Société de
pièces de vers sur les dames de Nevers sous le
— 36 —
règne de Louis XVI, dont il a trouvé , dans lei
papiers de son grand-père , le manuscrit , qu'il se
propose de publier avec des notes. Ces pièces de
vers sont assez médiocres, mais leur ensemble
oflFre cet intérêt de faire connaître les femmes qui,
au nombre de cinquante environ, composaient,
vers 1780, la société de Nevers. Deux extraits de
ces petites pièces que Ton va lire donneront une
idée de ce recueil :
A MADAME LA COMTESSE DU BOURG,
A Vhôtel de V Affabilité y rue de la Jolie^Gayté, près le magasin
des Roses.
Je croyais les plaisirs à la ville, à la cour,
Je vouloîs les chercher dans les lieux de plaisance;
Mais la raison me dit : Ce n^est qu^auprès du Bourg
Que régnent la gaycté, Tesprit et la décence;
L^amour m'y conduisit ; là je vis mille attraits
Qui flattèrent mes yeux, qui charmèrent mon âme,
En approchant du Bourg, je fus si satisfait
Que mon cœur aussitôt se trouva plein de flamme.
A MADAME DE SOULTRAIT,
A Vhotel de la Bonne-Mine, rue Généreuse, près le marché
des RiS'de-Veau.
L'amour, voulant un jour crayonner son portrait,
Fut tout-à-coup surpris, en faisant son ouvrage,
De se trouver en toy, de te voir Sous le trait
Qu'avait tracé sa main pour faire son image.
Quoy, se peut-il, dit-il, que femme à quarante ans
Puisse encore avec moy avoir ressemblance i
Oui, la raison lui dit, on est belle en tous tems
Quand on a la gayeté, Tesprit et la décence.
s
Pour expliquer l'adresse ci-dessus, toute fan-
taisiste comme les autres qui sont en tête des
-37-
diverses pièces , il faut dire que M"* de Soultrait
était M"® de Vaux, qu'elle était fort gaie, de
mine fort accorte, à en juger par son portrait,
et qu'elle recevait beaucoup dans son hôtel de
la rue des Récollets.
Une troisième et dernière citation :
A MADEMOISELLE DE LA PLANCHE^
A Vhôtel de la Bonne^Humeur, rue de la Sincérité, près du
couvent des Amateurs,
Uamour, voguant un jour, alloit faire naufrage,
Ses ailes étoient dans Teau , ses flèches et son carquois;
Il se désespérait de dépit et de rage;
Mais le destin, fâché de le voir aux abois,
Lui dit : Tiens, sauve-toi, je te laisse La Planche
Que les Dieux ont formée pour conduire au bonheur.
Cet enfent aussitôt y saute et s^y retranche,
Et tout en s'y sauvant, il y noya nos coeurs.
NOTICE HISTORIQUE
SUR LA COLLÉGIALE DE SAINT-MARTIN DE CLAMECY.
Par un hasard singulier, j'eus , il y a quelque temps , la
bonne fortune de mettre la main sur un manuscrit dont je
reconnus bien vite la haute valeur. Cétait un recueil de
procès - verbaux authentiques des visites pastorales des
évêques d'Auxerre, entre autres de Mf' André Gilbert, neveu
de Mer Charles Colbert, qui laissa en mourant une grande
réputation de piété, et de M»' Jean-Marie Champion de
Cicé, dernier évêque d'Auxerre. Celles du premier eurent lieu
en l'an i685 et celles du second les années 1767, 1774,
1783 et 1785, c'est-à-dire environ un siècle plus tard. Ce
— 38 —
recueil forme un bel in-folio relié en carton, avec couverture
de parchemin ; chaque feuillet est marqué, au timbre de la
généralité d'Orléans. Les procès-verbaux qui y sont contenus
ont trait à la plupart des paroisses qui formaient rancieti
diocèse d'Auxerre, et dont une partie a été rattachée ^u
diocèse de Sens , une autre au diocèse de Nevers, et la troi-
sième, la moins importante, au diocèse d'Orléans.
Parmi les paroisses faisant actuellement partie du diocèse
de Nevers qui figurent dans le recueil dont nous parlons.,
nous pouvons citer Clamecy, Surgy, Entrains, Varzy, Marcy,
Châteauneuf, Ménestreau, Couloutre, Colméry, Arbourse,
Nannay, Cessy-les-Bois, La Charité, etc.
J'ai cru bon de relever quelques détails concernant la
collégiale de Saint-Martin de Clamecy et qui m'ont semble
de nature à intéresser les membres de la Société nivernaise,
comme se rattachant plus spécialement au cadre de ses
travaux.
Le procès-verbal de la visite pastorale du 22 août 1782
nous apprend que la collégiale de Saint-Martin possédait
encore à cette époque , dans ses archives , le titre de la fon-
dation du chapitre, et qu' « une copie collationnée en forme >
de ce titre se trouvait < dans le trésor littéral de révéché >
d'Auxerre, oîi elle avait été déposée « par ordre de Mt' André
Colbert, lors de sa visite en 1684». Nous ne devons point être
surpris par conséquent de le voir inséré dans les Mémoires
de Tabbé Lebeuf, le savant chanoine d'Auxerre ayant pu
facilement en prendre connaissance.
D'après la teneur de cet acte, il ressort qu'en Tannée 1076,
Guy de Clamecy, de la maison de Nevers, et Godefroy,
évêque d'Auxerre , ont fondé le chapitre de Saint-Martin de
Clamecy et y ont établi huit chanoines pourvus chacun d'une
prébende. En 1782, le nombre des chanoines se trouvait
réduit à six, quoique le nombre des prébendes fût resté le
même. Seulement, elles étaient réparties de la manière
suivante :
a Deux des prébendes affectées à la chanterie , qui est la
seule dignité. Elle est possédée par M* Henry Limanton ,
prêtre, curé depuis le 98 septembre 1775 (i).
».Gnq prébendes sont possédées par autant de chanoines ,
savoir :
» M* François Magnan de Chazelles , prêtre, chanoine
depuis le 27 janvier 1769 ;
> M» Jacques-François-Germain L% Gry, clerc tonsuré,
absent pour cause dMtudes , chanoine depuis le 23 septembre
(i> M. Limanton était né en 1737, à Tannay. En 1791, il prêta,
entre les mains des oflBciers de la municipalité, le serment de fidélité
au loi, à la nation et à la Constitution. Mais il faut croire que ce
serment fut accompagné de restrictions, car la garde nationale fit
insérer, dans le procès-verbal, rédigé à cette occasion, < ses protes-
tations contre Pesprit et les tendances antipatriotiques du discours
proihoncé dans cette circonstance par le curé Limanton. «(Anciennes
délibérations de la municipalité.)
11 se maintint encore jusqu'en 1798; mais ^intolérance du parti
démagogique qui tyrannisait alors la France et les tracasseries
quotidiennes dont il était Tobjet le contraignirent de s^éloigner
momentanément de Clamecy. Après la chute de Robespierre , cédant
aux'VoKuz d'un grand nombre de ses paroissiens, il se décida à
renirer. Une pieuse et charitable dame, nommée Thomas- Va renne,
lai oiirit un asile dans sa maison, située au bas de la rue MirandoUe,
au lieu-dit la Grand'Cour. Cest là qu'à l'abri des poursuites révolu-
tionnaires il continua à exercer le saint ministère, mais d'une façon
occulte, jusqu'à l'époque de la réouverture des églises, qui eut lieu
en 1^3, et c'est le 14 mars de cette année (24 ventôse an XI) qu'en
présence et aux acclamations de toute la paroisse réunie,' M. Limanton
fut réintégré dans sa chère église de Saint-Martin. Il y resta jusqu'à
sa mort, arrivée le 27 décembre 1820.
Ses obsèques se firent le 28, sous la présidence de M. Deplaye, curé
de Tannay, au milieu d'un immense concours de prêtres et de fidèles,
malgré uii froid rigoureux et une grande abondance de neige. La
paroisse fut administrée par un vicaire jusqu'à la nomination de
M. Easelin, qui en prit possession le 21 février 1826. Les troubles
de i83o déterminèrent ce dernier à donner sa démission; il eut pour
successeur M. le Curé-Archiprétre actuel, lequel se trouve être le
troisième curé de Clamecy depuis 1775. (M. Guillaumet est décédé
pendant l'impression de ces pages^ le 6 mars 1887.)
— 40 —
> M* Clétnendot , prêtre et chanoine depuis le 14 février
1780;
» M* Pierre Colin^ prêtre et chanoine depuis le 2 1 décembre
1780.
» A l'égard de la huitième prébende , elle était ci-devant
affectée au principal du collège de ladite ville de Clamecy ;
mais depuis un certain nombre d'années , la ville ayant
refusé audit chapitre le dtoit d'inspecter le collège , ainsi que
par le passé, ledit chapitre avait cessé de donner au collège
le revenu de la prébende préceptorale. Les maires et échevins
choisissaient ledit principal, le présentaient au chapitre, qui
rexaminait avant de l'envoyer. » (Procès- ver bal de 1782.)
Le revenu de la cure consistait: « i^ dans un huitième ou
sixième du revenu du chapitre formant, année commune,
environ 700 livres ; 2* dans une dîme particulière d'agneaux
et de chanvre, affermée 3oo livres ; 3» dans un droit de pinte,
qui produit environ 60 livres par an ; 4* en deux petites
pièces de pré affermées 48 livres; 5» en un arpent et demi de
vignes plus à charge qu'à profit ; 6" ufi petit jardin ; 7' le
casuel, qui est de 5 à 600 livres par an. » (Procès-verbal du
5 août 1774.)
Les décimateurs de la paroisse étaient c M. le duc du
Nivernais, qui lève la dixième gerbe; le chapitre de Clamecy,
le prieur de Beaulieu (i) et Tabbesse de Réconfort (2), qui
dîment à la quinzième, et le prieur de l'Epau (3) , qui a la
dîme du vin, à raison de 5 sols par homme de vigne; les
fruits décimables sont le bled^ le vin, le chanvre et les
agneaux. »
§
CHAPELLES INTÉRIEURES.
On remarquait à cette époque dans l'église un grand
nombre de chapelles. Au rapport des procès-verbaux déjà
(i) Près de Rix, mais dépendant de Clamecy.
(2) Sur la paroisse de Saizy.
(3) Aux environs de Donzy.
i
— 41 —
mentionnées , on en comptait jusqu'à dix , placées chacune
sous un vocable particulier; elles occupaient Tordre sui-
vant :
i^ A gauche de la grande porte d'entrée, où sont aujour-
d'hui les fonts, la chapelle dite de la Samaritaine. Cette
dénomination lui venait probablement de la présence de la
fontaine baptismale. Elle a disparu depuis.
z^ En suivant la partie latérale du côté gauche, la
chapelle du Saint-Nom-de-Jésus. Celte chapelle existe encore,
mais elle n'est plus connue que sous le nom de chapelle de
Saint-Joseph, depuis sans doute qu'on y a placé une statue
de ce saint.
3* La chapelle de V Annonciation, à Tendroit où se dresse
aujourd'hui une statue de Notre-Dame-du-Sacré-Cœur ;
4^ Au côté gauche de l'abside, la chapelle de Notre-Dame-
de^Lampes; elle n'existe plus aujourd'hui.
La cinquième était adossée au mur de l'abside, derrière le
maître-autel. C'était à cette chapelle que le Saint-Sacrement
était conservé; aussi était-elle plus soigneusement entretenue
que les autres. Elle était fermée par une grille, et une lampe
suspendue à la voûte y brûlait jour et nuit. On lui donnait
différents noms : on rappelait chapelle du Saint^Sacrement,
chapelle du Crucifix, sans doute à cause d'un grand crucifix
appenduàla muraille, et chapelle de 5ainN/acfMe5, parce
qu'elle servait de lieu de réunion aux membres de la confrérie
de pèlerins fondée en 1645 par Tabbé de Montmorency.
Aujourd'hui cette chapelle n'est plus qu'un souvenir ;
cependant le crucifix occupe encore la même place ; il a été
respecté par les révolutionnaires de 98.
Quant à la lampe, sa destination n'a pas changé, bien que
le Saint-Sacrement soit actuellement conservé au tabernacle
du maître-autel ; seulement, au lieu d'être devant le Saint-
Sacrement , elle se trouve derrière, contrairement aux pres-
criptions de la liturgie. On peut voir là une preuve de la
lorce de l'habitude, pour ne pas dire de. la routine.
T. III, 3* série, 6
— 4a —
6° La chapelle de SainUPierre est celle qui porte aufour-'
d*hui le nom de chapelle de la Sainte* Vierge.
7» La chapelle dite de VEcce^Homo est actuellement
connue sous le nom de chapelle du Collège.
8^ La chapelle de Sainte-Elisabeth, où se dresse la statue en
marbre de sainte Geneviève, œuvre du sculpteur Etex et don
de M. Dupin aîné, qui l'avait obtenue lui-même du Gouver-
nement. Antérieurement à Pèpoque dont nous parlons, cettCi
chapelle portait le nom de chapelle de la Croix; c'est du
moins ce que nous apprend le registre manuscrit intitulé :
c Livre de la Fabrique », et dont la rédaction principale
remonte à l'année 1679 (i).
La neuvième et la dixième occupaient cette partie retirée
de réglise qui donne accès à la tour : l'une était sous le
vocable de saint Michel et l'autre sous celui de saint
Hubert.
Ces différentes chapelles avaient été fondées par des parti*
culierSy à la charge pour eux de les entretenir à leurs frais,
faute de quoi ils pouvaient y être contraints par sentence
judiciaire sur la plainte de la fabrique.
CHAPELLES EXTÉRIEURES.
Outre les chapelles intérieures , il convient de mentionner
encore : 1 ^ près de l'église collégiale, la chapelle de Saint"
Jean, dont il est parlé dans un pouillé du commencement du
quinzième siècle, que l'abbé Lebeuf a inséré à la fin de ses
Mémoires, On y voit même que dans cette chapelle on avait
fondé une seconde chapellenie sous le titre de Saint*Michel :
(i ) Ce registre est conservé à Parchiprêtré. Malheureusement il a passô
par des mains infidèles et assez peu scrupuleuses, qui en ont retranché
un bon nombre de feuillets, ce qui constitue des lacunes regrettables;
c^est ainsi que sur goo pages que ce livre contenait primitivement, il
en manque environ 3oo.
Prope ecclesiam collegiatam de Clameciaco est capella
Sancti Joannis. In eadem capella est fondata capelliana
Saacti Michaelis. Ces deux chapelles avec les résidences des
chapelains chargés de les desservir devaient former le corps
de bâtiments dont font partie les maisons Chesne et Tartrat.
Ces bâtiments sont en effet proches de l'église, dont ils ne
sont séparés que par une ruelle étroite qui porte précisément
le nom de « passage Saint-Jean » ; ils ont en outre un cachet
d^antiquité et un caractère d^architecture qui accusent le
quatorzième siècle; enfin, dans la partie occupée par la
famille Chesne se trouve une chambre dans laquelle se
voient des arceaux gothiques et d^autres ornements d^archi-
tecture qui démontrent, à n'en pas douter, que c'était là une
chapelle.
Nous apprenons par le c Livre de Fabrique » que la veille
et le jour de la fête du saint Précurseur, le chapitre de Saint-
Martin célébrait Toffice canonial dans la chapelle Saint-Jean,
et que même c les fabriciens de l'église Saint- Martin
avaient le droit d'y faire la queste ». Cette chapelle avait des
fonts baptismaux.
2« La chapelle du Collège, dédiée à la Sagesse incrééc.
3® La chapelle de Saint-Sidoine {Sancti Sydronii) qui
devait être située dans la partie de la Rue- Basse avoisinant
aujourd'hui la chapelle de Thospice, vis-à-vis la poterne qui
conduit au canal. Le 12 mai 1616, Godefroy de Lucenay,
clerc tonsuré, demeurant à Clamecy, prit possession de cette
chapelle en en recevant les clés et en faisant tinter la cloche,
ainsi que de la maison attenante, affectée à l'usage du cha-
pelain (i).
(i) Il est très-probable qu^elle ne faisait qu^un même corps- de
bâtiments avec une autre chapelle appelée chapelle Saint- Antoine,
située dans la rue supérieure, qui en a pris le nom et à laquelle on
arrive par un escalier et une petite terrasse surmontée d'une croix de
pierre. Le nom même de Saint-Antoine, qui ne se tetrouve pas dans
le pouillé, pourrait être une corruption du nom ancien , c'est-à-dire
de Saint-Sidoine.
— H —
Enfin, les hameaux faisant partie de la paroisse avaient
aussi leur chapelle.
Ainsi I* Beaugy avait la sienne sous l'invocation de saint
Bonaventure,
2® A quelque distance, entre Beaugy et la petite paroisse
de Rix. mais toujours dépendant de Clamecy, se trouvait le
prieuré des religieux Prémontrés de Beauliea, dont la cha-
pelle était dédiée à la sainte Vierge (i).
Pressures avait une chapelle dédiée à la sainte Vierge et
dépendant du prieuré de Beaulieu : Juxta villarfi de Clame-
ciaco est capella B, Marlœ de Pressures (2). En dernier
lieu, elle ne devait plus être desservie par un chapelain , car
le procès-verbal de la visite de M*' Champion de Cicé du
5 août 1774, en la mentionnant, constate que la messe
s'y disait seulement quelquefois.
Ces chapelles étaient à la présentation du chantre et du
chapitre de Clamecy et à la collation de Tévêque d*Auxerre.
4* La chapelle de Moulot, dédiée à saint Joseph. Cette
petite chapelle, où la messe se dit encore quelquefois, quoi-
qu'elle soit dans un triste état de dénûment, a été construite
aux frais des habitants ; la première pierre en a été posée par
M. Limanton , chantre-curé de Clamecy, le 3 octobre
1763.
Le 26 janvier 1622 , quelques religieux Récollets vinrent
prendre possession d'un petif ermitage bâti par un certain
frère Nicolas de Mouchy, anachorète, au haut du faubourg
de Beuvron. Ils transformèrent Termitage en couvent et
construisirent une petite église dont la dédicace fut faite par
Dominique Séguier, évéque d'Auxerre, le 4 mai i636.
(Archives de Clamecy.)
(i) L'un des procès- verbaux nous apprend que le prieuré de
Beaulieu relevait de Tabbaye de Notre-Dame de Bellevaux , au diocèse
de Nevers; ce prieuré devait être alors peu important , car le revenu
n'en était que de 3oo livres.
(2) Fouillé du quinzième siècle déjà cité.
- 45 —
I^ couvent des Récollets a subsisté jusqu'à la Révolution;
il lut supprimé le i6 décembre 1790. (Délibération de la
municipalité de Clamecy.)
Il a donné son nom à cette partie supérieure du faubourg
de Beuvron. En 1774, il ét$iit composé de cinq prêtres et de
trois frères. Il y avait alors entre eux et le curé quelques
tiraillements. Ce dernier se plaignait de ce qu'il était célébré
c dans la chapelle du couvent, les dimanches et têtes, à dix
heures, une messe basse oti tout le monde courait et désertait
la paroisse m, (Procès- ver bal de 1774.)
Nous trouvons dans le € Registre de la Fabrique » un
traité passé, en l'année 1679, le 6 décembre, entre les
fabriciens de l'église Saint-Martin de Clamecy et les RR. PP.
Récollets, d'après lequel ces derniers s'engageaient, moyen-
nant une rétribution annuelle de dou\e livres, payable au
« père temporel > , « à prêcher dans ladite église les premiers
dimanches de chaque mois et principales festes de Tannée ,
bors l'Advent et le Karesme. »
Voici, à litre de document, le texte de ce traité :
\
Nous, Jean de L'Isle, chantre-chanoine et curé de
l'église Saint - Martin de Clamecy, et Léger Faulquier,
avocat et procureur du roy en l'élection dudit lieu ; Guil-
laume Davault et Nicolas Cousté, bourgeois-fabriciens de
ladiite église, pour contribuer et continuer, suivant l'usage,
la. piété des parroissiens par les prédications dominicales, et
aux festes les plus considérables , dans le cours de Tannée,
hors le temps des Ad vents et du Karesme, reconnaissons
qu'à notre prière et réquisition les RR. PP. Récollets de cette
ville ont promis de prescher en notre ditte église les jours et
festes qui ensuivent, à scavoir:
» Le jour des Roys ;
» Le dimanche d'après les Roys, jour de la Dédicace de
TEglise ;
» Le jour de la Purification de la Vierge ;
» Le jour de l'Ascension de Notre-Seigneur ;
-46-
» Le jour de la Pentecôte ;
» La feste de la très-sainte Trinité ;
» L'Assomption de la Vierge ;
j> La Nativité de la Vierge ;
» Le premier dimanche d'octobre, à cause de Tinstitution
du Rozaire , en cas qu*il n'arrive point durant le cours des
vendanges ;
» Le jour de la Toussaint ;
» Le jour de Saint-Martin, patron de la paroisse, ii no*
vembre,
» Et tous les premiers dimanches du mois, excepté ceux de
l'Advent et du Karesme, desquels jours aucun ne pourra
avoir disposition de la chaire que par l'agrément du R. P.
Gardien ou supérieur desdits Pères Récollets , excepté ledit
sieur chantre, qui aura le choix de prescher ou faire prescber
qui bon luy semblera ès-jours et festes des Roys , de la très-
sainte Trinité^ de la Nativité de la Vierge et de sainct Martin,
patron de laditte église^ ou de laisser laditte chaire auxdits
révérends Pères. Duquel choix ledit sieur chantre les fera
advenir quinze jours auparavant lesdittes lestes.
» Ce que nous F. Siméon Tournoûer, gardien, et les reli-
gieux soussignés discrets du susdit couvent avons accepté et
promis d'effectuer.
» En reconnaissance de quoi nous fabriciens susdits et nos
successeurs payeront chacune année la somme de dou\e
livres au père temporel dudit couvent ou à celuy qui nous
sera nommé par ledit gardien ou supérieur. Promettons en
outre une retraitte la plus commode et décente que faire ce
pourra, pour servir de rafrechissement au R. P. Prédicateur à
l'issue du sermon.
» En foy de quoi nous avons réciproquement signé ces
présentes. Fait double à Clamecy, le sixiesme décembre
mil six cent soixante et dix-neuf.
» De L'Isle, chantre de Clamecy; Faulquier,
Davault, Cousté ; F" Siméon Tournoûer,
gardien ; F'* Appolinaire Delapaye, discret. »
— 47 —
8
CROIX.
Il y avait aussi sur le territoire de la paroisse, soit dans la
ville même, soit dans les faubourgs et extra muros^ un
grand nombre de croix qui témoignaient de Tesprit religieux
des habitants :
i" Au haut de la rue du Grand^Marché, à la place occupée
aujourd'hui par un puits ;
2® Au sommet du faubourg du Crot-Pinson ;
3o Sur la place des Barrières ;
4P Au lieu dit c les Jeux » ;
5<> Sur le grand pont de Bethléem ;
60 Sur la route qui conduisait anciennement au village de
la Forêt ;
7» Sur la route d'Armes ;
S^ A l'entrée du faubourg de l'abreuvoir ;
9<' Au sommet du chemin qui conduit du faubourg de
Bethléem au village de Sembert ; elle existe encore et est
connue sous le nom de croix Pathaut ;
io<> La croix Boudard^ sur la route d^Auxerre;
II» Sur le pont de Beuvron (i) ;
12® A l'entrée de la rue de Druyes ;
i3» Au sommet du faubourg des Récollets, à l'entrée de
l'ancien chemin de Moulot, la croix dite des Michelins.
Chaque dimanche, depuis Pâques jusqu'à TAscension , on
faisait, à l'issue des vêpres, une procession à quelqu*une de
ces croix, pour rappeler les différentes apparitions du Sauveur
après sa résurrection.
(i) Celle qu'on y voit actuellement a été érigée au mois de
décembre de Tannée i85i, à la suite d'une mission prêchée au sortir
d«^ événements dont Clamecy fut le thé&tre à cette époque néfaste.
-48-
De toutes les croix que nous venons dMnumérer, il ne
reste plus que les six dernières; mais il est bon de faire
observer qu^il en a été érigé de nouvelles, de sorte que le
nombre actuel est à peu près équivalent à celui d'autrefois.
§
CONFRÉRIES.
Le < Livre de Fabrique » nous donne le nom de seize
confréries existantes en 1679 ^^ selon Tordre que chacune
d^elles occupait dans les processions :
La confrérie de Saint-Jacques,
La confrérie de TEcce-Homo,
La confrérie de Saint-Nicolas,
La confrérie de Sainte-Anne,
La confrérie de Saint- Vincent,
La confrérie de Saint-Hubert,
La confrérie de Saint-Michel,
La confrérie de Saint-Eloy,
La confrérie de Saint-Biaise,
La confrérie de Saint-Honoré,
La confrérie de Saint-Crespin,
La confrérie de Saint-Jéhan,
La confrérie de Saint-Louys,
La confrérie du Saint-Suaire,
La confrérie de la Sainte-Trinité,
La confrérie de Saint-Martin.
Le procès- verbal de la visite épiscopale de 1774, après
avoir constaté que toutes ces confréries « avaient été sup-
primées depuis sept ou huit ans », ajoute qu'il ne restait plus
que celle du Saint-Sacrement, établi postérieurement.
Il est à présumer que cette suppression se fit à la suite
d'abus qui, avec le temps, s'étaient glissés dans ces pieuses
institutions et les avaient fait dévier de leur destination
— 49 —
primitive; mais peut-être aussi n'est-il pas téméraire de
supposer que le Jansénisme, dont était particulièrement
infecté le diocèse d'Auxerre, qui en était même, on peut
dire, le foyer, a bien pu contribuer de son côté, par ses prin-
cipes de rigidité étroite, à comprimer d^abord et à la fin
étouffer ces manifestations touchantes et ce glorieux épa-
nouissement de la piété populaire.
Malheureusement ses effets ne sVrétaient pas là : il
conduisait directement à Tabandon de la pratique des sacre-
ments eux-mêmes. M^' Champion de Cicé constate avec
peine ce résultat désolant : c II y a près de la moitié de la
paroisse, est-il dit dans le procès-verbal de 1774, qui manque
au devoir pascal, surtout parmi les bourgeois ; quelques-uns
n^ont pas satisfait à ce devoir depuis plus de vingt ans ; il s^y
trouve en outre un très-grand nombre de jeunes gens et
même des personnes mariées qui n^ont pas encore fait leur
première communion. »
Le même « Registre de Fabrique » nous donne encore sur
réglise collégiale de Clamecy plusieurs détails d*une véri-
table importance au point de vue plus spécialement archéo-
logique.
Il y est dit que la construction de la tour de Téglise fut
entreprise au mois d'avril de l'année 1497. Cette date nous
a été transmise par la tradition qui , paraît-il , s'en était
conservée fidèlement jusqu'alors, et aussi par les vers sui-
vants gravés sur un des piliers de Téglise et qu'on pouvait
lire encore à Pépoque de I^rédaction du c Livre de Fabrique »,
c'est-à-dire en Tan 1679 •
Mil cinq cent, trois moins seulement
Put de la tour de cette église.
En avril, pris le fondement,
Et la première pierre assize ;
T. m. S* série. 7
— 50 —
Laquelle tour fut entreprise
Le lundy de Pasque la grande;
Votre aumône soit icy mise.
Tant que puis vous le recommande.
L^architecte était sorti de Pécole de ces fameux ouvriers
que le roi Charles VIII, quelques années auparavant, avait
amenés d'Italie pour la construction de son château
d'Amboise.
L^inscription suivante, gravée aussi sur le même pilier, et
reproduite dans le » Registre de Fabrique >, nous donne la
date de la première pierre du portail :
Le neuvième jour de juin mil cinq cent et quinze, fut
mise et posée la première pierre du portail de laditte église
par Pierre Couvé (i), maistre tailleur de pierres.
Il est une inscription d'un autre genre et peu commune
que nous aurions tort de ne pas mentionner. Elle est gravée
en grec et en latin sur les deux piliers qui avoisinent la
grande porte d^entrée, au-dessus des bénitiers. Nous la
reproduisons dans son entier :
NIPSON ANOMHMATA MH MONAN OPSIN
LAVA PECCATA NON SOLAM FRONTEM (2).
Cette inscription a cela de particulier et de curieux que les
caractères grecs peuvent se lire indistinctement de droite à
gauche ou de gauche à droite sans que le sens en soit
modifié.
Ce jeu de mots byzantin était gravé, dit M. de Rossi, en
lettres d'or sur des vases de la basilique de Sainte-Sophie
de Constantinople et en plusieurs autres lieux (3). Les
(i) Née de La Rochelle dit : un nommé Cuvé, et c^est la véritable
orthographe, mais on prononçait Couvé.
(2) Lavez vos péchés et non pas seulement votre visage.
(3) Bulletin d'archéologie chrétienne, par de Rossi , 1867. — Voir
aussi le Dictionnaire des Antiquités chrétiennes, de l'abbé Martigny.
— 5» -
Voyages liturgiques de France les signalent sur un bénitier
de Tancien monastère de Saint-Mêmin, près d^Orléans. Il y
a une dizaine d'années, on fit à Autun la découverte d'une
fontaine sur laquelle était gravée cette même inscription.
Voici, selon nous, Texplication qu'on en peut donner :
Aux premiers siècles du christianisme, dans les églises
d'Orient, au milieu d'une enceinte découverte à laquelle on
donnait le nom de parvis, était une fontaine dont l'eau
servait aux fidèles pour Tablution des mains et du visage,
d'oti est venu plus tard Tusage de nos bénitiers. Or, la puri-
fication extérieure ne devait être qu'une image de la purifi-
cation de l'âme : ce symbolisme ne saurait être Pobjet d'aucun
doute uiie fois qu'on a connaissance de l'inscription rap-
portée plus haut.
Un détail précieux à noter et tout entier à la gloire de
Clamecy, c'est que la construction de l'église et de son admi-
rable tour est le fruit de la piété et des aumônes de ses
habitants, et, ce qui est non moins remarquable, c'est que la
conception du dessin et la conduite de l'ouvrage sont dus au
seul génie de ces mêmes habitants, l'architecte et les ouvriers
étant enfants de la cité.
La collégiale de Saint<Martin de Clamecy avait un jubé,
qui fut détruit, comme presque tous les ouvrages de ce genre,
au siècle dernier par un vandalisme inconscient. La date de
i525 gravée sur une des corniches, du côté du midi, indi-
quait que c'était celle où il fut achevé. Il était par conséquent
contemporain de la tour et du portail ; et n'eussions-nous pas
à son sujet d'autres détails, il nous serait permis de supposer
que ce travail ne devait pas être inférieur aux autres, et qu'à
cette époque du triomphe du style flamboyant, les sculptures
ont dû y être répandues avec une large profusion ; mais nous
avons le témoignage exprès des rédacteurs du c Registre de
Fabrique » qui nous en font le plus pompeux éloge. C'était,
y est-il dit, un chef-d'œuvre de hardiesse et de sculpture ; on
y voyait, gravée en bas-reliefs , avec un art sans pareil, toute
l'histoire de la Passion du Sauveur. La masse de cette déli-
— 52 —
cate tribune était soutenue par quatre colonnes, dans chacune
desquelles était pratiquée une niche renfermant la statue de
Tun des quatre plus anciens docteurs de l'Eglise. Deux débris
de ces bas-reliefs sont relégués dans le vestibule de la tour ;
ils représentent, Tunlacène, l'autre la descente de la croix
ou l'ensevelisseraent de Notre-Seigneur ; les personnages
sont vivants d^expression.
Ce monument avait été élevé aux frais d'un chanoine de
Clamecy, M* Guillaume Colas , personnage d^ne éminente
piété, qui a laissé plusieurs autres témoignages de sa charité,
et qui, pour ce motif, doit être compté parmi les principaux
bienfaiteurs de cette église. Ce bon chanoine avait une
dévotion particulière à la croix ; il rapportait tout à la croix
de Jésus-Christ; c'est ainsi qu'il fit sculpter sur le jubé tout
le mystère de la^ Passion ; il s*était fait représenter lui-même
en un coin du jubé, derrière le Sauveur portant sa croix ,
comme pour mettre en action cette maxime de TEvangile :
Si quis vult venire post me abneget semetipsum, tollat
crucem suant et sequatur me : c Si quelqu'un veut venir
après moi , qu'il prenne sa croix et me suive. » Enfin , cette
dévotion s'était manifestée jusque dans ses armes, qui
étaient « d'or, à la croix de gueules, avec les croisillons
servant de chef, laquelle croix était accompag.née des deux
premières lettres de son nom et de son prénom à l'antique
de même ».
Il faut dire, à l'honneur des anciens rédacteurs du
« Registre de Fabrique », que, quoique vivant au milieu et
même dans la seconde moitié du dix-septième siècle, ils
n'avaient point sacrifié aux préjugés de Tépoque relativement
à l'architecture gothique. Nous avons vu leur appréciation
sur la tour, le portail et le jubé. Nous constatons avec plaisir
qu'ils apportaient autant de goût dans la question des
vitraux et qu'ils avaient un grand souci de leur conservation,
attendu qu'un vitrier, gagé à l'année, étak spécialement
chargé de leur entretien. Nous reproduisons ce paragraphe,
où l'on verra en même temps que l'église collégiale était
-53-
encore pourvue à cette époque de ces beaux vitraux dont
nous ne saurions trop déplorer la perte :
t Le vitrier est gagé à Tannée. Surtout on doit veiller que
les vitres peintes à personnages soient exactement entretenues,
et ne point les laisser déchoir par négligence et le laps de
temps , parce que ce sont des pièces riches et curieuses qui
ont extrêmement cousté à faire et qu^on ne peut facilement
réparer comme les autres ouvrages sans les délabrer et défi-
gurer, principalement la grande vitre du portail, celle des
fonts baptismaux, celle de la chapelle de la Croix et sous la
tour, qui sont des principaux ornemens de notre église. >»
Nous en dirons autant de leur goût pour le service divin.
Ils avaient eu soin de doter Féglise d'un orgue destiné à
rehausser les offices : l'organiste était entretenu par moitié
par la ville et par la fabrique. Le paragraphe qui s'y rapporte
n'^estpas moins remarquable que le précédent; il démontre
qu'en matière de musique religieuse, leur jugement n^était
pas moins sûr. Les observations qui y sont contenues pour-
raient encore être méditées avec profit par plus d^un organiste
de nos jours.
« L^organiste est aux gages de la ville et de la fabrique par
moitié. On scait la dignité de cet instrument, combien il
inspire la dévotion , combien il contribue à la majesté du
service divin; qu'en effet, il est le seul instrument véritable-
ment approuvé par l'Eglise, que la primitive si tost qu^elle a
a pu librement respirer, après les persécutions apaisées , a eu
soin de Tintroduire partout et principalement dans la France
dès Tannée 787, régnant Pépin. Qu'ainsy on doit veiller à
tenir Torgue en suffisant estât, à ce que rien n^y dépérisse par
négligence; au contraire, ajouter si l'on peut à la piété de
nos prédécesseurs.
9 On ne doit point souffrir cependant qu^aucuns airs
profanes soient joués et touchés sur l'orgue ny meslés sur cet
instrument pendant le service divin, ny aux offertes du pain
bénit, confrairies ou autrement* »
— 54 -
Un siècle se passe. Nous arrivons au règne du badigeon,
des couleurs, des dorures, en un mot du vandalisme dans les
églises; on coupe, on taille y on tranche à qui mieux mieux.
Les fabriciens de notr^^ église collégiale alors en charge
n'échappèrent point à ce courant qui , il faut bien le dire,
entraînait même les meilleurs esprits. Ainsi, en Tannée 1722,
ils emploient une somme de i,5oo livres à faire dorer « le
rétable et le grand autel (i) d.
En vertu d'une délibération datée du i3 mars 1769, ils
consacrent une somme de 1,060 livres « à Tachât de deux
tableaux à cadre doré, »
Ce n'était encore que le commencement ; voici venir le
badigeonnage. « Par acte du i3 mars 1773, il a été fait
marché en conséquence d'une délibération du bureau de la
fabrique dudit jour i3 mars avec deux Italiens pour blanchir
Véglise en entier, moyennant la somme de 700 livres. »
On était trop bien en veine; c'eût été dommage de s^arrêter
en si beau chemin. En conséquence, c après la perfection de
cet ouvrage , Téglise étant blanchie, messieurs les fabriciens
ont fait mettre en couleur les bancs d'œuvre et fabriquer la
chaire et les grandes portes. Cette réparation a été faite en
exécution de la délibération du 3i mars 1773 et a coûté la
somme de cent vingt livres. » 120 livres la chaire et les
grandes portes! le prix est bien modique, mais aussi ces
objets sont loin, Tun et l'autre, d'être des chefs-d'œuvre ; ils
sont dignes de Tépoque.
Hélas! nous ne sommes pas au bout : voici où le vanda-
lisme atteint des proportions lamentables et désastreuses :
(1} On sait qu^au moyen-âge, dans beaucoup d^églises cathédrales
'autel était recouvert d'un ciborium soutenu par des colonnes et que
ntervalle des colonnes était garni par des rideaux de soie qu'on
irait à certain moment de la messe. Il faut croire qu'il y avait
quelque chose d'analogue dans l'église collégiale de Clamecy jusqu'au
siècle dernier, car dans le a Registre de Fabrique », au chapitre des
dépenses, il est dit qu'en l'année 1724 on a dépensé 5oo livres pour
a le ciel de l'autel, les rideaux et les tringles ».
— 55 — .
€ Par une autre délibération du i6 may 1773 ( on le voit,
les délibérations se succèdent coup sur coup), lesdits sieurs
fabriciens ont été autorisés à supprimer le jubé, à découvrir
le chœur en coupant les stales du côté de la nef à hauteur
d'appui et à fermer le chœur par une grille de fer, confor-
mément au plan qui a été fait et agréé par délibération du
5 septembre de la même année. En conséquence de laquelle
le prix en a été arréié avec le sieur Villard , serrurier, à la
somme de 1,024 livres. *
Il semble inutile de pousser plus loin ce réquisitoire;
aussi bien, ce que nous venons d^en dire suffit pour donner
un aperçu de Tœuvre de démolition qui s'accomplissait alors
dans les églises, par suite de Penvahissement du mauvai<!
goût. ^
Nous avons pensé qu'il serait bon de faire connaître aussi,
diaprés le même registre , le Cérémonial contenant l'ordre
des processions générales de Véglise Saint - Martin de
Clamecy :
c II n'est point question icy des cérémonies ecclésiastiques
qui appartiennent à messieurs du chapitre, mais seulement
de celles de police, tant dans l'intérieur de l'église que dehors.
» Les cérémonies du dedans de Téglise appartiennent aux
sieurs fabriciens.
9 Celles du dehors regardent les sieurs échevins.
» Et comme ces trois corps donnent également concours à
la gloire de Dieu et à la majesté de son service dans ces
occasions solennelles, il sera bon de se ressouvenir icy de
l'ordre et police que l'on y doit faire observer, conformément
à Pusage de l'église et de ce lieu.
» Pour mieux s^expliquer, la procession solennelle du
Saint*Sacrement à la Feste-Dieu servira d^exemple.
» I® Les sieurs échevins, comme surveillants de la police,
doivent donner ordre que les rues ou places publiques oh
passe la procession soient nettoyées.
-56-
» 2^ Faire ordonner que le devant des maisons et autres
bâtiments où passe le Saint-Sacrement soient tendus ou de
tapisseries ou de toiles honnestes, suivant les facultés des
particuliers , ou de ramages verts pour les maisons de deuil,
suivant l'usage de ce lieu.
» 3» Obligeront ceux de la religion prétendue réformée de
faire nettoyer devant leurs portes. ,
» (Déclaration du roy du i**" février 1669 et règlement
touchant les choses qui doivent être observées par ceux de id
religion prétendue réformée.)
» Seront tenus ceux de la religion prétendue réformée de
soufifrir qu^il soit tendu, par l'autorité des officiers, au*devant
de leurs maisons et autres lieux à eux appartenans. Cest-à-
dire que le précédent article est de devoir pour les religion-
naires, et celui-cy de tolérance et que Ton doit tendre pour
eux sans les y forcer. (La même déclaration de 1669.)
» 4^ Si ceux de la religion prétendue réformée se trouvent
aux rues, boutiques, fenestres ou autres lieux oti passe laditte
procession , seront tenus de se mettre en estât de respect en
ostant, pour les hommes, leurs chapeaux , ou obligés de se
retirer : deffenses à toutes personnes de les en empêcher. (La
même déclaration de 1669, art. 23.)
» 5® Lesquels jours de festes et processions publiques
jesdits religionnaires seront tenus d'observer. (Edit de Nantes,
la même déclaration.)
» Les sieurs échevins doivent soigner à la sécurité publique,
à ce qu^aucun tumulte , sédition ny scandale arrive pendant
lesdittes solennités, user à cet effet des précautions nécessaires ;
» 7* On fait ordinairement en cette ville quatre reposoirs
pour le Saint-Sacrement : le premier, vis-à-vis la tour du
Châtelot (i) ; le second, en Téglise Notre-Dame-de-Bethléem ;
(i) D*après Née de La Rochelle, on donnait ce nom à une maison,
avec colombier, située près du grenier à sel. Cette maison appartient
aujourd'hui à M** Rigolot d'Asnois; elle était antérieurement la
propriété de la famille Bezou.
-57-
le troisième, à la croix de la place du Marché; le quatrième,
aux RR. PP. Récollets.
» 8<* Les différens pour le dais ne s'estant jamais produits
dans cette ville, grâce à Dieu, il n'est pas besoin de s'y
étendre en cet article, suffit de lire le chapitre xiii du
Concile de Trente, sess. XXV.
» 9® La veille de la feste , les sieurs échevins invitent les
officiers de chacune juridiction, suivant leur rang, et des
notables de la ville de difTérens corps pour porter le dais dans
les cbangemens qui se font aux reposoirs du Saint-Sacre-
ment : ensemble les sieurs fabriciens.
» I o^ On sçait que les places les plus honorables sont celles
des derrières du dais.
» 1 1** On sçait le rang des sieurs fabriciens, qui suit immé-
diatement dans toutes les cérémonies celuy des sieurs
échevins, et qu'à leur égard, après le marguillier d'honneur,
ils marchent suivant le droit d^ancienneté dans la charge, à
moins qu'ils n^ayent d'autres dignités qui les élèvent au-delà
du fabricien.
» 12" Néanmoins, il faut remarquer dans la solennité de
la feste du Saint-Sacrement que, soit les sieurs échevins^ soit
les sieurs fab/kiens, quelques qualité et dignité qu'ils ayent.
Us ne portent en ce rencontre le dais que les derniers, depuis
les RR. PP. Récollets, dernier reposoir, jusqu'à l'église Saint-
Martin. Par la règle que quiconque fait honneur à inviter
chez soy même un inférieur doit céder la place honorable à
cet inférieur, à moins qu'il n'y eût entre eux une trop grande
différence qui n'est point présumée en cette solennité, et c'est
ce que représentent les sieurs échevins et fabriciens, les uns
comme les pères et tuteurs de la ville, les autres comme les
. pères et tuteurs de Péglise.
» i3^ Ceci présupposé, la police intérieure de l'église, qui
regarde les sieurs fabriciens, est de faire observer le rang des
bâtonniers , des confréries et autres de cette nature , sans
tumulte ny confusion et avec toute la modestie requise,
suivant l'ancien usage, ainsi qu'il en suit :
T. m , 3* série. 8
- 58-
» 14^ Après la petite bannière, qui sort la première de
Féglise avec les enfants et leur précepteur, suit la grande
bannière, ensuite les bâtons des confréries, accompagnés de
leurs torches, à la teste desquels marche le crieur des
confréries, vestu de l'aube et la tunique, ainsy que les
porte-bannières, avec son bâton de crieur, et les bâtonniers
vestus de l'aube et de la cbappe sortent de laditte église , et
suivent de cette sorte :
» Premièrement , le bâtonnier de la chapelle de VEcce^
Homo;
» Le bâtonnier de Saint-Jacques que les pèlerins accom-
pagnent ;
» Le bâtonnier de Saint-Nicolas,
» Le bâtonnier de Sainte- Anne,
» Le bâtonnier de Saint-Vincent,
> Le bâtonnier de Saint-Hubert ,
s Le bâtonnier de Saint-Michel ,
» Le bâtonnier de Saint-Eloy,
» Le bâtonnier de Saint-Biaise,
» Le bâtonnier de Saint-Honoré,
1 Le bâtonnier de Saint-Crespin ,
> Le bâtonnier de Saint-Jehan,
» Le bâtonnier de Saint-Louys ,
» Le bâtonnier de Saint-Suaire,
1 Le bâtonnier de la Sainte-Trinité,
» Le bâtonnier de Saint-Martin ,
» Douze particuliers avec un cierge à la main , en Thon-
neur des douze apôtres ;
» Les RR. PP. Récollets,
1 Les porteurs de reliques du chef saint Martin ,
1 Enfin la croix et le clergé.
» Tous clercs tant réguliers que séculiers , religieux ,
mesme les moines et hermites, ou autres qui pourraient se
dire exempts, sont obligés de se trouver aux processions
— 59 —
publiques après y avoir été invités , à Teiception de ceux qui
vivent en perpétuelle clôture. (Concile de Trente, sess. XXV,
cbap. xiii.j
% Recueilly par nous, Léger Faulquier, Guillaume
Davault et Nicolas Cousté , fabriciens en laditte église , en
Tannée 1679.
\ Signé: Faulquier, G. Davault, Cousté. »
§
CLOCHES.
Au siècle dernier, c'est-à-dire avant la Révolution, comme
aujourd'hui, Téglise de Saint-Martin était pourvue d'une
belle sonnerie.
Le 18 novembre 1778 eut lieu, par M« Henry Limanton,
chantre-curé, la bénédiction de deux plus grosses cloches.
La première, du poids de cinq milliers (de livres) 2,5oo kilos,
eut pour parrain M^ Louis-Jules- Barbon Mazarini-Mancini,
duc du Nivernais, etc., et pour marraine dame Hélène
Phélipaux de Pontchartrin , duchesse du Nivernais, son
épouse. Elle fut baptisée du nom de Martine, qui était celui
qu'elle portait auparavant , car elle existait déjà et fut seule-
ment refondue. Elle Pavait été pour la première fois en
1676 , et était le fruit des aumônes des habitants. M* Loup
Millelot, notaire royal , était alors premier échevin et était
inscrit en cette qualité sur ladite cloche. Lors de la refonte
de celle-ci , son poids fut augmenté de 100 kilos. La seconde
cloche, du poids de 3,944 livres, eut pour parrain messire
Claude-François marquis de Chabannes, de la branche du
Verger, et pour marraine dame Marie-Henriette de Four-
vières, de Cuncy-sur- Yonne, son épouse, demeurant Pun et
Pautre dans la ville de Clamecy. Cette cloche, comme la
précédente, fut également refondue; elle avait déjà, en cette
année 1778, au témoignage du procès-verbal de la béné-
— 6o —
diction , rapporté dans le € Registre de Fabrique » , deux
cent quatre-vingt-quatre ans d'existence^ ce qui en fixe
répoque à Tannée 1494, c'est-à-dire au temps de la
construction de la tour. Cette cloche était en très-bon état et
avait un beau timbre. Elle fut refondue uniquement c pour
être mise d^accord au ton plein avec la première ». Elle fut
baptisée du nom de Marie-Henriette ; elle s^appelait aupa-
ravant simplement Marie.
Mais ce travail ne réussit pas : les deux cloches ne se
trouvaient pas d'accord; c'est pourquoi les fondeurs (i)
furent contraints. Tannée suivante , de procéder, à leurs
frais , à une nouvelle refonte. Les fabriciens rédacteurs du
c Registre de Fabrique » nous apprennent quel fut, en
dernier lieu , le poids de ces deux cloches et à combien
s'élevèrent les frais de ce travail. Nous ne saurions mieux
faire que de reproduire intégralement le passage où ces
curieux détails sont consignés :
« Le 27 octobre 1780, procès-verbal a été fait de la pesée
des deux cloches et porté au registre des délibérations.
Martine, la principale cloche, est du poids de 4,756 livres ,
et Marie, la seconde, du poids de 4,218 livres.
» Le 28 dudit mois, elles ont été baptisées et bénites de
nouveau, les parrains et marraines, les mêmes que pour la
première fois, et Icsdittcs cloches ont été sonnées pour
V Angélus àMsoiv, leSi octobre 1780. Les sieurs marguilliers
François Née Decharmois, avocat au Parlement et pro-
cureur fiscal; Edme Millelot-Deslimes , notaire royal et
procureur, et Christophe Coquille, marchand tanneur, y
sont inscrits avec M. Limanton, prêtre-curé.
1 A l'assemblée du i" novembre, audit an, lesdittes
cloches ont été reçues et lesdits sieurs marguilliers autorisés
à payer lesdits maistres fondeurs.
» Les frais et faux frais payés par la fabrique, pour la
(i) Ils s'appelaient Cochois et Barrât.
— 6i —
-foûtadesdittes cloches^ montent à 4,022 livres^ et il a été fait
présent à laditte fabrique, par M^ le duc et M°** la duchesse
du Nivernais, de la somme de 480 livres, et par le marquis
et M">* la marquise de Chabannes de la somme de 72 livres
et de quatre aulnes de damas blanc dont il a été fait un orne-
ment en décembre 1782.
9 Lesdittes sommes données déduites, il en coûte à la
fabrique 3,470 livres. »
S
Nous terminerons ce travail par V Inventaire des reliques
et de l'argenterie de la fabrique Saint-Martin de Clamecy:
Nous apellons vulgairement le cabinet de la fabrique le
Trésor, suivant Tusage de la primitive Eglise, comme
Tempereur Justinien nous Taprend au § Sin autem L. cum
apiid veteres. Cod, de bonis auctoritate jud. posses,, qui
apelle tel cabinet Cimeliarchium, et les fabriciens nobilissimos
cimeliarchas sanctœ Ecclesiœ in qua pecunîœ deponuntur,
ce que les Hébreux appelloient Corbonan. Aussi les joyaux
et trésors de Téglise sont nommez par les anciens décrets
Cimelia. Néanmoins, par le présent volume, on peut con-
noître que les trésors de cette église sont peu de choses, à
Texception des reliques des saincts dont on ne peut pas
affirmer le prix, encore sont elles en cette église fort rares
ou pour mieux s'expliquer en petit nombre.
On sçait avec quel respect on doit les aprocher et à tout ce
qui a servy au mystère de noire rédemption, que leur depost
ne peut être trop honorable. C'est pourquoy, quand on est
obligé de les porter à l'œuvre ou remettre au trésor faute
d'un ecclésiastique, on doit les saluer de cette oraison que
TEglise nous enseigne en ces rencontres :
Propitiare nobis qucesumus Domine, Jamulis tuis per
sanctorum tuorum quorum reliquiœ in presenti requiescunt
Ecclesia, et omnium sanctorum mérita gloriosa , ut eorum.
— 62 —
pia intercessione ab omnibus semper protegamur adversis.
Per...
On a desja cy devant fait remarquer au rituel de la
fabrique (i), et l'on ne peut trop répéter pour le devoir du
fabrîcien qu'il est très-important de ne point recevoir de
reliques sans procès-verbaux authentiques, et, s'il y en a, de
les bien conserver et de les faire renouveller en la visite de
messes les évesques, |ou au moins faire inventaire de la
tradition constante, indubitable, surtout quand elle (est)
fresche et de la mémoire de nos pères, comme il s'agît icy, en
attendant que les supérieurs y ayent pourveu, afin de la
conserver entière. (Concile de Trente, sess. XXV, de Invo^
catione et reliquiis.)
11 est bon encore de remarquer que les sieurs fabriciens ne
doivent point de leur chef visiter, toucher ni examiner les
reliques. Ils doivent apeller le sieur curé pour, avec luy, en
estre fait estât, qui doit astre renouvelle de temps en temps,
afin de conserver tousiours la tradition, et éviter l«s accidens
qui peuvent arriver tant de subreption qu'autrement.
Il faut néanmoins aussy remarquer qu'il n'est point
permis ny audit sieur curé ny aux sieurs fabriciens de
décacheter les sceaux des seigneurs évesques , si aucuns sont
aposez, sans la permission des supérieurs. II suffira d'en faire
mention.
Avec ce respect et ces précautions, nous, Léger Faulquîer,
advocat en la cour, procureur du roy en l'élection de
Clamecy; Guillaume Davaultet Nicolas Cousté, bourgeois,
fabriciens de cette église de Saint-Martin de Clamecy, pour
marquer notre diligence et nos soins aurions fait le présent
inventaire tant des saintes reliques que reliquaires et argen-
teries et principales pièces seulement dignes d'estre inven-
toriées en ce lieu, ce vingt-huitîesme jour de may de l'année
mil six cent soixante et dix-neuf, en présence de vénérable et
(i) Chapitre intitulé : Rituel de la Fabrique, dans le présent volume.
-- 63 —
discrette perionne Jean de Ulsle, prestre^ chantre, chanoine
et digne curé de laditte église, ainsy qu'il en suit :
Premièrement, le grand reliquaire vulgairement apellé le
chef saint Martin , qui est le buste d'un évesque suporté
par deux anges dont les draperies , vestemens et ailes sont
d'argent, les carnositez et le surplus estant d'autre matière
avec le soubastement et la capsule ou boette au-dessus aussy
d^argent, le pied destail (piédestal) de cuivre doré. Dans
cette capsule il y a de la mantibule et d'un costé de saint
Martin (i).
(i) II est intéressant de rapprocher de ce texte *les deux extraits
suivants du registre de procès-verbaux de la visite épiscopale de
Mgr Champion de Cicé, faite k Clamecy en 1774, relatifs à Texamen
et à la vérification des reliques : •
« Desquels reliquaires qui sont touts d'argent, le premier, qui est
en forme de chapelle surmontée d'une croix, contient un ossement
avec cette inscription : de la coste saint Martin, et dans la croix est
placée une portion de la vray croix donnée en quinze cent quarante-
neuf à la fabrique par mossieur de Beaujeu, évéque de Bethéléem,
suivant l'authentique en parchemin que nous y avons trouvé signé de
luy et scellé du sceau de ses armes
» Et le troisième et dernier reliquaire, représentant le chef d'un saint
évêque porté par des anges sur un piédestalle, contient dans le buste
une petite boête où nous avons trouvé envelopé dans une vieille
étoffe de soye un morceau de mâchoire inférieure avec un linge et
au-dessus de la boête une inscription d'écriture du commencement du
seizième siècle portant ces mots : de la handibulle de saint martin
DONNÉE PAR MONSIEUR DE BÉTHLéEM A LA FABRICE DE GÉANT, et danS le
chef dit de saint Martin avons trouvé un osseme;it que le sicur
Cbauvot, chirurgien, pour ce appelle, nous a dit être lecalcanéum ou
Tos du talon que nous avons trouvé attaché avec un ruban de soye
verte et enveloppé de deux morceaux de taffetas, et nous a dit ledit
sieur curé que lesdites reliques sont exposées à la vénération des
fidelles, sur le banc de l'œuvre, les jours de grandes fêtes et pendant
la quinzaine de Pftque. »
Voici également une note du Livre de la Fabrique qui complète
l'histoire du reliquaire de Saint-Martin :
■ Cejourd'huy, vingt-cinq juin mil sept cent soixante- neuf, a été
fait présent à cette fsibrique par madame Hérault, de cette ville, une
-64-
L'histoire nous apprend que dans les guerres de la religion
la fureur des hérétiques a fait brûler le corps de ce grand"
sainct archevesque de Tours ; mais on sçait aussy que pour
la consolation des fidelles Dieu permet ordinairement que
quelques reliques ou portions des corps saincts soient
distribuées à des personnes pieuses et puissantes qui^ par ce
moyen , en font échaper l'entière abolition. Cest ce qui est
arrivé à Tégard des présentes reliques qui, ayant esté
conservées dans la maison de Beaujeu, dont la noblesse et
la piété est assez connue en France, seraient enfin parvenues
en ce trésor qui en aurait esté enrîchy par les libéralités de
révérend Père en Dieu messire Philbert de BeaujeiT, évesque
de Betlehem en cette ville. Estant important d'en rénouveller
et confirmer icy la très-certaine tradition de nos pères et des
escrits par l'extrait tiré de Tancien livre noir de la fabrique
en ces termes :
Le dimanche avant la feste monsieur saint Martin ^
neufiesme jour de novembre Pan mil cinq cent trente-neuf,
révérend Père en 'Dieu messire Philbert de Beaujeu,
évesque de Betlehem, meu de dévotion à l'église mons'
sainct Martin de Clamecy, bailla à la fabrique d'icelle
la mandibule du glorieux amy de Dieu monseigneur saint
Martin. Et le matin dudit jour fut une procession générale
comme on a accoutumé , pour aller quérir ledit reliquaire.
Ce fait, messieurs les vénérables du chapitre, avec tout le
peuple en grand nombre partirent de ladite église Saint*
Martin en grande et sincère dévotion avec les chappes , et
fut porté tout le luminaire de laditte église tant torches que
cierges tellement qu'il pouvoit avoir six-vingt personnes
portans torches et cierges; et furent lesdits sieurs du chapitre
et tout le peuple receuz honorablement par ledit révérend
croix à diamens feux , montée en argeant, pour estre attachée au chef
saint Martin , au lieu et place d'une autre en or, qui fust volée le
premier janvier 1768, sur le banc des pardons, actuellement appelle
le banc d'œuvre. »
-65 -
en son église dudit Betlehem, où fut chanté belles et
louables cantiques en l'honneur de Dieu , de la vierge Marie
et de son amy monseigneur sainct Martin. Après ce, ledit
révérend fit don dudit reliquaire et mandibule à la fabrice
de Clamecy et aux habitans dUcelle. Et ce fait, ladite
processsion fut parachevée, et fut ledit relique porté par
ledit révérend le longd^icelle jusqu'à la croix du marché ,
auquel lieu fut faitte une pause. Et lors ledit révérend bailla
au curé dudit Qamecy, messire Gérard de Piles, ledit
relique pour icelle porter le reste de laditte procession
jusqu'en laditte église qui fut porté sur le grand autel dudit
Saina-Martin ; et chanta ledit révérend la grande messe en
grande dévotion avec tout le peuple, et laditte messe para-
chevée lesdits sieurs du chapitre par force vouloient avoir
ledit pour leur proufHt particulier, mais les habitans et
procureurs de laditte fabrique à qui il avoit esté donné pour
le bien, utilité et entretenement de laditte église , résistèrent
contre eax ; tellement que ledit reliquaire fut porté par ledit
révérend sur le coffre des pardons de laditte fabrice; et
d'icdles au trésor et cabinet d^icelle avec tous les autres
reliquaires et sanctuaires d'icelle fabrique , que auparavant
lesdits sieurs du chapitre avaient eu en leur gouvernement,
et depuis en Tan mil cinq cent ... (i) après en suivant. Les
procureurs d^icelle fabrice et habitans dudit Clamecy ayant
leur dévotion audit sainct Martin, leur bon pasteur et
patron, firent faire à Paris un chef dudit sainct Martin avec
deux anges , le tout d'argent et le dessous dudit chef où est
laditte mandibule.
2. Plus une croix d'or avec le crucifix de mesme, à chaque
croison de laquelle il y a la représentation des évangélistes
avec leurs emblesmes dans un cercle , au milieu de laquelle
il y a quatre perles fines et qui s'ouvre ; au dos est escrit :
Cest de la vraye croix. Laquelle est suspendue au col
(i) Il y a ici un espace en blanc sur le registre.
T. m, 3* série. g
— 66 —
dudit chef sainct Martin d'une mesme chaisne de leton ou
de cuivre doré (i).
3. Item, un reliquaire en forme de chapelle qui aservy
autrefois pour porter le Sainct*Sacrement à la Feste-Dieu , y
mettant au-dessus du clocher un soleil où Thostie estoit
renfermée, laquelle chapelle est d^argent doré , son soubas-
tement et son entablement au-dessus estant de cuivre doréi.
Sur lequel reliquaire il est à remarquer deux choses : Tune
que dans le corps de laditte chapelle il y a un certificat
signé et scellé de messire Philbert de Beaujeu, évesque
de Betlehem susdit, datte du dimanche 5 mars 1549,
auquel on chante Misericordia Domini. Estant fabriciens
W Régnant Aubert , licencié ès-loix ; Pierre Cousté Taisné
et Léonard Clert , pour un morceau de fust de la vraye croix
mis en traverse au-dessus dudit reliquaire. L'autre certificat
de messieurs du chapitre d'Auxerre de Tan 1410 signé F.
Wiandus, touchant une pièce de* trois doigts de longueur et
deux de largeur et non ultra du manteau sainct Martin. La
seconde remarque est qu^au-dessus dudit clocher, où 1 on
mettoit un soleil comme il a esté dit, il y a une croix
d'argent doré moyennement grande et qui s'ente sur ledit
clocher, en laquelle est la traverse de laditte vraye croix cy
déclarée et un os du doigt de sainct Martin dans Tenchâssure
mentionné dans Pacte de messire Tévesque de Betlehem datte
du 10 décembre i633 — et autres reliques qui paroissent
par les cristaux des croisons.
(z) Le 10 août 1720, messire Charles de Cailus, évêque d'Auxerre ,
étant venu en cette ville pour faire la clôture d'une mission, vint au
trésor de la fabrique pour en visitter les reliques affin de dresser
procez-verbal de l'état où il les trouveroit. Après un examen exact,
il ne s'y trouva d'authentique qu'à celles qui concernent la vraye
croix et à celles de saint Martin , les autres furent trouvez dénuées
de procez-verbaux et autres actes qui en pussent garentir la vérité ;
mais comme elles ont été de temps immémorial exposées à la véné-
ration des fidèles, le prélat ne crut point devoir les en priver et
consentit sur nos remontrances qu'elles continuassent d'être exposées
les jours de fêtes et autres solennitez.
-67-
4- Pltis une boette de bois doré et argenté en six comparti*
mens assez confus. Dans le premier desquels il y a un billet
et du gravier d'un des cailloux dont on dit que sainct
Estienae fut lapidé et autres sans nom. Au deuxième des
vestemens de Notre-Dame, autre billet qui dit de Tépaule
saîna Bonnaventure , avec une attestation signée et scellée.
Dans le troisième, de lapide ubi jacebat B. Maria
Magdalena, de capite sanctœ Barbarœ, reliquiœ SS. JuS'-
tini et Justiniani, B. Prisai, Firmini et Secundi. Dans le
quatrième» de habitu et capillis sancti Francisci^ de habitu
capitis et vélo sanctœ Clarœ Virginis. Dans le cinquième,
des ossements divers sans nom. Dans le sixième, de sanctis
Justini (sic) et Justiniano, de tumulo sancto et de apostolis^
SS» Jacobi maj. et min. de sancto Marco et aliis sanctis, de
lapide montis Calvarii ubi Christus fuit crucifixus , de
columna in qua fuit flagellatus et cœtera anonima,
5. Plus un reliquaire dit des saincts martyrs, portatif aux
testes et processions de Vœu de la Ville, marquées au kalen-
drier cy-devant aux diverses façades duquel sont les images
de Notre-Dame et de saint Laurent, de sainct Etienne, de
sainct Sébastien ; au pinacle, un crucifix avec les images de
Notre-Dame et sainct Jean Tévangéliste, le tout d'argent.
Dans la capsule duquel sont epclos les billets et reliques qui
suivent : De sancta Cruce , de ossibus sancti Joannis
Baptistof, SS. Stephani, Georgii Adriani, de cruce sancti
Andrece, de sancto Ursinaro episcopo, de sancta Barbara
Virgine et martyre, de sancta Jawolberta, de terra sepuU
chri sanctœ Elisabeth, de mappa sanctœ Waldefredis et
soHctorum hœbreorum martyrum,
6. Item, un (sic) image d'argent représentant sainct Martin,
èvesque, avec son soubastement de cuivre doré, suporté de
six petits lyons aussy de cuivre, au col duquel est pendue
une croix de Jayet argentée par les bouts.
7. Item, une croix feuilletée d^argent doré à ouvrages anti-
ques, au milieu de laquelle est enchâssé de la vraie croix dont
......■■•■•^"
— 68 —
le pied est à Tantique et de cuivre qui a esté doré avec des
graveures d'armoiries, laquelle sert aux solennitez des festes
et services oU il y a diacre et sous-diacre.
8 . Item, le livre des évangiles qui sert aux mesmes solennitez
dont la couverture est de bois couvert de lames et f ueilles
{sic) d^argent oti d'un costé est représenté la descente de la
croix en bosse , de Pautre costé un Sauveur sur un trosne
cantonné des emblesmes des quatre évangélistes. Le tout
rehaussé d'ouvrages à l'antique et de dorures.
9. Item, une moyenne croix de cuivre doré dont le pied est
d'argent , qui sert aux processions ordinaires et avec laquelle
l'officiant donne la bénédiction au peuple.
10. Item^ un petit reliquaire de cuivre doré à fenetrages de
verre fait en forme de tourelle.
1 1 . Item, une image de Notre-Dame, laditte image de bois
argenté.
12. Item, une grande croix à feuilles ou lames d'argent
florensé et ouvragée à Tantique, qui sort ordinairement aux
processions.
i3. Item, une autre grande croix d'argent qui sert aussy
pour les processions et festes solennelles^ avec le bâton couvert
d'argent acheptée des deniers de la fabrique en 1675 pour la
somme de 333 livres 16 deniers avec l'estuy, comme il se
voit au compte de laditte année.
14. Item, deux grands chandeliers d^argent qui servent
ordinairement au grand autel acquis par laditte fabrique
avec un encensoir d'argent, comme il est cotté par rarticlc
suivant.
15. Item, un encensoir d^argent acquis avec les susdits
chandeliers en 1606 pour la somme de 3 3o livres» comme
il apert par l'acte receu Delavau , notaire , le 24 décembre
audit an 1606, inséré au volume brun.
16. Item, deux autres chandeliers d^argent qui servent
ordinairement à Tœuvre acquis par la fabrique en Tannée
— 69 —
i€63, de la pesanteur de sept marcs un once un gros , pour
le prix de 236 livres, la boëte comprise, ainsy qu'il apert par
le livre-journal de laditte année et quittance de Torfèvre
estant èfr»papiers de la fabrique.
17. Item, un soleil de vermeil doré pour exposer et porter
le Sainct-Sacrement aux festes et processions solennelles avec
ses deux christaux , ledit soleil fait à Clamecy pesant. . . ( i } et
acquis des deniers de laditte fabrique en Tannée 1670,
suivant le traité et acquit receu Frotier, notaire, le (2)...
18. Item , le bâton pastoral que porte le sieur chantre aux
festes solennelles et cérémonies dont le sommet est la repré-
sentation de rimage de sainct Martin estant à cheval avec
son pied d'estal et la vis d'argent , le surplus estant de cuivre
rouge et autre métal.
19. Item, un grand calice de vermeil doré d'un ouvrage
ancien et très-exquis dont la coupe , la pomme et le pied fort
massif se joignent et se montent par une seule vis artificielle,
autour de la pomme duquel sont représentez les apôtres,
aussy d'argent doré, dans leurs niches, enrichis de pierreries
avec la patène de mesme matière , sur le dos de laquelle est
un crucifix émaillé au-dessous, et de l'autre part un nom de
Jésus aussy émaillé.
20. Item , trois autres calices avec leurs patènes d'argent
dont il y a un grand et un moyen renouveliez sans autres
marques que le poinçon , le troisiesme estant plus bas , dont
le pied a des rayons de vermeil doré avec un crucifix , la
pomme ornée de façades d'apôtres et au-dessous des fleurs
de lys.
2 1 . Item , deux ciboires d'argent, l'un assez grand , l'autre
médiocre, pour porter le viatique.
22. Item, une petite boette d'argent destinée aussy à porter
le viatique.
(i) Espace laissé en blanc au registre.
(2) Idem,
— 70 —
23. Item, une boette ou vase où les sainctes huiles sont
renfermées avec leurs brochettes, pour faire les onctions, le
tout d^argent.
24. Item, deux autres petites boettes d'argent pour serrer le
reste des onctions des sainctes huiles.
25. Item, une coquille d'argent pour baptiser.
26. Item, un bassin d'argent cizelé avec les burettes de
mesme, sur lequel bassin est le nom des sieurs fabriciens
qui Tout acquis en Tannée 1645.
27. Item y une grande lampe de cuivre très-ancienne faitte
en 10 1 3, comme il apert au fond du bassin, avec les brandies
de mesme a mettre six cierges suspendue en la nef de Téglise.
28. Item, un sceau de cuivre rouge pour faire l'eaC^ bénite.
29. Item, une croix de cuivre avec un pied de mesme pour
la soutenir, qui servoit autrefois aux processions.
30. Item, un encensoir de cuivre pour servir aux jours
ordinaires.
Toutes les autres choses servant à Téglise, comme vases,
chandeliers de cuivre, tableaux, paremens d'autels, napes,
linges , chapes , chasubles , etc., estant d^un usage trop
fréquent et commun et trop sujettes au changement , ne
peuvent commodément icy s'inventorier, dépendant du soin,
de la diligence et de la bonne foy des sieurs fabriciens en
exercice, qui doivent en leur particulier en faire un inventaire
exact, sans qu^ils puissent s^en charger autrement. Le
surplus, comme cloches, tabernacle, orgues et autres, qui sont
comme de nature immobile, et enfin tout ce qui sert à Téglise^
appartenant à la fabrique, comme choses aquises de ses
deniers, ainsy qu'il se voit par les comptes, livres, journaux
et marchez de la fabrique.
Dieu veuille augmenter le présent inventaire et le zèle de
tous les fidelles pour la plus grande majesté de son service et
de sa gloire ?
Ainsy soit-il.
- 7î -
Dont et de tout ce que dessus ainsy fait et inventorié en la
présence de mondit sieur de L'Isle, chantre et curé, quia
visité lesdittes reliques et actes probatifs y énoncez , nous
Léger Faulquier, Guillaume Davault et Nicolas Cousté,
fabriclens susdits, nous sommes chargez lesdits jour vingt-
huit may et an mil six cent soixante et dix-neuf.
Signé: De L'Isle, chantre-curé de Clamecy.
L. Faulquier^ g. Davault, Cousté.
•
Et le sixiesme jour du mois de janvier mil six cent quatre-
vingt, nous François Faulquier, advocat en la cour, advocat
fiscal en la châtelnie (i) et procureur du roy au grenier à sel
de Clamecy, nommé fabricien par acte d'assemblée du premier
du présent mois et an au lieu et place dudit sieur Léger
Faulquier, et nous Guillaume Davault et Nicolas Cousté,
fabriciens susdits restans en charge, avons déchargé ledit sieur
Léger Faulquier du contenu au présent inventaire des
reliques, argenteries y dessus spécifiez et nous nous en
sommes chargez. Fait les an et jour que dessus.
Signé : Faulquier, G. Davault, Cousté.
Plus deux chandeliers d'argent (2) ouvragez au cizeau,
dont le pied est en tiers-point acheptez à Paris au mois de
décembre de Tannée mil six cent quatre vingtz; plus une
navette d'argent pour mettre Tencens et accompagner
l'encenssoir, et qui ont cousté avec laditte navette la somme
de trois cent quarante-une livres, payez des deniers de la
fabrique, suivant qu'il se justifie sur le livre-journal de
laditte fabrique de laditte année 1680 et autres suivantes.
(r) ChftteUenie de Clamecy.
(2) Ces objets ont été achetés plus tard et consignés au registre de la
fabrique à la suite de Tinventaire ci-dessus.
par une quittance signée Truffot, du i8 avril i68i# au
folio 87. Et lesquels deux chandeliers servent à présent à
mettre sur l'œuvre pour accompagner le chef saint Martin ^
la croix d^argent les dimanches.
Plus une croix dVrgent dont le pied est en tiers-poîAl
cizelé et la croix unie avec le crucifix attaché à laditte croix,
avec trois fleurons aux trois boutz, qui a esté acheptée dea
deniers de laditte fabrique par monsieur Delasaleine, juge de
Clamecy, en l'année mil six cent quatre*vingt-trois, comme
l'un des sieurs fabriciens^ et a cousté deux cent quatre livres»
ainsy qu'il est escrit sur le livre-journal de laditte fabrique,
commencé le premier janvier mil six cent quatre-vingt-trois,
au folio.r. 9... Et laquelle croix sert à présent à exposer sur
l'œuvre les dimanches et festes non solennelles accompagnée
des susdits chandeliers.
Le quinze novembre 1684^ messire Christophe Frotier et
honorable homme Pierre Debèze laisné, fabriciens en charge^
de Tadvis de vénérable Jean Delisle, chantre^ chanoine et
curé de laditte église^ ont faict marché avec Nicolas Gau-
douard, orphèvre, demeurant à Clamecy^ pour faire à neuf
un ciboire pour laditte église au lieu de celuy qui y estait
trop petit et rompu, et le faire de plus grande contenance,
moyennant pour sa façon vingt-quatre livres, et luy sera
payé le pardessus de largeur qu'il fournira, à raison de 3 livres
1 2 deniers Ponce au-delà de ce que pèze ledit ciboire, qui
sont treize onces et deux gros.
Le trente décembre audit an 1684, ledit Nicolas Gou«
douard, orphèvre, a rapporté ledit nouveau ciboire par luy
fait veu et visité par ledit siëur Delisle, curé, et après
avoir esté pezé, s^est trouvé qu'il pèze seize onces moins deux
gros ayant le dedans de la couppe dorée et une petite croix
sur le couvercle y bien et convenablement faict avec l'escrit
sur le pied qu^il appartient à cette église et a esté emporté
par ledit sieur Delisle, curé, pour servir selon sa destination,
en sorte que l'argent fourny par l'orphèvre et sa façon couste
à cette fabrique quarante livres.
-73-
Plas ( I ) messieurs Vezinier, Renard et Gandouard ont
it faire une lampe d^argent qui se met dans le cœur (sic).
Elle a été faite en 1690 par le nomé Nicolas Gandouard ,
orphèvre, demeurant en cette ville; elle coûte 800 livres.
Cest un bel ouvrage.
Plus messieurs Despatis^ Rossignol et Pierre Gouré ,
fiftbrkiens^ ont achepté en 17 17 quatre chandeliers d^argent
que l'on met sur le grand autel avec deux autres qui étaient
dans le trésor de la fabrique. Ces quatre chandeliers ont coûté
six cent livres.
Plus messieurs Débèze, Depignolle, Berriat et Bondoux,
marguilliers, ont achepté en 1724 un bénitier avec un gou-
pillon d'argent qui ont coûté deux cent cinquante livres.
J. CHARRIER,
Vicairg de Clamecy.
FAMILLES NI VERN AISES.
Les recueils généalogiques s'arrêtent, en général, à la
seconde moitié du dix-huitième siècle. Nous voulons sim*
plement donner ici la suite de quelques-unes des principales
familles nivernaises, au point de v/Te exclusif de leurs rap-
ports avec notre province ; elles ont du reste un passé trop
connu pour qu'il y ait lieu d'en rééditer une généalogie.
DE COURVOL.
AftMES : De gueules , à une croix ancrée d'or, cantonnée en chef de
deux étoiles d'argent.
La plus ancienne famille d'origine nivernaise, qui se soit
perpétuée jusqu'à nos jours, est celle de Courvol. Les chartes
(i) Ce qui suit est postérieur et d^une autre écriture.
T. III, 3* série. 10
— 74 —
du prieuré de La Charité-sur-Loire et de Fabbaje de Bourras
mentionnent Hugues de Courvol en 1088, Hervé iiSH,
Humbert 1253^ Jean I285^ etc. La filiation suivie com-
mence à Gaucher y seigneur de Courvoi-Dampbernard ea
i3oi, frère de Jean de Courvol, un des dix chevaliers que le
comte de Nevers envoya à l'ost de Flandres en i3oz. Son
fils, Gaucher, fut seigneur d'Isenay et du Tremblay, i33o-
1354, et eut pour petite-fille Huguette, mariée au célibce
Perrinet Gressart, capitaine-général des pays de NivernoiB
et de Donziois.
Cette famille produisit plusieurs hommes d*armes des
compagnies d'ordonnance, des capitaines , un gentilhomme
de la chambre du roi, des officiers des gardes, un comman-
deur du Mont-Carmel, etc.
Ses principales alliances nivernaises sont : de Dissy,
quatorzième siècle; Le Bidaud, 1401; de La Tournelle,
1441 ; de Marry, quinzième siècle; de La Perrière, i5o3; de
Reugny, i526; de Saint- Père, i53i; de Bongars, i58o;
des Paillards, 1584; de La Bussière, 1610 et 1640; de
Chassy, 1624; de Grandrye, 1655; de Moncorps, 1669;
Bréchard, 1671 ; de Cotignon, 1691; de Champs, 1693; de
Lavenne, 1695 et 1708; Pierre de Frasnay, 1694 et 1722 ;
Save, 171 9, etc. Ses fiefs et seigneuries dans notre province
furent entre autres: Corvol - Dampbernard , Isenay, Je
Tremblay, Montaron, Poussery, Thaix, la Boue, Saint-
Gervais-les-Verneuil, Saînt-Gratien, Poilly, Saint-Michel-
en - Longue - Salle , la Guette , Bazole , Montas , Lucy,
Villiers-sur-Nohain, Faveray, les Moulins, les Aubus,
Villaines, Billy-sur-Oisy, Savigny, la Motte -Billy, le
Fey, etc. .
Lazare de Courvol, seigneur de Lucy, eut deux fils, qui
formèrent les rameaux de Lucy et de Montas : A, Louis-
François, qui suit; B, Germain-Gabriel, qui sera rap-
porté.
A. : Louis-François de Courvol, écuyer, seigneur de Lucy,
capitaine de cavalerie en 1723, épousa en 1745 Marie^ÂQD^
— 75 —
de La Toumelle, dont il eut : i^ Jean-Baptiste, seigneur de
Bîlleron, capitaine au régiment de Limousin, comparut à
l'assemblée de la noblesse à Nevers en 178g, mourut en
1823, laissant d'Anne de Vichy deux filles : Thérèse, mariée
en 1815 à Louis-Joseph de Thoury, et Charlotte qui épousa
M. du Plan; 2* Louis-Alexandre, seigneur de Lucy, capi-
taine au régiment de Limousin, chevalier de Saint-Louis,
mort en 1829, marié en 1798 à Philippine du Verne de
Presle, dont il eut : Jean-Baptiste de Courvol, officier de
cavalerie, chevalier de Saint -Louis, marié en 1824 à
Adélaïde du Pré de Saint-Maur, dont il eut : a, Alexandre-
Louis^aston, né en 1825, célibataire, seul représentant du
nom; fc, Philippine, épouse de M. de Villemenard; c, Clé-
mentine, mariée en 1847 à Francis Gasseau de Fucy.
B. : Germain-Gabriel de Courvol , écuyer, seigneur de
Montas, gentilhomme de la manche en 1745, brigadier des
gardes du corps, épousa en 1740 Monique Carpentier de
Changy, dont il eut : i» CRude-Pierre, capitaine d'infan-
terie, mort sans postérité en i838; 20 Augustin, seigneur de
Montas, chevalier de Saint-Louis, mort en i836, épousa en
T794 Anne Le Comte, dont deux fils : Frédéric, garde du
corps, mort sans alliance, et Charles-François- Augustin ,
garde du corps y puis capitaine de cuirassiers , qui de Laurc
Mathieu n'eut qu'une fille: Augustine, mariée en i856à
Paul-Alexandre, marquis de Veyny.
François de Courvol, chevalier, seigneur de BazoUes et de
Montas, forma au dix-septième siècle la branche de Saint-
Maurice et Savigny-les-Billy; son petit -fils, Jacques de
Courvol, officier au régiment de Normandie, épousa en 1723
Marie de Compaing, dont il eut :
Jean-Qaude de Courvol, seigneur de Savigny et de
la Mothe-Billy, capitaine au régiment de Nice, chevalier
de Saint-Louis, épousa en 175 1 Marie-Anne de MuUot de
Villenaut, dont il eut: i» Jacques - Lazare , mort sans
alliance; 2* Claude, qui suit; 3® Ambroise, mort sans
alliance en i838.
Claude de Courvol, seigneur du Fey et de Savigny, épousa
en 1790 Marguerite-Hyacinthe de La Coudre, dont U eut :
Alexandrine, mariée en 1828 à Ernest Le Carruycr de
Beauvais, et Marie- Rosalie, qui épousa en 1821 Philippe
Dupin, célèbre avocat, député de la Nièvre.
Sources et preuves : Inventaire des titres de Nevers,
Marolles; Histoire du Berry, La Thaumassière ; manus-
crits de dom Villevieîlle ; archives de la Nièvre ; généalogie
imprimée en 1754 ; titres de la famille.
DE CHARRY.
Armes : D*a:(ur, à la croix ancrée d'argent.
La famille de Charry est connue en Nivernais depuis le
treizième siècle, et y est encore représentée. En 1296, Robin
de Charry faisait une vente ^e biens à Beaumont-sur*
Sardolles. Lorsque les habitants de Nevers voulurent recons-
truire le pont de Loire en i3o9, Louis de Flandres, comte
de Nevers, leur amortit le droit de pontenage appartenant k
Jean de Charry, damoiseau, seigneur de Huez, qui le tenait
de son grand-père, le sire d'Arbourse, auquel Mahaut de
Courtenay Pavait inféodé par lettres données à Entrains en
juillet 1247. La filiation sMtablit ensuite d'après de nom-
breux titres de i3io, i3i6, i323, i365, etc. Au siècle
suivant , elle fournit des hommes d^armes et des officiers de
la maison des comtes de Nevers, puis des chevaliers de
Malte, du Mont-Carme) et Saint- Lazare et de Saint- Louis^
un mestre de camp , des capiiaines, un mousquetaire, ua
garde du corps, deux capitaines des vaisseaux du roi , un
chef d*escadre, etc.
Sa principale illustration vient de Jacques de Charry,
célèbre capitaine du seizième siècle, dont parlent taat
Brantôme, Montluc et Castelnau. Il se distingua dans les
guerres d'Italie sous Montluc^ puis aux sièges d'Orléans et
— 71^
du Havre. Très en faveur près du duc de Guise et de la
Reine-Mère, il forma et commanda la première garde du
corps. D'Andelot-Coligny, colonel-général de l'infanterie,
dont il refusait de reconnaître le suprématie, le fit assassiner
à Paris en 1563. Brantôme dit de lui ; c PourCharry, c'étoit
un second Montluc en valeur et en orgueil, et qui auroit pu
l'être en dignités s'il ne se fût fait de trop grands ennemis. »
Cette maison a pris alliance , en Nivernais , dans celles :
de Chacy, treizième siècle ; de Frétoy, quatorzième siècle ;
de La Perrière, quinzième siècle ; du Verne, 1433 et 1648 ;
duChastel, 1480; du Gué, iSig; de Maumigny, 1549;
Salazar, i562; de La Ferté-Meung, 1584; deChéry, 16 19;
de Rolland, i633; de Chargères, i65o et 1700; de Che-
venon-Bigny, i663; de Bony, 1677; deChabannes, 1678;
de Berthier, 1710; Comeau, 171 9; Andras, 1731 , etc.
Ses différents membres furent : marquis des Gouttes ,
comtes d'Ainay, vicomtes de Beuvron, barons du Ryau et
de Chatel-Péron , seigneurs ''de Charry, Arbourse, Huez,
Bona, Saint-Maurice, la Bretonnière , Marancy, Couëron ,
Vendonne, Aubîgny, Précy, Septvoies, Giverdy, Villeneuve,
la Ronde, la Roche, Lurcy-le-Bourg, Boulon, Montgazon,
Mare, Sangué, Ligny, Saxy-Bourdon, Fourvieil, etc.
Hugues de Charry, chevalier, vicomte de Beuvron,
seigneur de Charry, Lurcy-le-Bourg, Boulon, etc., eut
deux fils: Pierre, auteur de la branche de Lurcy, qui suit,
et Michel, comte de Beuvron, seigneur de Villiers, Mont-
gazon, etc., qui mourut en 1753, laissant de Marguerite
Andras de Poîseux : Hugues-Michel, marié à Cécile de
Fourvières de Quincy, dont Pierre-Ferdinand , comte de
Charry-Beuvron, mort sans enfants en i852,
Pierre de Charry, chevalier, seigneur de Lurcy-le-Bourg,
Lurcy-le-Châtel , Boulon, Mare, Saint-Firmin, etc., épousa
Elisabeth des Prez de Bussy et fut inhumé en 1776 dans
Tëglisede Lurcy, où Ton peignit la litre de haut justicier
qu'on y voyait encore il y a peu d années ; il eut :
Hugues -Michel, comte de Charry-Lurcy, seigneur de
-?8-
Lurcy-le-Bourg, Boulon, Mare, etc., comparut à l'assemblée
de la noblesse à Nevers en 1789, avait épousé Marie-
Magdeleine, fille de Joseph , baron de La Bussière, dont il
eut: 1** Louis-Hugues-Michel, comte de Charry-Lurcy, qui,
d'Angélique de La Roche- Loudun , eut un fils unique,
Hippolyte, mort sans postérité en 1861; 2® Jean-Antoine,
qui suit; 3<> Elisabeth-Madeleine, mariée en 1798 à Edme-
Pélerin de MuUot de Villenaut.
Jean-Antoine, vicomte de Charry-Lurcy, épousa en 1804
Marie-Madeleine de La Bussière, dont il eut: i« Hugues-
Jean, qui suit; 2° Alfred-Eugène, qui d'isaure Paichereau
a eu: Auguste; Gabriel, marié en 1872 à Marguerite de
Roquebeau; Marie; Marguerite; 3<> Antoinette, épouse de
François Rignault.
Hugues-Jean, vicomte de Charry-Lurcy, mort en 1855, a
laissé de son alliance avec Joséphine de La Bussière :
!• Emile - Hubert , comte de Charry, marié en 1857 à
Florence de Lavenne de Sichamps; 2® Alfred -François,
marié à Marie de Charry; 3® Antoine-Hugues, marié en
1878 à Laure Loppinde Gémeau; 4* Louise-Joséphine.
Le rameau des seigneurs de Giverdy et de Fourviéil,
détaché en 1648, s'est éteint à la fin du siècle dernier, ainsi
que celui des seigneurs des Gouttes en Bourbonnais.
Sources et preuves : D'Hozier ; Inventaire des titres de
Nevers; MaroUès; Parmentier; archives de la Nièvre ; Le
Laboureur; Brantôme; Née de La Rochelle; dossier au
cabinet des titres ; dom Villevieille ; titres de famille.
DE CHABANNES.
Arkes : De gueules, au lion d'hermine, couronné, armé et lampassé d'or.
Qu'il nous suffise de rappeler que l'illustre maison de
Chabannes est issue des comtes d'Angouléme de la première
race, devenus sires de Chabannez en i i3o ; qu^elle a donné
- 79 -
un maréchal de France, plusieurs lieutenams*généraux et
maréchaux de camp> des conseillers d^Etat, des cham-
bellans, etc.; qu'elle compte cinq alliances avec la maison de
France « et d'autres avec celles de La Trimouille, de La
Tour-d'Auvergne, de Guise, de Rochechouart, de La Roche-
foucauld, etc. Elle était titrée: cousins du roi, marquis de
La Palice, comtes de Dammartin, de Curton, de Rochefort,
de Saignes, barons de Toucy.
La branche nivernaise posséda les seigneuries de Sainte-
Colombe, le Verger, Armes, Trucy, Corvol-Dampbernard,
Vandenesse, Nourry, Huez, Apiry, Faye, la Montagne,
Quincy, Argoulais, etc.; elle s'allia aux familles : d'Armes,
1570; de Bourbon- Busset, 1598; Babute, 16 10; de La
Rivière -Champlemy, 1612; Monnot, 1645; de Charry,
1678; Sallonnyer, 1715, etc.
La plupart des auteurs placent en 1 570 l'apparition des
Chabannes en Nivernais; cependant plusieurs de ses membres
y possédèrent des fiefs au quinzième siècle. Antoine de
Chabannes, célèbre capitaine des c escorcheurs », qui devint
grand-maître de France, reçut de Charles VII, en 145 1,
avec la terre de Saint-Fargeau, les nombreuses seigneuries
de Puisaye confisquées sur Jacques Cœur; il était aussi
seigneur de Corvol-Dampbernard et recevait à ce titre, en
147 1, foi et hommage de Claude de La Rivière, seigneur de
Oiry. Son fils Jean , comte de Dammanin , qui est encore
seigneur de Corvol, suivant des titres de 1492, 1496 et 1498,
vendit cette terre en 1 504 à Jean de La Rivière, gouverneur
du Nivernais.
Dans la branche aînée, Geoffroy, seigneur de Charlus et
La Palice, capitaine-général des provinces du Centre (le
Nivernais compris) acquit en 1488, de Jacques de Beaufdrt-
Caoillac, les terres de Vandenesse, Nourry et Pouligny, en
Nivernais; elles échurent à son second fils, Jean de Cha-
bannes, qui s'illustra en Italie sous le nom de Vandenesse, et
tomba à côté de Bayard, 1524; son frère, le maréchal de La
Palice, eut Vandenesse, que sa femme et ses enfants habi-
— 8o -
tèrent. Charles , fils unique du maréchal , ne laissa que des
filles, qui firent passer ce fief dans la famille Olivier, 1567*
La postérité de François de Chabannes, comte de Saignes,
s'établit définitivement dans notre province à partir du
seizième siècle; celui-ci était capitaine de 5o lances tt
conseiller d'Etat, et avait épousé en 1 570 Valentine d'Armes,
dame du Verger, de Sainte-Colombe et de Trucy-l'Orgueil-
leux. Cette branche nivernaise a fourni des chevaliers de
l'ordre du roi, de nombreux officiers et un pair de France en
181 5 ; elle était représentée vers la fin du siècle dernier par
Claude- François, comte de Chabannes, seigneur d'Argoulaîs,
Huez, Quincy, etc., chevalier de Saint- Louis, capitaine de
cavalerie, marié en 1764 à Henriette Fournier de Quincy,
exécutée sous la Terreur, dont il eut deux fils : i* Jean-
Baptiste; 2° Louis-Henri, qui suivra :
Jean-Baptiste, marquis de Chabannes, seigneur d^Ar-
goulais et Huez, chevalier de Saint- Louis, capitaine au
Royal-Normandie en 1788, pair de France, inspecteur
général des gardes nationales de la Nièvre en 18 17, épousa
en 1787 Zoé de Boisgelin, dont il eut : i<> Eugène-Henri,
qui suit; 2^ Isaure, mariée en 181 1 à Henri-Amable, comte
de Dreuille; 3* Henriette - Pauline , mariée en 1826 à
Edouard-Charles, comte de Saint-Phalle.
Eugène-Henri, marquis de Chabannes, maréchal-des-logis
des mousquetaires, puis sous-lieutenant des gardes du corps,
mort en 1877, épousa en i8i9Gabriellede La Tour-Vidaud,
dont il eut : i® Gilbert-Gabriel, sans postérité; 2° Edme,
mort en Crimée; 3° Amable-Marie, marié en 1857 à Mar-
guerite-Louise de Bourbon-Busset, dont Eugène-Gabriel et
Marie-Charlotte; 4" Marie-Lucrèce, mariée en 1840 à
Antoine, marquis du Prat,
Louis-Henri, comte de Chabannes de Quincy, épousa en
i8o3 Adélaïde Limanton de Jaugy, dont il eut : i» Louis-
Victor, qui suit; 2^ Auguste, marié à Pauline Béranger de
Moléme, sans postérité; 3^ Armand, page du roi, aide-de-
camp du maréchal de Bourmont, marié en"i835 à Clémen-
— 8i —
thie de La Morre, dont il eut Joseph, Pierre et deux filles ;
4* Henriette, épousé d' Auguste Vernînd'Aigrepont; 5* Adèle,
ipoQSt d^AdoIphe de Mullot de Villenaut; 6<> Eugène, marié
en 185 1 à Aline de Choiseul-Praslin , dont Marie*Cbarlotte,
épouse d^ Albert, comte de Cbabannes-Curton.
Louis- Victor, comte de Cbabannes, épousa en i838 Simone
Petitier, dont il eut Gaston, marié en 1 858 à Blanche de
Saint-Phalle, dont : Henri, Victor, Antoine, Henriette.
Sources et preuves : Histoire des grands officiers de la
couronne, P. Anselme; Moréri; archives de la Nièvre;
Inventaire de MaroUes; de Courcelles; Dictionnaire de
La Cbesnaye-des-Bois; archives de la famille.
DE LA FERTÉ-MEUNG.
Akkbs: Ecarielé, aux i et 4 d'hermine], au sautoir de gueules, qui
est de La Ferlé; aux 2 et 3 contr^écartelé d'argent et de gueules,
qui est de Meung.
La maison de La Ferté est connue depuis le onzième
siècle; elle est originaire de Sologne, où Hubert, sire de La
Ferté, vivait en Ï090; Geoffroy était à Bouvines ; Hubert
fut tué à Crécy. Elle fournit de nombreux chevaliers, qui
prirent part aux campagnes de Flandre et de la guerre
de Cent-Ans, des gentilshommes de la maison des rois
Charles VIII, Charles IX, Henri III et Henri IV, des
capitaines des compagnies d'ordonnance, des chevaliers de
Tordre du roi et de Malte, un lieutenant des gardes en 1570,
un brigadier, deux mestres de camp, etc.
Elle posséda dans notre province les seigneuries de Saint-
Germain-des-Bois, Saligny, Boisjardin, Challement, Mon-
ceau, Champdioux, Maux, Champlin, Pierrefitte, Solières,
Montanteaume, Villapourçon, Chevannes, La Roche-Milay,
Vilktte, Ettevaux, Sichamps, Cuncy-les-Varzy, Bourras,
ViIliers-ie-Sec> la Cave, Beaumont-sur-SardoUes, Marcilly,
la Loge^ Griandchamp.
T« m, 3* série. 11
-82 —
Outre ses alliances avec les de Mornay, des Barres^ de
G>ligny, de L^Hôpital-Vitry, de Rabutin, elle ea contracta,
en Nivernais^ avec les familles: de La Rivière-Cbampleiay»
1480; de Clèves, d'Anlezy, seizième siècle; du Verne, i53o;
de Chastellux, i564; d^Aunay; de Grossouvre, 1583; de
Charry, 1584; de Chassy, i623; de Saint-Quentin, 1639;
Sallonnyer, 1670; du Ly$; de La Bussière, 1680; de
Chéry, 1668; de Berthier; Fournier d^ Armes, 1716; du
Clerroy, 1722; Pitoîs de Quincize, 1732; du Bois d'Aisy,
1755, etc.
Cette famille se fixa en Nivernais au commencement du
seizième siècle, par suite de ses alliances de La Rivière^ 4^
Clèves et du Verne. François et Charles, son neveu, gou-
verneur de La Charité en 1572, furent de brillants capi-
taines.
Dans la branche aînée, Anne-Acbille , marquis de La
Ferté-Meung, seigneur de la Cave, Beaumont-SardoUes et
Marcilly, mourut en 1767 sans enfants de son mariage avec
la comtesse de Rivers, ne laissant qu^un frère, Germain,
vicaire général de Lisieux, seigneur de la Cave, mort en
émigration. Son cousin germain, Charles-Alexandre, sei«
gneur d'Anus, marié à la petite-fille du maréchal de La
Viefville, n^eut qu^un fils, mort sans postérité. Son autre
cousin germain, Samuel, comte de La Ferté-Meung,
seigneur de Villiers-le-Sec, Fouronne, Cuncy-les-Varzy et
Bourras, épousa en 1727 Catherine de La Bussière, dont il
eut: i^ Jacques-Gabriel, marquis de La Ferté«Meung, chef
de sa maison en 1796, capitaine au régiment d'Auvergne,
chargé d'affaires de Louis XVII I en Russie pendant Témi-
gration , maréchal de camp et commandeur de Saint- Louis,
épousa en 1778 Agnès de Saulieu, dont il n'eut que deux
filles: M"*»de La Cbasnayeet de Villenaut; 2» Geneviève,
mariée à Edme, marquis de MuUot de Villenaut.
Le chef de la branche cadette, Nicolas, comte de La
Ferté-Meung, seigneur de La Roche-Milay et Saulières,
colonel du Quercy-cavalerie , épousa en 1775 Antoinette
. -83-
Hennet de Courbois, dont il eut: Nabert-François, comte,
puis marquis de La Ferté-Meung, lieutenant-colonel des
chevau-légers, mort en 1825, marié en 1804 à Antoinette
de Lévis-Mircpoix, dont: i® Nabert-Jacques-Ferdinand,
officier de carabiniers, marié en 1829 à Clotilde, fille du
ministre comte Mole de Champlatreux , dont il n'eut pas
d^enfants; 2^ Hubert-Joseph, marié en i83o à Mathilde,
sœur de la précédente, dont une fille unique mariée en 185 1
au duc d'Ayen-Noailles.
Dans le rameau de Pierrefitte : Yves - Antoine de La
Fené-Meung, seigneur de Pierrefitte, chevalier de Saint-
Louis, major au régiment de la Sarre, épousa en 1750
Gabrielle de Jacquinet, dont Jean-Julien, officier de hus-
sards, marié en 18 10 à Joséphine deChargères, et père de
Louis-Gabriel, comte de La Ferté-Meung, qui, de Charlotte
Letors de Larrey, eut, en 1844, Fernand-Octave , marié en
1869 à M"* Taillandier-Dupleix, et seul représentant actuel
du nom de La Ferté-Meung.
Un cousin germain d'Yves, Claude de La Ferté-Meung,
seigneur de Chandioux, chevalier de Saint-Louis, capitaine
au royal-infanterie, épousa en 1775 Jeanne Millin, dont:
f Jean-François, capitaine au même régiment, marié en
1806 à Aimée de Cotignon , dont M"*** Berry et Guiller de
Chalvron, et 2« Jacques, seigneur de Chamenay, officier
d*infianterie, qui, de Marie de La Ferté-Meung, eut M"*«» la
comtesse de Veyny d'Arbouse et Collin.
Une autre branche cadette, celle de Challement, séparée
en i5?o, donna Anne, comte de La Ferté-Meung, seigneur
de Challement et la Tour- Rabuteau, marié en 1761 à
Antoinette de Clermont-Tonnerre, dont il eut: i" Louis-
Jacques, lieutenant au régiment Dauphin-cavalerie, dont le
fils Gustave, lieutenant de vaisseau , est mort en i883 sans
postérité; z^ et 3* M™*' Andras de Marcy et Aupépin de
Dreuzy.
Cinq La Ferté-Meung émigrèrent ; un d'eux fut tué au
massacre de Quiberon.
— 84 —
Sources ET PREUVES : D'Hozier; P.Anselme; aitblves de
la Nièvre; manuscrits de Clairatnbaalt; preuves pour Matie
et Saint-Cyr; Z>/c/ionnaire de La Chasnaye*des-Boi$; titres
de la famille.
A. DE VILLENAUT.
LES EXERCICES PUBLICS
DANS LE COLLÈGE DE NEVERS AVANT LA RÉVOLUTION.
(Mémoire lu à la Sorbonne, dans la séance du 29 avril 1886.)
Le collège de Nevers, fondé au commencement du seizième
siècle, fut confié, en 1573, aux Pères Jésuites par le glorieux
prince Louis de Gonzague. Entre leurs mains il conqui^
rapidement une réputation qui s'étendit bien au-delà des
limites du Nivernais.
De leur côté, les habitants avaient à cœur tout ce qui
pouvait contribuer à la prospérité du collège. En i6[o, le
lieutenant-général de Nevers , Henri Bolacre, et sa femme
Jeanne Millet, y créèrent une première chaire de philosophie.
En 1726, la ville en créa une seconde et constitua une rente
de 200 livres pour les prix à distribuer annuellement aux
écoliers. En souvenir de cette libéralité, le maire ou, en son
absence, le premier échevin, lors de la distribution solennelle
des prix, délivrait en personne le premier volume et donnait
à l'écolier l'accolade et la couronne (i).
Plusieurs fois dans Tannée, et notamment pour la rentrée
des classes, comme au jour de la distribution des prix, il y
avait des exercices publics auxquels les échevins étaient
(i) Parmbntier, Archives de Nevers, t. !•' p. 3 16.
-8s-
toujouis invités. Le programme en était publié avec honneur,
sur de grandes c affixes > imprimées, portant en tête les trois
lettres D. O. M. ou les trois mots Deo optimo maximo^ ou
encore Jesu Christo avec Técusson au nom de Jésus (i).
Nous avions pu recueillir çà et là, formant couverture
d^anciens registres de paroisses ou de vieux dossiers d^actes
notariés , souvent déchirées , couvertes d^écritures de toute
sorte, un nombre relativement considérable de ces précieuses
affiches , et il nous tardait de trouver Toccasion de les faire
connaître.
La lecture des séances du dernier Congrès de la Sorbonne
nous a prouvé, par la voix si autorisée de M. le Président
delà section d'histoire et de philologie, tout l'intérêt qui
s^attache à la publication de ces documents. Cest une douce
satisfaction, pour les modestes travailleurs de la province, de
se sentir encouragés par les maîtres de la science et de
rénidition. Voici donc le résultat de nos recherches.
5 I.
Les exercices publics dans le collège de Nevers s'offrent à
nous sous quatre formes distinctes : le drame, le discours,
la thèse philosophique , V exercice purement scolaire. Ils
sont toujours, à part quelques rares exceptions, écrits et
débités en latin.
Premièrement, les exercices dramatiques , vers lesquels
Pesprit se sent tout d^abord attiré , n'ont malheureusement
laissé à Nevers que de très-faibles souvenirs. Et cependant ,
(i) Ea 1611, le receveur de la ville paye 18 livres à un sculpteur
qui a gravé en taille douce, sur une table de cuivre, c ung nom de
Jésus 1, les armes de Monseigneur et de Madame, et les armes de la
▼ille pour mettre aux placards que Ton envoie • aux villes prochaines »
de la lecture des livres qui se fait au collège de cette ville, au jour de
Saint-Rémy prochain. (Arch. communales de Nevers. Pièces justifi-
catives des comptes. GC., p. 271.}
-So-
dés t6oo^ on jouait des drames au collège. Un article des
comptes de la ville nous Papprend en ces termes :
A Philippe NoUes^ charretier, lo sols, pour deux charrois
de « hayz et boys > conduits au collège, pour y faire des
échafauds , afin de c jouer des tragédies (i) ».
Il nous faut descendre à 1727 pour retrouver un fragment
d'annonce d'une pièce dont le titre paraît avoir été : 77re-
mistus. Les personnages semblent bien Tindiquer. Ce sont :
Theotimus et Irenœus, fils de Thémiste; — Charinus et
Phi Iodes, frères de Thémiste; — Cleomachus , son ami; —
Pamphilus et Eudoxius , fils de Clèomaque; — Tîmander,
parent de Thémiste; — Phronymus , son voisin; —
ChrysalduSy vieillard érudit; — Polydorus, gouverneur
de Théotime et d'Irènée ; — Erastus , gouverneur de
Pamphile et d'Eudoxius; — Tripodus, maître de danse; —
Menippus, serviteur de Thémiste.
Les quatorze acteurs dont les noms sont désignés en regard
des personnages de la pièce appartenaient presque tous à
d'anciennes familles nivernaises, la plupart encore très*
honorablement représentées. Deux seulement étaient étran*
gers à la province : François Cortet, d'Autun ; Etienne La
Combe , de Tulle.
Theotimus ,
fîlii Themisti.
Irenjsus,
Charinus, frater Themisti.
PhilocleSj frater Themisti bellator.
Cleomachus, Themisti amicus.
Pampuilus, I
) filii Cleomachi.
EUDOZIUS , I
De Bèze DuGué, Tannaius.
Jacob. Dominic.CHAiLLOT^ Nivernus.
PetrUS DE SOULANGT DE SaULIEU,
Nivernus.
Claudius P&YSiE DU R18, Nivernus.
Carolus Rousseau, Nivernensis.
Jacob. Saulieu de Chomonbrt,
Nivernus.
Joan. Joseph de Bbze de La Belouze,
Nivernus.
(i) Arch. comm. Nevers, CC, 249.
-87-
Toujfpnty affinis Themisti.
Phrontmus , Themisti vicînus.
Chrysaldus, senez erudîtus.
FoLTDo&us, Theotimi et Irenœi
moderator.
Erastus, Parophili et Eudoxîi
moderator.
Tripodus, artis saltatorise magister.
Msxtms, servus Themisti.
Petrus SALomnrBR Dupbron , Niverv
nu8.
Ludovicus DE La Planche, Deci-
ziacus.
Franciscas Cortbt^ iEduensis.
Petrus DU Ruisseau, ex Molino-
Engilb.
Guillelmus Potiek, Charitaeus.
Stephanus La Combe, Tutelensis.
Petrus Sallonnyer de Nion, Ni ver-
nus.
Die..* maii 1727, hora ipsa octava cutn média.
Scena Nivemi.
Ex typographia Renati Pinardeau, illustrissimi et
reverendissimi episcopi urbis et collegii societatis Jesu,
tyrpographiy necnon bibliopolœ.
La seconde ifihcQ, fabula, jouée le 16 janvier 173 1, a pour
titre bien significatif au début du nouvel an : Vota, les
vœux. La représentation sera faite à trois heures du soir,
dans la cour <;lu collège , par les élèves choisis de rhétorique.
D. 0. M.
VOTA
Fabula.
Exhibebitur a selectis rhetoribus
Collegii Nivemensis societatis Jesu,
PERSONA.
JUKITKR*
Mercurius.
MOMUS.
SoFBROMDius, fortunse sacerdos.
ACTORUM NOMINA.
Joannes Bapt. Fcbvre, Nivern.
Francise Stephanus de Colons ,
Nivern.
Hieronimus Vignault, San Sal-
viensis.
Jdem.
— 88 —
PoLiCHKONiuSj senez.
AsTROLOGus, philosophas.
EuGENius, scholasticus.
Parmeno, servus.
Aristus, v^erator.
NosopHiLUS, medicus.
Philomachus, miles.
Macrotrogus, cerdo.
PAMJETAS, villicas.
Joannes Lespinasse du i^AViLLOif,
Conian.
Henric. Lespikassb m Plaxcsb-
VIENNE, N.
Joannes Lud. Pierre de Crahrobert,
Nivern.
Claudius Francîscus Levesque, Ni-
vern.
Andréas Leonardus GiziOT, Nivem.
Joannes Baptista Caffart, Nirem.
Stephanus Blayet, Nivem. ( i ).
Jacobus Ludovicus Coquullb, Ni-
vern.
Claudius Gabriel Ollivxer, Nivern.
In aula collegii Nivemensis societatis Jesu,
Die i6* januarii anni ijSiy hora ipsa tertia.
Ex typographia Renati Pinardeau , etc.
Le mercredi 4 septembre 1748, jour de la distribution
solennelle des prix, il y avait au collège un redoublement de
zèle dramatique. On y jouait deux drames comiques, l'un
en latin avec prologue et épilogue, l'autre en français avec
prologue, et de plus une pastorale allégorique sur la paix,
cette paix qui venait d'être signée à Aix-la-Chapelle. Nous
(i) Etienne Blayet devint, en 1740, curé de la modeste paroisse
d'Apremont, où il mourut à la fin de 1766.
Notre président honoraire, M. Roubet, dans son curieux Mémoire
sur une question de céramique, lu au Congrès archéologique de Bourges
en 1868, raconte que le digne curé avait constamment refusé les
autres cures et bénéfices qui lui avaient été offerts. Plus ami d'Horace
que désireux d'un revenu plus important, il avait écrit en latin et en
français t
SiqtM adê iedeit Ht tibi eommoda tedet f
Hla 8€de itdes, nec ab tUa tede recède,
Puisqae sur cette chaise où Ton me voit assis
Depuis plus de vi> ans, je m'y trouve à mon aise,
Me verra-t-on en fou, moi de sons bien rassis,
Abandonner pour autre, une semblable cbaise?
Non!
/
-89-
'^^Qnoas le programme de ces trois pièces imprimé, non
plus en grand placard, comme de coutume, mais en un cahier
■"^ttat in-4% chez le nouvel imprimeur du collège : Niverni,
^* typographia Ludovici LeFebyre, collegii SocietatisJesUj
^Pographi. m.dcc.xlviii(i).
I. - MOROSOPHUS
Drama comicum
Dabitur.
A selectis secundanis
Collegii Nivemensis
Societatis Jesu
Die 4? mensis septembris , anno 1748, hora prima cum
média post meridiem.
PERSONiG ET ACTORUM NOMINA.
MoROSOPHUS , philosophas.
£«CHINUS, ) ., ,.
^ I Morosophi ami Cl.
Ctesipho , J '^
Ltconioes, 1 .
p } luvenes.
EUHCHUS, J
Cleomachus, Thraso.
RoNDiBiLis, medicus.
P0LTIUTE8, philosophas.
Jacobus Parent, Nivemensis.
Ludovicus JouBBRT, Nivern.
Petrus Dameron, Nivemensis.
Joan. Bapt. Courtois, Bituric.
Joan. RoussET, Nivemensis.
Joan. Bapt. Baudot, Charitœus.
Henricus Laurent, Nivernus.
Ludov. LHERunTE, Nivernus.
Scaena pro iEdibus Morosophi.
Prologum dicet,
Ludovicus Lhbrmittb, Nivernus.
Epilogum,
Henricus Laurent, Nivernus.
(i) Nous devons la connaissance de cette intéressante plaquette à
M. Edmond Réveillé , de Nevers, qui a bien voulu s'en dessaisir pour
notre collection. Elle porte la signature d^up des acteurs : J. Baudot ,
de La Charité.
T. ur, 3* série. 1 2
— 90 —
IL ~ DAPHNIS TRIOMPHANT.
Pastorale allégorique sur la Paix.
Daphnis, Charles Girard, de Prémery.
TiTYRE, Jacques Dominique Chaillot de La Chasseigne^ de Nevers.
CoRiDON, Jacques-Sébastien Dubois, de Moulins.
Mceris, Joseph Gestat du Breuil, de Nevers.
Alexis, François Le Roy, de Paris.
Tyrsis, Laurent-Claude Chambrun db Vauvtreille, de Nevers.
Mopsus , Pierre-François de Cernuschi , de Saint-Brieuc.
La scène est dans un bosquet.
III. - L'ENFANT GASTÉ,
Drame comique,
Sera représenté par les écoliers du collège de la Compagnie de Jésus ;
mercredi 4 septembre 1748, à une heure et demie après midy.
PERSONNAGES ET NOMS DES ACTEURS.
PoLÉKON , père de Mignonet.
Ledoux, beau-père de Polémon.
Mignonet, enfant gâté.
Eugène, frère de Mignonet.
Beaupré, capitaine de vaisseau.
Carille, ami de Mignonet.
Grognac, valet de chambre de
Ledoux.
Drolinet, valet de Ledoux.
J.-Bapt. Baudot^ de La Charité.
Henri Héron , de La Charité.
Charles Girard, de Prémery.
Casimir Tuévenau, de Saint-Saulge.
Edme Tricot, de Never».
Joseph Charamon, de Nevers.
Joseph GuiLUER, de Moulins-En-
gilbert.
Gilb. Gestat des Boistiaux, de
Nevers.
La scène est dans la maison de M. Ledoux^ dans une
ville maritime.
Dira le Prologue, Edme Tricot, de Nevers.
Suivra la distribution solennelle des prix.
Un autre drame comique, Triparcus , }oué en latin,
comme le précédent, parles élèves choisis de seconde ^ en
— 91 —
1754' ^^^^ ^^^^ ^^^ signalé par M. Le Blanc-Bellevaux ,
ancien archiviste du département. Nous sommes heureux de
donner ici le texte de ce programme qui nous a été obli-
geamment communiqué par notre laborieux collègue, M. de
Flamare :
TRIPARCUS,
Drama comicum ,
dabitur a selectis secundanis
collegîi Nivemensis
Societatis Jesu,
die 26 martii hora tertia post meridiem.
Nivemiy
ex typographia Ludovici Le Febvre^ colle gii Nivemensis
Societatis Jesu y typographi.
M. DCG. Lrv (i).
PERSONiE ET ACTORUH NOMINA.
AsaaoHERDBS, Triparcus.
Thbotimus , frater Triparcî.
CiotYSOsniSy feenerator.
CarroBULUs, amicus Theotimi.
VALsaïus, Triparcî ûlius.
EuGBRitis, filius alter.
YANiLOQuiDoaus , ludi-magistcr.
NuovoLA, librarius.
AaGBNTI-ExTEREBROMIDES, amlCUS
Triparcî.
OxTGBATES, archimagifus.
HippoDAMus, coquus et auriga.
Davus Daoxo, servi.
Trotinellus^ servus Valerii.
Ptracmon, £aber Ferrarius.
Agrio, rusticus.
Bernardus Rameau, Nîvernus.
Josephus JoLT, Niv.
Car. Nie. Barbikr tue LmomiBT, Niv.
Marcellus Durand, Niv.
Ludovicus Gasque-Chaxbkum, Niv.
Gilbertus Flamen d^Assignt, Niv.
Carolus NicolaOs Barbier de Lzm-
MONET, Niv.
Petrus Ludovicus Le Febvrb, Niv.
Idem.
Stephan. Chambrun-Mousseau, Niv.
Nicolaûs Servais, Niv.
Marti nus Boizeaux, Niv.
Joan. Bapt. Piquet de La Tour,
Ni 7.
Mîchael Ducret de Villaine, Niv.
Franciscus Ravart, Niv.
(1) Afcfaives de la Nièvre, D. 22.
— 9^ —
Prologus ,
Michael Ducret de Villatne, Nivemus,
Fabulant excipiet prœmiorum distributio.
§ H.
Des exercices dramatiques nous passons aux exercices
oratoires, c'est-à-dire aux discours, habituellement pro-
noncés par un élève de rhétorique , dans une séance solen-
nelle , en l'honneur de la rentrée des classes^ ad solemnem
scholarum instaurationem.
Ces exercices que le Père Le Jay devait mettre en honneur
au collège de Louis-le-Grand par ses Orationes panegyricœ
étaient bien avant lui en grande estime au collège de
Ne vers.
Quelques années seulement après le rétablissement des
Pères, à la suite de l'expulsion de 1594, il avait été convenu,
par contrat du 1 1 janvier 1607, que les habitants leur bâti-
raient un corps de logis au dedans duquel il y aurait une
salle de déclamation (i), et les échevins se plaisaient à
encourager ces exercices, même par des récompenses pécu-
niaires.
Les comptes de la^.ville, pour Tannée 1619, font mention
d'une somme de i5 livres donnée au fils de feu M. Baptiste
Conrade pour la déclamation par lui faite au collège, en
rhonneur de la ville (2).
(i) Archives communales de Nevers. Pièces justificatives des comptes,
ce, p. 266.
(2) Archives communales. Pièces justificatives. CC, p. 284.
Cest cet Auguste Conrade , fils de Baptiste Conrade , maître potier
en poterie blanche et sculpteur en terre de feïencequi, en 162g, était
reçu docteur en médecine, puis fut qualifié de premier médecin de la
reine de Pologne et composa le livre de VHydre féminine combattue
par la nymphe pouguoise. On trouve parmi les épigrammes et autres
pièces de vers des Approbations du Parnasse pour les Chevilles de
maître Adam Billault deux distiques latins d^Augustin de Conrade à
-93-
Plus tard , quand la ville eut fondé les prix , il y en eut
deux à^ amplification latine et deux d'amplification fran^
çaise (i).
Le sujet des discours était le plus souvent le panégyrique
du grand roi ou du dauphin^ ou une harangue en Thonneur
de quelque événement heureux pour la France, survenu
pendant le cours de Tannée.
En 1 677, l'orateur nivernais exalte les triomphes du vain-
queur de TEurope conjurée contre la France; Tannée
suivante, il démontre combien les Français doivent se
montrer reconnaissants pour le rétablissement de la paix :
D. o. M.
QUANTUM GALLOS
ob restitutam pacem
gratos ac memores
prœbere se deceat
demonstrabit orator.
( Le reste de la feuille manque. )
D. O. H.
Annum hune
LUDOVIC! MAGNI
factis ingentibus
gloriosum
et Europœ conjuratœ fractis
conatibus
feîicem
panegyrico laudabit
orator Nivemensis
in collegio societaiis Jesu,
Die ^Dominica , XIV novembris
hora post meridiem tertia, anno
post Christum natum
MDCLXXVIL
En 1680, c'est le panégyrique du sérénissime dauphin de
France; en i683, 1687, 1690 et 1692, suivent de nouveaux
panégyriques de Louis-le-Grand ; puis successivement : la paix
n'est jamais plus assurée que sous un prince belliqueux
comme Louis-le-Grand, le guerrier pacifique ; — seul contre
la louange de maître Adam. Les échevîns de Nevers avaient bien jugé
le jeune orateur. (Voir la Faïence^ les Faïenciers et les Emailleurs de
Nevers, par L. du Broc de Segange, introduction, p. 14.)
(i) Aimanach nouveau de la* ville de Nevers pour Pan de grâce xySS
et années suivantes.
— 94 —
tous^ Louis-le^raad a combattu pour la religion et seul
par la religion il a vaincu tous ses ennemis; — sous son règne,
le génie des Français ne le cède en aucune manière à l'anti-
quité la plus policée^ et il surpasse de beaucoup par la gloire
militaire les peuples les plus forts de cette même antiquité.
D. o. M.
LUDOVICO MAGNO,
BeUatort pacifico
pacem nunquam
quant sub bellicoso principe
tutiorem esse
demonstrabit
orator Nivemensis
in collegio Societatis Jesu.
Die 38 octobris, hora post meridiem secunda.
D. O. M.
Serenissimo
FRANCIiE DELPHINO
panegyricum
dicet
orator Nivemensis
in collegio Societatis Jesu.
Die 17 novembris, hora post meri"
diem secunda cum média,
LUDOVICO MAGNO
quod unus adversus omnes
pro religione pugnaverit
unus omnes
per religionem vicerit
panegyrica oratione
gratulabitur
orator collegii Nivemensis
Societatis Jesu.
Die Dominica XVII decembris.
Anno M. DC, XC, hora post
meridiem tertia.
LUDOVICO MAGNO
panegyricum
dicet
orator
collegii Nivemensis
Societatis Jesu.
Die Dominica 16 novembris,
anno i68y.
Hora post meridiem secunda cum
média.
D. o. M.
Régnante LUDOVICO MAGNO
Gallos ingenii laude
politissimœ antiquitati
nulla ex parte cedere
fortissimis vero ex eadem anUquitate
populis
militari gloria
longe esse superiores
demonstrabit
orator collegii Nivemensis
Societatis Jesu.
Die décima decembris
anno M. DC, XCIL hora post
meridiem tertia.
— 95 —
A cette époque , cependant y se rencontrent aussi des sujets
exclusivement littéraires. En 1682, Torateur parlera contre
les juges téméraires des génies; en 1685, il entreprend de
venger l'éloquence contre la loquacité qu^il dédaigne ; en
i6gty il démontrera que la véritable volupté des jeunes gens
a sa source dans le goût des lettres; en 1701 il enchérit
encore sur le même thème et entend démontrer que les jeux
littéraires l'emportent sur tous les autres jeux.
DEO. OPT. MA.X.
Ad solemnem scholarum
instaurationem
in temerarios judices ingeniorum dicet
orator
(La fin manque.)
DEO. OPT. MAX.
Ad
solemnem scholarum
instaurationem
eloquentiam ab exprobraia
loquacitate vindicabit
orator collegii Nivernensis
Societatis Jesu,
Die Dominica IV novembris.
Hora post meridiem secunda. Anna
post Christum natum,
M. DC. LXXXV.
DÉO. OPT. MAX.
Propriam adolescentum voluptatem
in studio litterarum
positam esse demonstrabit
orator
collegii Nivernensis
Societatis Jesu
Die Dominica XXV novembris.
Anno M, DC, XCL hora pos
meridiem sesqui secunda.
Cette même année 1 701, et dans la même séance, un autre
rhétoricien, Rémy-Girard d'Aumont-d'Espeuilles , s'exerçait
sur un thème nouveau et que nous aurions voulu rencontrer
plus fréquemment, pour la gloire de notre cité : Nepers doit
être célébré au-dessus de toutes les autres villes.
(Le titre de la feuille manque.)
-96-
Oraiio.
NIVERNUM
urbibus prce cceteris
celebrandum
demonstrabit
Remiglus Girard d'Aumont
d'Espeuiîles t rhetor
Oratio.
LUDUM
litterarium
esse ludis reîiquis
potiorem
demonstrabit
Claudius Boudier rhetor
in coUegio Nivemensi
Societatis Jesu,
Die II maii hora tertia post nteridiem, anno lyoi*
Quarante années plus tard , un autre élève célébrait aussi
la gloire de la province de Nivernais,
D. o. M.
Nivemensis provincial
celebrabit
orator
coUegii Nivemensis
Societatis Jesu,
Die Dominica j5* januarii hora tertia cum média pomeridiana,
Anno Domini iy4i.
Ex typographia Ludovici Lefebvre^ collegii Nivemensis
Societatis Jesu, typographi.
Il nous a semblé retrouver dans notre vieil historien
Guy-Coquille la pensée inspiratrice de ces deux discours
dont il nous serait si agréable d'entendre un écho lointain :
c Cette ville de Nevers , — dit Tauteur de VHistoire du
pays et duché de Nivemois (i), — a eu cette faveur de
Dieu qu^oncques elle n'a esté possédée par les Anglois^
combien que les villes voisines^ La Cherité et Sainct-Pierre-
le-Moustier ayent esté tenues par eux ; et presque toutes les
villes de la France, horsmis Orléans et Bourges... Aussi a
eu cette faveur que durant les troublés meus en ce royaume
(i) Édition in-4<> de 1612, page 376.
- 97 -
pour le faxct ou prétexte de la religion , elle s'est conservée
en Tobéyssance des roys sous la religion catholique, aposto-
lique et romaine: ce qui n^est advenu ausdites villes
d'Orléans et de Bourges, Dieu luy face grâce de continuer à
tousiours. »
Dans un autre ordre dMdées, nous pourrions ajouter avec
notre poète Adam Billault^ dans ses Chevilles, que Ncvers
se glorifiait aussi de ses fragiles bijoux et ses trésors de
verre, et avec M. de Saintemarie, que les ouvrages d^émail
qu'on y fabriquait se répandaient dans toute l'Europe (i);
et enfin comment ne pas rappeler Fart de faire la faïence
qui
Dans ritalie reçut la naissance
Et vînt, passant les monts, s^établir à Nevers (2).
Pour terminer cette série des Orationes, il ne nous reste
plus qu^à citer deux fragments des sujets de discours des
années 1726 et lySo.
D. o. M.
Quantum
ad
imperii Gallici
optimam administrationem
conférât
(La seconde moitié du programme
manque.)
(1726) ?
D. O. H.
Qualis
futurus sit
serenissimus Audegavensium dux
dicet
(Manque la seconde moitié du
programme.)
(1730)?
Nous terminons par un curieux programme de 1743
qui, par la forme, se rapproche beaucoup des exercices
philosophiques et des exercices scolaires , mais est ici bien à
sa place, ne serait-ce que par son titre (VExercitationes
oratorio? ! Et parmi ces exercices qui devaient se prolonger
(i) Recherches historiques sur Nevers, page 55.
(2) Po^me de la fiUence de Pierre de Frasnay.
T. m, 3* série.
i3
-98-
pendant deux jours, les lundi et mercredi 26 et 28 août, à
deux heures du soir, dans la salle de rhétorique du collège ,
in rhetorica collegii, se trouvent d'ailleurs un discours sur
cet adage trop vrai : // n*est pas rare qu'un grand génie
engendre la paresse , puis trois poèmes : l'un alors tout
d'actualité sur le Café, Pautre d'un intérêt toujours nouveau
sur VArt de plaire et le troisième sur la Vertu héroïque.
Jesu Christo
Exercitationes oratorice.
Après les questions sur la rhétorique, en neuf parties, se
terminant par le vieil adage: Gaudeant bene nati , voici
comment sont indiqués d'abord les noms des élèves qui
s'efforcèrent de répondre, puis celui des acteurs des discours
et poèmes :
His quœstionibus Deo duce et auspice dei para res^
pondère conabuntur, die lunœ 26* die mercurii, 28^ mensis
augusti 1743 hora 2» serotina:
Antonius Lambert, Nivernus.
Antonîus Léon Maillot, Nivernus.
Claudius Mahieu, Decizsus.
Eduardus Lemperbur, Nivernus.
Franciscus Doyat, Nivernus.
Georgius Richard, Corbîniacus.
Ignatius Ducué, Nivernus.
Joannes de Villars , Nivernus.
Joannes Taillefert, Nivernensis.
Lud. Chaillot de La Chassejgnb, Nivernus.
Ludovicus Jacobus Fautras , Nivernus.
Analyses orationum Gallicœ et Latince, varice eluaibra--
tiones oratoriœ et carmina quaque die recitabuntur :
DIE LUNiE. ACTORES.
MAGNUM INGENIUM NON RARO ESSE DESIDIJS FONTEM.
— Oratio Claudius Mahibu.
VIRTO8 HEROiCA. - Ctfrmiw | Ludovicus Chaillot.
( Antonius Lambert.
— 99 —
DIB MERCURII : ACTORES.
Ignatius Dugu£ ,
Caffmvu»
Carmen,
Ars placendi.
Cctrtnttt»
Georgius Richard ,
Joannes db Villars.
Antonius Maillot,
Eduardus Lempbreur,
Franciscus Doyat.
In rhetorica collegii Nivemensis Societatis Jesu
pro actu publico.
Ex officina Ludovici Le Febvre^ collegii typographi
et bibliopolœ.
S III.
Nous arrivons aux exercices philosophiques^ Exercitationes
philosophicœ, dont nous avons pu recueillir aussi un nombre
relativement considérable^ de 1680 à 1790. Et, quel que soit
le titre^ aujourd'hui peu séduisant, par lequel ces exercices
sont désignés : Conclusiones ex universa philosophia, —
conclusiones logico morales, — thèses ex physica, — thèses
logicœ, — thèses metaphysicœj etc., on aime à relire le nom
du jeune lutteur qui, en présence des premiers magistrats de
la cité , des sieurs échevins , devant ses maîtres et tous ses
condisciples assemblés^ devait soutenir vaillamment la vérité
de ses conclusions, avec Paide du Christ et de la Mère d^
Dieu : Harum conclusionum veritatem, Christo duce et
auspice Deipara, propugnabit o\i tueri conabitur. Gemment
aussi demeurer indifférent, quand on a quelque peu conservé
le goût des lettres, à la lecture, j'allais dire à l'audition du
gracieux compliment que le jeune combattant, avant d^entrer
en lice, adresse aux très-vigilants gouverneurs de la ville :
Urbis Nivemensis gubematoribus vigilantissitnis , tous
hommes instruits, amis 'des lettres, qui savent parfaitement
l'entendre et dont il se déclare le très-humble serviteur,
addictissimus ( i ).
(i) Voici les noms des quatre échevins en 1680 : Jacques Panseron,
avocat et grènetier ; Guillaume Vaillant, marchand ; Etienne Brisson ,
avocat ; Jacques Gentil, procureur.
— 100 —
C'est par exemple, le 3 août 1680, à trois heures du soîr.
Uaddictissimus Joannes Bernardot , de Saint-Saulge, San
Salviensis, s'exprime en ces termes :
Si vos lectissimos , sapientissimosque urbis administra^
tores et prœ/ectos philosophia prœtermitteret , nu^gnam
profectionem illius tandis , quant sapientia sua consecuta
est, deterere videretur, atque imminuere. Neque enim
video quamjustam satis excusationem^ quominus se sisteret
etiam vobis, posset illa prœtexere; atque hocloco, lîcet
offendere non consuerit uspiam hœreret tamen, et vestro^
rum quœ sane egregia sunt, meritorum immemorem se
confiteri palam teneretur, Tenet illud cujus memoria tandiu
futur a est, quandiu florentissimum istud collegium extabit,
tenet quantum vobis acceptum re/erat y non illa solum, sed
aliœ artes, inferiores quidem, at pulchrœ tamen et sua
etiam commandatione dignœ, Quod alantur universœ, quod
floreant, quod excolantur in hac civitate, magna parte id
vestri muneris est, seu potius munificentiœ singularis.
Ce joli compliment , que nous abrégeons , étant récité , le
combat commence. Les titres des huit parties de la philo-
phie sur lesquelles le duel pourra s^engager sont en tête du
programme et au milieu de quatre colonnes ; les voici : Ex
logica. Ex morali. Ex physica universali, De affectionibus
corporis naturalis. De mundo et elementis. De ortu et
interitu. De anima. Exmetaphysica. Chaque titre comprend
quatre sujets de thèses. Et au-dessous de ce vaste programme
on lit : Pro LVIL Exercitatione publica, Niverni, ex
officina typographica Antonii Chaillot prope collegium
Societ, Jesu. MDC, LXXX. Il serait trop long et inutile
d'indiquer les titres des autres exercices de ce genre que nous
avons pu recueillir. Toutefois, nous croyons pouvoir noter
au passage les noms , toujours intéressants pour Thistoire
locale, des jeunes philosophes :
C'est le 19 juillet 1687, Joannes Bourdeaux, Nivernus;
— en 1726, le vendredi 7 juin, il y a deux combattants :
I
— lOI —
Beroardus de La Grange^ Nivemus; Petrus Chatellain,
aussi Niyemtis; — le samedi 6 juillet de la même année
1726, deux autres combattants : Andréas Bonneau, Rémi"
liensis; Dionisius*Philbertus |Brune , Nivemus (i); — le
8 janvier 1727, c'est Antonius Caziot, Nivemus; — le lundi
T2 mars 1731, il y a deux lutteurs: Franciscus Glault^
Nivemus; Petrus Bureau , Sancti Pétri monasterio ; — de
même, le vendredi 14 décembre: Franciscus de Colons;
Hyeronimus Vignault; — de même aussi ^ le samedi
12 janvier 1743, Joannes-Baptista Le Jault^ Nivemus, et
Pfailippus Dapremont.
En 1773, le lundi 23 août, les thèses sont soutenues par
Gabriel Merle, de Nevers, Nivemus, qualifié de clericus ;
Jacques de La Planche Saulet, aussi Nivemus, et Ludovicus
Bezille^ Nivemensis; — Tannée suivante, il y a six combat-
tants : trois pour l'exercice d'hiver et trois pour Pexercice
d'été. Ces trois derniers sont : André-Joseph Clément^
Nivemus; Claude Décantes, Nivemus; Louis Robinot,
Decysiacus. Nous n^avons qu'un fragment de ce programme.
Aux deux exercices de l'année 1786, le lundi 3 avril et le
jeudi 24 août, prennent part Charles Marandat, de Varennes,
Nivemus; Marin-Guillaume Doin, aussi Nivemus, et Pierre-
Antoine Bernet, Nivemensis, — En 1788, le lundi 7 avril,
il) Les programmes de 1726 à lySi, imprimés par René Pinardeau,
sont illustrés d'un grand cartouche présentant un nom de Jésus, I H S,
coupé au milieu par une longue croix, dont Pextrémité repose sur
un cœur percé de trois clous. Tout le cartouche est illuminé par les
rayons sortant du nom divin. Au-dessus brille dans les nuées le nimbe
triangulaire, symbole de la Majesté divine.
Le programme de 1687 offre une jolie petite gravure représentant
le nom de Jésus tout rayonnant au milieu des nuées célestes. Deux
anges soulèvent un grand voile qui semblait le recouvrir et deux
saints de la compagnie, la tête radiée et revêtus du grand manteau
de cérémonie, se tiennent à genoux pour Tadorer. L'H du monogramme
porte une croix et au-dessous sont les trois clous de la crucifixion,
adoptés par la Société de Jésus. D^autres programmes offrent aussi
des vignettes, mais moins intéressantes.
— 102 —
les Conclusiones philosophicœ, ex prolegothenis et ex logîca
sont soutenues par François-Xavier Frossard, Nivemensis;
Jacques-Marie Miron de Marigny, Nivemus; François-
Joseph Haly, Nivemus ; François Trochault, Nivemensis,
En 1790, les mêmes conclusions qu'en 1788 sont soutenues
à deux reprises : les lundi et mardi 22 et 23 mars, les mardi
et vendredi 1 7 et 20 août, par sept élèves, quatre de Nevers :
Leodegarius Vanson, Petrus Chambrun-Maranger, Guil-
lelmus Dechamps , Ludovicus Masson ; deux Nivernais :
Franciscus Ruez, Jacobus Claustre et Ludovicus Potier^
Castrochinensis (de Château-Chinon).
Nous avons pu réunir encore dans notre collection deux
beaux fragments de grandes thèses illustrées, dont l'une en
parchemin, et deux autres thèses parfaitement intactes et qui
méritent d'être décrites :
Le texte et la date de ces deux thèses sont d'ailleurs
absolument semblables; elles ont pour titre: Thèses phi^
losophicœ ex logica, ex ethica et devaient être soutenues^
pendant les jours (les quantièmes n^ont pas été marqués)
d^août de Tannée 1741 , à trois heures et demie, par Nicolas
de La Chassagne, insignis ecciesiœ Nivemensis canonicus;
Jean-Baptiste Grillot, sodalitii prœfectm Nivemus ; Jean-
Paul Sionest, sodalis, Nivemus; Guillaume Décante,
Nivemensis ; Lazare Rebreget , sodalis , Ulmensis (de
Lormes); Pierre-Gaspard Vignier, sodalis y Nivemus.
On lit en bas: Pro actu publico , et dans un élégant
cartouche: Niverni apud Ludovicum Le Febvre, coîîegiî
Soc, Jesu, typographum.
L^une de ces thèses, qui mesure soixante-quinze centi-
mètres de hauteur sur cinquante de largeur, est occupée dans
la première moitié par une magnifique gravure représentant
saint Paul prêchant devant TAréopage; l'apôtre est debout,
une main élevée, Tautre reposant sur Tépée de son martyre;
ses doctes auditeurs sont assis ou debout appuyés contre des
colonnes. Ils écoutent avec une attention mêlée de surprise,
et quelques-uns laissent échapper des sourires moqueurs.
— io3 —
Derrière Papôtre sont debout trois personnes qui paraissent
tout particulièrement impressionnées; on reconnaît Denis
TAréopagite et mulier nomine Damaris^ dont parlent les
Actes des Apôtres. C'est vraiment grand et magistral. Cette
gravure est signée : A Paris, che{ L. Cars^ g^ ord^ du roy,
rue Saint-Jacques.
Au-dessous est un tableau encadré, très-hardiment dessiné,
et de mêmes dimensions que la gravure , au milieu duquel
est figuré un voile oîi sont imprimées les propositions de la
thèse. On voit, à n*en pas douter^ que cette seconde partie,
également gravée à Paris chez L. Cars, au très-saint Nom de
Jésus, était destinée à être livrée aux différents imprimeurs
qui publiaient les thèses des collèges des Jésuites. Ce qui le
prouve bien , c^est que le titre imprimé à Nevers , ainsi que
la dernière ligne, Pro actu publico, sont en partie sur le
voile et sur le cartouche de la gravure.
La seconde thèse , de même dimension que la précédente,
représente uniquement un grand tableau encadré. Les deux
colonnes de chaque côté sont en partie cachées par deux
anges debout qui soutiennent un voile et un grand cartouche
portant ces mots : Zelo impietatis vindici*
Cette pancarte est vraiment fort belle et ne porte aucun
nom de graveur; mais celui de l'imprimeur de Nevers se
trouve comme sur la précédente, ce qui confirme notre
observation relativement à la gravure (i).
On a pu remarquer, à la suite des noms de plusieurs
répondants de cette thèse, une expression qui ne s'était pas
encore rencontrée dans aucun des exercices du collège : trois
(x) M. Trévédy, vice-président de la Société archéologique du
Finistère, a décrit dans le Bulletin de cette société (juin 1886) une
thèse illustrée du collège des Jésuites à Quimper en xySa, qui offre
également la même disposition. Le sujet seulement est différent : il
représente la Sainte-Famille.
La pancarte ne porte ni le nom du graveur ni celui dePimprimeur;
mais si elle a été imprimée à Quimper, il est certain qu^elle n'y a pas
été gravée; c^est la juste conclusion de l'auteur.
— 104 ""
des répondants ont la qualification de sodalis (compagnon;,
un autre a le titre de sodalitii prœfectus (chef de la com«
pagnie) , d'où il semble qu'il s^agit du préfet et des membres
de la congrégation établie au collège (i).
§ IV.
Quelques notes sur les exercices scolaires et surtout les
noms des élèves qui y ont pris part termineront maintenant
cette étude sur notre vieux collège de Nevers.
Les exercices publics fixés à la fin de Tannée, pour contrôler
la force des études , étaient annoncés aussi par de grandes
affiches. Un fragment de celle de 178 5 que nous avons
recueillie porte, au-dessous des trois lettres D. O. M.,
rinscription suivante : In solemnibus affixorum ludis
explicabunt in collegio Nipemensi Societatis Jesu secun--
dani, augusti diebus i^ et 20^ i735, Q. Horatii Flacci
opéra omnia.
Les noms des élèves appelés à répondre sont :
Claudius Nicot, Fran. -Robert Gascoing de Bernay,
Petrus Portepain , Philbertus Fougère , tous qualifiés :
Nivemus; puis Guillelmus Guillemain, Corbiniacus; Lau-
rentius Martin de Lavaut, Nivemensis.,..
Un autre fragment de Tafiiche de 1737, indiquant les
examens pour les 3o et 3i août, nomme: Antonius Gondier
de La Vallée, Diennensis; Claud.Jac. Berger du Coulom-
bier, Charitœus; Joannes-Bapt. Grillot, Nivemus; Phîl-
bertus-Nicolaus Morlé, Tanaicus; Antonius Bourré, Claud.
(i) Cette interprétation se trouve confirmée dans la Tlièse illustrée
de Quimper déjà citée où , parmi les trente répondants il y a neuf
sodales qui, d'après M. l'abbé Peyron, étaient des membres de la
congrégation du collège de Quimper.
Nous devons ici remercier M. Trévédy, qui nous a £ait l'honneur
de reproduire, aux premières lignes de son travail, l'extrait du
compte-rendu de la séance de la Sorbonne du 3o avril 1886 relatif
à notre lecture.
— 105 —
Commercy du Monteau^ Dionisius Glaut, Franciscus
Eafert, Franciscus Septier, Gilbenus Landelle, Ludovicus
Roy, Lud.*Fraac« Simonin du Vernay, Lud. Gascoing de
M^gRy> Petrus Brecat, Joannes RoUet, Hugo Chambrun,
Stephanus Septier de Rigny, tous de Nevers; Henricus
Donny, Oniacus; Gilbertus Cocquille, Saugensis,
Dans les dernières années ^ le titre avait été modifié :
au-dessous des trois lettres D. O. M., on lisait: Solemni
prœmiorum ab illustri cipitate Nivemensi positorum
distributioni , exercitatione publica prœludent collegii
tfivemensis adolescentes lectissimi.
Cette solennelle dédicace devait rappeler à perpétuité ce
que nous avons dit, dès les premières lignes de cette étude,
concernant la générosité du Corps-de- Ville à l'endroit du
collège.
Pour mieux en fixer la mémoire dans le souvenir des
élèves, une feuille imprimée, placée en tête de chaque livre
de prix, portait, du moins dans la seconde moitié du dernier
siècle, cette inscription que Ton rencontre assez fréquemment :
Ex munificentia
nobilissimce civitaiis
Nîvernensis
quœ prœmium posuit
in perpetuum
auditoribus
in coUegio ejusdem civitatis
ingenuus adolescens.,,
palmare hoc volumen
in... ejusdem collegii schola meritus
et consecutus est.
Die 6ti mensis 7MM anno 1770.
In cujus rei fidem subscripsi, et sigillo
urbis munivi.
(Suit la signature du sieur Miné, principal du collège.)
Plus anciennement, le préfet des études écrivait lui-même
TattestatioUi et nous croyons être agréable au lecteur en
T. m, 3* série. 14
— fo6 —
donnant la copie de celle que nous trouvons écrite* de I9 main
du Père Roussel, sur un beau volume de cinq cents pages,
très-élégamment relié , des huit livres des Apophtegmes
d'Erasme, bien entendu tout en latin, lequel se vendait à
Paris, apud Joannem Roigny, subBasilisco, in vicoJacobœo;
>l/7;zo M.D.XXXIII.
Ce volume ferait-il aujourd'hui les délices des adolescentes
ingenui de la classe de troisième ? Nous n'oserions l'affirmer.
Quoi qu'il en soit, voici le texte du Père préfet des études :
C JESUS, MARIA, JOSEPH.
« Ego infrascriptus coïlegii Nivernensis Societatis Jesu
studiorum prœfectus testor , ingenuum adolescent^m
Joannem Lacollancelle in 4ertia primum solutœ orationis
latinœ prœmium meritum, et consecutum fuisse ; hocque
libro, in publico solemnique theatro, spectante ingenti,
numerosaque populorum frequentia , astante celeberrima
virorum illustrium corona^ et applaiidente liberatorum
hominum, insignique doctrina, et eruditione, prœditorum
consessu summa cum omnium laude, gratuîatione plausu et
admiratione donatum fuisse. In cujus rei Jidem, nomen
meum cum sigillo coïlegii nostri apposui, die quarta mensis
septembris, anno Dominimillesimo sexentesimo, sexagesimo
nono.
» D. Roussel, Soc, Jes.,
» Stud. prcef, (i) »
En regard du texte se trouve Pempreinte, sur pain à
cacheter recouverte de papier, du sceau du recteur. Le nom
de Jésus avec une croix sur TH et les trois clous au-dessous,
(i) Une attestation à peu près semblable, quoique moins solennelle,
également délivrée par le Père préfet des études pour un prix de
discours, a été reproduite par M. Anatole de Charmasse, dans sùù
beau travail publié en 1884, sous ce titre : Les Jésuites au collège
d*Autun. (1628-1713.)
— I07 —
au milieu d'une couronne radiée et flamboyante^ et autour,
ces mots : rectoris, colleoii. nivern. socie. iesv.
Post'Scriptum. — Pendant la correction des épreuves
de ces dernières pages ^ la lecture du XW volume des
Mémoires de la Société des antiquaires du Centre {iSSô-
1887) nous a fait découvrir, dans un remarquable travail
de M. P. Dubois sur le Père Terrasse-Desbillons , quelques
notes qui se rattachent directement à l'histoire de notre
collège. En 1729, en effet, le.Père Desbillons, comme on
rappelait communément, était déjà , à peine âgé de dix-huit
ans, professeur de rhétorique à Nevers, où il demeura deux
ans.
C'était, parait-il, un professeur fort doux, aimé, adoré de
ses élèves ; un causeur aimable, très-instruit, d'une mémoire
prodigieuse et défenseur intrépide, envers et contre tous, de
la littérature ancienne et des auteurs du grand siècle. On
sait qu'il dut surtout sa réputation à ses fables latines,
devenues classiques, même de son vivant (i).
Il se plaisait également , dans ses loisirs , à faire des
comédies, voire même des tragédies, dont plusieurs furent
représentées à Louis-le-G]:and ; et tout indique qu'il avait
composé la petite pièce: Fabula, intitulée: Vota, jouée à
Nevers par ses élèves de rhétorique le 16 janvier 173 1,
Dans le,catalogue de ses manuscrits conservés à Mannheim
et qui contient soixante-quatorze numéros , on rencontre en
effet plusieurs pièces de ce genre : Schola senum , comœdia
(en prose); — Farter sui anxius^ fabula comica; — Le
Misanthrope, comédie en prose; — L'Ecole des oncles^
comédie en trois actes, en prose; — V Emporté; — UEdu--
cation négligée; — Annibal, tragédie en prose avec prologue
(i) Fabularum jEsopiarunit libriquinque pr tores, il y en a eu cinq
éditions, dont la première à Glascow (Ecosse), en 1754; — Fabularum
^sopiarum, libri decem, il y en a eu huit éditions, dont la dernière
à Tours, chez Marne, en i885.
— io8 —
en vers ; — Ecole des pères; — Ecole des vieillard» f — ^
L Education négligée; — Bouquinet et Trottin, scènes
comiques contre les bibliophiles, etc.
Ajoutons encore, pour les bibliophiles nivernais, dans le
catalogue des imprimés: Cantiques spirituels, six feuilles
volantes, à Nevers, chez R. Pinardeau, et dans le catalogue
des manuscrits , deux pièces latines essentiellement niver-
naises, que nous aurions grand plaisir à connaître et à
publier dans notre Bulletin ; n® 12 : De Ligeri exundante
— ad amicum epistola ; n*» 1 3 : Iter Nivemense , stylo
horatiano.
Après la suppression de la Compagnie de Jésus , le Père
Desbillons s'était exilé en 1764 à Mannheim , alors capitale
du Palatinat du Rhin, le plus beau pays de l'Allemagne,
emportant avec lui tous ses manuscrits et le trésor de sa
bibliothèque, qui comprenait 17,000 volumes.
Nous avons rencontré avec plaisir dans une de ses lettres,
datée de 1764, un mot qui rappelle le souvenir de son trop
court passage dans notre ville. Parlant de sa chambre très-
grande et qui pourra contenir tous ses livres , il ajoute :
c J'ai sous mes fenêtres le Rhein, qui est large comme la
Loire à Nevers, mais bien plus profond... »
Enfin, signalons en terminant, une variante du texte de
l'inscription latine du curé d'Apremont (i) :
Si qua sede sedem quœ sit tibi commoda sedes
In illa sede sede, nec ab illa sede recède.
D'après Tauieur du travail que nous parcourons avec tant
d'intérêt, Tusagc de la langue latine était encore tellement
en estime au dix-huitième siècle que le journal lui-même ne
dédaignait pas de parler latin. Même devant des femmes,
dans le salon de M^e d'Epinay, Tabbé Galliani pouvait
improviser Tépigramme latine qubn vient de lire à l'adresse
(1) Voir la note de la page 88.
— I09 —
de rambasôâdeur d'Espagne, le comte de Fuentes , qu'on ne
voyait jamais s'asseoir dans un salon et qui papillonnait
sans cesse.
F. BOUTILLIER,
Curé de CoulangeS'leS'Nevers,
SEANCE DU 28 OCTOBRE 1886.
Présidence de M. le comte db Soultrait, président.
Etaient présents : MM. de Soultrait, Roubet,
Tabbé Boutillier, Duminy, Hippolyte Blanc, de
Flamare, de Villenaut, Tabbé Fouché, le docteur
Subert , Tabbé Soyer, René de Lespinasse , Tabbé
Pot , Langellé , de Dreuille , Cheminade de
Quirielle.
M. le Président donne lecture d'une lettre de
M. le Ministre de Tinstruction publique, invitant
la Société à donner son avis sur l'opportunité du
changement de date de la réunion annuelle des
sociétés savantes qui se tient habituellement pen-
dant les vacances de Pâques. M. le Ministre
observe que les vacances de la Pentecôte ayant
réuni le plus de suffrages, il est disposé à choisir
cette époque. A la presque unanimité, la Société
émet aussi le vœu que les vacances de la Pentecôte
soient choisies de préférence à celles de Pâques.
M. le Président lit une autre lettre adressée par
M. Alexis Fruit, correspondant d'un journal litté-
raire de Paris, le Forum français illustré, qui se
— 110 —
propose de donner des comptes - rendus dt^a
Bulletins des diverses sociétés de province, et
demande Tenvoi de la collection de nos Bulletins^
en échange des numéros du journal. La Société
prie M. Tabbé Boutillier, à qui la lettre avait été
adressée, de demander au préalable Tenvoi des
numéros parus de la nouvelle publication et de
déclarer qu'au .surplus, la Société ne pourrait en
retour que donner les Bulletins en cours de publi-
cation, mais non la collection entière.
La parole est donnée à M. Tabbé Pot, curé de
Magny. Après avoir, déposé sur le bureau un
certain nombre de médailles romaines, quelques
pièces du moyen-âge et d'autres plus récentes^
jetons de fabrique allemande, etc., toutes pièces
trouvées à diverses époques sur le territoire de sa
paroisse, M. Tabbé Pot en lit les descriptions.
Ce sont, outre une pièce de la colonie de Nîmes,
des grands bronzes de Domitien, Néron, Trajan,
Commode^ des petits et moyens bronzes de
Gratien, Tétricus, Constantin... Bien qu'il ne
s'en trouve point d'inconnues qui méritent une
mention spéciale , M. le Président remercie notre
collègue et déclare qu'on ne saurait trop encou-
rager cet exemple destiné à garder le souvenir des
découvertes faites dans le pays. En 1869, M. l'abbé
Pot avait déjà lu un rapport relatif à différentes
trouvailles faites sur le territoire de sa paroisse.
(Voir tome IV, 2® série de nos Bulletins y pages
260-263,)
M, l'abbé Boutillier fait part à la Société , aw .
— ïll —
nom d'un de nos compatriotes habitant Paris ,
M. le docteur Warmont , de Tenvoi d'une étude
intitulée : Notes pour seroir à Phistoire des
émaux de NeverSy recueillies par un Nivernais.
Cette étude, dans la pensée de Tauteur, devait
servir de matériaux pour une histoire des émail-
leurs qui serait le pendant de celle des verriers.
M. l'abbé Boutillier a répondu que le temps lui
manque absolument pour entreprendre cette nou-
velle étude, et que d'ailleurs les documents
feraient défaut.
La lecture du travail de M. Warmont est écoutée
avec intérêt et amène quelques observations.
Plusieurs membres ayant émis l'opinion que les
œuvres d'émail réunies par notre compatriote ne
doivent guère remonter au-delà du dix-huitième
siècle, M. l'abbé Boutillier répond en rappelant le
mémoire des objets oflFerts en 1622 à la reine
d'Autriche, lors de sa venue à Nevers : parmi ces
objets se trouvaient deux coupes avec des oiseaux
dedans, un poisson émaillé, un chien et un panier.
On ne saurait s'étonner de ne plus retrouver de
spécimens de ces anciens émaux, en raison de
leur extrême fragilité.
M." de Soultrait soumet à la Société trois
volumes manuscrits de Parmentier, qu'il vient
d'acheter pour sa bibliothèque nivemaise.
L'un est une* copie , d'une écriture superbe , de
l'histoire sommaire des évêques de Nevers, de
613 pages, dont la dernière porte seulement le
nom de Jean- Antoine Tinseau, 91® évêque de
— 112 —
notre diocèse. Il serait utile de coUationner cet
exemplaire avec les autres copies qui existent de
cet ouvrage.
Les deux autres volumes autographes de
Parmentier, renferment les Mémoires historiques
sur la ville de NeverSj publiés par Antony
Duvivier, en 1 842, sous le titre de : A rchioes de
Neoers ou Inventaire historique des titres de la
ville. (Deux vol. in-8°. Paris, Techener.)
Bien que le manuscrit ne soit point inédit, il est
intéressant en ce qu'il offire divers chapitres qui ne
sont point dans la publication de Duvivier : M. de
Soultrait cite en particulier un chapitre assez long
sur les auteurs nivemais.
Ces trois volumes, reliés en maroquin rouge et
dorés sur tranche, avaient sans doute été destinés
à être oflFerts en hommage, probablement au duc
de Nivernais. On a peine à comprendre comment
Parmentier, très-occupé de ses fonctions officielles
et de ses travaux historiques, s'est donné la peine
de transcrire avec tant de soin un manuscrit qui
n'a pas moins de 1047 pages.
M. de Soultrait croit avoir vu ces volumes, il y
a environ quarante ans, chez M. Bourdereau, fils
adoptif de Parmentier, qui possédait aussi un
manuscrit de Coquille, divers autres documents
concernant notre province , et le seul exemplaire
qu'il ait jamais rencontré du premier volume de
\ Histoire du Nivernais^ de Parmentier.
Sur la proposition de MM. Boutillier et Subert
M. le docteur Warmont est élu membre corres-
- ii3 —
pondant de la Société. M. Roger de Quirielle est
également admis comme membre de la Société ,
sur la proposition de M. le comte de Soultrait et
de M. Tabbé Boutillier.
SÉANCE DU 2 s NOVEMBRE 1886.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président; Tabbé Boutillier, vice -président ;
Ernest de Toytot, secrétaire; Canat, conser-
vateur du musée; Duminy, archiviste; de Cha-
rant, Tabbé Soyer, Langellé, Griveau, Tabbé
Fouché, de Villefosse, Julien, de Flamare, Arthur
de Rosemont, de Pierredon. Ad. de Rosemont,
le docteur Subert, H. Maraudât, Ed. Maraudât,
de Lespinasse, Ch. Col.
La Société scientifique de la Haute - Loire
demande à faire l'échange de son Bulletin avec le
nôtre. La Société pense qu'il y a lieu d'accepter
cet échange.
Le président lit une lettre du ministère de Tins-
truction publique , relative aux communications à
la section des sciences économiques et sociales.
La lettre ministérielle attire spécialement notre
attention sur une enquête à faire concernant les
assemblées générales des communautés d'habi-
tants.
T. m, 3* série. i5
— "4 -
M. Tabbé Boutillîer fait remarquer dans le der-
nier Bulletin de la Société éduenne une notice qui
intéresse spécialement notre pays : Les Faïences
de La Nocle et cfApponay. Cet article, d'ailleurs
très-court^ sera inséré au Bulletin de la Société
nivernaise, avec un acte de vente des dernières
faïences de La Nocle en 1748, dont M. Tabbé
Boutillier a retrouvé la copie.
M. Arthur de Rosemont fait une communication
verbale sur le prochain congrès scientifique inter-
national des savants catholiques^ qui doit se réunir
au mois d'avril 1887 à Paris.
M. le comte de Soultrait donne lecture dn
premier chapitre d'un magnifique travail intitulé :
Le château de La Bâtie et ses seigneurs ^ et qui
sera publié à Moulins.
FAÏENCES D APPONAY ET DE LA NOCLE.
Le dernier volume des Mémoires de la Société éduenne
(nouvelle série, t. XIV, ï885, pages 97 à 1 13) contient deux
notices qui intéressent tout spécialement le Nivernais.
La première a pour titre : La charte de Monceaux^le^
Comte.
On y trouve énumérées toutes les coutumes et franchises
consuetudines et libertates accordées en 1 247 aux bourgeois
de Monceaux-le-Comte par Mathilde de Courtenay, comtesse
de Nevers et d'Auxerre.
Nous devons savoir gré à M. Anatole de Charmasse
d'avoir publié un document aussi intéressant.
— ii5 —
La seconde notice, sans nom d^auteur, qui semble s'être
égarée dans les Mémoires de la Société éduenne , car c'est
dans le Bulletin de la Société nivernaise qu'elle devait
naturellement se rencontrer, a pour titre : Note sur les
anciennes fatptceries d*Apponay et de La Nocle {\). Elle
est le complément naturel des notes insérées dans VHistoire
d€s gentilshommes verriers et des verreries de Nevers et
du Nivernais (2], sur les verreries qui existaient également
dans ces deux localités.
Comme cet article est d'ailleurs très-court, nous proposons
tout simplement de le reproduire dans notre Bulletin , en y
ajoutant l'analyse d'un curieux acte de vente de faïences de
La Nocle du 7 décembre 1748, probablement inédit et qui
mérite , ce nous semble , d^étre connu ; il nous apprend , en
effet, quels étaient les objets fabriqués à La Nocle. C'est, à
proprement parler, l'acte de liquidation de cette manufacture
qui avait eu son heure de prospérité.
I.
NOTE SUR LES ANCIENNES FAÏENCERIES d'aPPONAY
ET DE LA NOCLE.
Il existait autrefois dans notre voisinage deux faïenceries
dont le nom et les produits ne sont plus guère connus
aujourd'hui. Le peu de durée de leur existence les a fait
oublier; leurs traces se sont effacées, et il s'est établi ^ entre
leurs œuvres et celles des fabriques plus durables et plus
célèbres de Nevers, une confusion qu'il convient de ne pas
laisser subsister. Malgré Tobscurité qui les a enveloppées en
naissant, il est cependant possible de déterminer leur origine,
de préciser l^époque de leur activité, de distinguer le carac-
tère de leur fabrication , et l'accomplissement de cette tâche
(1) Tome XIV, pages 141-145.
(2} Bulletin de la Société nivernaise, t. XII, pages 239-243.
— ii6 —
permettra, croyons-nous, d'inscrire désormais leur nom sw
l'inventaire des anciens établissements céramiques de notre
pays.
La première de ces deux faïenceries est celle d'Apponay,
près de Rémilly, dans le département de la Nièvre. Les
Chartreux possédaient en ce lieu un monastère qui remontait
à Tannée 1185. Après avoir défriché des forêts, établi des
étangs, créé des pâturages et des cultures, les fils de saint
Bruno, toujours fidèles au grand devoir du travail, avaient,
tourné leur activité féconde d'un autre côté. 11 ne leur
semblait pas que le défrichement et la mise en valeur du sol
leur aient donné quelque droit au repos, et c'est précisément
à l'époque que Ton se plaît à peindre comme un temps de
relâchement et d'inaction que les Chartreux d'Apponay
vinrent demander aux formes si nombreuses et si variées de
l'industrie une tâche nouvelle. Leur premier essai en ce
genre avait été celui d'une verrerie qui était en plein
exercice en 1682 et qui suspendit bientôt sa fabrication
après une courte existence. Sans se laisser décourager par ce
résultat, dom Louis de La Barre, qui était alors prieur
d'Apponay, eut la pensée d'établir une faïencerie tant pour
utiliser les (ours et bâtiments nouvellement construits que
dans le but de combler le déficit créé par l'insuccès de la
verrerie et de réparer ainsi les pertes éprouvées par sa
communauté.
La première mention que nous ayons trouvée de la
faïencerie d'Apponay remonte au 17 février 1727. Elle
résulte de l'acte de mariage, passé à cette date, à Commagny
« entre Jean-Claude Dubourg, tourneur en fayence, fils de
M. Louis Dubourg, manufacturier de la fayence d'Apponay,
paroisse de Rémilly, et de feue Marie Miette et honneste
fille Magdeleine Griveau, fille de feu M. Jacques Griveau,
vivant menuisier, et de Marguerite Boulenot ». Nous
trouvons ensuite, à la date du 8 mars 1728, t le baptême
de Louis, fils de Jean Dubourg, faïencier à Apponay, et
d'honneste femme Magdeleine Griviot. » On rencontre enfin
— 117 —
cette dernière mention à la date du 20 novembre 1730:
« Baptême de Marguerite, fille de M. Jean Dubourg, maître
faïencier dans la paroisse de Rémilly, et de Magdeleine
Griveau. > Il n'existe plus ensuite aucun acte relatif aux
faïenciers d'Apponay. Le créateur de ces manufactures, dom
de La Barre, avait cessé d'exercer les fonctions de prieur en
1727, et dom Louis Lancieux, qui lui succéda, ne parait pas
avoir partagé les goûts et les aspirations industrielles de son
prédédesseur.
Pendant que les Chartreux faisaient cet essai à Apponay^
le duc de Villars tentait la même expérience dans les terres
de son marquisat de La Nocle. Dans ce deuxième atelier, on
retrouve quelques-uns des noms que nous avons déjà
rencontrés dans le premier, et cette conformité permet de
croire que les ouvriers attachés à ces deux fabriques appar-
tenaient à la même colonie et avaient la même origine.
Ainsi, la plus ancienne mention de la fabrique de La
Nocle, en date du 17 octobre 1728, est Pacte de « baptême
de Claude-Marie, tille de M. Dubourg, maître faïencier à
La Nocle, et de damoiselle Françoise Veau. Parrain:
M. Claude Gayot, receveur général de Mgr le mareschal de
Villars ; marraine : damoiselle Marie-Marthe Lecœur. i La
seconde, du 28 février 1729, nous fait connaître une
troisième branche de la famille Dubourg appartenant,
comme les précédentes, à la colonie industrielle de la
région : « Mariage de Louis-François Potier, faïencier, fils
de Denys Potier, faïencier, et de Marie Peltier, et Marie
Dubourg, fille d'Emé Dubourg, faïencier, et de Jaqueline
Martin. » La suite des registres de La Nocle nous fait
connaître le nom de quelques-uns des autres faïenciers
attachés à cette fabrique.
A la date du 12 juin 1729, on trouve le baptême de
€ Pierre, fils de Joseph Dépaty, faïencier, et de Jeanne
Raffin. Parrain: M. Pierre Martin, commis à Nevers;
marraine: damoiselle Marie-Marthe Lecœur. » De même,
au 19 mai 1730, nous rencontrons Taae de baptême de
— ii8 —
c Louis, fils de Louis Potier, faïencier, et de Marie
Dubourg. Parrain: M. Louis Dubourg, faïencier; marraine:
damoiselle Françoise Veau. » On ne se bornait pas à fàbri*
quer à La Nocle une faïence grossière et sans ornements.
Des peintres-décorateurs étaient chargés d^appliquer aux
pièces fabriquées les dessins variés et les couleurs éclatantes
qui plaisent encore aujourd'hui. C^est ce qui résulte d^un
acte du 26 septembre 1730, concernant le mariage de
M. Jacques Poirson» peintre -faïencier, fils du feu Gilles
Poirson, et de feue Marie - Geneviève Bourinat^ et de
damoiselle Etiennette Dubourg, fille de M. Louis Dubourg^
maître faïencier, et de feu dame Marie Miette.
La dernière mention qui concerne les faïenciers de La
Nocle est Pacte dUnhumation de Pierre Jolivet, faïencier,
âgé d'environ cinquante-cinq ans, daté du 18 mars 1782.
On ne trouve plus ensuite aucune trace de cette fabrique^ qui
ne paraît pas avoir eu plus de succès et de durée que celle
d^Apponay. Etablies l'une et l'autre loin des centres de
population et débouchés, elles ne purent se maintenir et
lutter avantageusement contre les fabriques de Nevers , dont
le succès rendait toute concurrence difficile. Malgré sa
courte durée, la faïencerie de La Nocle est encore citée
comme en activité et même comme prospère, dix ans après
qu^elle avait cessé d^exister, dans le Dictionnaire universel
du commerce publié en 1741 par Savary des Brûlons : c La
meilleiyre argile, dit-il, se trouve dans les terres du marquisat
de La Nocle , appartenant au duc de Villars.
» On y a établi depuis peu une excellente fayancerie , où
l'on fabrique des ouvrages de toutes espèces, de meilleure
qualité que celles de Nevers et aussi belles que celles de
Rouen qui ont passé jusquUci pour les plus parfaites. »
Le décor de Rouen était celui que la faïencerie de La
Nocle avait principalement adopté, à Texemple des fabriques
de Nevers qui s'en inspiraient depuis longtemps. Mais si ces
dessins, que les différentes faïenceries s'empruntaient Tune
à Pautre, peuvent créer quelque confusion entre leur»
- 119 —
produits ^ la nature de l'argile propre à chacune permet de
les distinguer plus sûrement. Ainsi , tandis que la terre
employée à Nevers et à Rouen est d*un jaune pâle , celle de
La Nocle est au contraire d'un rouge brique un peu foncé ,
qui permet de reconnaître immédiatement son origine , sans
erreur possible.
Quoique ces renseignements soient peu importants , ils
nous font cependant connaître avec exactitude Porigine et
la date des deux faïenceries d^Apponay et de La Nocle, et
permettent de déterminer Porigine et la date de la première,
qui était totalement inconnue, de préciser Pépoque d'activité
de la seconde, que Savary avait prolongée trop loin, et
d'indiquer à quel signe certain les produits de l'une et de
l'autre peuvent être reconnus.
IL
VENTE DE faïence PATTE PAR LE SIEDR MARIE - CLAUDE GAYOT,
AU tHOFIT D^ANTOINE CHARDON ET AGATHE DURANTON, SA
FEMICE, MOYENNANT I,6oO LIVRES.
Par» devant le notaire royal soussigné, résidant en la
paroisse de Cercy-la-Tour, fut présent en sa personne le
sieur Marie-Claude Gayot, bourgeois, demeurant en la
paroisse de La Nocle, lequel volontairement a, par ces
présentes, vendu, avec promesse de garantie, à Antoine
Chardon et Agathe Duranton, son épouse, marchands
faïenciers, demeurant de présent en la ville de Nevers,
paroisse de Saint*Sau veur, présents , stipulant et acceptant
ladite vente.
C'est à savoir c toutes les/ayences blanches et bleux qui
sont, scavoir: au château de La Nocle, dans la gallerie du
corps de bastiment à la mansarde », plus dans la petite
chambre attenant le grand escalier proche ladite grande
galerie, toutes celles qui sont dans les deux chambres de la
tour carrée » dans celle de la tour ronde proche le portail et
celles qui sont dans le grand magasin du grand fenil aux
basses-cours , à Texception de quatre douzaines marchandes
d'assiettes rebut et quatre douzaines belles bleues aussi
marchandes^ de deux douzaines marchandes de pots de
chambre belle bleue et d'une douzaine marchande de blanc,
d'une douzaine de jaddes en douze pièces séparées de toutes
grandeurs, de deux douzaines Atpots à Veau marchandes en
bleu et une douzaine de blanc, de Aoxxzt seaux ta douze
pièces séparées, de deux cuvettes et deux douzaines mar-
chandes de tasses à café belle bleue, soucouppes^ gobelets,
moutardiers, écritoires et autres petites marchandises , et
trois ou quatre douzaines en belle bleue ou autres sortes de
marchandises et toutes belles à choisir, au compte de
marchands faïenciers, et de belle à choisir, excepté les
quatre premières douzaines en blanc qui seront rebut , mais
à choisir dans le rebut blanc , à la charge de vider lesdits
magasins dans quinze mois à compter de cejourd'hui ; de
débarrasser tous les magasins qui sont dans le château dans
les mois de mars , avril et mai prochains , et les mettre dans
les grands magasins du fenil ; emmèneront et vendront
lesdits acquéreurs de ladite marchandise dans les commen-
cements et à proportion de bonne et de mauvaise, jusqu^à la
fin dudit enlèvement ou payement, soit pour assurance du
payement, pour qu'ils ne laissent pas la mauvaise pour la
dernière.
Ladite vente ainsi faite sous les réserves ci -dessus et
encore pour et moyennant la somme de sei:[e cents livres
et 24 livres d'éirennes , qui ont été payées présentement en
un louis, dont quittance, et ladite somme de 1,600 livres
payable audit sieur Gayot, au château de La Nocle ou en la
maison de Maulais, où il demeurera, savoir: dans le courant
de chaque mois au moins 150 livres, à commencer le
premier payement au 20 du présent mois..., et ainsi à
continuer de mois en mois jusqu'en fin de payement...; au
payement dudit prix et en exécution du présent marché
lesdites parties ont obligé et hypothéqué' tous et un chacun
— 121 —
leurs biens meubles et immeubles, spécialement les mar-
chandise» ci-dessus vendues à quels lieux et parts qu^elles
puissent être transportées...; même ledit Chardon pour la
validité des présentes a prêté autorité à ladite Duranton, sa
femme, par elle prise et acceptée, et procédant sans icelle a
renoncé et renonce par ces présentes à l'article 14 de la
coutume de Nivernois, titre des droits appartenant aux
femmes , à elle expliqué par le juré soussigné en présence des
témoins , par lesquels il est dit quMne femme renonçant à la
communauté de son mari, vingt-quatre heures après son
décèst demeure quitte et libérée des dettes de leur commu-
nauté , ce qu'elle a dit bien comprendre et y a expressément
renoncé, et à tous autres droits, lois, coutumes et ordon-
nances faites et introduites en faveur des femmes; et ont
lesdites parties élu leur domicile irrévocable, même en cas
de mort, savoir: ledit sieur Gayot en sa maison de Maulais
et lesdits acquéreurs en la maison de M. Perrin, cabaretier
€ d'Apona >, paroisse de Rémilly...; et en outre donneront
lesdits acquéreurs à compte sur les 1,600 livres ci-dessus,
36 livres audit sieur Gayot lorsqu'ils prendront la première
voiture qui sera demain prochain , et au cas que les susdits
payements de 150 livres par mois ne fussent pas faits audit
sieur Gayot régulièrement..., le présent marché sera et
demeurera résilié et annulé , sans autre forme ni formalité
de procès , à la volonté dudit sieur Gayot , etc. — Signé :
Garillan, notaire royal.
Quelques notes inscrites sur la couverture du dossier
indiquent clairement que ce luxe de précautions n^était pas
inutile. On lit , en effet, d'une part : Faire poursuite contre
Chardon , tenir un commandement prêt , et faute de
payement faire saisir ses chevaux et charrette; d^autre part,
sera fait poursuite quand on trouvera lieu de rencontrer
ledit Chardon.
Coulanges-les-Nevers , novembre 1886.
F. BOUTILLIER.
T. m, 3* série. 16
— 122 —
SÉANCE DU 30 DECEMBRE 1886.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultraît,
président; Tabbé Boutillier, vice-président; E. de
Toytot, secrétaire; Canat, conservateur du
musée; Tabbé Marillier, vicaire général ; Ad.de
Rosemont, Fabbé Rolland, Tabbé Soyer, de
Villenaut, le docteur Robert Saint -Cyr, de
Flamare, Cheminade, de Pierredon, Duminy, le
vicomte de Maumigny.
Lecture est donnée par M. le Président d*un
questionnaire adressé par le ministère de Tins-
truction publique, relativement au bégaiement.
L'assemblée décide qu'une commission , composée
de divers médecins de la Société, sera invitée à
répondre à ce questionnaire.
M. l'abbé Marillier donne lecture du premier
chapitre d'une monographie sur la ville et l'abbaye
de Corbigny. L'auteur veut bien ajouter à cette
lecture un aperçu général de l'ouvrage en voie de
publication ; il traite en particulier de la translation
des reliques de saint Léonard et du nom de ce
saint ajouté à celui de la ville de Corbigny-lès-
Saint-Léonard.
M. le Président adresse à l'auteur, en son nom
et pour toute la Société, ses félicitations.
M. l'abbé Boutillier lit quelques pages intitulées :
Souvenirs du pèlerinage de Sainte -Reine
— 123 —
cC Alise y et fait passer sous les yeux de rassemblée
une collection d'anciennes médailles de sainte
Reine.
M. le Président fait connaître un article paru
dans le dernier numéro du Moniteur de la
céramique et de la verrerie. Cet article, qui
traite de nos industries nivernaises les plus renom-
mées, la faïence et la verrerie, mentionne surtout
avec honneur Touvrage de notre collègue M. Tabbé
Boutillier^ sur la verrerie de Nevers.
Plusieurs membres signalent, dans un catalogue
récemment publié par la librairie Saffroy, près
Saint-Gervais (Seine), un document intéressant
pour notre céramique nivernaise. Il est ainsi
indiqué :
<t Faïences de Nevers, pièce manuscrite, deux
pages, 12 fr. Important mémoire de très-beaux
spécimens, très-variés et fournis au comte de
La Roche -Aymon : assiettes, plats, soupières,
cuillères, tasses, aiguières, à la mode cannelée,
porcelaines faites en compotier, cannelées à souf-
frir le feu, cabaret des plus à mode, flacons, etc.,
dont les prix sont indiqués. Les articles devaient
avoir 154 écussons accolés, ornés d'un beau car-
touche. Ce mémoire est celui d'un commissionnaire-
voyageur auvergnat. 3>
La Société décide que le document sera acquis
par M. le Président, afin de pouvoir l'imprimer
dans notre Bulletin.
-=• 124 -^
La Société exprime aussi le désir de posséder
l'ouvrage de M. Julien sur le Nivernais. Une
somme de 50 fr. est votée à Teffet d'acquérir cet
ouvrage , si l'auteur veut bien l'offrir à la Société,
au prix réduit que l'assemblée désire mettre à la
disposition de M. le Président pour négocier cette
affaire.
M. de Soultrait entretient l'assetnblée d'yn
ouvrage déjà ancien , mais tiré à petit nombre et
peu donnu, dont la place est marquée dans la
bibliographie nivernaise ; c'est un volume intitulé :
Rondeavlx et vers d'amovr par Jehan Marioa,
poète nivernois du seizième siècle , publiés pour
la première fois par Prosper Blanchemain, membre
de la Société des bibliophiles françois. Paris,
Léon Willem, 1873, in-i8 (100 exemplaires numé-
rotés). M. Blanchemain dit dans sa préface qu'il
vit chez un libraire de Paris le manuscrit de cet
ouvrage (très-petit in-4° de 102 feuillets), qu'il
l'acheta, et que, trouvant qu'il en valait la peine,
il le publia avec une introduction et des notes.
J'avais l*honneur, ajoute M. de Soultrait, de faire panie
de la Société des bibliophiles français, dont j'étais même l'un
des anciens; mais je ne connaissais pas M. Blanchemain»
qui venait d'être admis dans ladite Société, et qui ignorait
lui-même mes attaches à la patrie du poète qu'il voulait faire
connaître ; il ne me demanda donc pas de renseignements,
et ce fut seulement quand le volume fut à peu près entière-
ment imprimé que mon confrère m^en communiqua les
épreuves. Je fus charmé de faire connaissance avec ce Marion,
qui venait renforcer le parnasse nivernais assez pauvre; mais
je crus devoir répondre à M. Blanchemain que je ne parta-
— 1^5 —
geais nullement soa opinion sur la personnalité du poète, et
je lui écrivis une assez longue lettre pour soutenir mon dire.
M. Blanchemain, sans me prévenir, me fit Thonneur d^im-
primer, à la suite de son petit volume, cette lettre, écrite au
courant de la plume, qui n^était pas destinée à pareille for-*
tune, et qui aurait été rédigée autrement si j^avais pu prévoir
qu'elle accompagnerait le livre.
Dans sa préface, M. Blanchemain attribuait les Rondeaulx
et vers d'amour à un Jean Marion, d^une branche de la
famille des barons, puis comtes de Druy, qui fut échevin de
Nevers en 1579 et i58o. Dans ma lettre, j*ai combattu cette
attribution et j'ai essayé de prouver que l'auteur des vers en
question était un Jean Marion, d'une branche pauvre de sa
famille, fils de Pierre Marion^ orfèvre à Nevers, qui, après
une vie agitée, alla s'établir en Pologne.
Quelle que soit la probabilité de mon attribution, j'ai été
bien aise de faire connaître à la Société nivernaise cet enfant
trouvé du Parnasse, qui ne lui avait pas encore été présenté.
Après une courte discussion , la Société décide
qu'une modification sera apportée au règlement,
relativement à rechange des jetons de bronze
contre un jeton d'argent. A partir du i**" juillet, il
faudra 15 jetons de bronze et non plus 10 pour
obtenir un jeton d'argent.
SOUVENIR DU PÈLERINAGE
DE SAINTE-REINE D'aUSE.
Le culte de la glorieuse vierge d'Alise (l'antique Alesia,
aujourd'hui Alise-Sainte-Reine), était autrefois célébré dans
toute la Bourgogne et en Nivernais,
— 120 —
La vieille église des Jacobins de Nevers, dont une seule
chapelle subsiste aujourd'hui dans rétablissement des frères
des écoles chrétiennes, avait sa chapelle de Sainte- Reine.
Le 25 avril 1695, Guillaume Gautherin, faïencier,
demandait, sur son testament, à être inhumé en Téglise des
révérends Pères Jacobins , ou devant la chapelle de Sainte-
Reine, oti il veut que ses funérailles soient faites (i).
Les chapelles de l'hôpital de Château-Chinon, du château
de Bizy, en la paroisse de Parigny4es- Vaux , de Villiers , en
la paroisse de Ménestreau, sont sous le vocable de sainte
Reine ; dans cette dernière paroisse , une source abondante
est également dédiée à cette sainte.
L
Aussi bien de nos jours encore comme dans le siècle
dernier, de nombreux pèlerins se rendent en pèlerinage à
la chapelle élevée sur le lieu du martyre de sainte Reine,
pour vénérer ses précieuses reliques, surtout durant l'octave
de sa fête du 7 au 14 septembre (2).
Or, il est à noter que les pèlerinages, autrefois si popu-
laires, avaient d'ailleurs leurs règlements sagement établis
par TEglise et auxquels les pèlerins devaient se conformer.
Un ouvrage fort bien fait et qui eut au dix-septième
siècle une très-grande vogue : Le Parfait ecclésiastique,, .^
imprimé à Paris, chez Pierre de Bresche, en 1665, contient
notamment deux chapitres des plus instructifs au point de
vue historique: i° sur les pèlerinages et lieux de dévotion et
comme il faut s'y comporter; 2^ sur les intentions et la
manière de faire saintement les pèlerinages.
Si c'est un grand pèlerinage que Ton veut faire , il faut
demander à son pasteur la bénédiction ecclésiastique propre
(i) Archives départementales de la Nièvre. Titres de fiamilles.
(2) Dans le Morvand un très-grand nombre de personnes portent
le nom de sainte Reine.
— 127 —
pour les pèlerins , laquelle est dans les rituels , tant pour la
sortie que pour le retour en action de grâce.
Ce serait une chose très-louable de n'entreprendre aucun
pèlerinage sans en avoir pris Tavis de s|on curé et de son
confesseur, afin quUls instruisent à le faire utilement...
Pour plus de sûreté , dans certains diocèses > le curé
donnait à son paroissien se rendant en pèlerinage un
certificat de bonnes vie et mœurs, afin qu^en cas d'accident
il pût recevoir les sacrements de l'Eglise.
Une de ces pièces émanant du curé d'une paroisse du
diocèse aauel de Nevers , et se rapportant à un pèlerin de
Sainte-Reine, nous a été obligeamment communiquée par
M. le chanoine Greuzard , ancien curé de la paroisse dont il
s^agit (i). Il nous a paru intéressant de le copier; en voici la
teneur :
c Nous, soussigné, curé de Couloutre, diocèze d'Auxerre,
certifions à quiconque appartiendra que le nommé Philippe
Sainieon, habitant de laditte paroisse et fabricien de mon
église, est un homme d'honneur, et de probité, et de mœurs
très -chrétiennes, qui s^est toujours acquité de tous les
devoirs de la religion avec une fidélité et une exactitude la
plus édifiante, et comme il a prit le party de se transporter à
Sainte-Reine, pour implorer la protection de cette sainte
auprez de Dieu pour obtenir le rétablissement de sa santé ,
si Dieu la juge nécessaire pour sa gloire et pour son salut,
il nous a requis de lui délivrer le présent certificat pour lui
être pourveu aux besoins spirituels de son âme, et à la
réception même des sacremens des fidèles , au cas quMl se
trouva en danger de mort dans son voyage. Ainsi nous
supplions instamment MM. les Curés oQ il pouroit se
(i] Ce certificat est écrit tout entier de la main du vénérable curé,
sur une feuille de papier marqué au timbre de la généralité de
Bourges et cette i sol 8 deniers.
Le timbre représente trois fleurs de lys sur une seule ligne hori-
zontale , entre quatre palmes très-gracieusement disposées»
— 128 —
trouver malade , dm en danger, de irouloir bien le secourir
et de lui administrer les sacremens, si ils le jugent néces-
saire. Délivré en notre maison curiale ce deuxième septembre
mil sept cent cinquante et un. ^ Frémy de La Colombière,
curé dudit Couloutre. »
II.
Les pèlerins d'autrefois, pas plus que ceux de nos jours,
n^oubliaieDt de rapporter de leur pieux voyage quelque
médaille commémorative. Ces anciennes médailles de pèle-
rinage forment Pappoint le plus intéressant des collections
de numismatique religieuse. On les retrouve surtout dans
les sépultures des vieux cimetières , oh elles attestent la piété
des défunts qui n'avaient pas voulu que la mort même pût
les séparer de leur précieux souvenir.
Nous avons recueilli, grâce à l'aimable générosité d'un de
nos collègues, M. le baron d'Espiard, un certain nombre de
types divers de médailles de sainte Reine, toutes trouvées
dans les anciens cimetières d^Autun.
Ces médailles représentent habituellement la sainte debout,
la tête couronnée du diadème royal et nimbée, d'une main
tenant la palme du martyre, de l'autre un glaive dont la
pointe repose sur le soi.
Quelquefois la sainte est à genoux, et derrière elle le
bourreau debout , le glaive levé , s'apprête à lui trancher la
tête.
La légende, quand elle n'est pas supprimée, est toujours,
Saincte Reine.
Le revers de ces médailles offre invariablement trois
grandes croix debout plantées dans le sol et surmontées d'une
touffe de feuillages sortant du sommet de chaque croix.
Assez souvent chaque touffe se partage en trois branches bien
distinctes.
Au pied de la croix du milieu se tiennent agenouillés
deux petits personnages ayant les mains jointes.
— 119 —
Quelle est l'explication de cette décoration tout à la fois
originale et gracieuse ?
Voici ce que rapporte la légende de sainte Reine :
Comme la jeune vierge, poursuivie par les émissaires du
préfet des Gaules Olibrius, épris de sa beauté et qui la voulait
pour épouse, s^était enfuie à la faveur des arbustes dont était
couverte cette partie de la campagne située au pied d^ Alise ,
elle réussit à se cacher dans un épais bouquet d'ormeaux.
Mais , bientôt découverte, elle répond au proconsul qu^elle
adore la divine Trinité et qu^elle a choisi Jésus-Christ pour
époux.
Or, ce lieu s^appelle encore aujourd'hui les TroiS"
Ormeaux (i). Les ormeaux cependant, depuis longtemps
disparus, ont été remplacés par trois tilleuls et par trois croix,
et les pèlerins de Sainte-Reine ne manquent pas d^aller faire
une station aux Trois^Ormeaux, où ils récitent une prière
qui commence par ces mots : c Cest ici, vierge victime, que
vous avez confessé la divine Trinité. >
Nous avons donc l'explication du gracieux symbolisme des
médailles de sainte Reine : les trois croix, les trois ormeaux,
les trois branches de chaque ormeau rappellent le mystère de
de la Trinité si glorieusement confessé par la généreuse
martyre.
En terminant, rappelons, à titre de souvenir, que notre
glorieux évéque saint Arigle était, d'après Fortunat, origi-
naire d'Alise ou Mont-Auxois, aujourd'hui Sainte-Reine.
Décembre 1886.
F. BOUTILLIER.
(i) Manuel de la confrérie de Sainte-Reine canoniquement érigée
dans réglise paroissiale de Flavigny, par Pabbé L. Nortet, curé-doyen.
— Dijon, 1874.
T. m, 3* série. 17
— i3o —
SEANCE DU 27 JANVIER 1887.
Présidence de M. Roubbt.
Etaîeilt présents : MM. Roubet, président hono^
raine; Boutillier, vice-président; Ernest de Toy tôt,
secrétaire; Canat, conservateur du musée; le
docteur Subert, Tabbé Soyer, de Villenaut,
Langellé, Gadoin, de Maumigny, le docteur
Robert Saint-Cyr, de Barrau, de Flamare, de
Pierredon, Duminy, Tabbé Foucher, Teste,
Griveau.
Lecture est donnée (}e la note de M. Bricheteau,
trésorier, sur la situation financière de la Société.
Il restait en caisse au 31 décembre 1886 un excé-
dent de 1,208 fr. 52 c.
M. le docteur Subert communique à la Société
l'analyse d'un ouvrage intitulé : Recueil manuscrit
de plusieurs remèdes , très-eœpérimentés par des
personnes charitables et zélées du soulagement
des pauvres malades^ 1755. M. le docteur Subert
est invité à recueillir les notes qui lui paraîtront
plus intéressantes et à relever les noms propres se
rattachant au pays , qui abondent dans le manus-
crit.
MM. de Rosemont et de Flamare présentent
comme membre M. Octave de Mulot de Villenaut.
Il est procédé au vote. M. de Villenaut est admis
à l'unanimité des voix.
M. de Rosemont appelle l'attention de la
Société sur plusieurs débris de sculptures re-
— i3i —
cueillis dans remplacement de Tabbaye de Saint-
Martin de Nevers, et signale en particulier la
première pierre du logis abbatial , portant la date
de 1632. Les autres fragments exposés sur le
bureau par M. de Roseraont paraissent appartenir
aux neuvième et douzième siècles et corres-
pondre aux périodes de fondation et de restau-
ration de l'abbaye. Ces curieux débris sont oflferts
au musée. M. de Rosemont fait connaître une
note relative à Nicolas Briot, monnayeur au dix-
septième siècle.
M. Roubet lit une très-courte note intitulée
Saint-Gildard et Saint-Gildas y qui sera insérée
au Bulletin.
M. Tabbé Boutillier donne lecture du document
original dont il a été parlé à la dernière séance, et
qui fait maintenant partie des collections niver-
naises si importantes de M. de Soultrait.
Mémoire du nombre de lafayance que le sieur Mago a pris
à Nevers pour M. de La Rochajrmon, qui est très-
conforme à Voriginal,
Deux plats potager de douze poulces chacun . . 3 1.
Plus deux plats de quinze poulces chacun, • . 4
Plus un grand oval octogonne 3
Huits plats d^entrée à ragoût de dix poulces
chacun 5 1. 4 s.
Deux plats pour le rôti 4
Huit plats d'onze poulces chacun 6
Six douzaines d^assiettes plattes 60
Deux douzaines d'assiettes creuses 20
— l32 —
Six saladiers de moyenne grandeur^ deux en
octogonne et quatre en ovale avec écussons. • 7 1. lo s.
Huit compotiers 7
Deux sucriers sans écussons i 10
Deux poiurières avec les couuers sans écussons . i 10
Deux succriers ains sans écussons 24
Deux grands bassins de uint un poulces chacun. 18
Un bassin ouale en octogonne de la même
grandeur 9
Deux éguières à la mode canelées 4
Deux cuuettes en ouale octogonne canelées. . . 8
Deux iattes de toilettes auec leurs pots« ... 6 10
Douze porceleines faittes en compotiers à confi-
tures rondes canelées sans écussons .... 7
Deux casseroles à souffrir le feux sans écussons . 2
Quatre seaux à rafraîchir le uin rons canelés. . 5
Deux cuilliers à potage sans écussons .... 2
Huit tasses à caffé auec sous couppe sans cussons 4
Deux caffetières , Tune de douze prises et l'autre
de six sans écussons . i
Deux huilliers avec leurs cuuettes 2 10
Plus cabarez des plus à la mode auec une
bouatte à sucre 4 10
Plus un écritoire garny gratis i
Deux bouteilles de huit pintes chacunne , paintes
tout tes les deux 410
Quatre flacons, deux de deux pintes chacun et
les autres de pinte chacun. , 6
Sur lesquelles espèces il serat payé cent sinquante-quatre
écussons aux armes dudit seigneur de La Rochaymon et de
madame son épouse, les armes de monsieur est un lyon d'or
rempant à champ de sable parsemé d'étoile d'or sans nombre,
et celles de madame est une tour d'argent crénelée de trois
pièces de même en champ d^azur parsemée de fleurs de lys
d^or sans nombre, lesdits deux cussons auec un beau
I
— i33 —
cartouche et une couronne de marquis^ pour lesquels cussons
on est conuenu pour la somme de vint Hures seize sols*
Laquelle accumulée auec celle de deux cent dix liures qua-
torze sols. Soient encore trante-six liures pour la uoiturc.
Sur tout cela on a reçu cent liures par monsieur de La
Rochaymon à-compte.
267 L 10 s. Ressu 100 liures.
Ce document, ajoute M. de Soultrait, est inté-
ressant en ce qu'il donne la composition et le prix
d'un service de table complet pour une grande
maison , car le marquis de La Roche-A3anon était
un seigneur d'importance. Il est à regretter que le
nom du faïencier qui a fourni ce service ne soit pas
mentionné; quant à la date du document, elle
peut être fixée approximativement à l'aide de la
description des armoiries qui décoraient les pièces.
J'ai cherché dans les généalogies de la famille de
La Rocbe-Aymon, et je n'ai trouvé qu'une seule
des alliances de cette famille ayant porté dans son
blason une tour et des fleurs de lys : c'est celle des
d'Alègre , famille de haute noblesse de l'Auvergne
et du Bourbonnais , qui portait , il est vrai , la tour
d'argent et les fleurs de lys d'or sur fond de
gueules, tandis que l'indication du fond des
armoiries donnée par le document est d'azur^ mais
on peut bien admettre cette erreur héraldique
chez l'individu qui avait commandé la fourniture.
Annet de La Roche-Aymon, chevalier, marquis
de Saint- Maixent , avait épousé en 1630 Anne
d'Alègre, qui mourut en 1663. C'est donc bien
évidemment de 1630 à 1663 que le service fut
— i34 —
établi, et y d'après la composition et la forme
indiquée de certaines pièces de ce service, je
serais porté à lui assigner la date approximative de
1645 à 1650. Il serait à désirer que Ton pût
retrouver quelque pièce de ce service.
M. de Rosemont demande, en terminant la
séance, à faire connaître la lettre et le programme
du prochain Congrès scientifique international
des catholiques y et il propose à la Société de
voler une souscription de 10 fr., afin de pouvoir
conserver dans ses archives le Bulletin et le
compte-rendu des travaux. La Société vote la
souscription et nomme comme délégués au congrès
MM. Arthur de Rosemont et Tabbé Foucher,
aumônier du lycée.
SAINT-GILDARD. — SAINT-GILDAS.
Nous n'hésitons point, avec Née de La Rochelle, à
confondre en une même identité le nom de Gildard avec
celui de Gildas.
Aucun de nous , sans doute , n^ignore que sous les murs
de Nevers, ou, comme on disait alors, lès-Nevers, il a existé
un antique prieuré-cure dit de Saint-Gildard qui a disparu»
mais dont le vocable est destiné à une longue perpétuité
d^années nonobstant les changements et les effacements que
nous voyons chaque Jour.
Il n^est pas hors de propos de faire connaître qu'en
Bretagne, dans un lieu nommé Ruys, il a existé un
monastère fondé au quatrième siècle par on moine du nom
- i35 —
de Gîldas qui , pendant sa vie , fut surnommé le Sage , et
mérita après sa mort d'être honoré comme saint.
Peut-être serait-il permis d'induire plus ou moins indi-
rectement une corrélation entre le monastère armoricain et
le prieuré nivernais. Bien entendu, nous ne faisons qu^cn
proposer la fugitive possibilité.
Dans son histoire des Congrégations religieuses (femmes)
Mx' Crosnier, avec le talent qui lui était si familier, après
avoir fait une excellente description archéologique le l'an-
cienne église de Saint-Gildard , ajoutait : c Avant d'obtenir
le titre de prieuré-cure, il est probable que tout d abord
Saint-Gildard n'était qu'un simple prieuré qui, au douzième
siècle , fut cédé à l'abbaye de Saint- Laurent. Cest à cette
époque que, par suite de la donation de Douzion • abbé de
Saint-Laurent, la reconstruction de l'édifice a été effectuée
(iioo-ii3o). »
L'historien ajoutait encore : Quelle était la construction
antérieure à cette réédijication ? On en chercherait en vain
les dates.
Aujourd'hui nous osons hasarder une supposition basée
sur des faits d^histoire étrangère à la localité qui n'ont pas
encore été signalés par nos chroniqueurs nivernais.
En voici l'analyse succincte :
L^abbaye » fondée au quatrième siècle par saint Gildas ,
était devenue prospère; elle dut naturellement exciter la
convoitise des envahisseurs victorieux. En 920, les Nor-
mands s^en emparèrent. Les moines se dispersèrent en
emportant avec eux leurs richesses et surtout les reliques de
leursaiot patron.
Ils se répandirent dans l'Anjou , dans la Touraine et dans
le Berry, oti ils créèrent quelques prieurés simples plus ou
moins temporaires, car nous savons qu'en 1022 saint Félix
put reconstruire le monastère de Ruys et y rappeler les
reliques qui avaient été emportées et conservées dans le Berry.
Ne conviendrait-il pas de faire remonter la création du
prieuré de Saint^Oildard nivernais à l'époque précise de la
— i36 —
dispersion des religieux de Ruys ? Le Berry n'est point loin
du Nivernais.
En terminant, à titre de curiosité, nous dirons qu'Abélard
devint abbé de Ruis , mais il n^était point fait pour diriger
les moines indomptables de la Basse - Bretagne , pourvus
d^orgueil et dMne violente ténacité ; voici CjC qu'il écrivait à
Héloi:>e :
c J ^habite un pays barbare dont la langue m*est inconnue
et en horreur; je n'ai de commerce qu'avec des peuples
féroces ; mes promenades sont les bords inaccessibles d'une
mer agitée ; mes moinesjn'ont d'autre règle que de n'en pas
avoir.
» Je voudrais que vous vissiez ma maison , vous ne la
prendriez jamais pour une abbaye ; les portes ne sont ornées
que de pieds de biches^ de loups, d'ours^ de sangliers , des
dépouilles hideuses de hiboux. J'éprouve chaque jour de
nouveaux périls ; je crois voir à tout moment sur ma tête un
glaive suspendu, i»
Effectivement Abélard fut obligé de s'enfuir pour échapper
à la mort.
Nous supposons que le prieuré de Saint-Gildard-les-
Nevers n'offrit jamais des cas identiques à ceux qui se
produisaient en l'abbaye de Ruis ; les bords de notre Loire
différaient des bords de TOcéan.
L. ROUBET.
SÉANCE DU 24 FÉVRIER 1887.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président; Roubet, président honoraire; l'abbé
Boutillier, vice-^président ; Canat, conservateur
— i37 —
du musée; E. de Toytot, secrétaire; Duminy,
archiviste ; Tabbé Soyer, Adolphe de Villenaut ,
le vicomte de Maumigny. L. Tiersonnier, Che-
minade, Langellé, Dècray, de Pierredon, de
Flamare, Tabbé Pot, de Villefosse, Col.
M. le Président fait part de la lettre de
M. Jullien qui offre à titre gratuit à la Société son
ouvrage : La Nièore à travers le passé. La
Société adresse à M. Jullien l'expression de ses
remercîments.
M. le comte de Soultrait donne lecture d'une
lettre - circulaire du ministre de Tinstruction
publique , relativement aux sociétés des beaux-arts
et aux mémoires à lire en séance publique à la
réunion générale des sociétés de beaux-arts des
départements.
Une autre circulaire du même ministère traite des
mémoires relatifs à Télude de la France de 1789 et
indique le plan général qui pourrait être suivi , par
généralité ou fraction de généralité ; pour donner
une certaine unité et une idée d'ensemble à ces
travaux, il est joint à cette circulaire un pro-
gramme des diverses questions qu'il serait inté-
ressant de traiter.
M. de Rosemont et M. l'abbé Boutillier pré-
sentent pour faire partie de la Société M. de
Saulieu , à Lurcy-le-Bourg.
M. de Villenaut et M. de Flamare présentent
M. de La Chesnaye, à Pouilly.
M. le comte de Soultrait et M. Roubet pré-
sentent M, Guillerand, de Mornay.
T. III, 3* série. 18
-^ i38 —
La Société vote à runanimité Tadmission de
MM. de Saulieu, de La Chesnaye et Guillerand.
M. Tabbé Boutillier demande la parole pour
rendre hommage à la mémoire de deux de nos
collègues décédés récemment : M. Tabbé Bonoron,
vicaire de Saint-Etienne de Nevers^ et M. Tabbé
Michel Crosnier, curé de Saint-Louis de Four-
chambault.
Le premier, reçu il y a deux ans seulement,
dans la séance de février 1885, n'avait pu trouver
rheure encore de se livrer à des études pour
lesquelles il ressentait un véritable attrait.
Le second, membre de la Société depuis 1872,
quittait volontiers son importante paroisse de
Fourchambault pour assister à nos réunions, qui lui
rappelaient la mémoire de son vénéré frère, notre
premier président, Mgr Crosnier.
Ses goûts pour les voyages non moins que sa
piété l'avaient entraîné jusqu'à Jérusalem, et il
publia à son retour, en 1876, d'abord un volume,
sous ce titre : Deux mois en Palestine. Journal
d'un pèlerin de Terre-Sainte ; puis un opuscule
qui mérite d'être remarqué : Souvenirs de Terre-
Sainte. Description des Lieux-Saints en vers.
Ces deux ouvrages sont dans la bibliothèque de
la Société , à laquelle Tauteur en avait fait pré-
sent.
M. Tabbé Boutillier annonce ensuite qu'il a pu
réunir une suite de documents assez nombreux
pour donner bientôt au Bulletin le travail sur le
Trésor de la cathédrale de Nevers^ annoncé
dans la séance de janvier 1886. Cependant, il a cru
devoir encore s'adresser à M. Léopold Delisle,
qui connaît si bien toutes les richesses de nos
anciennes cathédrales, aujourd'hui conservées à la
Bibliothèque nationale. Et, en eflFet, Téminent
directeur s'est empressé de lui signaler un troisième
sacramentaire de la cathédrale de Nevers, du
douzième siècle, ayant pour titre : Antiquum
collectarium signât am per I , et de lui en donner
l'analyse sommaire.
Les membres présents prient M. l'abbé Boutillier
de hâter cette publication, et ils votent, sur la
proposition de M. Héron de Villefosse, un
tirage à part à 200 exemplaires, dans le format
de la Monographie de la Cathédrale^ de
Mgr Crosnier.
M. Koubet continue la lecture de son travail
sur les Chroniques judiciaires de Saint-Pierre-
le-Moûtier.
M. le Président, en terminant la séance ^ nous
donne la bonne nouvelle que l'affaire dont il avait
été chargé , relativement à la reconnaissance de
notre Société comme établissement d'utilité pu-
blique est en bonne voie.
Snr la demande de M. l'Archiviste, qui annonce
qu'il n'existe plus de jetons de présence ni de
bronze, ni d'argent, la Société décide qu'il y a lieu
de commander à la Monnaie des jetons de bronze
et d'argent. Le secrétaire est chargé de régler
cette affaire, ainsi qu'il l'a fait précédemment avec
M, le Directenr de la Monnaie. Il s'entendra avec
— 140 —
M. TArchiviste sur la quantité de jetons qui!
convient de commander.
La commande est fiée à 50 jetons d'argent et
300 jetons de bronze.
SÉANCE DU 31 MARS 1887.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président ; Tabbé Boutillier , mce - président ;
Canat, conservateur du musée ; E. de Toytot,
secrétaire; Duminy, archiviste; Adolphe de
Villenaut, de Villefosse, Tabbé Soyer^ Tabbé
Foucher, Ad. de Rosemont, de Flamare, Octave
de Villenaut, de Pierredon, Col, de Charrant.
M. le Président dépose sur le bureau un volume
offert en hommage à la Société par Fauteur, M. le
comte L. Lafond , et intitulé : U Ecosse jadis et
aujourd'hui. Des remercîments sont votés à
Fauteur.
M. le Président donne lecture de circulaires
ministérielles relativement à Fépoque de la réunion
des sociétés des beaux-arts des départements et
des sociétés savantes des provinces.
L'époque de ces réunions est fixée à la semaine
de la Pentecôte au lieu de la semaine de Pâques.
La lettre du ministre donne le programme du
congrès des sociétés savantes à la Sorbonne.
. — 141 —
Mention est faite d'un prospectus adressé à la
Société : Revue des patois gallo-romains.
M. Jules Och, membre correspondant de la
Société havraise d'études diverses et de la Société
de géographie commerciale du Havre, ayant
appris par la lecture de nos Bulletins que nous
n'avions pas les explications données par M. de
Belloguet sur l'inscription ande camulos, en a
envoyé une copie à M. l'abbé Boutillier. L'inser-
tion de ce document au Bulletin est votée, avec
remercîments à notre obligeant correspondant.
Extrait du glossaire gaulois de Roget de Belloguet ,
tome /•', page 2j2.
ANDE
CAMV
LOS TOVTI
SSICNOS
lEVRV.
Inscription connue depuis plusieurs siècles à Nevers. Elle
commence par deux nominatifs singuliers en os dont le
second, suivi de ieuru seul, repousse la signification de fils,
que Tun de nos plus habiles épigraphistes voulait, dans le
principe, attribuer à ce mot ; mais il n'en est plus question
aujourd'hui que cette signification a été positivement
reconnue dans la finale cnos de Fow//wicnoj, soit qu'on la
sépare avec M. Pictet des syllabes précédentes, soit qu'on n'y
voie qu'une désinence patronymique, comme dans les noms
gaulois de Cintugenus Camulogenus, Camulognata, etc.
Dans le premier cas, Foutissi devient un génitif en /,
comme nous en reconnaîtrons tout à l'heure deux autres.
Dans le second , qui me paraît plus vraisemblable, Foutis*
— r42 —
^ic/zo^, reste ce que nous avoQs présumé, un nom patrony-
mique composé de la même manière q\x Oppianicnos et
Frouticnos que nous rencontrerons dans la suite. Foutissos
est effectivement un nom tout gaulois; celui d'^Andecamulos
ne Test pas moins dans les deux parties qui le composent; il
rappelle d'abord les Andecamulenses d'une inscription
trouvée à Rançon, dans le Limousin, et qui nous a seule
révélé l'existence d'une ville d'Andecaniulum ; elle était sans
doute sous le patronage spécial de Camiilus^ le Mars gallo-
romain , que nous ont fait connaître plusieurs monuments
épigraphiques, et dont le nom diversement varié se montre
souvent parmi ceux que portaient les Gaulois de Tépoque
impériale.
Reste cet ieuru si souvent répété dans nos inscriptions et
que nous avions reconnu de prime abord pour la troisième
personne singulier d'un prétérit, conformément aux flexions
verbales doroigu robbu que Zeuss a relevées dans des gloses
irlandaises, pages 439, 481 et al. Nous lui avions donné le
sens de vouer, consacrer en même temps que Tabbé Auber,
de Poitiers, hésitait entre cette signification de dedicavit
et celles dQ posuît ou dQ/ecit, et que Becker, en Allemagne,
arrivait au même résultat que moi dans le Rheinisches
Muséum^ treizième année, pages 290 et suivantes. Telle
était encore son opinion très-positive en 1862 et celle de
M. Pictet dans son premier jEwa/, où il dit que le docteur
Sicgfreid, de Dublin, s'était, de son côté, prononcé pour
fecit au tome I", page 45 1 , des Beitrage de Kuhn et de
Schleicher. Ce ne fut toujours pas sans tergiversations ulté-
rierieures, d'après une citation des Irish glosses de \V.
Stokes, 1860, page 73, dans laquelle le docteur traduit encore
notre prétérit gaulois par dedicated. Toutefois, ces deux
maîtres se sont définitivement ralliés au sens dt fecit dans
Ces mêmes Irish glosses , page lôi, et M. Pictct s'est rangé
à leur opinion dans son nouvel Essai-Revue archéologique^
mai 1867.
Sur quels rapprochements avons-nous, de part et d'auirç
— 143 —
appuyé cette double interprétation ? Nous avons pour notre
compte mis entre autres en avant les kymrique jor VEternel,
Dieu-Seigneur dans J. Davies et (l = si souvent r) jol,
implorer Zeuss, page 1099, aujourd'hui joli, prier, adorer,
— armoricain jovli, vouloir, désirer, — enfin irlandais
Jarraim, demander, prier. Erse Jarr.
M. de La Villemarqué, avec sa légèreté ordinaire, m'a cité
fort inexactement à cette occasion pour se donner le plaisir
de me prêter une grosse sottise et de changer en affirmations
positives de simples questions que je soumettais au lecteur.
Du reste, < jarraim > a été seul mais vivement discuté par
M. Pictet et les deux savants anglais particulièrement irlan-
distes comme lui. A ce terme définitivement mis hors de
cause, Siegfried a substitué avec bonheur l'ancienne racine
irlandaise iur ou ior, dégagée d'abord des composés /r/^amm
iurat (me adficiunt) et fritamm iorsa {me adficiet) tirés
des gloses recueillies par Zeuss , page 336, puis rencontrée
seule iurat [factum est) dans le livre d'Armagh, célèbre
manuscrit irlandais du huitième ou neuvième siècle. Stokes
et après lui M. Pictet citent d'autres composés avec ce radical
ou avec une deuxième forme équivalente uar. Le philologue
genevois a cherché cette fois dans le kymrique des parents
du verbe irlandais et il y a trouvé iorth, actif, indus-
trieux, etc. ; il est remonté ainsi à notre ior, Dieu, Créateur ;
il n'a prêté aucune attention , s'il les a connus aux rappro-
chements que M. de La Villemarqué a faits, à Tappuide
Tii/rde Siegtried, avec les prétérits des verbes irréguliers,
qui signifient faire, goru et gurel en kymrique et en
comique, Ober en armoricain, et dont je ne citerai que le
dernier eure , il a fait {eureu dans la grammaire bretonne de
G. des Rostrenen, 1738). Je le cite parce que M. de Jubain-
ville a fortement protesté au nom de l'ancien g initial contre
la confusion de cet eure au moyen-âge gueure ou guerue
avec notre ieuru; j'observerai seulement qu'en comique
Téclipse grammaticale de ce ^, qui a également lieu en
kymrique, ramène bien souvent dans les temps du verbe
- 144 -
gurqy, faire, les formes n/ra, n^re» un-euch^ à chacune
desquelles R. Williams a consacré dans son dictionnaire un
article particulier.
Il est donc certain ({n'ieuru doit signifier fecit, a fait,
mais en lui laissant dans les formules religieuses une signi*
fication implicite de consécration , comme dans le latin
tumulaire ou votif, exerit , votum, solvit, etc. En somme,
la brièveté de cette inscription, peut être incomplète, et
l'absence de tout renseignement sur la destination que
pouvait avoir reçue la pierre où elle est gravée ne nous
permet pas d^y lire autre chose que: Andecamulos, fils de
Foutissos, a fait ou érigé
A ce texte, M. Och ajoute quelques remarques
complémentaires dont nous lui laissons la respon-
sabilité :
On trouve le mot ievrv avec la signification de fecit :
i^ Dans une inscription gauloise trouvée à Autun;
2^ Dans l'inscription gauloise de Nevers ;
3*» Dans Tinscription écrite sur le manche d'une patère en
métal trouvée en i853 dans les environs de Dijon ;
4® Dans l'inscription découverte à Vaison en 1840 et qui
appartient au musée d'Avignon (mais sous la forme grécisée
de Eiôpov) ;
5^ Dans Tinscription déterrée en iBBgdans le sol même
d'Alise ;
6^ Dans Pinscription trouvée à Volnay, près de Beaune;
7® Dans l'inscription qui se trouve sur la pierre druidique,
le menhir du vieux PozVfer^, nom que porte remplacement
d'une ancienne ville dans la commune de Cénon , près Châ-
tellerault ;
8° Dans l'inscription découverte il y a environ vingt ans
sur un bloc de granit, près de la gare de Marsac (Creuse).
Cnos est encore interprété aujourd'hui avec la signification
— 145 —
de c fils 1 que lui a donnée Roget de Belloguel ; ainsi dans
rinscription découverte récemment à Saint-Cosmes, près de
Nîmes, M. Guillemaud, qui Ta trouvée et interprétée,
n^iiésite pas un seul instant à traduire le mot Adressicnos
qui s'y trouve par fils à* Adressas.
Je remarque enfin : i» que le second T de la troisième
ligne de l'inscription de Nevers reproduit par le présidene
Boubier et par Roget de Belloguet ne se trouve pas sur le
fac-similé du Bulletin de la Société nivernaise, et 2® que le
président Boubier met un V à la place de la première lettre S
de la quatrième ligne , ce qui constituait déjà pour lui une
difficulté d'interprétation.
M. le comte de Soultrait ajoute ensuite quelques
explications sur cette même inscription. Elle avait
été, dit-il, copiée au moment même de sa
découverte, dans un manuscrit fort intéressant ,
appartenant à M. Girerd : sur les feuilles de cet
ouvrage, sorte de barrême à Tusage de la chambre
des comptes de Nevers, le greffier avait l'habitude
d'inscrire une foule de détails et de commentaires
curieux sur diverses choses.
Quant à l'inscription, qui a été détruite depuis»
on sait qu'elle existait sur une pierre au bas de la
rue de l'Oratoire.
M. le comte de Soultrait dépose sur le bureau,
pour être livré à l'impression , le travail de M. de
Chastellux sur Vésigneux.
M. de Flamare donne lecture d'un intéressant
mémoire^ intitulé : Gaucher de Châtillon , baron
de Donzt/y à la croisade; ce mémoire sera publié
au Bulletin. \
M. l'abbé Boutillier lit un rapport sommaire
T. m, 3* série. 19
— 146 —
sur un ancien et très-curieux livre des évangiles
(XP et XII® siècles) appartenant à Téglise Saint-
Martin de Clamecy. Ce volume lui a été commu-
niqué par M. Tabbé Greuzard, chanoine de la
cathédrale.
M. l'abbé Boutillier dépose sur le bureau , en
même temps que Tévangéliaire , une très -belle
bible de 15 16 appartenant au grand séminaire de
Nevers, et fait remarquer les pages du canon des
évangiles dont la disposition est la même que celle
du manuscrit.
M. l'abbé Boutillier est heureux de joindre à son
rapport un très-savant mémoire sur le fond même
de l'ouvrage , dont l'auteur est un de ses amis ,
qui s'occupe tout spécialement d'études sur TÉcri-
ture-Sainte. Ces deux travaux seront également
insérés au Bulletin.
M. l'abbé Boutillier communique un grand sceau
elliptique en cuivre appartenant à M. H. Evain,
receveur de l'enregistrement à Varzy. Ce sceau
porte pour légende en lettres capitales gothiques :
Sigillum conventus monasterii béate Marie de
Columbis Carnotensis diocesis.
Notre-Dame de la Colombe ou des Coulombs
est représentée debout sous un dais de style ogival
secondaire bien décoré ; elle tient l'Enfant- Jésus ,
et de chaque côté , à ses pieds , voltige une
colombe.
M. de Rosemont continue à rendre compte de
ses recherches sur l'abbaye de Saint-Martin ; il
communique à ce sujet un plan daté de 16 13 des
— 147-
terrains dépendant de Tabbaye et un rapport sur
l'état des lieux, plus l'inventaire et l'expertise des
terrains et propriétés dépendant de cette même
abbaye en 1752.
SEANCE DU 28 AVRIL 1887.
Présidence de M. le comte dk Soultkait.
Étaient présents: MM. le comte de Soultrait,
président; Canat, conservateur du musée; le
docteur Subert, Adolphe de Villenaut, Guillerand,
l'abbé Soyer, Col, Adolphe de Kosemont, Octave
de Villenaut , L. Col , A, de Rosemont , Decray,
Blanc, le chevalier de Pierredon, de Flamare,
Langellé, E. de Toytot, secrétaire; d'Assigny,
Griveau , de Villefosse.
Une lettre de M. de Lespinasse offre à la
Société quatre gravures , tirées sur des photo-
graphies de MM. Col et Blandin , représentant
des vues de La Charité, en particulier de l'abside
de la tour. Ces gravures , exécutées aux frais de
M. de Lespinasse, seront annexées au Cartulaire
de La Charité qu'il publie en ce moment.
M. de Lespinasse demande si la Société voudrait
bien prendre à sa charge les frais de papier et de
tirage.
La Société accepte avec reconnaissance cette
proposition , qui donnera au Cartulaire un lustre
— 148 —
tout particulier et vote la dépense qui résultera
de cette impression.
M. le Président oflFre d'ajouter aux planches
proposées par M. de Lespinasse un cliché du
tympan de Téglise de La Charité.
La parole est donnée à M. Ad. de Rosemont
pour continuer ses communications relatives à
Tabbaye de Saint-Martin. 11 donne connaissance
de diverses pièces très-intéressantes relatives au
roi de Pologne, Jean Casimir.
M. le docteur Subert entretient la Société du
curieux livre d'anciennes recettes médicales dont
il a déjà parlé à une précédente séance.
SEANCE DU 26 MAI 1887.
Présidence de M. le comte de Soultrait.
Étaient présents: MM. le comte de Soultrait,
président ; Tabbé Boutillier, vice - président ;
Roubet, de Villefosse, le docteur Subert, H.
d'Assigny, Langellé^ Griveau, Teste, de Lespi-
nasse, Octave de Villenaut, Duminy.
M. le Président donne lecture d'une circulaire
du ministre de Tinstruction publique relative au
catalogue des manuscrits des sociétés savantes.
M. le docteur Subert communique à la Société
une petite plaque de cuivre rouge trouvée dans
les démolitions de l'abbaye de Saint-Martin de
Nevers, constatant la reconstruction du monastère
— 149 —
au milieu du dernier siècle et kt pose de la pre-
mière pierre par M«'' Jean- Antoine de Tinseau,
évêque de Nevers, le 2 avril 1755.
Voici ce texte scrupuleusement reproduit :
HOC . iEDIFICIUM . UETVS
TATE . DIRUTUM . CURA . ET .
80LLICITUDIRE . CANONICORUM
REOtJLARIUM . C0N6RBGAT10NIS .
6ALLICÀNJE . NEGMON 8^ MARTINI .
NIVBRNENSIS . FUIT . RiEDIFICATUM .
ANNO . D . MDCCLV .
PRIMUM . LAPIBEM . POSUIT .
ILLUSTRISSIMUS . D . D . lOANNES .
ANTONIUS . DE . TEINSBAU . EP .
IN . OIE . SECUNDA . APRILIS .
EIUSDEM . ANNI .
Sur le revers de la plaque^ dans le bas, on
lit ces deux mots du graveur d'ailleurs assez
malhabile :
FECrr . PERONNY .
M. René de Lespinasse soumet à la Société
les épreuves phototypes qui doivent orner le
Cartulaire de La Charité.
M. de Flamare est heureux de faire part à la
Société de la réintégration des archives si impor-
tantes de la mairie de Decize aux archives dépar-
tementales.
M. Roubet annonce qu'il a été trouvé dans les
travaux de terrassement et de fondation d'une
maison en construction sur l'emplacement de
l'aiieienne caserne une ouzmnaie romaine.
— i5o —
M. Tabbé Boutillier donne lecture d'une courte
notice sur le dernier nécrologe du dix-septième
siècle de Tabbaye Notre-Dame de Nevers, dont il
a retrouvé quelques feuillets.
Cette notice, où sont rappelés les noms de
plusieurs anciennes familles nivernaises, amène
quelques observations généalogiques de la part de
M. de Soultrait, qui est prié de vouloir bien les
consigner par écrit, pour être jointes au travail de
M. l'abbé Boutillier.
M. de Flamare ajoute qu'il lira prochainement
un travail sur les nombreux et importants frag-
ments de l'ancien martyrologe et obituaire de
cette même abbaye Notre-Dame découverts sur
des dos de registres reliés au commencement de
ce siècle.
M. Teste communique une pièce de 1480 copiée
aux archives nationales ; c'est une procuration
donnée par Antoine de Chahanne^ comte de
Dommartiny pour V administration de la terre
de Marcijy à Jean A iguillet , suivie du bail à
bordelage d'une vigne à Michaugues.
M. l'abbé Boutillier lit une note sur l'origine
du flottage en trains, par M. Badin de Montjoie,
imprimée dans le Bulletin de la Société des
sciences naturelles et historiques de V Yonne
(année 1885, 39® vol., page lixix des procès-
verbaux). En voici le texte :
Des écrivains mal renseignés ont avancé que Pinventeur
du flottage était Jean Rouvet^ qui aurait fait arriver^ le
— 151 —
premier, ua traia de bois à Paris , en 1 549. Cest sur cette
allégation répétée que le comité délégué par le commerce des
bois fit ériger, en 1828^ à ce personnage, un buste sur le
pont de Clamecy.
Des recherches postérieures dans les archives du bureau
de la ville de Paris ont démontré que le premier train de
bois à brûler amené à Paris au moyen du flottage en trains
sur TYonne Pavait été le 2 1 avril 1 547, par Charles Lecomte,
marchand de bois à Paris. Le procès-verbal constatant ce
fait intéressant a été publié en 1843, par M. Frédéric
Moreau , dans son Histoire du flottage en trains , oti
M. Badin de Mohtjoie l'a trouvé. Il n'y a donc pas lieu à
mettre en doute la priorité de la mise en pratique du flottage
en faveur de Charles Lecomte, et toutes les allégations du
monde ne feront rien contre la date du procès-verbal de
1547.
Le même membre signale dans la notice
de M. Quantin, sur V Histoire de la rivière
dH Yonne , des paragraphes concernant différentes
communes de la Nièvre.
M, le Président rappelle qu'à une précédente
séance il a demandé aux membres qui auraient
des communications à faire d'en prévenir M, Tabbé
Boutillier, pour que les lectures en soient
annoncées au procès-verbal.
M. de Flamare est nommé secrétaire-adjoint.
M. Henri d'Assigny propose à la Société de
consacrer une notice biographique à M. le docteur
'Jacquinot.
M. le docteur Subert veut bien se charger de la
rédaction de cette notice.
— 15» —
VESIGNEUX
AU nord de Saint*Martin*du-Puits^ dans une vallée ver-
doyante, a existé, dès les temps les plus reculés, la maison
forte de Vésigneux, dont le nom se retrouve près de Lucenay-
révêque, en Autunois, et d'Alaise, en Franche-Comté. Cette
maison forte a eu son rôle militaire au quatorzième siècle,
ainsi que nous le verrons plus bas (i). Elle fut en grande
partie reconstruite au dix-septième siècle. Elle se compose
d'un corps de logis flanqué de deux ailes parallèles (2), ren-
fermant une cour d'honneur; au sud, la cour des écuries, à
laquelle on arrivait par un portail, effondré depuis long-
temps, situé à l'extrémité d'une longue avenue percée dans
la direction de Saint-Martin. Les bâtiments ont été incendiés
le 3 septembre i883.
On pénètre dans le château par un pont dormant et par
une porte au-dessus de laquelle on distingue à peine les
anges qui soutenaient Técusson des Bourbon-Busset. A
Tangle occidental s'élève le donjon , haute tour carrée; dans
une tour ronde, au midi, se trouvaient trois prisons super-
posées : la plus basse était réservée aux grands criminels. Des
fossés, qu'on inondait à volonté au moyen de Tétang voisin,
entouraient le château , dont le délabrement attriste aujour-
d'hui le regard et contraste singulièrement avec le souvenir
des fêtes brillantes qui y étaient données au grand Condé,
qui s'y reposait des fatigues de la guerre. S'il faut en croire
une tradition constante, le jeune Vauban y fut présenté au
prince.
(i) Dans un dénombrement rendu par Saladin de Montmorillon, il
est parlé c d^une motte environnée de vieux fossés, où esloit la maifton
seigneuriale, à une demi-lieue du chaste! de Vésigneux ».
(2} L'aile du nord a été rasée en 1884.
- i53 -
Véaigneux était un arrière-fief mouvant noblement de la
seigneurie de Chastellux , et ses possesseurs jouissaient de
droits assez étendus qui sont ainsi décrits dans le terrier
dressé par Morizot le 4 juin 1602 :
c 1^ En ladite seigneurie et dépendances appartiennent
auxdits seigneur et dame tous droits de justice haute,
moyenne et basse, où il leur est loisible de nommer, installer
et établir juge, procureurs, greffier et sergents, tant pour la
justice ordinaire que la gruerie de leurs eaux et forêts, dont
les dangers, amendes et confiscations, soit ordinaires ou
extraordinaires, leur appartiennent, comme aussi tous droits
d^aubaine, épaves et confiscations.
» 2<> A cause de leur chastel et maison forte dudit Vési-
gneux, le droit de guet et garde en temps d'éminent péril sur
les sujets étant au dedans les détroits de ladite seigneurie de
VésigneuXy de quelque condition qu'ils soient, selon qu'ils
y sont tenus d'ancienneté.
> 3^ En ladite seigneurie le droit de prendre sur chaque
acquéreur des terres , meix et tènements étant au dedans le
circuit dUcelle , la somme de vingt deniers tournois pour
livre, pour les lods et ventes, et semblablement pour tous les
remuements en choses non bourdelières , et en choses
bourdelières mouvantes d^icelle seigneurie le tiers denier,
selon la coutume usitée en ce pays de Nivernois ; lesquels
lods et ventes, ensemble lesdits tiers deniers , se doivent
payer quarante jours après les contrats passés, à peine de
Tamende de vingt sous tournois.
» 4'' Le droit de retenue de tous les meix et tènements
étant au dedans de ladite justice et seigneurie sur toutes
personnes, quelles qu'elles soient, soit des héritages censables
et bourdeliers que non censables et non bourdeliers.
» 5* Toutes épaves qui se trouvent en ladite seigneurie,
à la charge de la coutume et auxdits sujets de les conduire
au chastel et maison forte dudit Vésigneux, dans le temps
porté p^r ladite coutume^ sur peine, à défaut de ce faire,
T. hi, 3« série. 20
— i54 —
de Tamende de soixante sous et de restitution de ladite
épave.
» 6» Le droit de mainmorte sur tous les sujets de ladite
seigneurie de Vésigneux et ses dépendances, étant hommes
serfs et de servile condition, leur étant habiles à succéder en
tous et un chacun leurs biens meubles, immeubles et
conquêts, pourvu qu'ils meurent sans hoirs procréés de leurs
corps légitimement et hoirs communs.
» 7<> Le droit de langues des bétes aumailles qu^on tue
par chacun en ladite seigneurie soit sur lesdits sujets ou
autres.
» 8^ Lesdits sujets tenus d*aller moudre leurs bleds au
moulin dudit Vésigneux pourvu qu'il soit en état, à peine
de l'amende et de la mouture.
» 9® Le droit de prendre par chacun an, le jour et fête de
saint Martin d'hiver, sur chacun feu étant au dedans de la
seigneurie et dépendances, unegéline de coutume.
» lo^ Le droit de blairie suivant la coutume de Nivernois.
» II® Lesdits habitants, de quelque qualité qu^ils soient,
tenus de faire chacun d^eux tenant feu et lieu trois courvées
de bras, à savoir : une à faucher, une à faner et une autre à
moissonner.
» i2<> Ayant bœufs et charrues, faire chacun trois cour-
vées par chacun an perpétuellement, tant eux que leur
postérité, avec leursdits bœufs et chariots, à savoir : deux à
charroyer du bois en la maison seigneuriale dud. Vésigneux :
Tune la veille du jour de Toussaint, l'autre la veille delà
Nativité de Notre -Seigneur, et l'autre courvées pour
charroyer des foins desd. seigneur et dame.
» i3® Les sujets usant de franchise et liberté n*ont aucun
droit d^acquérir des hommes de condition desd. seigneur et
dame, aucuns héritages provenant de leurs meix et tène-
ments, si ce n'est sous la charge onéreuse que lesd. seigneur
et dame ont droit d'imposer sur leursd. héritages ainsi
acquis, ou bien les mettre en main habile, suivant lad. cou-
tume de Nivernois.
— i55 —
» i4<» Enfin lesd, seigneur et dame ont le droit de
prendre sur tous litigants et contestans, pour le défaut,
trois sols; pour cause non contestée, vingt deniers tournois ;
pour cause contestée oîi il y a serment déféré^ sept sols
tournois , et pour le procès oîi Tenquéte est faite et rapportée
pour le danger, soixante sols tournois, et ce sur ceux qui y
sont condamnés en toutes lesdites actions. »
On a énuméré ici tous les droits appartenant autrefois à la
seigneurie de Vésigneux , afin de faire voir que , parmi eux ,
il n'y en avait aucun qui ressemblât, même de loin, à ceux
qu'a inventés l'ignorance ou la mauvaise foi , ainsi que
Ta démontré si victorieusement M. Louis Veuillot.
On a beaucoup discuté sur Torigine et la légitimité des
droits seigneuriaux qui ont été et qui sont encore Tobjet
de récriminations injustes et passionnées. Si Ton prenait
la peine de lire attentivement les vieux documents qui
concernent cette matière, et particulièrement l'ancienne
coutume de Nevers, on verrait que ces droits étaient aussi
légitimes que le sont aujourd'hui certaines redevances
insérées dans les baux des propriétés affermées. La servitude
personnelle elle-même était seulement un accessoire du
ténement servîle. Ainsi, on voit dans les archives de
Vésigneux que , par un contrat de 1445 , c demoiselle
Marie de Brasier , dame de Vésigneux , a consenti donation
au profit de Jean Myart , Isabeau sa femme , et Guillemette
Dubour , de quatre journaux de terre en deux pièces , finage
de Vésigneux, sans aucune charge, sous la condition que
ledit Myart, qui était de condition franche, a consenti et
voulu être homme serf de ladite demoiselle. »
Il est également fait mention dans les terriers de
Vésigneux de nombreuses concessions de propriété moyen-
nant les charges féodales ordinaires.
Ainsi, le 10 novembre i58o, messire Saladin deMontmo-
rillon cède c à titre de cens et rente à M. JofFroict, prêtre-
curé de Chalauxy un petit étang situé au finage de Chalaux,
— 156 —
au-dessous de la fontaine des Guillemins , sous la charge de
2 sols 6 deniers tournois de rente et 6 deniers tournois
de cens, portant lods et ventes, défaut, retenues, etc.,
payables le jour de Carême prenant. Il lui accorda , le même
jour, le droit de prendre bois dans les bois de ladite
seigneurie de Chalaux et bois par terre, réservé bois de ligne
pour son chauffage et pour en jouir en bon père de famille
et en user comme font les habitants de Chalaux , sans
pouvoir en faire œuvre venderesse, à la charge de payer
chacun an , au jour et fête de la Magdeleine , deux poulets
prêts à chaponner, comme les autres habitants, et à la
condition d'aller faire moudre son blé pour son ménage au
moulin banal de Chalaux. »
Le 18 juin i6o3, dame Louise de Montmorillon fit
cession à Magdelon Boussard et Guillaume ToUot , labou-
reurs, demeurant à Chalaux, communs en biens , de dix
arpents de terre, en Aigrevaulx, sous la charge de trois sous
quatre deniers tournois de cens , au jour et fête de Notre-Dame
en mars, et dix sous tournois de rente au jour et fête de sainte
Luce, et moyennant ce i5 livres pour entrée et belle-main.
La dernière vente qui eut lieu avant Tabolition des droits
seigneuriaux est du 11 juillet 1791 : Suivant contrat passé
devant Heulhard du Fay, notaire à Lormes , le domaine de
Fourlot ou THuîs-Jean , comprenant maison , granges ,
écuries, cours, jardin, soixante-douze arpents de terre,
quatorze arpents de pré, un cheptel estimé 2,1 10 livres, fut
cédé moyennant 12,000 livres, et encore a sous la charge
d'une rente foncière annuelle de 16 livres i3 sous , payable
au château de Vésigneux , le 1 1 novembre, du droit de lods
et ventes, à raison de 5 sols par écu , en cas de mutation , et
aussi de trois corvées avec bœufs , charrues ou chars , par
chacun an, à la première réquisition de mondit sieur
de Bourbon-Busset , ou de ses commis à perpétuité. » On
ajouta dans l'acte a lesquelles clauses sont de rigueur , sans
quoi mondit sieur de Bourbon-Busset n'aurait point consenti
la présente vente et aliénation. »
— i57 —
Les droits seigneuriaux existaient donc bien légitimement;
sans doute ils cessèrent à la longue d^être en harmonie avec
les mœurs du temps; mais en les abolissant, sans accorder
la moindre indemnité aux seigneurs , on commit une grande
injustice et un attentat grave au principe de la propriété.
Les seigneurs de Vésigneux furent toujours dignes de
l'afiection de leurs vassaux et leur donnaient souvent la
liberté pour reconnaître des services signalés. Noble demoi-
selle Marie de Brasier , dame de Vianges et de Vésigneux ,
veuve de noble homme Odet de Cussigny, écuyer, affranchit
du lien de servitude et de mainmorte, le 8 octobre 1471 ,
Marion , veuve de Jean Tharé , fils de Geoffroy , et alors
femme de Jean Raveteau, domiciliée à Vésigneux.
En i36o, le château de Vésigneux fut occupé par les
Anglais; mais le passage des grandes compagnies lui
réservait un désastre plus irréparable. Ces bandes indisci-
plinées avaient établi leur quartier général au château
d'Arcy-sur-Cure , sous les ordres d^un aventurier de bas
étage, qui s^affublait du nom bizarre de Gilles Trousse*
Vache; elles s^emparèrent aussi du château de Dammarie
et de la forteresse de Vésigneux et, grâce à ces positions, d*oti
personne n'osait les déloger, elles demeurèrent maîtresses de
tout le pays qu'elles rançonnaient sans pitié. Le roi chargea
Arnaud de Cervoles, dit l'Archîprêtre, d'obtenir le départ
de ces terribles hordes , moyennant une indemnité de
3,700 fr. payable en bonne et belle monnaie d'or : une
circonstance inexpliquée empêcha Pexécution du marché
convenu. Gilles Trousse- Vache fut arrêté en octobre 1364
par Guillaume de Railly, qui le livra, moyennant 160 florins
de Florence, à la justice du duc de Bourgogne; mais les
Bretons occupaient toujours Vésigneux, où ils étaient
solidement établis et retranchés.
Sur la fin du mois de juin 1621, les mêmes vassaux furent
avertis par billets de publication lus au prône des églises
paroissiales situées dans les fiefs des seigneurs de Vésigneux,
de venir remplir le même devoir. Quoiqu en pleine paix, la
-158-
France était alors pour ainsi dire en état de guerre en consé-
quence des démêlés des catholiques avec les protestants.
Enfin, le i3 août i636, le bailli de Saint- Martin-du-Puits
et de Vésigneux et dépendances, c à la réquisition du pro-
cureur fiscal desdites justices , condamna tous les habitants
et justiciables des terres, seigneuries et baronnie dudit
Saint-Martin-du-Puits, dudit Vésigneux et leurs dépendances,
à faire le guet et garde suivant leurs reconnaissances
générales, i
Cette sentence n'ayant pas eu sans doute Peffet qu'on en
attendait, il fut prescrit par une autre sentence rendue le
3o octobre i636, au bailliage de Vésigneux et dépendances,
c qu^il seroit satisfait par tous les habitants et justiciables
desdites justices tant aux réparations qu^au guet et garde au
jour et suivant Tordre qui leur seroit donné par le capitaine
dudit chastel, à peine contre chacun défaillant de dix sous
d^amende, et enjoint à tous lesdits justiciables d^avoir des
armes et les tenir prêtes aux mêmes peines. »
A cette époque , la Bourgogne était envahie par le duc de
Lorraine, et, conformément à Pordonnance royale du
3i juillet 1626, rendue à Nantes , les créneaux du château
avaient dû être démolis.
En 1 602 , le chastel et maison forte de Vésigneux se com-
posait déjà de trois corps de logis ; la façade était flanquée de
trois tours ^ deux rondes et une carrée. En 1766 , oq abattit
une tour ronde située à l'entrée de la cour intérieure.
L'autre renfermait les trois prisons. La tour carrée servait
de porterie. Il y avait « pont-levis et double porte, couverte
de tuiles, en forme de pavillon ». Ce corps de logis ne com*
prenait alors qu'une grande salle , sous laquelle se trouvait
une sommellerie voûtée, la cuisine et )a boulangerie. A
rétage supérieur^ il y avait deux greniers , un garde-manger
et un cabinet. La pièce située au bout de la salle à manger,
qui devint la chapelle en dernier lieu, n'existait pas alors.
Dans le corps de logis, au couchant , il y avait une petite
salle et une chambre, et au premier deux chambres.
— iSg —
En 1723, le comte de Bourbon -Busset fit construire le
pavillon qui flanque Patle du fond, où étaient établies la
boulangerie et la lingerie. La même année, il fit planter
la charmille qui s'étendait de l'avant-cour du château à
la chapelle de Notre-Dame de Tous-Biens. François-Louis-
Antoinc , son fils , fit aussi exécuter des réparations considé-
rables au château à partir de 1766. On abattit deux tours :
Tune située au côté gauche de l'entrée de la cour intérieure
et Tautre derrière l'aile du fond , prés de Tendroit où les
prisons furent transférées en dernier lieu. La vaste salle du
rez-de-chaussée fut remaniée pour rétablissement d'une
salle à manger et d^un escalier destiné à remplacer celui qui
se trouvait dans la tour détruite.
Ce corps de logis se trouvait flanqué d^une grande tour
carrée renfermant un escalier en vis de pierre, qui conduisait
dans toute la maison.
Dans la cour extérieure se trouvait un autre corps de logis
appelé la Galerie , qui existe encore et qui devait servir au
logement des hommes d^armes. Il y avait aussi cinq écuries
oïl Ton pouvait c aberger de 70 à 80 chevaux. »
Un écusson placé au-dessus de la porte extérieure de
Paile située au fond de la cour et mutilé en 1798 semble être
celui des Montmorillon : ce qui en reste, joint au style de
Fédifice, semble le prouver; il y aurait donc lieu défaire
remonter la reconstruction partielle du château au moins
à Saladin de Montmorillon.
On voit encore à la voûte de la cuisine trois écussons
mutilés en 1793 ; Tun d'eux porte trois bandes.
Jacqueline de Vésigneux portait d*a{urf à la croix
dentelée d'argent.
CHAPELLES.
Il y avait deux chapelles à Vésigneux : celle du château
n'avait aucun vocable particulier.
Par acte passé devant Alin, notaire, le 22 décembre 1552,
— i6o —
Mme Jacqueline de Vésigneux fonda dans sa chapelle une
messe quotidienne et des prières pour les trépassés à la fin
de chaque messe. Cette fondation fut modifiée le 7 mai 1771,
par acte passé devant Boussard ^ notaire royal, et contrôlé à
Lormes le même jour par Lefiot. Il fut stipulé entre le comte
de Bourbon-Busset et le sieur Pierre Ferrand de Battereau,
chapelain, titulaire de ladite chapelle, que ledit sieur Ferrand
de Battereau et ses successeurs ne seraient tenus de dire que
quatre messes basses chaque semaine de Tannée, avec le
psaume De profundis et un répons pour les trépassés. De
ces messes il devait y en avoir une chaque dimanche et les
fêtes chômées; les autres devaient être dites aux jours choisis
par le seigneur de Vésigneux ou quelque personne de sa
famille. Cette réduction de fondation fut confirmée par
l'abbé Frémont, vicaire général de Tévéché d^Autun, le
14 juin 177Ï.
Cette chapelle, établie primitivement au rez-de-chaussée
de la tour carrée, fut transférée en 1766 dans la pièce
contiguë à la salle à manger; elle fut desservie par des
chapelains titulaires, le curé de Chalaux et les capucins
d' A vallon.
Au moment de la Révolution, la chapelle du château était
un bénéfice valant 200 livres, dont la dotation se composait :
1® D'un devoir de 6 sous 8 deniers de cens et rente sur
le pré de la Meloise, appartenant aux Chartreux du Val-
Saint-Georges ;
20 De deux cantons de bois appelés le buisson Saint-
Germain et le buisson des Champs-de-Vannuit, situés finage
de Lormes, contenant ensemble cinq arpents, dont la coupe,
tonture et superficie, fut vendue en 1787 au sieur
Magdelenat, marchand de bois à Saint-Martin-du-Puits,
pour la somme de 848 livres; et de rentes sMlevant à
168 livres 8 sous 6 deniers.
Lorsque les religieux de la chartreuse du Val-Saint-
Georges eurent été brutalement expulsés de leur monastère ,
— i6i —
Tun d'eux, nommé le Père Xavier Asler, crut pouvoir
trouver au château de Vésigneux un asile assuré et y exercer
son saint ministère. Mais comme il se trompait f Le
10 octobre 1793, une troupe de bandits, dirigée par les
citoyens Henriot, Commerçon, Paumier et Enfert, commis-
missaires du représentant du peuple Fouché , et par Chay,
juge de paix à Lormes , se mit en marche sur Vésigneux. Le
Père Xavier célébrait la messe lorsque la bande entra dans
la cour en vociférant : Ça ira! Quelques-uns de ces
sauvages se dirigèrent vers la chapelle : le bon Père, qui
s^tait un instant interrompu , s^était offert lui-même en
sacrifice, prévoyant bien que c'était à lui qu^on en voulait,
et il priait avec plus de ferveur encore. A sa vue, un horrible
cri de joie fut poussé : on allait porter une main sacrilège
sur lui, lorsque le brigadier de gendarmerie crut devoir
intervenir : « Citoyen, dit-il résolument à celui qui comman-
dait le détachement , il ne peut nous échapper ; laissons-lui
finir sa messe , nous n^aurons pas longtemps à attendre. —
En réponds-tu ? — Oui , j'en réponds. — Alors qu'il se
dépêche , » et une épouvantable imprécation accompagna cet
acquiescement. Le Père Xavier acheva donc tranquillement
sa messe ; mais à peine le dernier mot en était-il prononcé ,
que ces furieux se ruèrent sur lui en le dépouillant de ses
ornements ; après Tavoir garrotté, ils l'emmenèrent à Vignes,
où ils croyaient trouver un autre proscrit caché dans la
chapelle du château, qui appartenait aussi à M. de Bourbon-
Busset; ils ne mirent la main sur personne; mais cette
chapelle était abondamment pourvue d^ornements qubn
n^avait pas pensé à mettre en sûreté ; alors la pensée sacrilège
leur vint de se décerner les honneurs du triomphe ; ils se
revêtirent donc de ces ornements et défilèrent sur deux
rangs , drapeau en tête ; après eux venait sur un chariot
le pauvre Père Xavier, recouvert par dérision des housses
dorées dont le comte de ^ourbon-Busset se servait pour ses
équipages. Le reste de la bande suivait en poussant des
chants d^ivresse et de mort. Arrivés à Lormes , ces furieux se
T. m, 3* série, 21
— l62 —
fireat servir un banquet patriotique de quarante couverts «
dans lequel les vases sacrés servirent aux plus criminelles
orgies. Le brigadier de gendarmerie , qui avait obtenu que
le Père Xavier finît sa messe , s^honora par son courage en
refusant de boire dans le calice , sans s^émouvoir des menaces
qui pleuvaient autour de lui. « Je prétends, disait-il, avoir
la liberté de choisir pour boire le vase qui me convient;
à présent, quand j'aurai soif , me faudra-t-il attendre que le
citoyen *** m'ait envoyé de Nevers un verre de sa façon et de
son choix? Je ne 'boirai pas. > Dénoncé pour cet acte, l'honnête
brigadier fut envoyé à Nevers pour donner des explications,
et il eut la rare chance de revenir chez lui; les siens
tremblaient déjà pour sa tête.
M. MoriOy le régisseur du château de Vésigneux, qui
avait donné l'hospitalité au Père Xavier, fut mis en état
d'arrestation et conduit à Corbigny. Entré le soir dans son
cachot avec des cheveux noirs , il en sortit le lendemain avec
des cheveux entièrement blancs; à cette vue, ses juges
n'osèrent aller plus loin et le renvoyèrent absous.
M. Marguerit, avocat, chargé des affaires de M. de Bourbon,
fut pareillement arrêté, mais il fut relâché peu de temps
après. Quant au Père Xavier, il fut conduit à Nevers , où sa
famille le tira de sa prison. Depuis la honteuse journée du
10 octobre 1793, la chapelle du château de Vésigneux n'a
jamais été rendue au culte , et conserve encore Pempreinte
de la rage révolutionnaire et athée.
En 1628, Mme Louise de Moncmorilloo, femme de
César de Bourbon, comte de Busset, avait fait construire dans
PaHée du Parquet, près du château, une autre chapelle^ en
Phoaneuf delà sainte Vierge, sous le vocable Notre-Dame
d^ Toufi-Biens ; et par acte passé devant Vinceat Morizot,
notaire^ le 15 février 1629, elle y avait fondé quinae messes
par an .pour célébra les quiciae joies de Notre-Dame, savoir :
I* Une messe de la sainte Trinité, avec commémoration
de Notre-Dame, de tous les Saints et des "iTrépassés;
— f63 —
2* Sept messes les jours des fêtes de Notre- Datne, 2 février,
25 mars, 2 juillet, i^août, 8 septembre, 2f novembre et
8 décembre, avec comtnémoraison du Saint Esprh et de tous
les Saints et des Trépassés ;
3» Six messes en llionneur de saint Joseph, de saint
Louis, de saint François d'Assise, de saint Franco» de
Pauk, de saint Jean^Baptiste et de sainte Anne, cha(}ue
messe devant être dite le jour de la fête ;
4* Enfin, une messe des morts.
Ensuite, par un acte reçu Magdelenat, notaire, le 20 mars
i635, cette même dame fonda 4ai\s la même chapelle un
service annnel de cinq messes.
Cette chapelle devint bientôt un lieu de pèlerinage
célèbre \ c^était surtout dans les calamités publîc^ues que les
populations environnantes i'y rendaient solennellement en
procession ; la tradition atteste que Icucs prières ne restaient
jamais s^ri^s. La Révolution elle-même n'avait pas osé
renverser la chapelle; mais vers 1 818 le malheur voulut que
la gestion de la terre de Vésigneux se trouvât confiée à un
sieur Houdaille^ fort indigne de cette mission ; le proprié-
taire n^était alors qu^un enfant. Il fit par impiété détruire le
sanctuaire. A peine cette profanation fut-elle accomplie, qu'il
perdit complètement la vue ; l'ouvrier qui avait entrepris les
travaux de démolitioi^ se cassa la jambe et sa femme devii\t
subitement fojle. Les populations ipdignées reconnurent le
doigt de Dieu dans tous ces accidents.
De cette chapelle il ne reste plus qu^une planche qui devait
être placée au-dessus de Tautel, avec Tinscriptioa suivante :
Regina omnium bonorum.
SEIGNEURS.
On peut supposer que Vésigneux faisait parSe des domaims
de la maison de Chastellux , et qu'à Tépoque des croisades il
devint Vapanage d'un cadet ou (l'un fidèle écuyer dont on
voulait ainsi reconnaître les services.
— 164 —
Aubert et Guillaume de Vésigneux, les premiers seigneurs
connus, donnèrent à l'abbaye de Crisenon et au prieuré de la
Vernée un setier de blé et une charretée de foin sur leurs
prés, ce qui fut contre-signe par Hugues, seigneur de Lormes,
et par Aubert, sire de Chastellux. Nous trouvons encore en
août 1249 une charte qui mentionne le don fait au prieuré
de la Vernée par Guillaume le Malade, lépreux, frère de
monseigneur Aubert Lecorchien, de 20 sous de rente sur les
tailles de Vésigneux, et approuvée par Artaud de Chastellux.
Aubert ayant élevé quelques difficultés à cette occasion, le
sire de Chastellux décida (juillet i25o) que Guillaume tou-
cherait 6 livres sur les tailles de Vésigneux et prendrait sur
cette somme les 20 sous qu'il destinait au prieuré.
En 1291 nous trouvons Huguenin de Vésigneux qui laissa
de son union avec Adeline de Mont une fille, Isabelle»
mariée à Jean de Bousson. Adeline convola en secondes
noces avec Jean Le Lohaz de Chevannes.
Dans le dénombrement fourni au comte de Nevers en
i33i , Jean de Chastellux nomma la maison de Poincet de
Vésigneux, tout ce qu'il tenait en domaine en la ville et au
finage de Vésigneux, et la justice grande et petite desdits
lieux, lesquelles choses étaient tenues en fief de Miletde
Vésigneux et en arrière-fief du seigneur de Chastellux.
Aubert de Vésigneux possédait la terre par indivis avec
Jean d'Arcy et Pierre deCuisel, ses beaux-frères, pendant
les désastres qui fondirent sur le Morvand et dont nous
avons parlé plus haut.
Un procès-verbal du 3 janvier 1374 mentionne la prise
de possession de la terre et château de Vésigneux au nom de
Laure de Bordeaux, dame de Chastellux. Mme la comtesse
de Flandre, à cause de sa châtellenie de Donzy, avait aussi
usé de mainmise sur ladite terre, et le bailli de Donzy l'avait
déclarée être du fief de Mme de Chastellux à l'encontre de
Mme de Cuisel et de Jean d'Arcy l'aîné. Un arrêt du Parle-
ment de Paris, en date du 3i août 137*5, adjugea par
provision à Mme de Chastellux la mouvance de la terre de
— i65 —
Vésigncux à rencontre de Marguerite de Vienne, veuve de
Louis de Chalon et dame de Cuisel. Deux ans après,
Guillaume de Beauvoir, chevalier, transigea, au nom de sa
tante, Mme de Chastellux, avec Jean de Liénas, chevalier,
seigneur de Grandchamp, veuf de Philippine d'Arcy, sur
l'instance en commise de fief de la terre et maison-fort de
Vésigneux, laquelle avait appartenu à Robert de Vésigneux
en fief lige de la maison de Chastellux. Jean d^Arcy s'était
cru permis d'entrer en la foi de Louis de Chalon, et depuis
sa mort en eelle de sa veuve pour ledit fief. Par cette tran-
saction Jean de Liénas reconnut que Vésigneux relevait du
fief de Mme de Chastellux et s'engagea à payer i oo fr. d^or
pour les dépens du procès. Une transaction semblable fut
consentie par Jeanne et Eticnnette de Saint- Phalle , que
Philippine d'Arcy avait eues de son premier mariage avec
Guillaume de Saint-Phalle. Leur père donna son dénom-
brement en 1 382 et maria Jeanne à Jean de Brasiers, écuyer ;
de cette union sortit Marie, qui devint la femme d'Oudot de
Cussigny, seigneur de Vianges et de Maçon. Celui-ci donna
reconnaissance le 15 octobre 1465 à Jean de Beauvoir, sire
de Chastellux, au nom de sa femme, qui elle-même passa
procuration le i3 novembre 1478 à Jean de Chasson, écuyer,
et à Bernard de Cussigny, son fils , pour la reprise de fief de
Vésigneux. Une partie de cette terre échut en partage à
Guillemette de Cussigny, femme de Lucas Barbier, riche
bourgeois de Vignes, qui se rendit acquéreur du reste par
moitié avec son frère Pierre, avocat en Parlement. Dès-lors,
ils quittèrent leur nom plébéien pour porter celui de leur
nouvelle seigneurie. On voit que bien longtemps avant 1789
chacun avait le droit et la facilité d^aspirer à une position
supérieure.
Lucas de Vésigneux laissa deux fils : Sébastien et^Aubert ,
qui firent Paveu de leurs terres le 26 mai iSiq. Sébastien
n'ayant point eu d'enfants de Claude de La Porte, légua son
héritage à sa nièce Jacqueline de Vésigneux , qui en fit foi et
hommage le 16 septembre 1541 : veuve de Saladin de
— i66 —
MontmoriUon , elle se remaria , vers 1 582 , à Philibert
d^Igny, seigneur de Rizaucourt; de cette union vint
Christophe, qui mourut en 1549. Ce jeune homme avait
acquis de Philippe de Chastellux la vicomte d^Avallon et
la laissa à son frère , Saladin de MontmoriUon ; celui-ci
la revendit en i56i à sa sœur consanguine, Charlotte de
MontmoriUon, dame de Bazoches. En i568, Saladin était
capitaine et gouverneur d'Avallon avec Sébastien de Rabutin;
Tannée suivante^ la ville dépensa cinquante sols f)oar offrir
iiB coq d'Inde à M. de Vésigneux.
Saladin de MontmoriUon , devenu seigneur de Vésigneux
par la mort de sa mère, épousa Anne de L'Hospital et
mourut en 1597 ; ^^ n'eut qu'une 611e , Louise , qui épousa,
k 21 juin 1588, César de Bourbon, comte de Busset et
de Chalus , commandeur des ordres du roi , gouverneur de
Sarlat et de Morat; c'est ainsi que Vésigneux devint la
résidence d^une branche de l'iUustre maison de Bourbon,
privée de tout droit à la couronne ducale et plus lard au
trône par la haine de Louis XI.
Cés»f de Bourbon-Busset était, le 20 juin 1589, capitaine
de cinquante hommes d^armes des ordonnances du duc
d'Orléan^y et gentilhomme ordinaire de la chambre du roi.
Psir son testain^nt du 2 novembre i63o , il fit le partage de
ses biens entre ses enfants, et mourut à Busset le
21 norv^mbre i63o. De so«i paariage avec Louise de
MociiQQoriUon , U eu) sept enfai^ts^ dont le quatrième
reçuetltît l'héritage de ses parents.
Loïkise de MeiAtmof iUoD était dame d^honneur de la reioe
en i634« et moiurut v^ers la Toussaint,, en 1649, dans un
âge fort avancé. Elle avait fourni,, le i3 paai 1S99, son
dénombrement de la terre de Vésigneux à M. de Chastellux.
Le 9 janvier 1640, elle fit en faveur des Cordeliers de
Vézelay une fondation de douze livres de rente, assise sur
les biens desNaulîn, de Jourland, paroisse de Saint-Martin.
Cette reifLte fut vendue le i^^ mars 1687, par les Cordeliers,
au aiew PbiUb^t de Sauvage ^ seigneur de MoLatbaroa,
— tif —
comme tuteur du tteur Guillaume Courtot, moyenant deux
cents livres employées à acquérir deux pièces de vigne.
Par son testament olographe du i3 mars 1645, elle
chargea son iSls « d^une fondation de cent dix sols par an
pour un service de cinq messes qui devait être fait dans
réglise de Saint-Martin, à tel jour que celui du trépas de
kdite dame. •
Jean-Louis de Bourbon, né à Busset, le 23 juin 1597,
était resté le seul fils de Louise de Montmorillon, et recueillit
son héritage , dont il fournit le dénombrement le 24 février
1652. Il se plaisait à réunir l'élite de la noblesse au château
de Vésigneux, et eut l'honneur d'y recevoir le prince de
Condé. Il hit nommé, en 1648, premier syndic de la
noblesse d^Auvergne, et figura comme député de celle-ci aux
Euts-Généraux tenus à Orléans en 1 649, et à Tours en 1 65 1 .
Il mourut à Busset le 8 avril 1667. ^^ ^^^^^ épousé, par
contrat du i*' août 1639, Hélène de La Queuillede Fleurât ;
de cette union vinrent : Jean-Louis, mort jeune; Louis,
qui suit; Madeleine, née le 18 novembre 1644, mariée le
17 septembre 1668 à François Andrault de Langeron,
marquis de Maulévrier, morte en couches onze mois après,
et Anne, née le 18 juin 1646, mariée en 1672 à Jean de
Saulx, marquis de Tavanes, morte le 17 octobre 1707.
Hélène de La Queuille n'était pas faite pour sauvegarder
les intérêts de ses enfants : peu de temps après la mort de
son mari , il fut adressé au lieutenant^général de Riom une
requête à l'effet c de faire saisir et mettre sous bonne .garde
les meubles précieux, titres et papiers du château de Busset
pour empêcher les dissipations qu^en faisoit ladite dame. >
Hélène de La Queuille mourut à Cusset le 7 mars 1 669 ,
dans la maison du sieur Marc-Antoine de Bart du Croisât ;
son corps fut inhumé dans Téglise des Pères Célestins de
Vichy , qui reçurent six cents livres pour l'enterrement et le
service du bout de Pan, Par son testament, fait la veille de sa
noort, devant Lachaise, notaire à Cusset, elle laissa le quart
de ses biens à Jean- Gilbert de Btrt, écoyer, sieur du
— i68 —
Croisât et du Crozet; elle légua aussi à Antoine de
Bart, son écuyer, 3,ooo livres , son équipage de carrosse, ses
chevaux et sa chambre garnie , et à Diane de Bart
6,000 livres. Aussi ses héritiers naturels n'acceptèrent sa
succession que sous bénéfice dUnventaire.
Louis de Bourbon, comte de Busset, lieutenant-général de
Tartillerie de France, était né le 18 octobre 1648, et servit
avec la plus grande distinction dans les armées du roi, mais
sa carrière se termina d^une façon glorieuse et prématurée
sous les murs de Fribourg, dans la nuit du 11 au 12 no-
vembre 1677; son cœur fut placé le 9 décembre dans la
chapelle du château de Busset. Il avait fourni son dénom-
brement le 23 juin 1671. Il avait épousé le 15 janvier 1672
Madeleine de Bermondet , qui prolongea son existence jus-
qu'au 3o juillet 1724. Elle fit foi et hommage, au nom de ses
enfants, à M. le comte de Chastellux, le 9 novembre 1682.
Elle obtint, le 19 janvier 1723, du sieur Rosier des Essarts,
lieutenant-général de police à Limoges, une ordonnance lui
permettant de faire imprimer par tel imprimeur qu'elle vou-
drait et de faire afficher où besoin serait une généalogie
prouvant que les seigneurs comtes de Bourbon-Busset des-
cendaient par légitime mariage de Tillustre et royale maison
de Bourbon.
De ce mariage vinrent quatre enfants, dont Taîné, Louis,
posséda Vésigneux.
Louis de Bourbon, comte de Busset, né à Busset le 3o sef>-
tembre 1672, y mourut le 14 avril 1724. Il avait épousé le
3i décembre 17 19 Marie-Anne de Gouffier de Thoix qui, à
l'occasion de sa mort, fit peindre un tableau allégorique
qu'on voit encore au château de Vésigneux. Le comte de
Bourbon-Busset y est représenté s'élevant au ciel, tandis que
sa veuve éplorée lui présente Tenfant dont il l'avait laissée
enceinte.
François- Louis- Antoine de Bourbon, comte de Busset,
naquit au château de Busset le 26 août 1722. Pour célébrer
sa naissance on fit à Vésigneux, le 20 septembre, un feu de
— 169 —
)oie qui fut placé c au-dessus de Touche des Ongelées « près
d^un magne existant à côté de la chaume. Toute la justice
s y trouva, avec tambours, hautbois, fusiliers et deux cou-
leuvrines mises par delà le feu de joie, en face Chastellux. »
Il fut nommé capitaine de cavalerie au i égiment d^Andlau le
24 août 1741, mcstre de camp du mcme régiment le
ler décembre 1745, chevalier de Saint-Louis le 2 janvier
175 i, brigadier de cavalerie le i»' mars 1758, maréchal des
camps et armées du roi le 20 février 1761.
Le comte de Bourbon^Busset fut élu de la noblesse aux
Etats de Bourgogne, en 1766 [1} ; il devint premier gentil-
homme de la chambre du comte d^ Artois, le 16 sep-
tembre 1773, puis lieutenant-général le i*' mars 1780.
Il fit de fréquents et longs séjours à Vésigneux , et y tenait
un grand état; beaucoup de ses amis venaient ly visiter. 11
aimait réellement ce pays et lui rendit un service signalé en
y introduisant la culture de la pomme de terre
Par son testament du 9 avril 1788, il laissa d'abondantes
aumônes aux dix-huit paroisses dont il était seigneur, et de
nombreuses pensions à ses gens, et toutes ses terres du
Nivernais à son second fils. Il mourut au château de Busset,
le 16 janvier 1793, pénétré de douleur à la vue des malheurs
qui accablaient la France, et prévoyant déjà Texécrable
crime qui allait la condamner à de longues et terribles
expiations.
Le dernier acte de foi et hommage à M. le comte de Chas«>
tellux fut rendu le 9 mars 17791 par le comte de Bourbon-
Busset. Ce dernier avait épousé, le 23 avril 1743, Madeleine-
Louise-Jeanne de Qermont-Tonnerre , fille du maréchal,
femme du plus grand mérite.
Cette femme si supérieure mourut au prieuré de Valdosne,
le 27 juillet 1769, et fut inhumée dans Téglise de la paroisse
(i) li reste encore auchAteau de Vésigneux des documents nom-
breux et intéressants sur les Etats de Bourgogne, qu*un travaiUeur
pourrait étudier avec fruit.
T. m, 3* série. 22
— 170 —
de Saint-Maurice de Charenton ; elle fut remplacée, le
27 avril 1773, par Jeanne Marie- Louise-Thècle de Moreton
de Chabrillan, qui vécut jusqu^au 24 avril 1812.
Le comte de Busset eut de son premier mariage huit
enfants, dont deux fils qui furent auteurs des deux branches
de la famille.
Louis-François-Joseph de Bourbon, appelé d^abord le
marquis de Bourbon-Busset , puis le comte de Chalus, se
trouva fréquemment à Vésigneux avec son père.
Louis-Antoine-Paul de Bourbon, vicomte de Busset,
naquit au château de Busset, le 11 novembre 1753 , et fut
reçu chevalier de Saint-Jean de Jérusalem en 1762; sous-
lieutenant dans le régiment du colonel général de la cavalerie
légère le 3o décembre 1769; il devint capitaine au même
corps le 4 mai 1771. Le 19 octobre 1779 , il reçut un brevet
de survivance à la charge de premier gentilhomme de Mgr
le comte d'Artois , possédée par son père ; le 1 3 avril 1780,
il fut nommé mestre de camp en second du régiment d^ Anjou
infanterie.
En 1787, il devint élu général de la noblesse de la province
de Bourgogne , et exerça cette charge jusqu^en 1 790 ; dans l'in-
tervalle, il fut promu, le 10 mars 1788, au grade de mestre de
camp lieutenant commandant le régiment d'Artois cavalerie.
Il remplit les fonctions d'élu général de la noblesse avec
tant de distinction que, lors de la démission du marquis de
Gouvernet comme commandant en chef de la province de
Bourgogne , il fut unanimement désigné pour occuper ce
poste important. Le roi Ty appela par ordonnance du
9 décembre 1789, et il y resta jusqu'au 1^ mai 1791 , que
ces places furent supprimées.
Le zèle que M. de Bourbon-Busset déploya dans l'exercice
de ses fonctions, les travaux excessifs auxquels il se livra au
milieu de difficultés sans cesse renaissantes, Peffroyable
responsabilité dont il sentait le poids , et surtout la douleur
que lui causèrent de funestes événements, ruinèrent complè-
tement sa santé,
Nous avons vu que Vésigneux fut pillé le lo octobre 1793;
on enleva ce jour-là la plus grande partie du mobilier de la
chapelle; on vola en même temps de l'argenterie^ deux
juments toutes sellées et bridées, un poulain arabe de quatre
ans , huit selles et brides et trois tableaux de famille. Les
1 9 et 26 octobre et le 15 décembre 1793 on enleva ce qui
restait à la chapelle, Pargenterie , le linge et les meubles; on
brûla sur la place publique une partie des archives et toute
la bibliothèque, à cause des fleurs de lys qui ornaient les
plats.
Le district de Corbigny rendit le 11 novembre 1793 un
arrêté qui prescrivait la vente du mobilier, à l'exception des
objets utiles au service des armées et des volontaires , et
l'expulsion de tous les gens attachés au service du château.
M. de Bourbon protesta le 20 novembre, mais en vain ; les
meubles furent donc vendus les 10 , 25 et 3o janvier 1794,
tant à Ncvers qu'à Vésigneux, et 3r,837 livres 3 sous
allèrent s'engouffrer dans les poches républicaines. C'était un
crime d'émigrer, c'en était un aussi de rester dans ses foyers
et de défendre ses biens contre la rapacité des oppresseurs de
la France. M. de Bourbon réclama ses livres et habits le
itr avril 1794 et encore le 23 janvier 1795 , et eut beaucoup
de peine à les obtenir. Il se trouvait à Paris au plus fort de
la Terreur, cherchant à se faire oublier, et lorsque le 9 ther-
midor semblait lui permettre de respirer, il se vit en butte
aux vexations les plus arbitraires. Le 26 juillet 1794 le
bureau central de Paris décerna un mandat d'amener contre
lui ; les scellés furent apposés dans sa demeure le 29 et ne
furent levés que le 9 décembre. Le 3i juillet, le commissaire
de police constata qu^il ne se trouvait dans ses papiers et
correspondances rien de suspect ou de contraire aux intérêts
de la République. Le 8 août, M. de Bourbon adressa une
pétition pour obtenir sa liberté ; le lendemain , le comité
révolutionnaire de la section de la Fontaine-de-Grenelle
donna un certificat portant que le citoyen Bourbon-Busset
n'avait été arrêté que comme suspect. Le 8 décembre suivant.
— i72i —
le comité général de la Convention prit un arrêté pour
ordonner son élargissement et celui de ses deux neveux,
emprisonnés le 8 août 1794, en vertu d'un arrêté de Forestier,
représentant du peuple : ils sortirent de la maison d^arrêt du
Luxembourg en même temps que leur oncle, le 29 décem-
bre 1794.
Malgré son extrême pénurie, le vicomte de Bourbon-
Busset continua à payer les nombreuses pensions léguées par
son père et par sa tante la comtesse d^Ouroy , et se dévoua
pour les deux fils de son frère émigré; il fut assez heureux
pour leur conserver la plus grande partie de leur patrimoine.
Pour subvenir à toutes ces charges, il n^hésita pas à
contracter les emprunts les plus onéreux.
Il aimait extrêmement Vésigneux, oti les dispositions testa-
mentaires de son père l'avaient fixé , et cherchait à accroître
la richesse agricole de ce coin du Morvand. Il y avait établi un
haras, composé de deux étalons arabes et de plusieurs juments
poulinières; il y avait aussi fait venir des vaches de Suisse
et des moutons du Roussillon et d^Espagne, pensant que ces
différentes espèces d^animaux s'accommoderaient du climat du
Morvand. Mais ses bonnes intentions furent paralysées par
les rapines de la République et de certains particuliers.
Lorsque la tempête révolutionnaire se fut un peu calmée,
le vicomte de Bourbon-Busset éprouva le besoin de se créer
une famille, un intérieur et des affections. Il épousa donc à
Besson, en Bourbonnais, le 29 octobre 1796, une riche
héritière de dix-sept ans , Marguerite- Louise-Charlotte-
Joséphine de Lordat, et partit avec elle, le 29 novembre,
pour Vésigneux, oti le jeune ménage sUnstalla tant bien que
mal, donnant une hospitalité tout écossaise à des amis
dévoués. La vicomtesse accoucha, le 6 novembre 1797, ^*""
fils, qui fut nommé Louis-Charles-Timoléon ; la joie fut
grande à Vésigneux, mais bientôt changée en deuil : l'enfant
mourut le 2 mai 1798, et son frère Eugène naquit le
i5 février 1799. Tout souriait autour de ce berceau, mais
des malheurs successif allaient amener la ruine de Vésigneux.
La vicomtesse s'étant rendue à Paris , y mourut le 7 juin
! 800 , en laissant à son fils la tertre de Lignières , en Berry ,
qui lui venait des Colbert, ses aïeux maternels. Le vicomte,
usé par tant de chagrins et d'émotions, y mourut le 9 fé-
vrier 1802, et Eugène de Bourbon- Busset se trouva, dès
Tâge de trois ans , à la tête d^une fortune très-considérable.
Elevé loin de son pays natal , il ne jugea point à propos de
revenir s^y établir, et ne fit que de rares apparitions en
Morvand. Par sa mort, arrivée à Lignières le 24 novembre
i863, la terre de Vésigneux échut à sa fille Marguerite-
Louîse-Marie-Anne de Bourbon, qui avait épousé, le a8 oc-
tobre 1857, Amable-Marie-Laurcnt , aujourd'hui marquis
d« Chabannes. Elle fonda une école pour les jeunes filles de
Saint-Martin, sous la direction des religieuses de Nevers , et
songeait à restaurer le château de Vésigneux, lorsqu'une
mort prématurée l'enleva, le 8 octobre 1870, à la tendresse
des siens. Elle laissa trois enfants ; on souhaite que l'un
d^eux se fixe à Vésigneux et y remplisse la place qui convient
à un homme de cœur et de bien, capable d'exercer une
influence utile dans son pays (i).
Comte DE CHASTELLUX.
(i) J'ai refondu mes notes avec celles de M. Teste, régisseur du
château de Vésigneux, et je lui adresse ici mille remercîments pour
ses recherches si exacles et si curieuses.
- ?74 -
LA CHARTE DE DÉPART POUR LA TERRE-SAINTE
DE GAUCHER DE CHATILLON, BARON DE DONZY.
En partant pour les expéditions en Terre-Sainte, ces
croisades d'oCi si peu revenaient , les seigneurs avaient
coutume de faire des donations aux établissements religieux
de leur voisinage; par là ils devenaient participants aux
prières de ces maisons ; quelquefois aussi ces donations
notaient que des ventes simulées ou des engagements par
lesquels ils se procuraient les fonds qui étaient nécessaires
pour le voyage.
Un bien petit nombre de ces chartes de départ nous sont
parvenues ; celle dont nous donnons le texte plus loin ,
d'après l'original conservé aux archives départementales de
la Nièvre, n'est pas une des moins intéressantes, et par
l'illustration du donateur, appartenant à une de ces grandes
familles féodales dont bien des membres déjà avaient
guerroyé contre les infidèles, et par la manière glorieuse
dont il s'acquitta de son vœu et trouva la mort dans cette
célèbre et désastreuse campagne, et par les soins qu'il prend
d^assurer des secours qui, dans sa volonté, devaient être
perpétuels pour les pauvres de l'une de ses seigneuries , ce
qui rend cette donation tout particulièrement touchante.
L'un des chevaliers les plus braves et les plus renommés
parmi ceux qui prirent part à la première croisade de saint
Louis fut sans contredit Gaucher de Chatillon , seigneur de
Saint-Aignan en Berry et baron de Donzy.
Fils de Guy de Chatillon , comte de Saint - Paul , et
d^Agnès, baronne de Donzy, dame de Saint-Aignan, il
s^était distingué dans l'expédition conduite en 1242 par
Louis IX contre Hugues X, comte de La Marche.
- 175-
En 1247, Mahaud de Courtenay, comtesse de Nevers,
veuve d^Hervé de Donzy, son aïeule maternelle , et Dreux
de Mello, seigneur d'Epoisses et de Château-Chinon , le
prirent pour arbitre dans un différend au sujet de la
mouvance du château de Lormes, qui fut reconnu être du
fief de la comtesse de Nevers (i).
L^année suivante, il prit la croix et accompagna saint
Louis à la croisade, ainsi que son oncle Hugues de
Chatillon, comte de Saint- Paul.
Avant de partir, au mois de juillet 1248, il légua aux
abbés de Saint- Martin de Nevers et de Fontmorigny
23 livres tournois de rente , représentant 466 fr. 07 c. de
notre monnaie actuelle, valeur intrinsèque, à prendre
chaque année sur les revenus de sa terre de Cuffy, sur
lesquelles 20 livres devaient servir à acheter des tuniques et
des souliers destinés à être distribués par les deux abbés aux
pauvres de la terre de Cuffy. Dans l'acte qui nous a conservé
le souvenir de cette libéralité, Gaucher de Chatillon prend
des précautions méticuleuses pour assurer Texécution de
sa fondation : il y est dit que si Tun des deux abbés ne
pouvait pas, ou ne voulait pas assister par lui-même à cette
distribution , le prieur de son abbaye devait le remplacer,
toucher lui-même les 3o sous qui auraient dû revenir à son
abbé s'il eût été présent, et les employer à donner une
pitance à son couvent. En ajoutant un plat au maigre
ordinaire de leurs maisons , le donateur pensait sans doute
rendre les prieurs des deux abbayes plus vigilants à veiller à
Paccom plissement de ses volontés. Il déclarait aussi que son
intention était que si Tabbé ou le prieur d'une seule des
deux abbayes faisait en personne la répartition des secours,
les 3 livres lui seraient intégralement données, et dans le
cas oti ce serait le prieur, elles serviraient à une pitance
pour les religieux de son abbaye. Cette distribution de
secours devait être faite le jour de Saint-Remy ; les receveurs
(i) Maboli,bs, Inventaire det Titres de Nevers^ col. 491.
— ij6 —
des râTenus et les juges de la terre de CujSy devaient payer
aux deux abbés ou aux deux prieurs 3 sous tournois
d'amende par jour de retard du payement de cette somme. De
leur côté, les abbés et prieurs des abbayes de Saint-Martin
et de Fontmorigny devaient, aussitôt après leur nomination,
se rendre sur les lieux où se levaient les revenus sur lesquels
étaient prises les 23 livres tournois à eux laissées, c'est-à-dire
à Cuffy, et s^y engager devant le seigneur du lieu ou son
mandataire à bien s^acquitter et fidèlement de Texécution
des volontés du donateur.
Saint Louis s'embarqua à Aigues-Mortes le 28 août 1248
et débarqua en Chypre le 18 septembre; Tarmée y passa
l'hiver et ne se rembarqua que le 21 mai 1249. ^^^^^
pendant ce long séjour en Chypre , au mois de février 1 249
(nouveau style) , que Gaucher de Chatillon fit don à Alain
Le Lou, chevalier, l'un de ses compagnons et sans doute un
Nivernais , de 40 livres de rente en fief, soit 809 fr. 55 c. de
notre monnaie, au comté de Nevers, lorsque ledit comté lui
serait échu (i).
L'armée de saint Louis, grossie du contingent des che-
valiers des royaumes de Chypre et de Jérusalem , prit terre à
Damiette à la fin de mai ou au commencement de juin; la
ville fut prise de suite, et le roi y fit un long séjour pour
attendre les retardataires de son armée. Ce ne fut qu^à la fin
de novembre que l'on se mit en marche pour le Caire; après
quelques succès, les 6 et 25 décembre, saint Louis fut obligé
de s'arrêter le 8 février i25o à La Massoure, oCi fut livrée
une bataille sanglante et indécise. Pour rentrer au camp,
Tarrière-garde fut confiée à Gaucher de Chatillon, sur sa
demande (2).
(i) Marolles, Inventaire des Titres de Nevers, col. 67.
(2) « Le soir, au soleil couchant, nous amena li connestables les
arbalestriers le roy à pié, et s'arangièrent devant nous; et quant H
Sarrazin lour virent mettre pié en Testrier des arbalestes, il s'en-
fuirent et nous laissièrent* Et lors me dist li connestableis : « Sénés*
- 177 —
Pendant la nuit suivante, les Sarrasins ayant attaqué
le camp que gardaient les hommes du sire de Joinville,
le roi envoya Gaucher de Chatillon pour soutenir le séné-
chal de Champagne, et les assaillants furent repoussés (i).
Dans la bataille qui eut lieu le ii février, Gaucher de
Chatillon commandait un corps de chevaliers chrétiens
qui se défendit si vigoureusement que les Turcs ne purent
Tentamer (2).
Au commencement d'avril, la retraite fut décidée; on
repassa le Nil , et ce fut encore Gaucher de Chatillon qui fit
Tarrière-garde : « Toutevoiz ne se mut li roys ne ses gens ,
jusque^ à tant que tout li harnoiz (3) fu portez oustre ; et
lors passa li roys et sa bataille après li , et tuit li autre baron
après, fors que mon signour Gautier de Chasteillon, qui
fist Tarrière-garde (4). >
Le 5 avril eut lieu la bataille de Pharamie, à la suite de
laquelle le roi fut pris ; c*est là que Gaucher de Chatillon fut
chau6> c'est bien fait; or vous en alez vers le roy, si ne le lessiés
huimais jusques à tant que il iert descendus en son paveillon. » Si
tost comme je ving au roy, mes sires Jehans de Waleri vint à H et
H dist: f Sire, mes sires de Chasteilion vous prie que vous li donnez
Tanère^arde. • Et li roys si fist moût volentiers^ et puis si se mist
au chemin. » (ioïKviLLK, édition classique de Natalis de Wailly
(1882), p. 102.)
(i) « ... et li roys nous envoia mon signour Gauchier de Chasteilion
liquez se logea entre nous et les Turs , devant nous.
* Quant H sires de Chasteilion ot reboutée arièra les serjans aus
Turs à piéy il se retraistrent sus une grosse bataille de Turs à cheval,
qui estoit rangée devant nostre ost... » {Ibid.^ p. 108.)
(2) « Après la bataille au roy de Sezille, estoit la bataille des barons
d*outre-meo dont mes sires Guis dUbelin et mes sires Baudoins, ses
frères, estoient chievetein. Après lour bataille, estoit la bataille mon
signour Gautier de Chateillon, pleinne de preudoroes et de bonne
chevalerie. Ces dous batailles se deilèndirent si viguerousement que
onques li Turc ne les porent ne percier ne rebouter, p {fbié., p. 112.)
(3) Bagage.
(4) Joiinrnj.B, p. i23.
T. m, 3* série. 23
— 178 —
tué après des prodiges de valeur. Voici comment Joiaville
raconte sa mort :
•
c Je ne vueil pas oublier aucunes besoignes qui avindreni
en Egypte, tandis que nous y estiens. Tout premier je vous
dirai de mon signour Gauchier de Chasteillon, que uns
chevaliers^ qui avoit non mon signour Jehan de Monson,
me conta que il vit mon signour de Chasteillon en une rue
qui estoit ou kasel (i) là où li roys fu pris; et passoit celle
rue toute droite parmi le kasel, si que on veoit les chans
d'une part et d^autres. En celle rue estoit mes sires Gauchiers
de Chasteillon, Tespée ou poing, toute nue.
ï> Quant il veoit que li Turc se metoient parmi celle
rue (2), il lour couroitsus, Tespée ou poing, et les flatoit (3)
hors dou casel; et au fuir que li Turc faisoient devant li (il
qui traioient (4) aussi bien devant comme darière) le cou-
vrirent tuit de pilez (5). Quant il les avoit chaciez hors dou
kasel, il te desflichoit (6) de ces piles qu'il avait sur li, et
•
remetoit sa cote à armer (7) de sus li, et se dressoit sur ses
estriers, et estendoit les bras atout (8; Tespée, et crioit :
c Chasteillon, chevalier! oti sont mi preudome?» Quant
il se retournoit et il veoit que li Turc estoient entrei par
Tautre chief (9), il lour recouroit sus, Tespée ou poing, et les
enchaçoit ; et ainsi iist par trois foiz en la manière desus dite.
» Quant li amiraus des galies m*out amenéi devers ceus
qui furent pris à terre, je enquis à ceux qui estoient entour
(i) Casai ou casel, nom qu^on donnait en Orient aux hameaux ou
villages.
(2) Se metoient parmi celle rue, — entraient dans cette rue.
(3) Flatoit, — jetait.
(4) Traioient, — tirer de l'arc.
(5) Pile^ ou piles, — traits,
(6) Se desflichoit, — enlevait les flèches.
(7) Cote à armer, — cotte d'armes, vêtement d'étoffe légère qui se
mettait par-dessus le haubert ou cotte de mailles.
(8) Atout, — avec.
(9) Chief, — bout.
— Ï79 —
li; ne onques ne trouvai qui me deist comment il fu pris,
lorsque tant que mes sires Jehans Fouinons (i), li bons che-
valiers me dist que, quand on Tamenoit pris vers la Mas--
soure, il trouva un Turc qui estoit montez sur le cheval
mon sîgnour Gauchîer de Chasteillon ; et estoit la culière (2)
toute sanglante dou cheval. Et il li demanda que il avait fait
de celi à cui li chevaus estoit ; et li respondi que il li avoit
copei la gorge tout à cheval, si comme il aparut à la culière
qui en estoit ensanglantée dou sanc (3). »
Gaucher de Chatillon n'avait que vingt-huit ans et ne
laissait pas d'enfants de Jeanne de Boulogne, sa femme ^
fille unique de Philippe H urepel, comte de Clermont-en-
Beauvoisis, de Mortain et d'Aumale, et deMahaud, com-
tesse de Boulogne et de Dommartin ; ses seigneuries de
Donzy et de Saint-Aignan revinrent à sa sœur, Yolande de
Chatillon, veuve d'Archambaud IX, sire de Bourbon, qui
hérita aussi de Mahaud de Courtenay, son aïeule, du comté
de Nevers.
Le sceau de Gaucher de Chatillon existe encore aux
Archives Nationales; il est appendu à une charte du mois
de novembre 1 249 par laquelle le seigneur de Saint-Aignan
en Berry reconnaît des dettes contractées envers le roi de
France.
H. DE FLAMARE.
Ego Galtherus de Castellione, dominus Sancti Aniani in
Bituria ; notum facio omnibus presentibus et futuris quod
ego ordinavi et statui in testamento meo quod feci quando
(i) Jean Fouinons, vassal de la chàtellenie de Chàtillon-sur-
Marne; il avait déjà pris part à la croisade de 1204 et à celle de 12 18,
où il avait été fait prisonnier par les Sarrasins.
(2) Culière, — croupière.
(3) JoiNviLLE, édition classique, p. 163-164.
— i8o —
ad partes me transtuli transmarinas quod abbas Sancti
Martini Nivernensis et abbas Fontis Moriniacensîs, cîster-
ciensis ordinis, ejusdem dyocesis, exigant et recipiant
singuUs annis in perpetuum> in festo Sancti Remigii
viginti très libras turonensium in meis redditibus de
Cufiaco, diocesis supradicte, et volo quod dicû abbates
emant singulis annis in perpetuum de viginti libris dicte
summe viginti libratas tunicarum et sotularium pauperibus
ejusdem terre erogandorum prout et quando ipsis videbitqr
expedire. Volo etiam quod sexaginta solidos residuos sibi
pro Deo retineant ac pro suis laboribus et expensis , si per
eos facta fuerit erogatio supradicta. Volo iterum quod si
unus de dictis abbatibus ad predictam peccuniam exigendam
et recipiendam et ad dictam erogationem faciendam interesse
non possit aut nolit^ prior ejusdem abbatie cum altero
abbate eandem peccuniam exigat et recipiat et eam cum
eodem abbate in usum predictum distribuât et eroget pau-
peribus dicte terre, et tune triginta solidos quos abbas qui
ad predicta facienda interesse non potuit aut noluit habuisset
si interfuisset sibi retineat idem prior (i) pro pitancia suo
conventui facienda. Et volo quod de predictis trigiata
soiidis eodem modo fiât pitancia singulis annis in quibus
idem prior predicta fecerit pro eo quod abbas suus ad
predicta facienda non potuerit aut noluerit interesse. Idem
(sic) volo quod si nuUus de dictis abbatibus predicta facere
voluerit aut potuerit, priores sui ea faciant vel unus eorum
si alter prior noluerit vel non potuerit predictis faciendis
interesse; et volo quod si ambo priores predicta fecerint
predicti sexaginta solidi ipsis pro pitanciis suis conventibus
erogandis illo anno equaliter dividantur; et volo quod
eodem modo fiât singulis annis in quibus dicti priores
propter defectum suorum abbatum fecerint supradicta. Et si
forte contigerit quod nec abbas nec prior unius dictarum
abbatiarum voluerint vel potuerint interesse predictis
(i) Le texte porte priori.
- i8i -
faciendis sexaginta solidi supradicti sint intègre illo anno
alterius abbatis si predicu solus fecerit» aut prioris
ejusdem (i) abbatie pro pitancia suo conventui facienda
si propter defectum sul abbatis fecerit supradicta; et volo
quod eodem modo fiât singulis annis in quibus unus abbas
solus vel unus prior solus propter defectum aliorum fecerit
suprascripta. Volo insuper et precipio et ad hoc etiam
heredes et successores meos et predictam terram meam de
Cufiaco obligo quod receptores reddituum ejusdem terre et
illi qui in eadem terra justicias exercebunt jurent quamcito
a dictis abbatibus vel prioribus vel ab altero ipsorum
fuerint super hoc requisiti quod solutionem predictarum
vinginti trium librarum intègre facient singulis annis
termino superius assignato. Et volo et precipio quod in
ipsorum sacramento adiciatur quod ipsi persolvent très
solidos turonensium nomine pêne singulis diebus quibus
defecerint in solutione dicte peccunie post terminum supra*
dictum. Volo etiam et precipio quod si receptores dictorum
redituum et illi qui in dicta terra justicias exercebunt
noluerint prestare sacramentum secundum modum superius
declaratum, quod qualibet die qua defecerint in prestacione
dicti sacramenti teneantur eadem pena qua propter defifectum
solutionis sunt astricti. Et volo et precipio quod omnes
pêne predicte dentur abbatibus aut prioribus qui fecerint
diciam di&tributionem secundum modum qui superius est
expressus ck residuo denariorum qui debentur in tunicis et
sotularibus pauperibus erogari. Et ut istud vires habeat et
eSectum , volo quod abbates et priores supradicti antequam
predictos redditus recipiant » veniant ad loca in quibus siti
sunt dicti redditus cum de novo foerint electi et in verbo
veritatis promittant eoram domino loci qui pro tempore
fuerit vel ejus mandato ai inde fuerint ab eis requisiti,
quod ipsi iideliter et bona fide facient dictam distributionem
secundum quod eis injunctum est per hec scripta. Item rogo
(i) Le texte porte eidem.
et requiro prelatum in cujus dyocesi siti sunt predicti
redditus ut dominos locorum ac receptores reddituum eteos
qui justicias exercuerint tempore defectus soiutionis vel
prestacîonis sacramenti per censuram ecclesiasticam com-
pellat ad solvendum predictis abbatibus vel prioribus
predictos redditus ad penas secundam quod superius est
distinctum^ nisi sibi constiterit de reddituum solutione et
juramenti prestacione per patentes litteras dictarum perso-
narum que debent recipere dictos redditus et etiam sacra-
menta. In cujus rei testimonium et munimen présentes
litteras feci, sigilli mei munimine raboravi. Actum anno
Domini millesimo ducentesimo quadragesimo octavo, mense
juIio.
[Archives de la Nièvre H., fonds Saint-Martin de
Nevers, Original sur parchemin )
LE LIVRE DES EVANGILES
DE SAINT-MARTIN DE CLAMECY.
On se souvient, peut-être^ qu'il y a quelques années,
M. Léopold Delisle, Téminent directeur de la Bibliothèque
nationale^ signalait avec tristesse, dans la Revue des
Sociétés savantes (i), quantité de manuscrits français
récemment acquis par la bibliothèque de Saint-Pétersbourg
et par le Musée britannique. Parmi ces derniers se trouvait
précisément un Obituaire de l'église de Saint-Martin de
Clamecy (1259- 1546) classé sous le n<> 21,362.
(1) 5* série, t. VI, 1874, et 6* série, t. III, 1876. — Voir aussi une
note insérée dans le Bulletin de la Société nivemaisef 2* série, t. VIII,
p. 129-130.
— i83 —
Nous sommes heureux de signaler aujourd'hui , comme
taisant partie du trésor de Péglise de Clamecy, un texte des
évangiles de la fin du onzième ou du commencement du
douzième siècle, de Tépoque même du beau sacramen taire
de révéque de Nevers, Hugues le Grand, si magnifiquement
édité par notre président, Mgr Crosnier, en 1873.
L'inventaire des reliques et de Targenterie du trésor de la
collégiale de Saint-Martin , rédigé par les fabriciens de cette
église en 1679, le décrivait en ces termes : c Item, It livre
des Evangiles, qui sert aux mesmes solemnitéz (fêtes et
processions des vœux de la ville) , dont la couverture est de
bois couvert de lames et feuilles d^argent, oti d'un costé est
représenté la descente de croix en bosse , de Tautre costé un
Sauveur sur un trosne cantonné des emblesmes des quatre
évangélistes. Le tout rehaussé d^ouvrages à Tantique et de
dorures (i). »
Mais, hélas! cette œuvre magnifique, qui serait aujourd'hui
d'un si grand prix, devait bientôt disparaître entre les mains
de quelque brocanteur^ comme il y en avait tant déjà au
siècle dernier (2).
Aujourd'hui, notre livre des évangiles n'est plus exté-
rieurement qu'un beau volume relié au dix-huitième siècle
en veau rouge , par une main d'ailleurs inhabile ; volontiers
on le prendrait pour un vieux missel , si on ne lisait sur le
dos le titre: novum TEsrTAu{entum), En l'ouvrant, on
s^aperçoit que les feuillets, de très-fort parchemin , ont été
impitoyablement rognés , sans doute pour mieux le dorer
(i) Voir dans le présent Bulletin de la Soc. nivern» (t. XHI, p. 6i»73)
la copie intégrale de ce curieux inventaire.
(2) Dans une de ses lettres, en 1725, Tabbé Lebeuf écrivait à Tabbé
Fenel, doyen de Sens : « J'ai voulu médailliser partout où j*ai passé ;
il n'y a à Donzy qu'un seul chaudronnier qui n'avoit rien. A La
Charité-sur-Loire, le subdélégué y donne la chasse tant chez les deux
orfèvres que chez les chaudronniers, etc.t (Lettres de Pabbé Lebeuf,
publiées en 1867, par la Société des sciences historiques et naturelles
de l'Yonne, t. K)
— 184 —
sur tranchés! On reconûatt âasii que les felids, qui se
trouvaient au commencement et à la fin , ont été rtmfrfacés
par des feuilles de fort papier sur lesquelles pas un seul mot
ne se trouve écrit. De méme^ pas une seule note, sur les
1 1 3 feuillets qui composent actuellement le volume , car il
en manque quelques-uns, de telle sorte qu^au point de vue
de la chronique locale notre volume est absolument muet.
Mais ce qui d'abord attire plus vivement Fattention dès les
premiers feuillets du manuscrit, c'est la disposition toute
particulière d'une quinzaine de pages partagées en quatre,
trois ou deux colonnes, avec de longues séries de nombres
dont nous ferons bientôt connaître la destination. On est
vraiment captivé par l'examen des colonnes, des chapiteaux,
des grands cintres si élégamment décorés , --^ avec les seules
couleurs vert, rouge et bleu , — de tous ces motifs si variés,
si capricieux, qui sont le caractère du style roman fleuri. Les
fûts des colonnes surtout sont tour à tour chevronnés, zig-
zagues, imbriqués, cannelés en spirale ou perlés, et peuvent
fournir les meilleurs motifs pour la peinture des égHses de
cette époque (i).
Cette disposition, qui se retrouve encore au commenceaient
du seizième siècle , et notamment dans la Bible imprimée à
Lyon en i5o6 par M* Jehan Moylin, alias de Laubray
(dont un exemplaire existe au grand séminaire de Nevers),
avait d'ailleurs frappé notre président Mgr Crosnier ; car, il
nous tarde de le dire , il avait eu connaissance du texte des
évangiles de Clamecy, et il s'en explique ainsi dans la pré-
face du Sacramentaire :
« La Société nivernaise, en faisant éditer ce manuscrit, a
cru devoir lui donner un frontispice^ A cet effet, on l'a
composé avec le titre qu'il renferme, en prenant les motifs
dans un Êvangéliaire nivemais de la même époque ^ sans
rien y ajouter. »
(i) La décoration des colonnes de la chapelle dé Notre-Dame-dii-
Peuple-Nivernais à la Visitation de Nevers en donne un très-bel exemple.
— i85 —
Ce n'est pas tout ; les deux grandes figures , placées en
cariatides au frontispict du Sacramentaire , et représentant
l'une saint Marc, avec une tête de lion, portant le livre des
évangiles, l'autre saint Jean, avec une tête d'aigle, tenant un
long rouleau (volumen), forment, par leur disposition origi-
nale, les premières lettres du texte sacré : Initium Evangelii
Jesu Christi {saint Marc); In principio erat Verbum (saint
Jean).
Il en est de même de la figure de saint Luc avec la tête de
bœui nimbée, — comme celles du lion et de l'aigle, — qui
commence la préface du Sacramentaire, Cest l'initiale de
son Evangile : Fuit in diebus Herodis (i). Il y a ici de plus
cette particularité que saint Luc porte des ailes, tandis que
les autres évangélistes sont simplement vêtus d'une longue
robe et d^un manteau. Ces ailes se rencontrent fort à propos
pour former la partie supérieure de la lettre F, et le phi-
lactère que Tévangéliste tient d^une main, tandis que Tautre
indique quMl parle, remplace le trait central.
Enfin, la grande L capitale romaine, décorée d^un aigle
aussi nimbé (2), est l'initiale de PEvangile de saint Mathieu :
Liber generationis Jhesu Christi.
c On nous saura gré, ajoutait Mgr Crosnier, d'avoir
reproduit ici ces types curieux, d^autant plus qu'ils sont
rares. C'est, en effet, au quinzième siècle seulement que
nous voyons dans nos manuscrits gallicans les évangélistes
(i) Il est à remarquer que dans les Bibles actuelles ces mots sont au
commencement du 5* verset du chapitre I*'. Mais, anciennement, les
quatre versets précédents : Quoniam quidem multi conati sunt étaient
considérés comme la Préface de saint Luc sur son Evangile, Cest en
effet le titre que Ton retrouve encore en 1609, dans la célèbre Bible de
Louvain. Le chapitre I*' commençait seulement à Fuit in diebus.
Aussi Pauteur du manuscrit s^est-il contenté, au commencement du
texte formant Pavant-propos, d'une majuscule ornée mais dépourvue
du symbolisme.
(2) Introduction , page xiv. Voir aussi VIconographie chrétienne, de
Mgr Crosnîer, 1876, page 232.
T. III, 3* série. 24
— i86 —
portant quelquefois, au lieu d'une figure humaine^ la tête
de leurs animaux symboliques. Avant cette époque, il faut
recourir aux manuscrits saxons pour rencontrer cette parti-
cularité que présente notre évangéliaire nivernais.
» Une autre observation qui constaterait une faute en
iconographie , c'est Tapôtre saint Jean chaussé , tandis que
les autres évangélistes ont les pieds nus ; saint Jean devrait,
diaprés les principes iconographiques, être déchaussé comme
les autres apôtres. »
Ajoutons qu a la fin ou au commencement du texte de
chaque évangile, excepté pour celui de saint Luc, se trouve
une grande miniature, tenant la moitié d^une page, qui
représente, à gros traits, mais avec une remarquable sûreté
demain, le tout rehaussé de couleurs très-vives, Tanimal
symbolique nimbé, ailé, marchant et tenant le livre sacré.
On ne peut qu'imparfaitement juger de la beauté de cette
décoration du manuscrit par le dessin minuscule du bœuf
de saint Luc figuré sur le frontispice du sacramentaire déjà
cité.
Après ce rapide examen,, tout extérieur, d^un si précieux
volume, nous sommes heureux d'ajouter les notes claires
et pleines d'érudition qu^a bien voulu nous communiquer
un savant religieux qui s'occupe tout spécialement d'études
historiques et exégétiques sur l'Ancien et le Nouveau-
Testament, et que nous regrettons de ne pouvoir nommer.
En les lisant, on apprendra à connaître et à apprécier
le manuscrit de Clamecy.
§
CODEX CLAMECIACENSIS.
I. Etat primitif. — Le manuscrit de Clamecy ne paraît
pas avoir été un « évangéliaire > exécuté pour servir aux
offices de PEglise, car aucune de ses divisions ne correspond
— i8y —
aux sections liturgiques des évangiles de la messe. Il était
destiné à la lecture privée.
Plus tard , il a été utilisé comme livre d'église; des ongles
barbares ont labouré le parchemin , pour marquer le com-
mencement et la fin d'un certain nombre d'évangiles de
messes. (Exemples: folio 28, recto; folio 83, verso;
folio 95, verso, etc.) Quelquefois même une plume récente
a suppléé en marge la formule liturgique: In illo tempore.
(Exemples: folio 81, recto; folio 100, recto, etc.) Ces
m
violences même montrent que la première destination du
manuscrit n'était pas de servir aux offices.
II est sorti des mains du copiste avant d'avoir reçu la
dernière façon , car :
a) Un grand nombre de mots grattés attendent encore la
surcharge du correcteur, et le texte manque, en ces endroits,
d'un ou de plusieurs mots, suivant l'étendue du passage
gratté. (Exemples, folio 4, recto: collocatus; folio 22, verso:
noliic timere ; folio 35, verso: msigister; folio 38, recto:
lucratus e^^ alia duo, etc.)
b) Les canons d'Eusèbe, au commencement, n'ont jamais
reçu leurs litres et numéros. Les explicit qu'on y lit sont
ajoutés par une main récente.
IL Préfaces. — Le volume s'ouvre, comme tous les
recueils semblables, par les préfaces de saint Jérôme (lettre
à Damase, extraits du De Scriptoribus eccL), et d'Eusèbe
(lettre à Carpian et canons.)
a) Il est bon de remarquer au folio 4, recto, le fragment
Sciendum etiam. Dans nos Bibles imprimées, ce fragment
fait partie de la lettre à Damase. Déjà dom Martianay Ta
écarté de son édition de saint Jérôme, comme une interpo-
lation. Il s'appuie sur ce que la plupart des manuscrits ne
l'ont pas, et surtout sur ce que le codex San Germanensis ,
n« 6, l'insère à part comme un document entièrement
différent. {Patrol. Mignc, t. XXIX, col. 53o.) Notre
— i88 —
manuscrit se comporte comme le San GermanensiSy n^ô*
Peut-être lui serait-il apparenté ?
b) Quant aux canons d'Eusèbe^ ils ont disparu des Bibles
depuis le seizième siècle. Ils étaient sans utilité depuis que
les chapitres et versets actuels avaient fait abandonner )es
« péricopes ». fOn sait qu'Ammonius d^Alexandrie avait
sectionné le texte des évangiles en très-petits chapitres,
appelés péricopes. Il y en avait 355 dans saint Mathieu,
233 dans saint Marc, 342 dans saint Luc et 232 dans saint
Jean. Eusèbe de Césarée imagina de mettre en regard les
péricopes des divers évangélistes qui contenaient les mêmes
récits. Il obtenait ainsi dix tableaux ou canons. Le premier
tableau contenait en quatre colonnes les récits communs aux
quatre évangélistes. Les péricopes répétées dans trois évan-
gélistes étaient réunies dans les canons 2, 3, 4; venaient
ensuite les passages communs à deux évangélistes (canons 5,
6> 7> S, 9), et enfin la liste des passages qu'on ne lit que
dans un seul évangéliste (canon 10).
Le manuscrit de Clamecy n'ayant pas adopté les divisions
d'Ammonius, ces canons ne pouvaient servir. Ils ont été
maintenus cependant, comme dans les Bibles imprimées
jusqu'au seizième siècle , parce qu'ils faisaient partie de la
lettre d'Eusèbe à Carpian, et qu^ils sont visés dans la préface
de saint Jérôme, devenue inintelligible pour les lecteurs des
Bibles actuelles.
III. Divisions. — Les divisions du manuscrit de Clamecy
ne sont pas numérotées, mais marquées seulement par une
initiale alternativement rouge et bleue (i). Chose étonnante,
elles reproduisent sensiblement les chapitres actuels, attribués
généralement à Hugues de Saint-Cher (1241); il faut, ou
que ce savant n*ait fait que vulgariser une division déjà
connue, ou que le codex soit plus jeune qu'on ne croit.
(i) Il y a une numérotation de seconde main, mais il ne s'en
aperçoit plus que quelques chiffres, la plupart ayant été rognés avec
la marge extérieure, ou enfouis dans la couture.
— i89 —
Voici en regard les divisions du codex pour saint Mathieu,
et les divisions correspondantes de la Vulgate Clémentine :
Codex.
Clémentine.
Codex.
Clémentine.
II
II, 19.
XX
XIX, 3o.
ni
rv.
XXI
XXI.
IV
v.
XXII
XXI, 33.
V
VI, 5.
xxin •
XXII ,15.
VI
vn.
XXIV
xxiii, i3.
VII
vn, 28.
XXV
XXIII, 37.
VIII
vni, 23.
XXVI
XXVI.
IX jusqu'à xvni
IX à xviii.
XXVII
XXVI, 3i.
XIX
XVIII, 23.
XXVIII
XXVII, 27 et 28.
C'est-à-dire qu'à quelques versets près, c'est la même
division. Si le codex de Clamecy est du onzième siècle, il
appuierait une remarque de Huet, qui signale l'existence de
cette division dès Tan iioo dans plusieurs manuscrits.
(Huet, Notœ in Origen,, p. 19.}
IV. Sommaires. — Les sommaires, ou capiiulationes ,
sont identiques à ceux de la Bible imprimée à Lyon i5i6
(biblioth. du séminaire). Seulement, au lieu de précéder
respectivement chaque chapitre, ils sont groupés en tête de
chaque évangile, selon un usage assez fréquent.
V. Variantes, — Les variantes sont sans importance.
Quelques-unes appuieraient les corrections que Lucas
Brugensis demandait à la Clémentine, par exemple :
CLÉHENTUfE. CODEX CLAMECIAUENSIS.
Math., VIII, 9. Homo sub potestate ... deest constituttis, (Folio 20.)
constitutus,
Marc, ZY, 4. Et venerunt voluores ... deett cœlL (Folio 48.)
cœli.
Id., VI, 4. Non est propheta... in ... in patria sua, et in cognatione
patria sua, et in domo sua, et sua et in domo sua. (Folio 5o,
in cognatione sua. verso.)
Joan, m, 5. Nisi... renatus... ex ... deest fonc/o. (Folio 95, verso.]
aqua et sp« sancto.
J
— igo —
Les autres, d'ailleurs minimes, sont des leçons moins
bonnes.
VI. Lacunes. — i^ Entre les folios 83 et 84, il manque
depuis Luc xii, 40, jusqu*à Luc xiv, 22. L'ancienne folio-
tation accuse cette lacune.
2* Entre les folios 92 et gS, il manque depuis Luc xxm,
19, jusqu'à Jean i. L^ancienne foliotation laccusc. Elle
semble aussi accuser des lacunes: A^ A^*^ et A^^, Mais le
texte se suit sans interruption.
VU. Reliure, — i« Le relieur n'a pas traité ce volume
comme un évangéliaire, mais comme un novum testamentum,
(Voir le titre au dos.) Je serais porté à croire que nous
n'avons pas tout le manuscrit. La miniature finale, analogue
à celles qui terminent les trois autres évangiles, n^a pas l'air
de « prendre congé > du lecteur. Arrivés à bout d'œuvre, les
copistes avaient coutume de se donner un peu plus carrière.
Je soupçonne que les Actes des Apôtres venaient ensuite
dans le manuscrit primitif.
2® Le dernier relieur a essayé une restauration des coins
d^en bas, il a collé des ajouts en parchemin plus blanc que
celui du manuscrit. Ces ajouts sont quelquefois tombés.
V, g, folios 56 à 59, 72, 73, etc., ou près de tomber,
folio 67. Quand le texte lui-même avait été endommagé, on
Ta rétabli sur les ajouts du relieur, par exemple folio 78,
recto: mortua, 80, 82, 86, 91, 92. Excepté folio ii3.
Ce soin indique que le dernier relieur considérait déjà le
codex comme précieux.
Une restauration plus considérable est celle des coins
intérieurs, depuis folio 104 jusqu^à la fin. Elle a entraîné la
nécessité de reconstituer des lignes entières de texte (folio 105,
verso, dernière ligne ; folio 1 10 , recto et verso ; folio in,
112, 1 13, idem,). D'autres lignes ont été repassées à l'encre
(mêmes folios).
L'écriture du c restaurateur » imite assez mali*ancienne;
on y peut remarquer que le t final est toujours accompagné
d^une barre verticale, et d'ailleurs un peu différent de celui
du premier copiste. Celui-ci ne prolonge jamais la tige
au-dessus du croisillon , le nouveau la prolonge ,tou jours.
Les autres lettres sont plus simples et moins raides dans le
premier texte. En somme les corrections sont assez franche-
ment gothiques , au lieu que récriture primitive reste dans
le type pur du onzième-douzième siècle.
LE DERNIER OBITUAIRE
DE l'abbaye NOTRE-DAME DE NEVERS.
Nous avons eu déjà l'occasion de signaler, dans la notice
sur le Reliquaire de Vabbesse de Notre-Dame de Nevers ,
Gabrielle Andrault de Langeron (i), Inexistence de quelques
feuillets du dernier obituaire de cette abbaye miraculeu-
sement sauvés, comme pour nous permettre de constater
Tauthenticité des reliques « de la châsse de bois doré »
édifiée par la vénérable abbesse.
Il nous parait utile de compléter aujourd'hui Pexamen de
ces trop modiques épaves de la Révolution.
Depuis le seizième siècle, les moniales de Notre-Dame
avaient cessé d'inscrire les obiit en regard de la leçon du
jour sur le vieux martyrologe d^Usuard, conservé d'ailleurs
avec soin dans les archives du monastère. La lecture quoti-
dienne du martyrologe se faisait sur un texte imprimé.
Dès-lors il avait fallu inscrire, sur un livre spécial, les nou-
veaux obiit des religieuses professes ou converses et des
confesseurs de la communauté.
(t) Bulletin de la Soc, niv,, t. XII, pages 453-469.
— 192 —
Ce livre, ou plutôt ce cahier de parchcinin coateuait
quatorze feuillets, soit vingt-huit pages.
Il nVn reste plus que le premier et le dernier feuillet qui
primitivement formaient couverture et les feuillets 9 et 12,
c'est-à-dire la première moitié de janvier, — la seconde
moitié de septembre avec la première moitié d^octobre — et
la seconde moitié de décembre.
Les mortuaires les plus anciens sont de i523, Ludorica
de Torcy; ibyo , Maria de Roffignac ; 1580, Maria
Jaquelot; les plus récents de 1727, Maria Debè\e, et
1735, Henrica Cachefert,
On reconnaît aisément la main, très-exercée d^ailleurs, qui
a commencé la rédaction de l'obituaire , et sur trente-huit
mémoires en a écrit dix-neuf, de 1523 à i653. L'année
suivante 1654, c'est une autre main qui inscrit VobittAt
Maria Dubroc,
Remarquons que la langue latine est toujours en usage;
il n*y a qu'une seule exception en 1661.
II nous a paru intéressant et utile pour l'histoire des
familles nivernaises de transcrire toutes ces mémoires.
De même, malgré leur moindre importance, on nous
permettra de donner la copie de toutes les notes écrites en
français par diverses mains, à di£Férentes époques, sur les
pages blanches du commencement et de la fin du cahier.
En les lisant, il nous semble entendre comme un dernier
écho de ces vieux cloîtres si longtemps sanctifiés par la
prière et la pénitence. En effet, à part les textes publiés,
dans la notice déjà citée, relatifs aux reliques du monastère,
et quelques notes historiques ou liturgiques, la grande
préoccupation de ces filles de saint Benoît , déjà mortes au
monde , est la pensée de la mort et le souci de bien mourir.
En 1703, l'abbesse de Langeron s'associe, avec sa commu-
nauté, aux religieuses du Saint -Sacrement de Paris, et
s'engage à faire une heure d'adoration à l'intention de la
première qui doit mourir.
En 17 14, Pabbesse Charlotte de Lévy s'associe également.
- 193-
avec sa communauté, à la confrérie des Agonisants établie à
Nevers , chez les Pères de Saint-Martin , pour qu^ils prient
quand une religieuse sera à l'agonie.
A chacun des Quatre-Temps de Tannée, outre la récitation
de Toffice des Morts, une messe était dite pour les défunts:
la première, pour les pères , irères et sœurs en religion ; la
seconde , pour les pères et mères et autres parents ; la
troisième, pour les fondateurs; la quatrième, pour les
bienfaiteurs et proteaeurs de la maison.
§
Premier feuillet , recto.
J. f M.
Madame Louyse Endraude de Langeron, abbesse de
Notre-Dame de Nevers, c^est fait asosier pour touiours avec
sa comunoté aux religieuse du Saint-Sacrement de Paris,
en rennes mille sept sant trois, le 21 novembre, pour être
en adoration devant le Très-Saint-Sacrement depuis deux
heure jusqu'à trois diaprés midy à l'intention de la première
qui doit mourir.
L'an mil sept cent dix-neuf et le quatre juin, après avoir
vériffié les reliques de saint Révérien et de saint Genoux qui
sont conservées dans ce monastère dans trois châsses de
rechef, nous avons ordonné que la feste de saint Révérien
se célébreront solennel majeur, comme de patron avec octave,
le I*' juin de chaque année, et la feste de saint Genoux,
comme solennel mineur de seconde classe, le 17 janvier de
chaque année (i).
Madame Marie-Charlotte de Lévy, abesse de Notre-Dame
de Nevers, c^est fait associer et sa communôté à la confrérie
(i) La fête de saint Genoul est indiquée dans les Auctaria du
martyrologe d^Usuard (édition Migne] au 17 janvier: Codex alius
régime Suecia; item sancii Genulfi confessons,
T. VI, 3* série. 2 5
— 194 —
des Agonisent le 24 de décembre 17 14. On dira tous les
vendredis le Miserere et sine Pater et sine Ave Maria et
on aura soin de faire avertir les Pères de Saint-Martin
quand quelques-unes ceront à Tagonie, afint qu'il faces les
prières des asocié.
LONGET,
Vicaire général.
Premier feuillet , verso.
JANVIER.
Obiit et commemoratio.
Le premier jour.
2.
3. Maria du Rut, i6?5.
4-
5. Obiit soror Joanna Deserots, 1713.
6. Anna de Fontenay, nondum Deo dicata, 1654 (i}.
Obiit soror Henrica Caehefert, nondum conversa hujus
monasterii, 1735.
7. Maria Bélanger, 1654.
Obiit Joannes Vellard (?) hujus domus confessor, anno
1688.
8.
9. Gabriela Desjours alias du Monceau, 1667.
10.
11. Maria de Roffignac, 1570.
12. Anna Grîmouard, 1629, conversa.
i3. Maria Bourgoin.
14.
(i) Marguerite de Fontenay était abbesse de Notre-Dame de 1 345 à
r36o. Elle est marquée dans le nécrologe (d'après le Gall. Christ.)
au III des calendes de juillet. — Françoise de Fontenay fut abbesse
de Notre-Dame de 1564 à 1607.
— igS —
Deuxième feuillet, recto,
SEPTEMBRE.
i6.
17. Obiit soror Joanna Bolacre^ anno 1708(1).
18.
19.
20.
21.
22. Anna Salonnier, i638.
23. Catherina d'Anlesy (2).
24. Genovefva de Brienne, professa hujus monasterii, i653.
25.
26.
27.
28.
29. Joanna Renard, 1644, conversa.
Martha de Gamache, professa hujus monasterii, 1657 (3}.
3o.
(i) Jeanne Bolacre^ probablement fille de Henri B., seigneur de
Gigogne et du Marais, lieutenant-général en la pairie de Nivernais,
qui fut marié deux fois: i* A N. Olivier, fille de N., seigneur de
Monceaux; 2* à Gabrielle Conrade. (Note de M. de Soultrait.)
(2) Le nom de Catherine d'Anlezy ne se trouve pas dans les
généalogies de sa famille^ Tune des plus anciennes du Nivernais.
(Note de M. de Soultrait.)
(3) Elle était fille de Claude I" de Gamaches, chevalier de Tordre
du roi, seigneur, baron de Jussy, etc., et de Marie Genton, fille
unique de Claude Genton, seigneur du Goudron et de Saint-Germain-
des-Bois, et petite-fille de Georges de Gamaches, époux de Jehanne
des Guerres, dont une fille, Claudia de Gamaches, abbesse de Notre-
Dame en i5o7, après Françoise de Fontenay, mourut en odeur de
sainteté en 1642. Sa sœur aînée, Marie, fut religieuse à Jarzay ; sa
sœur cadette Jehanne, religieuse à Saint-Laurent de Bourges. Le
Gallia Chnsliana dit que Ton conservait dans le monastère sa vie
manuscrite. Une sœur de cette abbesse, nommée Anne, fut aussi
-- 196 —
Deuxième feuillet , verso.
OCTOBRE.
Obiit et commetnoratio.
I.
2. Maria de La Rivière, i63o.
3. Maria Jaqueiot^ 1580.
Eodemdie, 3 octobris 1664, obiit in domino R. Pater
Vincent Coudray, religios. profess. Sancii Patris
nostri Benedicti, abbatise Sancti Vmcentii congre-
gationis casalis benedicti et confessor, per multos
annos, hujus monasterii Sanctœ Marise Nivernensis.
4-
5.
6.
7-
8. Magdalena Bolacre, nondum professa^ 164! (i).
Marguarita de Lunyaco, abb. hujus monasterii, fundavii
tria anniversaria, anno 1438 (2).
religieuse de Notre-Dame de Nevers. (Voir dans les Mémoires de la
Société des antiquaires du Centre, t. XIV (1886-87), l'important
travail de M. le baron Thierry de Brimont: Les Seigneuries de
Jussy^Champagne et de Quinquempoix. Les chapitres III et [V surtout
sont remplis de documents relatifs aux de Gamaches.
(i) 8 octobre. Madeleine Bolacre, probablement fille de Henri,
seigneur de Sigogne et du Marais, et de Jeanne Millet. Elle devait
être la grand'tante de Jeanne Bolacre, morte en 1708. (Note de M. de
Soultrait.)
(2) D'après le Gallia Christiana (t. XII), Marguerite III de Lugny
se trouve dans différents actes, de 1428 à 1466, qui fut Tannée de
sa mort; et le texte ajoute: In necrologio adhuc qualer occurrit,
scilicet XIV kalendas Februarii; Kal. Martii; V, noms Octobris;
VI. idibus ejusdem mensis. Aucune de ces dates ne con/ient à celle
de notre texte , à moins que par erreur on ait mis le VI des ides au
lieu du VIII, qui correspond au 8 octobre.
— 197 —
g. Hoc die (683 , obiit soror Gabriel Duret, professa.
Maria de Bèze, 1727(1).
10. Henrica Andrœas, lôSg.
Maria Bertier, conversa, 16S4 (2).
II.
12. Maria Dubroc, 1654.
i3.
14.
i5. Obiit soror Francisca Duret, hujus conventus sancti
Benedicti professa, i663.
Ântoni, obiit pater Âstier, religiosus S. Benedicti^
confessor hujus monasterii, 1673.
16. Maria de Roffignac de Meaulce, 1586 (3).
Obiit soror , 1669.
Troisième feuillet, recto,
DÉCEMBRE.
16. Ludovica de Torcy, 1523.
17. Obiit soror Francisca Brisson, anno 1693.
On doibt dire une messe tous les jeudy de l'année. . . .
matin du Saint-Sacrement, à la fin le salut du Saint-
Sacrement avec le ciboire, avec l'antienne O sacrum
convivium, le verset et Toraison et ensuitte De p'o-
(i) 9 octobre. Marie de Bèze, probablement fiUe de Jean de Bèze,
écuyer, seigneur de Vesvre, et de Marie Gascoing. (Note de M. de
Soukrait.)
(2) to octobre. Cette Marie Berthter, sœur converse, ne devait pas
être de la famille Berthier de Bizy. [Id).
(3) 16 octobre. Je ne trouve pas de Marie de Roffignac dans les
généalogies de Cette ftimille, mais bien une Anne de R., religieuse à
Notre-Dame de Nevers. fille de Guy de R., écuyer, seigneur de
Meauce, marié en i585 à Françoise du Plessis.
Marie, décédéc en i586, devait être la sœur de Guy. {Id,)
On a vu au 11 janvier une autre Maria de Roffignac, décédée en
1570.
— 198 --
fundis par le chœur... et loraison pour deffunie
damoiselle Françoise Bouzitat de La Tour (?),
décédée le 17* décembre 1692, qui a fondé une messe.
18. Obiit domicilia Francisca Bouzitat..., 1692 (i).
19. Sœur de Blanchefort, décedda le 19 décembre 1661 (2).
20.
21.
22. Anna de La Rivière. — Obiit soror Joanna Niodot,
conversa, i683.
23. Maria Collin, conversa, i63i.
24.
25.
26.
27.
28. Maria d'Albret, abbatissa hujus monasterii et principissa
Nivernensis (3).
29.
3o.
3i.
§
Troisième feuillet , perso.
Charlotte Bourgoing, religieuse de céans, a fondé pour
dire le 24* mars, vigile de l'Annoniiation , sur les sept
(i) Le nom a été effacé intentionnellement en mouillant et frottant
du doigt le parchemin.
18 décembre. Françoise Bouzitat était probablement fille de Pierre
B., écuyer, seigneur du Chasnay, élu à Nevers, et de Françoise
Gascoing, et sœur d'Anne Bouzitat qui entra novice à Tabbaye de
Notre-Dame en i63g. (Note de M. de Soultrait.)
(2; 19 décembre. N. de Blanchefort, probablement fille de Roger de
Blanchefort, chevalier, baron d'Âsnois, et de Françoise de Bèze. {Id,}
(3; On trouve dans le catalogue donné par le Gallia, Johanna V
d'Albret (qui s'appelait aussi Marie), fille de Jean d'AIbret, abbesse,
de i533 à x56o; puis. Maria 11 d' A Ibret, qui, l'année suivante, se démet
en faveur de Françoise de Fontenay et meurt le 28 décembre 1 563.
— 199 —
heures du soir, le respond Gaude Maria, etc. Et après
aussy la prose Inviolata avec la collecte Deus qui de Beatœ
Mariœ^ etc. Et le lendemain de la feste, une messe solem-
nellement des morts avec le Libéra me, ainsy qu'il est porté
dans les lettres de fondation.
Monseigneur Philippes de Molins, jadis évesque de
Noyon, a fondé trois anniversaires pour faire chanter tous
les jours, avant la grande messe, Tantienne Ave Domina
mundi Maria ^ et ensuite les verset et collectes (i).
Madame Marie d^Albret , duchesse de Nevers , abbesse de
séans, a establi la réforme Tan... (2}.
(Suit l'inscription relative à la nouvelle châsse de saint
Révérien, reproduite dans la notice sur le Reliquaire de
V abbesse, Gabrielle Andrault de Langeron.)
La tradition de nos antiennes nous a assuré que saint
Genoux nous a donné Sardole et son revenu (3), saint
Révérien toutes les maisons qui relèvent de céans, saint
Mesme (?) a donné la terre de Beaune.
§
Quatrième feuillet, recto.
Es Quatre-Temps de Tannée, faut lire vigiles, à neuf leçons
et le lendemain dire la messe des Morts.
(i) Le testament de Philippus de Molinis , episcopus Noviomensis,
conservé aux archives nationales, X** 9807, folio 25o, verso, a été
signalé et copié par M. Victor Gueneau. On n*y rencontre malheu-
reusement aucune mention des fondations de ce grand évéque dans
le Nivernais, son pays d^origine.
(2) Le Gallia Christiana (t. XII) donne la date: Anno i534f monas-
terium reformavit, illudque sanctissime rexit usque ad annum i56o.
(3) Parmentier {Arch. de Nevers, t. II, p. 292), écrit aussi: « C'est
saint Genoul qui a donné (870) la terre de Sardolles aux Bénédictines. »
Et ailleurs (dans le t. I*', p. 387): « Les Bénédictines prétendent avoir
le chef de saint Genoul dans une châsse d'argent, et le martyrologe
de cette maison porte que ce saint leur avait autrefois donné la terre
de Sardolles. n II ne dit rien de saint Révérien ni de saint Mesme.
— 200 —
Aux premiers Quatre-Temps qui sont en TA vent, faut
appliquer ses prières au soulagement des âmes de ses pères,
frères et sœurs religieuses, et à cette intention on dira les
collectes: Deus penice, Deus cujus miseratione et Fidelium,
Aux seconds qui sont en Caresme, pour ses pères, mères
et parents, les collectes : Deus qui nos patrem, Deus veniœ
et Fidelium.
Aux troisièmes qui sont après la Pentecoste, faut appliquer
ses prières au soulagement de Pâme des fondateurs, les
collectes: Inclina Domine, Deus veniœ et Fidelium,
Aux derniers qui sont en septembre, faut prier pour les
bienfaicteurs et protecteurs de la maison décédés, les
collectes : Miserere quœsumus Domine , Deus veniœ et
Fidelium.
A chaque Quatre-Temps, chaque prestre célébrera la
messe des Morts en cette intention. Ceux qui ne sont pas
prestres réciteront vigiles à neuf leçons ; les frères convers
trente Pater et Ave Maria.
Le jour qu'on dit la messe de grâce , toutes nos mères et
sœurs sont obligées de dire les sept psaumes avec les litanies
et les oraisons.
Suivent, sur la fin de cette page et au verso, les deux actes
concernant le reliquaire de Tabbesse de Langeron et la
croix de bois placée dans le chapitre de l'abbaye, parles
soins de la même abbesse qui la fit construire, sur le modèle
exact de celle de la sainte chapelle de Bourbon (i).
Mai 1887.
L'abbé BOUTILLIER.
(i) Bulletin, t. XÏI, p. 457.465.
^ 201 —
SEANCE DU 30 JUIN 1887.
Préudence de M. Roubbt , président honoraire.
Etaient présents : MM. Canat, de Villefosse,
Tabbé Soyer, JuUien, le colonel de Charant, le
chevalier de Pierredon, Hippolyte Blanc, Duminy,
Octave de Villenaut, René de Lespinasse, Col,
de Flaraare.
M. Hippolyte Blanc oflBre à la Société deux
études intitulées : la première, le Roi et les Cor-
porations; la deuxième, les Anciennes Corpora-
tions ouvrières.
M. Henri Colin fils offre également un travail
intitulé : Etudes archéologiques sur Saint-
Honoré. Des remercîments sont adressés aux
auteurs.
M. Roubet annonce que dans les fondations de
la maison Ramond , sur les terrains de l'ancienne
caserne, il a été trouvé plusieurs fragments de
pierres tombales avec des inscriptions en carac-
tères gothiques. M. de Flamare est prié de vouloir
bien en rendre compte.
M. de Lespinasse communique à la Société un
jeton inédit d'Imbert de LaPlatière, évêque de
Nevers, trouvé dans la démolition d'une grange à
Luanges. D'un côté est un écu à un chevron,
accompagné de trois rocs d'échiquier et la légende
f Imbertus episcopus Nioernensis. Le revers porte
une croix fleuronnée, cantonnée de branches de
T. III, 3* série. 26
— 202 —
V
lys et la légende : Crucem tuam adoramm
Domine.
M. Roubet donne lecture d'une étude sur le
Prieuré de Fontaines. L'auteur s'attache à énu-
mérer les droils utiles et honorifiques de ce prieuré
d'après un terrier de 1456 qui fait partie de sa
collection. Il constate entre autres choses qu'à
cette époque les hommes du prieuré s'eflForçaient
de se soustraire aux obligations de la condition
servile, et, par contre, il lit le texte d'une pièce
quelque peu postérieure à la date du terrier par
laquelle un étranger vient se reconnaître homme
serf et de serve condition du prieuré , afin , sans
doute , d'obtenir du prieur une tenure servile. Ce
travail prendra place au Bulletin.
M. de Lespinasse propose qu'il soit délivré aux
membres de la Société des exemplaires brochés
complets du Cartulaire contre remise des fasci-
cules parus antérieurement et brochés avec les
fascicules du Bulletin. Cette proposition est
approuvée.
SEANCE DU 28 JUILLET 1887.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président; E. de Toytot, secrétaire; Canat,
conservateur du musée; Duminy, archiviste;
Hippolyte Blanc, le docteur Subert, de Ville-
— 2o3 —
fosse, Tabbé Soyer, de Rosemont, de Lespînasse,
Cheminade, Langellé, Julien, Col, Charles du
Verne, de Flaraare, Octave de Villenaut , le comte
de Maumigny.
Lecture est donnée d'une lettre de M. le Secré-
taire général de la préfecture de la Nièvre deman-
dant que la Société veuille bien envoyer aux
archives départementales ses publications, ainsi
que cela avait lieu autrefois. M. l'Archiviste voudra
bien faire cet envoi et répondre à M. le Secrétaire
général.
M. de Flamare lit un travail intitulé : Note sur
les archives du château de Chassy.
Divers membres de la Société expriment le
désir de voir la Société entrer dans cette voie de
recherches et demander en communication les
archives des châteaux ou fonds divers intéres-
sant le Nivernais, afin qu'on puisse en publier
les inventaires' ou l'analyse. M. Charles du Verne
appelle spécialement notre attention sMvlt Recueil
de dom Caffiaux^ extrait d'archives ou manus-
crits français. (Nivernais et Picardie , cote ??)
M. de Rosemont fait passer sous les yeux de la
Société trois portraits : deux de Marie de Gon-
zague, reine de Pologne, et un d'Anne de
Gonzagne. Il signale aussi les portraits de Louise
de Gonzague et de Ch. de Gonzague, gravés par
Nanteuil.
Sur le désir exprimé par M. de Flamare que l'on
obtienne le transport en notre musée lapidaire de
plusieurs fragments de sculpture romane actuel-
— 204 ~*
lemetit déposés dans la cour de la gendarmerie de
Corbigny, M. le Président s'engage à faire toutes
les démarches nécessaires pour que ce transport
puisse être effectué.
LES TERRIERS DU PRIEURÉ DE FONTAINES.
On appelait Papier ^ Terrier un registre qui contenait
avec précision i'énumération des droits , dîtnes , coutumes ,
corvées, cens et rentes , ainsi que la désignation territoriale
des héritages seigneuriaux ou roturiers qui aiféraient au
seigneur féodal.
Ce registre pouvait servir de preuve en justice; aussi il ne
pouvait être libellé qu^après une autorisation émanant de
Tautorité royale, et par un commissaire exprès nommé et
assermenté.
Il nous est permis de rappeler que les anciens terriers du
prieuré de Fontaines étaient au nombre de trois , à partir du
quinzième siècle :
Le premier, reçu par Jehan Combriat, date de Tan 1456;
Le deuxième, dressé par Pierre Carré, est de 1 547 ;
Le troisième, écrit par Jean Decray, est de Tannée 1579.
Depuis cette dernière époque les prieurs firent procéder à
des rappels et rénovations qui avaient pour but principal de
constater les changements survenus dans la désignation des
confins de certains héritages mentionnés aux terriers anté-
rieurs. C^est ainsi que nous voyons Gilbert Berton, en 1722,
et Edmond Decray, en 1732, Tun et Pautre notaires à Decize,
chargés de ces rénovations.
Le plus intéressant de ces terriers est celui qui fut dressé
J
— 2o5 —
par Combriat , à la requête de domp Geoffroy Lesueur que
nous trouvons déjà prieur de Fontaines en 1441.
Ce terrier, qui est en notre possession, est écrit très-
correctement sur parchemin. 11 est relié en bois, revêtu de
veau gaufré.
La couverture de garde est une feuille de parchemin
annotée d^un plain-chant qui accompagne Toffice de sainte
Agnès; récriture est du douzième siècle.
Cest de ce terrier que nous allons extraire la notice bien
incomplète que nous produisons.
§
Fontaines était autrefois une petiie paroisse du diocèse
d'Autun. Son territoire se trouve aujourd'hui enclavé dans
la commune de Charrin, canton de Fours.
Avant rétablissement de la paroisse, il existait à Fontaines
un prieuré.
Nous savons tous comment in principio furent institués
la plupart des nombreux prieurés répandus dans les diocèses.
Les couvents auxquels il était fait des concessions de
terres, presque toujours incultes, envoyaient des frères
convers avec mission de les mettre en rapport , et en même
temps de propager les bienfaits de la religion.
Ces moines construisaient d abord un réduit, qui prenait
le nom de grangia et obédience. Autant que possible , ils
consacraient dans leurs dépendances un oratoire qui se
changeait bientôt en une chapelle champêtre.
Au dixième siècle, il n'existait encore qu'un petit nombre
d^tablissements religieux, qui n^étaient autres que des
prieurés. Ces prieurés, prenant chaque jour plus d'impor-
tance, constituaient peu à peu une agglomération qui se
nomma paroisse. Les prieurs exercèrent alors les fonctions
curiales : nous disons curiales bien que le titre de curé fût
alors inconnu.
Le concile de Clermont ayant en 1092 interdit Tunion
— 206 —
des paroisses aux communautés religieuses, les prieurs et
abbés durent nommer des chapelains ou vicaires , qui furent
d'abord révocables, mais que le pape Innocent II rendit
inamovibles.
Le prieuré de Fontaines avait donc sa paroisse , et la
nomination du vicaire ou curé devint naturellement un des
privilèges des prieurs.
Conformément aux règles ou usages résultant de la
féodalité, les possessions territoriales du prieuré furent
érigées en seigneurie, avec droit de justice haute, moyenne
et basse, et le territoire de la paroisse devint en grande
partie la propriété du prieuré.
Les habitants auxquels il fut fait des concessions à titre
de bordelage se trouvèrent par le fait de la coutume être
hommes serfs et de serve condition , taillables et exploitables
de suite et de mainmorte.
Les prieurs avaient droit de dîmes dans les paroisses
limitrophes, au moins en partie. Ils exerçaient ces droits à
Charrin, àCronat, à Thaix, à La Nocle, àCoulonges, à
Cercy, à Lamenay, à Coudes, à Saincenne, à Ganay, qui se
trouve désigné par Ganat.
Voici, au surplus, en quoi consistaient quelques-unes de
ces redevances :
Dans la paroisse de Fontaines et justice du lieu , le dîme
se prenait sur tout le blé, froment, seigle, avoine, orge et
millet, fèves, pois, panais et vin.
Pour le four banier, chaque habitant devait payer 9 sols
par année: ce droit se nommait foumaige.
Le dîme était de 1 1 gerbes une et 1 1 tinets de vendange
une. Quand les habitants et manants de la paroisse appor-
taient leur dîme, le prieur était tenu de leur donner une
demi- miche et un verre de vin; ces redevances étaient
acquittées le jour de Saint'Bartkolommier, apoutre.
En vertu de son droit de suite, le prieur prenait la moitié
du dîme, quand les hommes labouraient les terres de Mgr le
comte de Nevers.
— 207 ■"
A Charrin , il prenait le douzain sur les habitants , c'est-
à-dire de 1 2 gerbes une , et le comte prenait de 24 gerbes
une.
Le dîme de Ganay était de 8 gerbes une ; c'est peut-être
pour cela qu'il était ap[>elé le grand dîme.
La cure de Ganay était à la fois à la présentation et du
patronage du prieur de Fontaines et du prieur de Mon-
tambert. Ils prenaient tous deux la moitié des offrandes et
oblations en lëglise de Saint-Jean de Ganay, € excepté le
jour de la Toussaint, qui depuis vespres, ne de tout le
lendemain jour des Morts, les prieurs ne prennent rien ne
ès-femmes qui relèvent d*enfants , ne à Pasques. »
Ils prenaient encore la moitié des sépultures , excepté le
curé, qui avait droit à 1 8 deniers sur le tout pour dire la messe
Le prieuré avait dans ses dépendances des bois, des
étangs, des vignes et deux domaines, l'un appelé le domaine
Gilette et Tautre le domaine Bridard.
Malgré tous les revenus et redevances qui afféraient aux
prieurs, nous ne voyons point qu^ils se soient mis en grands
dépens pour embellir leur résidence. Elle était bien loin
d^avoir la somptuosité du prieuré de Coulonges, qui avait
Taspect et l'étendue d'un véritable château.
Tout d'abord cette résidence ne consistait qu^en une
maison avec premier étage, couverte en tuiles, à la suite de
laquelle se trouvaient des annexes couvertes en paille.
Plus tard, d^autres bâtiments furent édifiés; on les désigna
sous le nom de Nouveau Prieuré. Au moment de la
Révolution, il consistait en chambre haute, grenier contigu,
chambre basse, cave, cuisine, le tout couvert en tuiles plates
à la mansarde.
L'église, dédiée à sainte Marie -Madeleine, était fort
modeste; elle attenait à Phabitation prieurale.
Enfin, c les justice, forches et gibets ^ étaient assis non
loin de Tétang de la Bruée, près le Ruau de ce nom , là où
commençait le territoire dit Lieu -Dieu, appartenant au
seigneur de La Noucle. »
— ao8 —
$
Les archives du diocèse d'Autun , qui se trouvent actuel-
lement déposées à Mâcon, pourraient sans doute nous
fournir d'intéressants renseignements sur le prieuré de
Fontaines. Nous sommes, quant à présent, obligé de nous
contenter des fiches et documents que nous avons sous la
main; le plus zélé chroniqueur ne saurait offrir que ce qu'il
a à restituer.
Voici donc le nom de quelques prieurs :
1390. — Frère Guillaume Bolestat.
144t. — Domp Geoffroy Le Sueur. — Le 17 juillet de
cette année , il constituait vicaire perpétuel de Fontaines la
personne de domp Robert d'Osterel , prieur de Coulonges,
pour gouverner et régir son bénéfice ( i ).
Nous le trouvons en transaction avec Pierre Belin , curé
de Saint-Hilaire, au sujet d^un droit d'accense.
En 1443, il faisait marché pour Tachèvement de la char-
pente de la nef et du beffroi du clocher.
En 1456, il faisait procéder par Jehan Combriat^ prêtre et
notaire-juré , à la confection du terrier dont Toriginal est en
notre possession.
Domp Geoffroy eut pour successeur domp Denis Tho-
massin. Il apparaît en 1462 et fait ajouter par Gerbaud,
prêtre et notaire du comte de Nevers, quelques articles omis
dans le terrier Combriat.
Après Thomassin , nous rencontrons religieuse personne
Jehan de Rouchinol, dont le nom se trouve quelquefois
traduit par Rossignol. L'année 1472 est l'époque présumée
du décès ou du retrait de son prédécesseur.
Frère Jehan prétendait au droit de patronage à la cure de
La Nocle. Il vivait encore en 1492.
(1) Communication de M. de Flamare, archiviste de la Nièvre, pro-
secrétaire de la Société nivernaise.
Nous trouvons, en i5i5, Hymbert de Morboux^ prieur
de Fontaines.
Après lui, vers 1525, arrive messire Bacbellet, en qualité
de prieur commendataire.
Il a écrit de sa main une recommandation pour la bonne
conservation du terrier Combriat, qu'il déclare être fre-
ciosum librum. Cet autographe se trouve sur la feuille de
garde dont nous avons parlé.
En 16 14, Pierre Chasseigne était pourvu du bénéfice dudit
prieuré de Fontaines.
L'abbé La Garde est prieur en 1688.
Le dernier prieur qui nous soit permis de citer est domp
Louis Roman dit Bernard.
En 1750, il consentait assez négligemment à un échange
de plusieurs fonds avec le sieur Salonnier, seigneur
d'Avrilly. On lit dans le terrier Edmond Decray qu'il y a
lésion manifeste dans cet échange et que le prieur y perd
5o livres de revenu.
En 1753, il confiait les fonctions de juge à Gabriel Belard,
avocat à Decize.
Revenons au terrier Combriat, qualifié de registre pré-
deux. Nous trouvons mentionné un champ qui se nomme
YOrme^au^Bailli, Etait-ce Forme sous lequel le juge de
Fontaines rendait la justice? Cest probable.
Nous trouvons une rue qui va de la justice au chaigne
Boussu. — La yuj^tVe n'est autre que les forches patibulaires.
En 1456, il est question du fourneau de Briffault, paroisse
de Cercy-la-Tour (i).
(i) Dans un des terriers que nous avons cités, nous avons trouvé
une feuille volante , qui est la minute d*un contrat de mariagee dressé
par un notaire de la prévôté de Decize. On y voit mentionnée en
marge cette note : Peut être util au prieur de Fontaines. Ce contrat
T. ni, 3* série. 27
— 2IO -^
Nous trouvons aussi un tenement situé en Briet^ et nous
rencontrons souvent répété le nom de Marion en qualité de
parrochien de Charrin (i).
Le plus grand nombre des déclarants qui figurent au
terrier Combriat se reconnaissent hommes ser£s et de serve
condition, taillables, explectables de suyte et de mainmorte.
Le 1*1' mai 1457, Jehan Pascault, de la paroisse de
Charrin, après avoir reconnu tenir à titre de taille, selon la
coutume du Nivernais , de Geoffroy Le Sueur, à cause de
son prieuré et seigneurie de Fontaines , trente-sept pièces
de terre, vignes et prés , moyennant la redevance de 28 sols
et 4 deniers tournois, deux boisseliers d^avoine chacun an, à
paier le jor de la feste de saint Bertholommier, apoutre,
protestait n^estre point homme serf ne de serve condition.
Le prieur, de son côté, prétendait le contraire.
Bref, pour entretenir paix et accord et laisser le procès, il
était appointé ainsi qu^il suit :
c Ledit Pascaud a cogneu et confessé qu'il était homme
serf et de serve condition, taillable, explectable de suyte et de
mainmorte du seigneur Geoffroy, à cause de sondit prieuré
de Fontaines.
> El ledit Geoffroy, tant pour lui que pour ses successeurs,
a octroyé et promis audit Pascault et à ses successeurs qu^ils
pourront marier toutes leurs filles franchement descendants
est celui de Françoys du Haulmont, maistre de la forge de Briffault, et
de Claude Taillefert.
Nous avons cherché en vain en quoi ce document pouvait être utile
aux prieurs de Fontaines. Certainement, ce n'était pas parce que le
futur époux s'obligeait à donner à la future deux robes de drap dont
Tune mi-doublée de damas et l'autre à manches de satin.
Parmi les signataires du contrat se trouve maistre Guy-Coquille ,
licencié ès-lois, qui ajoute à son nom : Présent. 2a avril i573.
(i) C'est en Briet que notre peintre nivernais Hector Hanoteau a
établi son atelier d'artiste justement renommé, et nous trouvons
parmi ses jeunes élèves Louis Marion, originaire de Charrin.
— 211 —
de droite ligne de Jehan Pascauit , sans que ledit prieur et
ses successeurs prieurs puissent et ne doivent jamais rien
demander ni à leurs hoirs descendants de leur propre corps ,
excepté Téchoite et mainmorte à deffaut d'hoirs d'elles. »
Cet accord avait lieu en présence de frère Benoist Ardy,
Jehan Ghassan, Bartholommier-Guillaume Marion, Guil-
laume Cotin , Jehan Debray, Pierre Chalamet , tous de la
paroisse de Charrin.
Il n*est point, sans doute, hors de propos de mentionner
ici in extenso une reconnaissance de serve condition qui se
trouve annexée au terrier Combriat. La voici textuelle-
ment :
c Personnalement establis en leurs personnes, Guillaume
Viseneuf du Bas et Jehannette, sa femme , fille de feu Jehan
Gilbert, eulx disant et portant franchises personnelles,
lesquels de leur bon gré et bonne voulonté, sans aucunes
force ne contraincte, publiquement et endroit, ontcogneu et
confessé et par ces présentes confessent pardevant Jehan
Cannart, prêtre et notaire-juré, et Guichard Gerbault, prêtre
et notaire-juré de Monseigneur le conte de Nevers , soubs le
scel de la prévôté de Decize, se sont donné et par ces pré-
sentes se donnent hommes serfs et de serve condition de
mainmorte et suyte comme ung des autres hommes de la
terre de Fontaines, à frère Jehan de Rouchinol , prieur du
prieuré de Fontaines, eulx et leurs hoirs présent et advenir à
tousiours et jamais , c'est assavoir que et par le moyen que
ledit prieur veult et consent que lesdits dénommés eulx et
leurs hoirs joyront et useront de certains héritaiges tAaiz et
tenements qu'ils portent dudit prieuré tout ainsi et comme il
est contenu en certaines lettres reçues , faictes et passées
pardevant messire Bartholommier Prost, prêtre, notaire-juré,
promettant et obligeant et renonçant.
3 Fait et donné au lieu de Maulays , le seizième jour de
septembre mil quatre cent soixante-dix-neuf. Présens discrète
— 212 —
personne messire Guy Compagnon , prêtre; Loys Dornant,
Jehan Gilbert, Pierre Gaultier et Jacques Montigny, de la
paroisse de Maulays, témoins présents et appelés.
> {Signé) J. Canard, G. Gerbaud. >
§
Un jour peut-être nous aurons à parler longuement sur le
faict des serves conditions en notre pays de Nivernais; nous
dirons seulement en passant que le servage était une condi-
tion intermédiaire entre Vesclavage et la liberté^ telle que la
proclament les lois modernes.
Nos rois ont été les premiers à affranchir les serfs de leurs
domaines. En i3i5, Louis X, en donnant cet exemple,
disait dans son édit que son royaume est dit et nommé le
royaume des Francs y dtsX'k'dirt Az franchise; il entendait
que la chose soit vérité et accordant au nom; en consé-
quence , il ordonnait que toute servitude soit ramenée en
franchise.
Cette volonté royale était méconnue dans les terres du
prieuré de Fontaines.
Nous devons néanmoins faire observer, diaprés le texte
même de la reconnaissance que nous avons reproduite, que
le servage volontaire dont s'agit relevait en partie de cette
condition terrienne que nos coutumes désignaient sous le
nom de colonat. C'est là au surplus une simple réflexion
que nous osons soumettre aux terribles détracteurs des temps
passés.
L. ROUBET.
**t^^9^^^i^
LE TRESOR
:athédrale de nevers.
ANaENS INVENTAIRES
DE SES LIVRES, DE SES JOYAUX ET DE SES
'AUTEUR des Recher-
ches historiques sur
Nevers ( i ) , Louis de
SaiDtemarie , dans le
chapitre consacré à la
cathédrale, rapporte que
l'on conservait au trésor,
qui a d'ailleurs était fort
riche », quelques monu-
ments précieux par leur
antiquité , entre autres
le chef de saint Cvr,
enchâssé en or, présent
du roi Raoul, et une
couronne dorée dans la-
quelleétaitenchâssée une
épine de la couronne de
Notrc-Seigneur , don de
/ Philippe de Moulins ,
*- - évéque de Noyon en 1 404.
(i) A Neven, de l'imprimetie de Letebvre te jeune, iSio {p. 478).
— 212 —
personne messire Guy Compagnon , prêtre; Loys Dornant,
Jehan Gilbert, Pierre Gaultier et Jacques Montigny, de la
paroisse de Maulays, témoins présents et appelés.
> {Signé) J. Canard^ G. Gerbaud. »
Un jour peut-être nous aurons à parler longuement sur le
faict des serves conditions en notre pays de Nivernais; nous
dirons seulement en passant que le servage était une condi-
tion intermédiaire entre Vesclavage et la liberté, telle que la
proclament les lois modernes. /
Nos rois ont été les premiers à affranchir les serfs de leurs
domaines. En i3i5, Louis X, en donnant cet exemple,
disait dans son édit que son royaume est dit et nommé le
royaume des Francs, c'est-à-dire dt franchise; il entendait
que la chose soit vérité et accordant au nom; en consé-
quence , il ordonnait que toute servitude soit ramenée en
franchise.
Cette volonté royale était méconnue dans les terres du
prieuré de Fontaines.
Nous devons néanmoins faire observer, diaprés le texte
même de la reconnaissance que nous avons reproduite , que
le servage volontaire dont s'agit relevait en partie de cette
condition terrienne que nos coutumes désignaient sous le
nom de colonat. C'est là au surplus une simple réflexion
que nous osons soumettre aux terribles détracteurs des temps
passés.
L. ROUBET.
^*t^^9^^^i^
LE TRESOR
CATHÉDRALE DE NEVERS.
ANCIENS INVENTAIRES
E SES LIVRES, DE SES JOYAUX ET DE SES ORNEMENTS.
'AUTEUR des Recher-
ches historiques sur
Nevers ( i ) , Louis de
Saiatemarie , dans le
chapitre consacré à la
cathédrale, rapporte que
l'on conservait au trésor,
qui 1 d'ailleurs était fort
riche », quelques monu-
ments précieux par leur
antiquité , entre autres
le chef de saint Cvr,
enchâssé en or, présent
du roi Raoul , et une
couronne dorée dans la-
quelle était enchâssée une
épine de la couronne de
Notre-Seigneur , don de
<^ Philippe de Moulins ,
évéque de Noyon en 1 404.
(i] A Nevers, de l'impriaierie de Letebvre le jeune, tSio (p. 478).
— 212 —
personne messire Guy Compagnon , prêtre; Loys Dornant,
Jehan Gilbert , Pierre Gaultier et Jacques Montigny, de la
paroisse de Maulays, témoins présents et appelés.
> {Signé) J. Canard, G. Gerbaud. »
Un jour peut-être nous aurons à parler longuement sur le
faict des serves conditions en notre pays de Nivernais; nous
dirons seulement en passant que le servage était une condi-
tion intermédiaire entre Vesclavage et la liberté, telle que la
proclament les lois modernes.
Nos rois ont été les premiers à affranchir les serfs de leurs
domaines. En i3i^, Louis X, en donnant cet exemple,
disait dans son édit que son royaume est dit et nommé le
royaume des Francs, dest'k'dire dt franchise; il entendait
que la chose soit vérité et accordant au nom ; en consé-
quence, il ordonnait que toute servitude soit ramenée en
franchise.
Cette volonté royale était méconnue dans les terres du
prieuré de Fontaines.
Nous devons néanmoins faire observer, diaprés le texte
même de la reconnaissance que nous avons reproduite, que
le servage volontaire dont s'agit relevait en partie de cette
condition terrienne que nos coutumes désignaient sous le
nom de colonat. C'est là au surplus une simple réflexion
que nous osons soumettre aux terribles détracteurs des temps
passés.
L. ROUBET.
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LE TRESOR
CATHÉDRALE DE NEVERS.
ANCIENS INVENTAIRES
DE SES LIVRES, DE SES JOYAUX ET DE SES
'AUTEUR des Recher-
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Nepers (i) , Louis de
Saiotetnarie , daas le
chapitre consacré à la
cathédrale, rapporte que
l'on conservait au trésor,
qui a. d'ailleurs était fort
riche », quelques monu-
ments précieux par leur
antiquité , entre autres
le chef de saint Cyr,
enchâssé en or, présent
du roi Raoul , et une
couronne dorée dans la-
quelle était enchâssée une
épine de la couronne de
Notre-Seigneur , don de
.^ Philippe de Moulins ,
évéquedeNoyonen 1404.
(i) A Nevera, de l'imprimerie de Letebvre le jeune, 1810 (p. 478).
— 212 —
personne mcssire Guy Compagnon , prêtre; Loys Dornani,
Jehan Gilbert, Pierre Gaultier et Jacques Montigny, de la
paroisse de Maulays, témoins présents et appelés.
> {Signé) J. Canard, G. Gerbaud. »
§
Un jour peut-être nous aurons à parler longuement sur le
faict des serves conditions en notre pays de Nivernais; nous
dirons seulement en passant que le servage était une condi-
tion intermédiaire entre Vesclavage et la libertéy telle que la
proclament les lois modernes.
Nos rois ont été les premiers à affranchir les serfs de leurs
domaines. En i3i5, Louis X, en donnant cet exemple,
disait dans son édit que son royaume est dit et nommé le
royaume des Francs y c'^sl-k-div^i^ franchise; il entendait
que la chose soit vérité et accordant au nom ; en consé-
quence, il ordonnait que toute servitude soit ramenée en
franchise.
Cette volonté royale était méconnue dans les terres du
prieuré de Fontaines.
Nous devons néanmoins faire observer, d'après le texte
même de la reconnaissance que nous avons reproduite , que
le servage volontaire dont s agit relevait en partie de cette
condition terrienne que nos coutumes désignaient sous le
nom de colonat. C'est là au surplus une simple réflexion
que nous osons soumettre aux terribles détracteurs des temps
passés.
L. ROUBET.
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LE TRESOR
CATHÉDRALE DE NEVERS.
ANCIENS INVENTAIRES
DE SES LIVRES, DE SES JOYAUS ET DE SES ORNEMENTS.
'AUTEUR des iîecAer-
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Nevers ( i ) , Louis de
Saintemarie , dans le
chapitre consacré à la
cathédrale, rapporte que
l'on conservait au trésor,
qui a d'ailleurs était fort
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le chef de saint Cyr,
enchâssé en or, présent
du roi Raoul , et une
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Nôtre-Seigneur, don de
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'■■- évêquedeNoyonen 1404,
(i) A Ncvert, de rimprimerie de Letebvre le jeune, 1810 (p. 478J.
— 212 —
personne messire Guy Compagnon , prêtre; Loys Dornant,
Jehan Gilbert, Pierre Gaultier et Jacques Montigny, de la
paroisse de Maulays, témoins présents et appelés.
» (Signé) J. Canard, G. Gerbaud. »
Un jour peut-être nous aurons à parler longuement sur le
/aict des serves conditions en notre pays de Nivernais; nous
dirons seulement en passant que le servage était une condi-
tion intermédiaire entre Vesclavage et la liberté, telle que la
proclament les lois modernes.
Nos rois ont été les premiers à affranchir les serfs de leurs
domaines. En i3i5, Louis X, en donnant cet exemple,
disait dans son édit que son royaume est dit et nommé le
royaume des Francs, c'est-à-dire àt franchise ; il entendait
que la chose soit vérité et accordant au nom; en consé-
quence , il ordonnait que toute servitude soit ramenée en
franchise.
Cette volonté royale était méconnue dans les terres du
prieuré de Fontaines.
Nous devons néanmoins faire observer, diaprés le texte
même de la reconnaissance que nous avons reproduite, que
le servage volontaire dont s'agit relevait en partie de cette
condition terrienne que nos coutumes désignaient sous le
nom de colonat. C'est là au surplus une simple réflexion
que nous osons soumettre aux terribles détracteurs des temps
passés,
L. ROUBET.
- IIÎ -
LE TRÉSOR
CATHÉDRALE DE NEVERS-
ANCIENS INVENTAIRES
DE SES LIVRES, DE SES JOYAUX ET DE SES ORNEMENTS.
'AUTEUR des Recher-
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Nevers ( i ) , Louis de
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l'on conservait au trésor,
qui 1 d'ailleurs était Tort
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le chef de saint Cyr,
enchâssé en or, présent
du roi Raoul, et une
couronne dorée dans la-
quelleétait enchâssée une
épine de la couronne de
Notre-Seigneur , don de
^Q Philippe de Moulins ,
évéquedeNoyonen 1404.
(i) A Neven, de rimprimerie de Letebvre le ieune, tSio {p. 478J.
— ai4 -
Parmentier, dans son Histoire manuscrite des éyêques
deNepers, nous apprend aussi, parlant de Guillaume de
Saint-Lazare, le restaurateur de la cathédrale au treizième
siècle, que l'on montrait encore dans le trésor, vers 1770,
par respect pour la mémoire de ce saint pontife, « ses
sandales et une crosse qu^on croit avoir été la sienne. »
Le Livre noir ou Recueil des statuts de Véglise de
Nevers{i), rédigé au quatorzième siècle, — dans le statut
de Ostensione facienda, de la montre qui se doit faire
chaque année, le mardi après le deuxième dimanche de
Carême, de tous les joyaux en or, argent et cuivre, des
ornements et livres de l'église, — nous indique d'ailleurs
quelle était, à cette époque, l'importance du trésor. Cette
montre se faisait devant le trésorier, le sacriste, les deux
gardiens en titre du trésor, dont la présence était obligatoire,
à cause du péril qu^ils encourent, et les chanoines présents
recevaient 12 deniers de la bourse commune. Voici ce texte,
qui doit ici trouver sa place :
Item statutum est quod , anno quolibet, die Martis post
Reminiscere fiet per custodes ostensio omnium rerum et
jocalium Ecclesiœ, sive sint in auro^ argento, cupro^
sericOy tela et lihris aut aliis quovis modo, et quilibet
canonicus prœsens in -dicta ostensione habebit duodecim
denarios de bursa communi ; prœcentibus sacrista et
thesaurario aut eorum procuratoribus , quia de periculo
principaliter ipsi tenentur (2).
Cependant, nous ne connaissons jusqu'à ce jour d'autre
inventaire de la cathédrale que celui qui avait été fait bien
sommairement au mois de décembre 1792.
(i) Copie manuscrite du dernier siècle, conservée à la bibliothèque
de révêché.
(2) Folio 10 du Livre noir ancien. Ces folios sont indiqués aux
maires de la copie.
— 2l5 —
Dans une lettre adressée à dom DoUet (ou Dolé),
religieux de Tordre de Cluny, à Saint-Manin-des-Champs^
à Paris, le 7 août 1718, Tabbé Lebeuf^ après lavoir félicité
de V Histoire du Nivernais par lui entreprise, et lui avoir
indiqué un gros manuscrit de dom Viole et un pouillé de
Nevers coUationné en 1635 sur l'original de Michel
Cotignon, ajoutait:
« Si vous vous étendez sur les antiquités de la cathédrale,
j^ai la copie d'un Inventaire du trésor fait Tan 1297. »
Dom Dollet n'avait sans doute pas manqué d'accepter une
offre si intéressante. Le Père Lelong en fait mention dans sa
Bibliothèque de la France^ n* 14914 bis; mais M. de
Saintemarie nous apprend que ce manuscrit avait disparu ,
quelques années avant la Révolution , de la bibliothèque de
l'abbaye de Saint-Martin-des-Champs , q\x il fut longtemps
conservé (ij.
Quelle fut donc notre joie en lisant , dans la Bibliothèque
de l'Ecole des Chartes (2) , l'extrait du catalogue des
anciens manuscrits conservés à Londres, au British
Muséum, d'y rencontrer une notice de M. Léopold Delisle
sur deux manuscrits, un évangéliaire et un traité de comput
venant de la cathédrale de Nevers et contenant, tous les
deux , beaucoup de notes historiques , entre autres des
Inventaires des livres et des ornements du trésor de la
cathédrale. Tout d'abord nous nous étions demandé s'il ne
serait pas possible d'obtenir la copie de ces précieux
inventaires par l'entremise des RR. PP. Maristes^ qui ont
une maison importante à Londres !...
C'est ainsi que Mgr Crosnier, en 1868, reçut des notes
bien précieuses du R. P. Leforestier sur le sacramentaire
nivernais du dixième siècle , également conservé à Londres
(i) Mémoires sur te Nivernais, par Née de La Rochelle, 1827, t. III,
p. 167.
(2) Tome XLVI, année i885, 3- liv., p. 3i5.
— 2l6 —
au Brîtish Muséum, dans ce fonds harléien si riche en
manuscrits de la' cathédrale de Nevers (i).
Tandis que cette pensée nous préoccupait, une heureuse
fortune nous fit recevoir de Londres une lettre datée du
I*' janvier 1886, signée de M. Edmund Bishop, bien connu
des érudits français.
€ Il n'y a pas longtemps, nous écrivait-il, vous avez
publié un inventaire d'une église rurale — la vôtre je crois
— des environs de Nevers, un à part de la Semaine
religieuse, Cest de cet à part que je suis très-désireux
d'avoir un exemplaire s'il est possible. Malheureusement les
libraires de province ne donnent que trop souvent une
oreille sourde aux curieux ou aux collectionneurs qui
s'adressent à eux quand il s'agit d'un opuscule de quelques
pages seulement, et force est d'avoir recours à la complai-
sance des auteurs eux-mêmes.
Y Et voici encore deux ouvrages sur lesquels je n'ai pu
trouver des renseignements ici : les Recherches sur la
Liturgie nivernaise , de Mgr Crosnier, et les Drames
liturgiques et rites figurés dans l'église de Nevers,
l'auteur duquel je n'ai pas besoin d'indiquer.
» ... Cependant, ajoutait-il, j'aurais plaisir au moins de
vous communiquer un Petit inventaire de votre cathédrale
du dixième siècle ou onzième que j'ai copié d'un manuscrit
du musée britannique , parmi les manuscrits nombreux de
l'église de Nevers qui y sont recueillis, la plupart bien
anciens. Peut-être puis- je ajouter que j'ai extrait d'un autre
de ces manuscrits les anciennes Annales nivernaises et les ai
communiquées aux Messieurs des Monumenta Germaniœ
historica qui les ont insérées dans le treizième volume de
leurs Scriptores (2).
1» Ceci pour dire que je ne suis pas tout à fait hospes et
peregrinus dans le champ de vos antiquités... »
(i) Études sur la liturgie nivernaise, par Mgr Crosnier, p. 48.
(2) Voir Bulletin de la Soc. niv., t. XI, p. 5oo.
— ai7 —
Il va sans dire qoe les ouvrages demandés furent prompte-
tement expédiés et que Toffre de la copie des inventaires fat
acceptée avec la plus vive reconnaissance.
M. E. Bishop nous répondit bientôt par une lettre de
quince pages grand in-4<> , suivie de plusieurs autres des
plus intéressantes.
Ce notait pas seulement la copie des inventaires ^ c avec
les abréviations et toutes ces minuties que méprise le public,
et qui seules peuvent suppléer en partie à Texamen du
manuscrit de propriovisu, » mais un commentaire plein
d'érudition et, mieux encore, une analyse aussi complète
que possible de tous les éléments qui composent le volume.
En vérité, nous ne pouvions espérer une si précieuse
collaboration !
Transcrivons donc tout d^abord Tarticle de M. L. Delisle :
Catalogue ofancient manuscripts in the British Muséum.
Part. IL Latin. London, 1884. Grand in-folio de vi et
89 pages, plus 61 planches autotypiques, p. 320. TPage 24
du catalogue.)
Les quatre Évangiles Fonds harléien, n* 27 po.
Ce volume, dont une page est reproduite en tac-simile sur
la planche 44, est écrit en minuscule Caroline du neuvième
siècle, et vient de la cathédrale de Nevers, à laquelle il avait
été donné par Tévéque Herimannus , entre les années 840 et
860 ou environ , comme le prouvent trois distiques inscrits
au folio 19, verso:
Me quicunque legis, Herimanni sis memor, oro;
Cujus me studio possidet iste locus.
Obtulit ecclesiœ sibi commissœ memorandus
Prœsul me 9 fateor, pro bonitaiis ope.
Me Sancto Cyrico tali sub conditiane
En dédit ut pereat qui cupit abstrahere.
Dans Parcade d'une page des canons (folio 23} se lit en
lettres capitales le nom de Gédéon , qu^on a supposé pouvoir
T. Vif 3* série. 28
— 2l8 —
être le nom d*{in artiste employé à la décoration du livre. —
Sur quelques pages blanches , on a ajouté après coup des
documents très-curieux pour Thistoire de Téglise de Neven,
tels qu'un ancien catalogue des évéques, des inventaires des
livres et des ornements du trésor de la cathédrale et la charte
suivante, qui paraît émaner de Tévéque Hugues IV, du
commencement du douzième siècle :
Notum fieri volumus omnibus Sanctœ Dei ecclesiœ filiis
quod ego Hugo, Nivernensis episcopus , Rotgerium,
priorem ahbatiœ Sanctœ Mariœ et Sancti Stéphanie cum
duobus monachis, Arnulfo scilicet et Adalardo Theutonico,
propter inobedientiam quant Deo et michi fecerunt , feci
venire nudis pedibus usque ad altare Sancti Cirici ante
presentiam meam et totius ecclesiœ, ad satisfaciendum
Deo et michi in ipsa festivitate sancti Stephani post natale
Domini.
Voici maintenant comment notre docte correspondant
classe les divers éléments qui composent le manuscrit:
lo L'Evangéliaire même, qui fait le corps du volume;
20 Le Capitulaire (folios 264-271} qui, si TEvangéliaire
servait à Pusage liturgique, doit nécessairement l'accom-
pagner;
3* Les quelques vers constatant que Tévéque Hériman a
donné le volume à l'église de Nevers ;
4^^ La liste des évéques de Nevers ;
5^ Le titre concernant Tévéque Hugues et les moines de
Saint-Etienne ;
6** Les inventaires des folios 262 et 263.
Puis viennent les principales observations propres à chacun
de ces éléments.
D^abord VEvangéliaire ne semble pas avoir été écrit pour
Téglise de Nevers spécialement; il fut probablement acheté
tout fait par Hériman , comme partie de la grande restau-
— ai9 —
ration de son église (i). L'écriture et l'encre sont tout à
fait différentes de l'inscription en Thonneur d^Hériman,
laquelle parait plus récente.
Secondement , le Capitulaire offre à peu près la même
disposition de Tannée ecclésiastique que Ton trouve dans le
Calendarium romanum , édité par le Père Fronteau , et
généralement dans tous les plus anciens capitulaires. Il
paraît être d'une écriture du neuvième siècle et n^a rien de
particulier pour Nevers ; c'est tout bonnement une copie
d'un vieil original romain. Mais on ne peut douter qu'il
n'ait été écrit qu'après qu^Hériman eut fait l'acquisition du
volume.
En troisième lieu, les vers d^Hériman sont importants, en
ce qu'ils nous offrent un point de départ fixe et nous
permettent de conclure que, en dehors de TEvangéliaire,
toutes les autres parties du manuscrit viennent des mains
des clercs de l'église de Nevers, à différentes époques.
Quatrièmement, la liste des évéques, qui est sans titre, est
tout d^une même main , et le dernier évéque nommé est
Hugues le Grand. On peut dire sans trop de présomption
que cette liste fut écrite pendant son épiscopat. Il est à
remarquer qu^un premier nom a été gratté. Le rédacteur du
Catalogue 0/ ancient mss suggèrt Rus ticus , mais je crois
ma suggestion meilleure.
Il reste, en effet, assez de Vus terminal pour s'assurer que
récriture était la même, et en comptant l'espace nécessaire
pour les lettres , on trouve qu'il y a assez de place pour les
onze lettres faisant le nom Tauricianus, et aucun autre
nom, dans les listes imprimées des évéques de Nevers,
(i) Cest ce prélat, écrit Parmentier dans son Histoire des évéques
de Nevers , qui a réparé les grandes pertes que son église ayait faites
depuis plus d'un siècle , et qui lui a rendu son lustre , en la créant
comme de nouveau. Sa charte de 849 porte quUl avait établi dans sa
cathédrale quarante chanoines, etc.
— 220 —
parait se conformer à ces conditions. Au surplus, la
« gratture » n^est pas ancienne, on la croirait faite avec
mauvaise volonté, et Ton serait tenté de croire qu'elle
indique qu^il y a eu une querelle un peu acérée parmi les
antiquaires du seizième ou dix -septième siècle sur la
question de la succession des premiers évêques de Nevers.
Les noms ne sont pas écrits en colonnes , comme dans le
Sacramentaire publié par Mgr Crosnier, mais ils se suivent
dans les lignes Tun après lautre (i).
Voici cette liste qu'il est intéressant de confronter avec
celle du Sacramentaire :
...{raturé)... S. Arigius; S. Eulalius; S. Gislebertus;
S, Rorgus; S. Icterius; S. Euladius; S. Agricola; S. Opor-
tunus; S. Nicterius; S. Waldo; S. Deodatus; S. Evartius;
S. Hieronimus ; Jonas ; Heneas ; Guineredus ; Hugo ;
Bertarius; Herimannus; Raginus; Ragimfredus; Abbo;
Emmenus; Franco; Atto; Launo; Tedalgrinus; Gosbertus;
Natrannus; Roclenus; Girardus; Hugo secundus.
Cinquièmement, à propos de la charte de Tévéque Hugues
concernant les moines de Saint-Etienne, le compilateur du
Catalogue qf ancient mss est disposé à attribuer le fait
plutôt à Hugues III qu'à Hugues le Grand.
Je prends la liberté de n'être pas de son avis, laissant
d'ailleurs de côté la question de compétence en fait de
paléographie... et voici mes raisons: Tévêque somme les
moines, d'une manière péremptoire, comme ayant autorité
directe sur eux, et leur fait subir presque des humiliations
publiques (2).
(i) Voir page Sg de Tîntroduction du Sacramentarium ad usum
ecclesiœ Nivemensis et page 141 du texte.
(2) Voir plus haut le texte donné par M. Dclisle. Le prieur et les
deux religieux de Saint-Etienne, coupables de désobéissance, sont
condamnés à venir ^i>^5 nus se prosterner devant Tautel de Saut-
Cyr, en l^lise cathédrale , en présence de Tévéque et de tout son
chapitre, au jour de la festivité de taint Etienne après Noil,
— 221 —
Je doute que Hugues III se fût comporté de la sorte
envers des moines dépendant de Cluny à cette époque. Il me
semble que s*il avait à se plaindre, il se serait adressé à
Tabbé même et aurait usé de moyens plus doux , tandis que
Hugues le Grand , qui avait tant iait pour le monastère de
Saint* Etienne» pouvait manifester son déplaisir d'une
manière plus vive et se comporter un peu en maître vis-à-vis
des anciens religieux (i).
Sixièmement, les inventaires écrits sur le feuillet 262,
verso, et sur le folio 26?, recto et verso, sont au nombre de
trois. Le premier, en haut du folio 262, a pour titre: Hi
sunt libri domni abb. Rostagni ; puis, après un grand
espace blanc , presque la moitié de la page , sans titre
spécial, vient rénumération des ornements d*une église ; et
enfin le troisième inventaire , qui remplit les deux côtés du
folio 263, se rapporte évidemment à Téglise cathédrale de
Nevers , le titre est formel : Hec sunt nomina librorum qui
sunt in armario Sancti Cyrici,
Que le second inventaire se rapporte pareillement à
réglise de Saint-Cyr, il n'y en a pas de preuve positive, il est
vrai ; mais ce texte a été écrit à coup sûr après que le manus-
crit fut devenu propriété de Téglisc de Nevers, l'écriture ne
permet pas d'hésiter sur ce point , et il forme le complément
du fragment d'inventaire des joyaux qui suit la liste des
livres de Saint-Cyr.
Maintenant, quel est cet abbé Rostagnus du premier
inventaire? Dans la vie de /{^rA^rm^ que Mabillon a com-
pilée {Acta SS, O. S, B. Sœculo V, p. 480, édition de
Venise) je trouve ce passage extrait de Folcuin de Lobbes :
t Libellum etiam vitœ sancti Ursmari, cum Cumis exsularet,
ibi reperit, quem solœcismis re/ertum emendavit nobisque
(i) Voir dans le Bulletin de la Soc. nivem,, i" série, t. !•', la
notice historique sur VEglise et le Prieuré de Saint - Etienne de
Neptrs t par Mgr Crosnier, et les chartes extraites du Gallia
Christiana,
— 222 —
transmisiL Postea cum in parte Burgundiœ, quœ provincia
dicitur, mansitarety Jilium cujusdam viri ditissimi, nomine
Roestagnum, ad imbuendum litteris postulatus recepit;
ad quem librum de arte grammatica conscripsit quem
librum gentilitio loquendi more Spera-dorsum vocavit, pro
eo quod qui scholis assuesceret puerulus, dorsum a flagris
servare posset. Ob quœ ei (Ratherio) episcopatus datus est,
que (m) relinquens Laubias revertitur. i
A la page 474, Mabillon assigne l'arrivée de Ratherius en
Provence à Tan 941 ou environ, époque quMl assigne aussi
fp. 476) au retour de Ratherius à Lobbes. L'éditeur de
Folcuin dans les Monumenta Germaniœ met en marge 940
pour rarrivée en Provence, 944 pour l'arrivée à Lobbes, et il
rapporte le spera au mot allemand sparen.
Puisqu'un évéché fut offert à Ratherius, on est en droit de
conclure qu'il avait complété Tinstruction de Rostagnus et
que ce dernier n*était plus un enfant...
Mais ce qui paraît le plus singulier, c'est de trouver, d'une
part, dans cet inventaire des livres de Saint-Cyr (n^ 54) les
œuvres de Ratherius, Epistole Raterii, et un abbé Rosta-
gnus en rapport avec l'église de Nevers, et d'autre part, enfin
un Rostagnus élevé pour les lettres (il est à présumer pour la
cléricature, sinon pour un monastère ) sous la conduite de
Ratherius. Il est d'ailleurs bien difficile de pénétrer plus
avant ce point d'histoire si curieux. Si les anciens cartu-
laires de Saint-Cyr existaient encore, ou les vieux nccrologes,
peut-être y trouverait- on quelque mention du nom de
Rostagnus !
Ajoutons cependant qu'on ne peut douter que Ratherius
dont il s'agit est le célèbre évéque de Vérone qui mourut à
Namur en 974. Or, on doit bien supposer que cette collection
de ses épîtres ne fut faite qu'après sa mort, et il faut donner
le temps de penser à faire cette collection , le temps de la
faire effectivement et d'en prendre copie, ce qui conduit
à la fin du dixième siècle ou aux premières années du
onzième.
— 323 —
Enfin» voici quelques notes rapides concernant divers
articles des deux invenuires des livres :
f Sur le no 3 1 du § i*', ParsRegistri, j*espérais, continue
M. Edmond Bishop» pouvoir Tidentifier dans la liste très-
ample que donne M. Ewald [Nen^es Archiv., tome IIIJ des
manuscrits des lettres de saint Grégoire le Grand... Impos-
sible î 1
Même chose pour les Gesta Longobardorum cum vita
Apollonii, n^ 3^, dans la préface de M. Waitz, à son édition
de Paul, diacre, dans les Monumenta Germaniœ. Encore
impossible ! Mais il y a une classe de manuscrits par lui
cotée série H, à laquelle je crois que notre manuscrit a dû
appartenir. Ces manuscrits sont tous d'origine française, et
la plupart ont dans le même volume VHistoria Apollonii ; ils
donnent d^ailleurs, dit Waitz, un mauvais texte : € Pauli
historia usi ut eam potius déformasse quam reddidisse sint
dicendi, i
Dans le jeune Isidore, n* 42, iaut-il voir le Mercator?
Sur le n^* 14 du i 2, Expositio Moridac super Donatum
majorent f — Moridac, c^est assurément le nom irlandais
« Muirdach •. Ce personnage n*est pas mentionné dans
Lanigan, Ecclesiastical history of Ireland, M. labbé
Chevalier ne le connaît pas non plus.
Le Scotus (Irlandais) Elias fut, dit-on, maître de Héric
d^Auxerre, lui-même maître de Hucbald. Peut-être est-ce
ainsi qu'il faut expliquer ce nom irlandais à Nevers ?
V Expositio Marciani (§ 2, n*'26) est-ce le commentaire
sur Marcianus Capella écrit par Héric ?
Franco et Saxo (n" i5), voilà un titre qui fait envie!
Serait-il oiseux de le renvoyer à l'auteur des Poésies popu"
laires, M. Edelstan du Méril (i) ?
(i) Le général Ambert, Pauteur des Récits militaireSy ouvrage cou-
ronné par TAcadémie française, vient de renoureler ce titre, avec une
allure toute guerrière, dans ses Gaulois et Germains.
— 224 —
Andradus (n* 48), ce sont peut-être les visions dont
Duchesne a publié des fragments !
Le missel appelé Guitbert (n* 68), voilà un problème
intéressant! Je n^ai pu aller plus près que saint Guitbert»
fondateur de Gembloux.
Ici se terminent les communications de notre érudit corres-
pondant, auquel nous ne saurions trop exprimer notre
reconnaissance.
Privé du bonheur de voir, de toucher, d'étudier à loisir le
précieux manuscrit, gardien fidèle des antiques souvenirs de
notre cathédrale, il y a mille ans, nous avons été bien-
heureux de recueillir tout ce qui nous en était rapporté , et il
nous tarde de faire connaître le texte de ces inventaires.
Combien d^autres remarques, sans doute, il y aurait
encore à faire, en particulier sur ces livres de ï Armoire de
Saint'Cyr^ où nous retrouvons les principales œuvres
des philosophes de Tantiquité, depuis Aristote : ses Catégo-
ries, — son livre de l'Interprétation (en gvtcperi Ermeneias),
— ses Topiques (n** 21 à 26) (i).
Le livre de la Consolation de ta philosophie du philosophe
chrétien Boèce était surtout goûté ; on le possédait en triple
exemplaire (nM4à6); le Traité de la Trinité, du même
auteur, est aussi mentionné une fois.
Puis ce sont les œuvres des poètes : Perse, Horace, Virgile,
Juvénal; du prêtre poète Sedulius, au cinquième siècle, etc.,
et même un cahier {quatemio) d'Homère ; — les ouvrages
d'histoire ecclésiastique d'Eusèbe, des traités de droit-canon,
de médecine, de géométrie, de musique, le psaultier de saint
Jérôme; les livres de Comput; les expositions des évangiles,
des psaumes, les épitres canoniques, les recueils d'ho-
mélies, etc.; — quelques vies de saints sous le titre de
(i) Voir dans VEssai sur la psychologit d* Aristote , par A.-Ed.
Chaignet, recteur de racadémie de Poitiers, i883, le catalc^ue des
écrits d^Aristote, p. 91-101.
— 225 —
Passion : des Sept Dormants, de saint Denys, de saint Cyr,
cette dernière sans doute i^œuvre de Hucbald (n** 5i, 58,
59» 67) (i); enfin, les livres-missels et ces beaux textes
d'argent et d^or sur lesquels nous aurons roccasion de
revenir.
Arrêtons-nous donc à ces mentions si brèves, et pour
compléter d'ailleurs, autant qu'il est en notre pouvoir, l'état
du trésor de Saint-Cyr jusqu'à sa destruction par la Révo-
lution, aux trois inventaires déjà annoncés nous en ajoute-
rons quatre autres ($§ 4, 5, 6 et 7}, comprenant : l'indication
d'une panie des vases sacrés et joyaux de la cathédrale
de Saint-Cyr utilisés au quatorzième siècle, pour la réfection
du reliquaire renfermant le chef de saint Cyr; — «rénuméra-
tion des objets divers entrés dans le trésor depuis le treizième
siècle jusqu'à la fin du dix -huitième; — les anciens
manuscrits liturgiques du chapitre de Saint-Cyr; — enfin
les vases sacrés et ornements en 1791 .
§1.
INVENTAIRE DES LIVRES DE L^ABBÉ ROSTAGNUS.
Ilarleian ms. 2790, folio 262, verso.
Ht sunt libri domni abbatis Rostagni,
1. Porphirius.
2. Aristotiles.
3. Expositio Boetii super cathegorias.
4. Musica Boetii.
5 . Popice di fieren tie.
6. Arismetica.
7. Compotus cum martirologio.
(1) Dans le premier inventaire (n** 32-43) sont indiquées les passions
de saint Austremoine et des saints Savinien et Potenticn.
T. III, 3* série, 29
— 226 —
8. Ciceroad Herennium (i).
9. Cicero Invectivarum.
10. Duo Juvenales.
11. Boetius de consolatîone philosophie.
12. Lucanus.
i3. Liber figurarum Giometrie.
14. Quaterniones de dialectica.
i5. Isidorus de partibus.
i6. Homerus.
17. Remigius super Donatum.
18. Expositio cantica canticorum cum Beda de ortographia<
19. Numerus abbaci.
20. Dialectica.
21. Prosperi duo.
22. Avianus (2).
23. Pabula abbaci.
24. Astrolabium.
25. Salustius.
26. Prudentius hymnorum.
27. Expositio super Esaiam.
28. Expositio super epistolas canonicas.
'^9. Libri V de moralibus.
3o. Job.
3i, Pars registri.
32. Passio Austremonii (3).
33. Epistole Hieronimi ad Damasum Papam.
(i) Écrit comme un seul mot adherennium ; de même pour les n"" 11,
14, 18, 33, 40, deconsolaiione, dedialectica^ etc.; addamasum, etc.
(2) Ainsi très-clairement écrit; mais, observe M. E. Bishop, en note
de sa copie : Je ne connais pas a Avien •.
(3} Combien il serait important, pour le diocèse de Nevers en
particulier, de posséder le texte de cette passion ! Saint Austremoine
est, en effet, appelé dans une vieille vie de saint Cassy, évcsque des
Auvergnats et des Nivernais . Michel Cotignon, dans son Catalogue
historial des évêques de Nevers^ considérait saint Austremoine comme
notre premier évéque.
►
f
— 227 —
34. Machrobius.
35. Gesta Longobardorum cum vita Apollonii.
36. Augustinus de Baptisnio.
37. Rethorice IL
38. De Transita sancte Marie.
39. Expositio super perchermenias.
40. Versus Alchuini ad Carolum regem.
41. Liber Ambrosii contra Adrianos.
42. Liber Isidoris junioris.
43. Passio Savîniani et Potentiani (i}.
44. Pastoralîs.
§IL
INVENTAIRE DES LIVRES DU CHAPITRE DE 8AINT-CYR.
Harleian ms. 2790, folio 2G3, recto.
Hec sunt nomina librorum qui sunt in armario Sancti Cyrici,
1. Donatus parvus cum majore, — et cum barbarisme, —
et cum expositione majofis Donatî, — et cum Pris-
ciano parvo, — et cum Beda, — et cum Prisciano
de constructione in uno eodemque volumine.
2. Sedulius parvus cum Prisciano, — etServiolo, — et
Beda, — et cum expositione majoris Donati, in uno
volumine.
3. Sedulii alii, IIL
4. Boetii de consolatione Philosophie, IL
(i) La passion des saints Savinîen et Potentien intéresserait le
diocèse de Nevers au même degré que celle de saint Austrcmoine. Ils
furent, en effets les apôtres du centre de la Gaule; nos anciens
sacramentaires et graduels du onzième siècle et les bréviaires du
seizième les honoraient d^une manière toute spéciale. Le propre du
diocèse de Nevers, renouvelé en 1881, a conservé une oraison propre
et une leçon des saints Savinien et Potentien au 19 octobre. Il en est
de même pour saint Austremoine au 3 novembre.
— 228 —
5- Boctius de consolationc Philosophie alcer» — cum
arismetica in uno volutnine.
6. Boetius item de Trinitate.
7. Prudentii duo de Sicomachia unus pictus et alter planus .
8. Aratoresduo.
9. Juventii, III.
10. Priscianus parvus cum foca.
11. Prisciani deduode cum versibus.
12. Virgilii , II.
i3. Item Bede duo.
14. Persius I, •— etitem Persiuscumduobusquaternionibus
Juvenalis.
i5. De Lucano quaterniones , V.
16. Item expositio Moridac super Donatum majorem.
17. Franco et Saxo, II.
18. Marcianus, I.
19. Terentius, I.
20. Oratius, I.
2 1 . Priscianus major cum Prisciano de construct.
22. Virgilius, I.
23. Porphirius cum comto >!Boetii et cum periarmenias et
cum Cathegoriis Aristotiiis.
24. Item Cathegorie Aristotiiis per se.
25. Item Porphyrius cum Cathegoriis Aristotiiis in uno
volumine.
26. Item Cathegorie Aristotiiis.
27. Popicarum libri , III.
28. Expositio Marciani , — et expositio Cathegoriarum , —
et expositio Periarmeniarum, — et expositio Porphirii,
— et expositio Giometrice, — et expositio Musice.
— Item musica Enchiriadis, — item definitio
musice, — item expositio Persiî, cum uno quater-
nione Omeri et cum Topica , in uno volumine.
29. Epistolc canonice.
30. Expositio apocalipsis.
3i. Expositio libri Machabeorum.
32. Décréta pontificum.
33. Liber de virginitate béate Marie.
34. Psalterium Iheronimi.
35. MedicinaieSi VII.
36. Leges , III.
37. Historia ecclesîastica Eusebii.
38. Ordines ecclesiastici II.
39 Vite canonice II.
40. Libri Corn pot i III (1).
41. Libri Canonum VIII.
42. Item ordo ecciesiasticus.
43. Isidorus I.
44. Expositio Evangeliorum miaula.
45. Item vita canonica cum Martirologio.
46. Item expositio Evangeliorum in Quadragesima.
47. Expositiones Psalmorum II.
48. Glosarius I.
49. Expositio Misse.
50. Audradus.
5 1 . Liber de sancta Trinitate Alcuini.
52. Scrmo beat! leronimi ad Paulam et Eustochiam.
53. Passio VII Dormientium.
54. Istoria mystica Ecclesie cum quaternionibus diverse
scripture.
55. Prosperus contra Gallos.
56. Epistole Raterii.
57. Liber Inchiridionis sancti Augustini.
58. Eptaticus.
59. Johannes Crisostomus.
60. Passio sancti Dionisii.
6î . Passio sancti Cyrici (2).
(1) Cest un de ces livres de Comput que nous mentionnons plus
loin au | VI.
(2) Dans la Monographie de la Cathédrale de Nevers et dans la
notice historique sur saint Cyr et sainte Julitte, publiée par la Semaine
— 2'io —
62. Veieres quaterniones episcopales.
63. Item alii quaterniones de Nativitate Domini, vel aliis
festivitatibus (i).
64. Istoriarum libri III, cum quaternionibus Genesis.
65. Quadraginta homeliarum libri II; unus integer et
alter imperiectus et vêtus.
66. Smaragdini IL
67. Missales V.
68. Epistolarum liber unus et alter inceptus.
69. Texti argentei II ; cutn aureo et cum vita argentea
sancti Cyrici (2).
70. Liber messalis qui Guitbertus vocatur.
71. Item liber lectionalis et textus in uno volumine.
72. Expositio super epistolas Pauli.
religieuse du diocèse en 1868, Mgr Crosnier a longuement traité ce
qui concerne la légende ou passion de nos saints patrons, par le
moine Hucbald^ devenu écolâtre de Nevers au commencement du
dixième siècle, et par le doyen du chapitre Teterius.
(i) Au-dessous de de Nativitate, une autre main a ajouté : cum
psalterio» (Note de M. E. B.)
(2) Textes à couverture d^argent^ doré par partie; vie de Saint-Cyr,
à couverture d^argent.
Le martyrologe de la cathédrale, au VH des ides de mai (26 avril)
mentionnait, parmi les nombreuses donations de Tévéquc Theobaldus
à son chapitre : Missale argenteum et Lectionarium argenteum. Theo-
baldus fut évéque de Nevers, de 1177 a 1188.
Dans le paragraphe suivant, n** 10 et 11, nous retrouverons encore
deux petits textes d'argent et un Lectionnaire à couverture d'argent. Je
dois consigner ici une remarque de M. E. Bishop : Il y avait d^abord
parvus textus argenteus l, que Ton a changé ensuite en parvi texti
argentei II. La rature a été fort bien faite , mais avec un peu d^atten-
tion, on la reconnaît très-bien. Cette observation est importante, en
ce qu'elle semble indiquer que le fragment dMnvcntaire du folio
262 est antérieur à celui du folio suivant.
— 23l —
§ III.
INVENTAIRE DU TRÉSOR DE 8AINT-CYR.
Harleian ms. 2790, folio 262, verso.
1. Capsule de pallio VII (i).
2. Cappe XXI.
3. Pallia XVI (2).
4. Tunice subdiacooorum VIII.
5. Dalmatice diaConorum III.
6. Fascitergii VI (3).
7. Alba aurea I, cum stola aurea et fanone et amictis
aureis IV, et aliis stolis V, cum fanonibus (4).
8. Candelabra argentea duo paria.
9. Albe de tansilo III (5)^ cum amictis.
(X) Capsula, pour casulof, chasubles.
Pallium, paille, étoffe de soie. Voir Ducange, à Pallium, où il cite
Hariulphe, lib. !!> cap. 10 : « Casulas de pallio, 3o. » (Cette note et
les suivantes jusqu^au n* 1 1 inclusivement, puis celles des n** i3 à 17
sont de Mgr Barbier de Montault, qui a publié et annoté un si grand
nombre d^inventaires de mobilier ecclésiastique. QuMl veuille bien
agréer ici Thommage de notre reconnaissance !)
(3) Pailles, tentures. Voir Ducange, à Pallium,
(3) Mouchoirs (TauteL Voir, au mot Facietergium, Ducange, qui
cite : a Duo pallia aurea et facisterculum aureum. Dalmaticae VIII,
tunicae subdiac XI, facistercula tria, n diaprés le cartulaire de
S. Vaast, d'Arras. Voir surtout ce que j'en ai dit dans la Reifue de
l'Art chrétien, en rendant compte de ta messe de Rohaultde Fleury.
(4) J*at parlé des aubes (Tor dan| l'inventaire de Monza.
Le fanon est le manipule. Voir Ducange, à Fano, où il cite entre autres
Pierre Abailard : « Nulla de serico sint ornamenta, prêter stolas et
fiinones. »
Je ne connais pas d*amicts d'or, mais seulement des amicts à or/rois
d*or. J'en ai parlé plusieurs fois. Voir Ducange, à Amictus.
(5) Ducange n'a pas tansilo, mais campsUis, qui signifie chemise.
Ces trois aubes sont donc en toile de chemise^ ce qui les distingue de
Valba aurea»
— 232 —
10. Parvi tezti argentei II (i).
11. Lectionarius argenteus (2).
Folio 263, recto.
12. Caput aureum cum corona (3).
(i) Textes, épistolier et évangéliaire, à couverture d*ârgent et de
petit format. Voir Ducange, à Textus.
(2) Argenteus, couverture d'argent au lectionnaire.
(3) Caput, chef renfermant la tête d'un saint. Corona ne signifie pas
seulement couronne, mais aussi nimbe. Voir Ducange, à Corona,
Guy-Coquille, en son Histoire du Nivernois (édition de lyoS, p. 3 16).
dit que tt révéquc Thedelgrinus impétra de Guido, évêque d'Auxerre,
le chef et partie du bras de saint Cyre, et le roy Rodolfe donna l'or dans
lequel ledit chef est enchâssé ». D*autre part, on lisait dans le marty-
rologe delà cathédrale de Nevers, au dire de Parmentier, que c'est le
roi Raoul qui a donné l'or dans lequel sont des reliques de saint Cyr,
qu'on porte en procession sous le nom de chef de saint Cyr ; mais,
observe notre scrupuleux archiviste, il est écrit sur la châsse qu'elle
a été fiaite aux dépens du chapitre. (Archives de Nevers, t. II,
p. 293.)
Il est i regretter que Parmentier, habituellement mieux inspiré,
n'ait pas ajouté à sa note rectificative le texte même de l'inscription
qu'il avait sous les yeux. Nous y aurions lu, sans doute, que le caput
aureum cum corona de l'antique trésor de Saint-Cyr avait été remplacé
par un autre chef, exécuté au quatorzième siècle pour le compte du
Chapitre, ainsi que nous l'apprend le curieux mémoire dont le
texte va faire l'objet du chapitre suivant.
Conservons donc au moins le souvenir du roi Raoui et de sa
générosité envers le patron de notre vieille cathédrale.
Plusieurs usages bien touchants relatifs au chef de saint Cyr étaient
signalés dans les Monita qui précèdent le Diurnale eccUsie Niver'
nensis de 1789 :
Quoties CAPUT S. Cyrici exponitur super altare, illud Pueri
albarum, officio absoîuto, deducunt ad Thesaurum cantando antiphonam
Innocbns.
Cette belle antienne, qu'avait conservée la liturgie nivernaise de
1728, tout «n abandonnant l'ancien office traditionnel, se retrouve
maintenant dans le propre du diocèse. Donc, les enfants d'aubes
chantaient en portant le chef de saint Cyr : Innocens Quirîcm et stue
— 233 —
i3. Crucem auream I (i).
macula, quia nescivit malum nec egit dolum in lingua sua : ideo non
movebitur in sœcula,
A la procession générale du dimanche des Rameaux, le trésorier
et le sacrîste , puis Tarchiprétre de Nevers et le curé de Saint-
Jean, dont la paroisse était sous le couvert de la cathédrale,
portaient alternativement, sur une civière, le chef de saint Cyr...
Dominica in Ramis... deferlur caput 5. Cyrici sub. tensam altem. a
D. Thesaurario et sacrista, archipresb. Nivern, et parocho S, Joannis.
(Diurnal, 1789.)
De même, le jour de TAscension, après tierce, fit processio solemnis
cmn cappis circa claustrum in qua defertur cafut S. CYsia a duobus
canonicis. Les échevins devaient assister à cette procession, comme à
celle du jour des Rameaux.
Enfin, le jour de la fête de saint Cyr et de sainte Julitte, patrons de
réglise cathédrale et de tout le diocèse, après tierce, processio solemnis
cum cappis circa claustrum in qua deferlur a duobus canonicis caput
S. Crtaci Jloribus coronatum.
A cette procession étaient tenus d*assister officiarii juslitiœ capituli
togis induti, (Diurnal, 1789.)
Lors de la peste de 1438, à une procession menée à Saint-Antoine-
les-Nevers, pour demander à Dieu de mettre la ^aix sur terre et de
faire cesser la mortalité, il fut porté, outre une grande chandelle de
cire contenant c tout le pourpris circuite 1 de la ville, « le chef
monsieur saint Cire et la chasse monsieur saint Jerosme. > (Archives
communales, mss. CC. 42.) Cette dernière châsse n^était pas à la
cathédrale, elle devait appartenir à Tabbaye Saint-Martin, où reposait
le corps du saint évêque de Nevers. Le chef de saint Jérôme fut encore
porté, en 1549, à une procession menée, par MM. du Chapitre, à Saint-
Victor de Nevers et autres lieux, afin de prier Dieu pour la santé de
Monseigneur.
(i) Le même Parmentier, dans son Histoire manuscrite des Mques
de Ne»ers {épiscopat de Tédalgrin), rapporte qu' « il est écrit dans le
Martyrologe^ au 18 avant les calendes de février, ou i5 janvier, que
le roi Raoul fit présent à la cathédrale d'une croix d*or, d'un texte
QU Ihfre des Evangiles, aussi en or, et quMl donna pareillement l'or
dans lequel est ench&ssé le chef de saint Cyr. » Cette croix d'or
n'aurait-elle pas été fondue avec l'ancien reliquaire du roi Raoul et ne
semble-t-tl pas que c'est d'elle qu'il s'agit dans l'article 7, § IV, de la
dépense du nouveau chef de saint Cyr : Item recepi de auro in cruce
reperto!.,.
T. III, 3* série. 3o
— 234 "■
14* Cassamauream (i).
i5. Philacteria XIV (2).
16. Calices argenteos III, cum pateniset unocalamo (3).
17. Scrlnium unutn cum coclea de argento (4}.
18. Turribulos argenteos III.
g IV.
DÉTAIL DES VASES SACRÉS ET DIVERS JOYAUX UTILISÉS
POUR LXEUVRE DU CHEF DE SAINT CYR.
Archives départementales de la Nièvre. Foods du chapitre de
Saint-Cyr.
Le précieux document dont nous donnons le texte, inédit
jusqu'à ce jour, a été traduit déjà par Mgr Crosnier dans sa
notice historique sur le culte de saint Cyr et sainte Julitte à
(i) Cassa, châsse. Voir Ducange. Se dit aussi du vase de la réserve,
ce qui est plus probable ici, à cause de la matière riche : < Cassa,
que pendet super magistrum al tare, in qua corpus Domini requiescit. »
(Spicileg, Fontanel.j
(2) Phylactères, voir Ducange, à Phylacterium; reliquaires pour des
parcelles de reliques.
(3) Calices à chalumeau. Voir Ducange, i Calamus, où il cite un
inventaire du Velay: « Calices argenteos auro que deauratos ses,
cum uno calamo argenteo. » Voir aussi Chalumeau^ dans le Glossaire
archéologique de Victor Gay.
(4) Scrinium, écrin, boîte. Ducange ne lui donne pas le sens, qu*îi
a certainement ici, de navette^ ce qui résulte de son rapprochement
avec les accessoires, turribulos et de la cuiller, coclea, dont elle est
munie. — Rappelons à ce sujet le si curieux ivoire latin, provenant
de la cathédrale de Nevers, aujourd'hui au musée de la ville, et dont
le Bulletin monumental de 1884, par la plume savante de Mgr Barbier
de Montault, a donné une si intéressante description. {Bulletin de la
Soc, Niv., t. XII, p. 323-33a.) L'auteur n'hésite pas i admettre que
cet ivoire a fait partie d'un petit coffret, très -probablement liturgique,
dans lequel on mettait rencens, et il faut avouer que le sujet reproduit
sur rivoire : PAdoration des Mages, convenait par&itement à cette
destination.
— 235 —
Nevers, pages 35-37, d'après une copie faite à la hâte que
nous lui avions communiquée, copie malheureusement
incomplète, ce qui explique quelques légères erreurs.
Notre collègue, M. deFlamare, archiviste du département^
a bien voulu coUationner ce texte et le compléter.
On peut donc, ainsi que Tobservait déjà Mgr Crosnier, se
faire une idée du reliquaire de saint Cyr : Cétait un buste
en vermeil représentant le saint Enfant et la tête était
couronnée d'un nimbe d'or orné de pierreries, car il paraît
difficile de donner une autre destination à celles dont il est
ici question.
Haec sunt illa que ego Guillelmus de ponte (i) habui a
viris venerabilibus et discretis dominis decano et capitulo
Nivernensibus pro Capite beati Cirici perfaciendo.
1* Primo, unum calicem argenti cum pathena pondcris
trium marcharum cum dimidia.
2* Item, unam magnam cassant argenti ponderis decem
marcharum cum tribus unciis.
3^ Item, unum parvum scrinium argenti ponderis unius
marche cum VU unciis.
Summa predicti argenti XV marche VI unciis, quod
quidem argentum fuit mundatum et purificatum antequam
magistri possent operari de illo, quo purificato et mundato
devenit ad XV marchas, quas XV marchas habuerunt
magistri predicti et illas receperunt pro dicto capite.
(i) Nous n^avons pu retrouver aucune mention de Guillaume du
Pont ; mais tes archives communales de Nevers citent fréquemment,
au quinzième siècle, Philippe Dupont, qui était échevin en 1460 et
1461, puis fut receveur de la ville pendant six ans, de 1466 à 1471.
En 1468, Philippe Dupont et Régna ud de La Forest vont deux fois
à Moulins-en- Bourbonnais, voir et rapporter par écrit, comme les
neuf preux et les neuf preuses étaient en ordre sur la tapisserie de
Mgr de Bourbon. Cette même année, i rentrée à Nevers de Marie
d^Albret, Philippe Dupont reçoit 40 sols pour une fontaine faite au
marché des Oisons, laquelle • gettoit ypocras, vin, eau et lait. »
— 236 —
4" Item, recepi a dicto capitulo unum vitrum argenti
deauratum ponderis duarum marcharum cum dimidia uncia
quod fuit venditum VI libras parisiensium.
5» Item, recepi VI ciphos argenti çonitns V marcharum,
VII unciarum et XV stellîngoram ; quœlibet marcha fuit
venditapretio Xni solidorum, valentes XV libras, XVI sol-
des, II II denarios.
Item, recepi de minuto argento III uncias XV sterlingtis
per manus domini Johannis de Molinis (i) que vendite
fuerunt XXII solidos, VI denarios. Summa argenti vendit!
XXII libras, XVIII solidos, X denarios.
6o Item, recepi unum calicem auri cum pathena ponderis
unius marche cum tribus unciis et fuit quelibet marcha veu-
dita XXXV libras parisiensium valentes XLIX libras,
XIII solidos parisiensium.
7* Item, recepi de auro in cruce reperto^ non tamen
mundato nec tanti valoris quanti aurum calicis III marchas
cum tribus unciis XII sterlingis, quo purificato et mundato
decidit de duabus unciis, et sic devenit ad III marchas,
unam unciam et X sterlingos et fuit quelibet marcha vendita
XXII libras parisiensium valentes LXX libras, VIII solidos
parisiensium. Summa totius auri venditi VI libras, XII de-
narios.
Sequuntur missiones et expense.
(i) Joannes de Molinis, qualifié de prêtre et Tun des sept-prêtres de
l'église de Nevers, signe comme témoin au chapitre général du mois
de mark i34i, où fut porté le statut contra adversarios Eccîesiœ.
{Livre noir du chapitre de Nevers, folio 49.)
Jean de Moulins, chanoine de Nevers, archidiacre de Decize, se ren-
contre fréquemment aux archives communales comme garde du scel
de la prévôté de Nevers, de 1374 à i384.
Le terrier du prieuré de Commagny, de Tancicn diocèse d'Âutun,
mentionne aussi, en i335, Discretus vir Dominas Johannes de Molinis
curator eccîesiœ parochialis de Commaigny. (Note communiquée par
M. Victor Gueneau.)
— 237 —
Sucntna tam auri quam argenti VII" II libras, XIX so-
lidos, X denarios.
8» Primo, pro XXXV marchis argenti emptis et traditis
dictis magistrîs, qualibet marcha LU II solidos valantes
IIII" XIV [uncias] et XIX sterlin^ios.
9<» Item, tradidi pro lapidibus mundandis II II libras,
VIII solidos.
10® Item, pro dimidia marcha auri puri pro corona
facienda XVI IF libras, X solidos.
1 1** Item, magistris pro parte salarii XX libras.
Surama dictarum misiarum V^^ XVII libras, VIII solidos.
Restât quod debeo CXII solidos.
12** Item, recepi per manum domini Johannis de Molinis
V marchas et très uncias auri non mundati neque purificatiy
quo purificato et mundato una cum quibusdam anulis aureis
qoos habebam, idemaurum dictis anulis devenit ad V^ mar-
chas, V uncias et XV stellingos, et fuit vendita marcha dicti
auri precio XXVIII librarum et II solidorum parisiensium,
et sic valuit totum aurum predictum VIII libras XVII soli-
dos, V denarios parisiensium, de qua summa emi X uncias
auri puri pro dorando jocale pretio XLV librarum pari-
siensium.
i3** Item emi X uncias alterius auri non ita puri pro
corona facienda, pretio XXXVI librarum V solidorum pari-
siensium.
i4<> Item tradidi pro mundandis et reparandis lapidibus
quas dictus dominus Johannes michi tradidit LII solidos
parisiensium.
1 5® Item magistrîs facientibus dictum jocale LX libras
parisiensium. Item tradidi predicto domino Johanni de
Molinis. C. solidos parisiensium pro expensis suis.
Summa predictarum misiarum VII" VIII libras, XVII so-
lidos, denarium.
Et sic restât; deductione facta, quod debeo XII libras
V denarios parisiensium. Et sic omnibus computatis et
— 238 -
deductts ego debui XVII libras, XI solidos quas tradidi
domino Johannide Molinis, deductis et computatis LVII so-
lidisquos tradidi pro domino Theobaldo de Fontanello (i).
iV.
SAINTES RELIQUES ET OBJETS DIVERS ENTRÉS DANS LE
TRÉSOR DE SAINT-CYR DEPUIS LE TREIZIÈME SIÈCLE.
I. L'évéque Guillaume de Saint- Lazare, mort en odeur de
sainteté en 1221, avait donné à la cathédrale, -— diaprés le
Nécrologe et le Martyrologe que cite Parmentier, — une
grande statue de la sainte Vierge en argent : Imaginem
magnam Béate Marie argenteam ; une partie du chef de
saint Mathieu et de celui de saint Victor, capita B. Mathei
etB. Victoris; une grande châsse d^argent, capsam magnam
argenteam; quatre bassins et un encensoir aussi d'argent»
IV pelyes argenteos, Thuribulum argenteum.
Le nécrologe de Téglise de Chartres faisait mention que
Pévéque de Nevers, Gervais de Châteauneuf , ancien chanoine
de Chartres, mort en 1 222 (2}, avait donné à cette église le chef
de saint Mathieu , apôtre et évangéliste , apporté de Cons»
tantinople. On croit, ajoute Parmentier, qui rapporte aussi
ce fait dans son Histoire manuscrite des évêques , que ce
pourrait bien être le même dont Guillaume de Saint-Lazare
avait fait présent à Téglise de Nevers.
Il nous semble qu^il ne s'agit dans les deux cas que de
fragments du chef de saint Mathieu, et que les deux églises
pouvaient se glorifier de posséder cette sainte relique.
Et, en effet, outre le chef de saint Cyr, toujours porté aux
{i) Theobaldus de Fontenella, chanoine de Nevers, est désigné dans
le testament du chanoine Reginaldus de Liciis, en i336, pour Tun de
ses exécuteurs testamentaires. (Archives du département.)
(a) Le dernier février, d'après ce nécrologe, et le p' décembre,
d'après le mart3rrologe de Nevers.
— 239 ""
proc^sions générales pendant le quinzième siècle, les comptes
de la ville signalent les chefs de saint Jacques et de saint
Mathieu (i).
A la procession générale faite en 1483^ en l'honneur de
Dieu et de saint Jacques, furent portés « les chiefs de
Mgr saint Cire, saint Jacques, saint Mathieu, » en priant
pour Pindisposition du temps et des biens de la terre.
(Archives communales de Nevers, CC. 72.)
L'année suivante, 1484» à la procession générale faite
€ pour la disposicion du temps, afin de pouvoir cueillir et
levers les biens qui sont sur terre >, furent aussi portés trois
« beaulx reliquaires, à savoir les chefs très-glorieux et très-
saints de Dieu, Mgr saint Cyr, Mgr saint Jacques et Mgr
saint Mathieu, et, à Tendroit d'un chacun reliquaire,
étaient ponées deux torches garnies des armes de la ville ,
ainsi qu'il est accoustumé faire. 9 (Arch. com. de Nevers,
CC. 73.)
2. L'évéque Gervais de Châteauneuf avait aussi donné à
l'église Saint-Cyr un saphir enchâssé en or. (Parmentier,
Histoire manuscrite des épêques.)
3. L'évéque Raoul de Beauvais , décédé en 1239, avait
fait présent à son église d'une croix d'argent. (Parmentier,
Histoire manuscrite des épêques.)
4. Le compte de Guillaume ^eJBo^cAefo, chanoine boursier
du chapitre en 1293 (2} mentionne au chapitre des
dépenses communes : Expensœ communes : Tachât d^une
nouvelle pixide d'ivoire : Pro pisside ebumea nova.
XU den.,
(1) Parmi les reliques tirées du trésor de Saint-Cyr en 1793 et cer-
tifiées par le savant abbé AUoury, alors chanoine de Nevers, se
trouvaient celles de saint Jean-Baptiste, de saint Jacques le Majeur, de
saint Mathieu, de saint Cyr, de sainte Julitte, de sainte Euphémie.
La note qui l'atteste est conservée dans les authentiques de Pévéché.
(2) Archives départementales de la Nièvre. Fonds du chapitre de
Saint-Cyr.
— 240 --
Puis Tachât d'étoffes de toile colorée pour les coussins sur
lesquels on déposait le missel. Les anciens inventaires des
paroisses citent fréquemment les cuissinets propres à mettre
le livre messel, La rubrique du missel nivernais de 1728
rappelait encore cet ancien usage : In missa majori, ablutione
sumpta^ Diaconus transfert librum cum pulvinari v€l
legeolo ad cornu Epistolcé^
Et encore les signets de soie si nécessaires, surtout à cette
époque , pour les manuscrits où, les renvois étaient très-
fréquents :
Pro tela empta ad culcitras reparandas, Xsolid,,Xdena*
rios,
Pro tela colorata, XXXIX solides,
Profactione earumdem, X solid,
Sub cingulis novis, laqueis siricis et signis ad libros,
XXX solid.
Pro una virga ferreâ circa magnum altare, III solid.
Pro organis reparandis, XX solid.
Ces deux derniers articles, concernant le grand autel et la
réparation des orgues de la cathédrale, méritent une atten-
tion toute particulière.
5. Le procès-verbal des reliques de saint Vincent de
Magny, remontant à la fin du treizième siècle , faisait men-
tion qu'un os d'un des bras de ce saint prêtre était alors
renfermé dans un reliquaire d* argent tout garni de pier--
reries. ( Parmentier , Histoire manuscrite des évêques. —
Episcopat d'Hériman.)
6. Decette époque paraît aussi dater la précieuse relique de
saint Laurent, diacre et martyr» aujourd'hui conservée à la
cathédrale et qui semble provenir de Pancienne collégiale de
Varzy. Deux dents sont enchâssées dans une mâchoire de
bois toute recouverte de lames d'argent et retenues par de
petites bandes aussi d^argent, de telle manière qu^on ne puisse
les enlever.
— 241 —
Une large bande d'argent doré, formamdouble bordure du
reliquaire, offre en belles majuscules indifféremment gothi-
ques ou romaines du treizième siècle l'inscription suivante
deux fois répétée : dens beati lâvrench.
Au seizième siècle, on a eu la malencontreuse idée d'en*
chfisser au milieu même de l'inscription un gros cabochon
vitré qui contient, sur un billet de parchemin ces deux mots :
Beati Laurantii.
7. L'ancien candélabre de la cathédrale était ainsi men-
tionné dans la fondation de l'anniversaire de Tévéque
Fromond, qui se célébrait en Tabbaye de Saint-Martin :
Huic anniversario CANDBLABRUM^efr^/ accendiad vesperas
vigiliis ; sed ad missam non débet accendi quia processio
vadîtad S. Martinumpro dicta missa celebranda. (Histoire
manuscrite des évêques de Nevers, de Parmentier.)
On voit par les comptes de la ville qu'il servait également
aux obsèques des princes. £n i4o3> il est donné 20 sols au
sacristain de Saint-Cyr pour son candélabre qu*il a laissé
ardoir pendant les obsèques de feu Mgr de Bourgogne.
(Arch. com., CC. 12.)
Le Livre noir du chapitre, parmi les émoluments du
sacriste cite le droit du candélabre :
Item dictus sacrista super anniversariis per arnium ,
percipit circa duodecim libras turonenses pro candelabro
suo {i),
(i) Ce candélabre était-il semblable à celui de la cathédrale de
Châlons , décrit en ces termes dans un inventaire du quinzième
siècle ?
Item in tnedio chori super candelahrum sunt ires ciphi argentei, in
quibus ponuntur cerei continue ardentes ante majus altare, habentes
cuspides de argento, etfundus unus argenteus, aliorum autem duorum
fitndi deferro albo sunt.
Au milieu du chœur il y avait un candélabre à trois bobèches
d'argent, dont les pointes aussi d'argent maintenaient des cierges qui
brûlaient perpétuellement devant le mattre-autel. Le fond de Tune
T. III , 3* série. 3i
— 242 —
8. Le 10 du mois de septembre 1404 (et non du mois
de juillet T407, comme le dit par erreur Parmentier),
Philippe de Moulins, évéque de Noyon , fît don à Péglise de
Nevers d*une couronne dorée en laquelle était enchâssée une
épine de la couronne de Notre-Seigneur; plus^ d'une grande
croix dorée.
Diaprés le procès-rerbal de la remise de Tinsigne relique,
in drapello, erat quoddam vasculum de cristallo in quo erat
dicta spina, quod quidem vas de cristallo cum spina in dicta
coronafuit positum iocosuo.
A la suite d^une copie de ce procès-verbal, faite au com-
mencement de ce siècle , sur l'original actuellement conservé
à lëvêché, Tabbé Morizot ajoutait que ladite couronne
fut retirée du trésor de Téglise de Nevers le 9 février 1793.
Nous la verrons en effet mentionnée plus loin dans l'inven-
taire de 1791, n® 23. On croyait la posséder encore en i832,
dans un tube de cristal enveloppé d*étoj[fes, avec divers
papiers établissant son authenticité ; mais en ouvrant , avec
toutes les précautions voulues, le précieux paquet, pour trans-
férer la sainte épine dans une croix d*ébène garni d*ivoire
qu'avait fait préparer le vénérable M. Imberl, archiprêtre de
la cathédrale, on s'aperçut avec douleur que le tube était
vide, sans quMl fût possible de découvrir celui qui s^étaît
rendu coupable de ce méfait. [Hagiologie nivemaise, de
Mgr Crosnier, p. 379-572.)
Le jour de la susception de la sainte couronne d'épines,
II août, ad totum officium, marque le diurnal de 1789,
exponitur S, Corona spinea super altare inter duos cereos
ardentes.
9. Pierre de Norry, chevalier, seigneur dudit Norry, avait
fait don au chapitre de Saint-Cyr, le 8 février 141 5, des
des bobèches était d*argent, mais celui des deux autres n^était que de
fer-blanc. — > Note de M. Darcel. (Inventaire de la cathédrale de
ChâIons-8ur-Marne, 1410. — Comité des travaux historiques, 1886,
p. iSg-iSS.)
— 243 —
draps qui servent à entourer V église les jours de procession ;
plus d'un denier tournois pour leur entretien. (Archives
départementales de la Nièvre. — Fonds de la Chambre des
comptes.)
10. Par son testament du 27 avril 1445, Jean Pomereu le
jeune, prêtre, chanoine de Nevers et curé de Sardolles,
léguait à la fabrique , ^iitrice Nivernensi, unam taxeam
argent! quant emi a domino Johanne Charrier ^ aut sexa-
ginta soiidos turonenses, semeî; pour Tœuvre de sa tombe,
infavorem tumbe mee et quorumdam aliorum ( i). .. .
11. De même, le 8 mai 1488, un autre chanoine de la
cathédrale, Henri de Saxe [Henricus de Saxonia alias Wil^
dembroch), licencié en médecine , léguait au chapitre, ad
opus thesauri, pour finir le grand autel et pour sa décoration,
duos paces argenteas deauratas, cum imaginibus crucijixi
et béate Marie Virginis et beati Johannis Baptiste argen^
teas et deauratas predictis crucibus affixas, appretiatis ad
summam quinquaginta librarum turonensium. Item, ad
honorifice incapsandum brachium sancti Jacobi Majoris in
dicta ecclesia existentis centum scuta auri.
(Archives départementales de la Nièvre, titres de familles.)
1 2. Michel Cotignon mentionne souvent dans sonHistoire
des évêques de Nevers le pupitre de cuivre des images de
saint Pierre et saint Paul, au chœur de la cathédrale.
Cest près de ce pupitre, au côté droit, que fut enterré, en
1 539 ou 1540, révêque Jacques d'Albret.
L'ancien martyrologe que cite Parmentier notait qu^Imbert
(i) Le même chanoine avait légué aussi à chacun de ses neveux,
6Is de François Mige et de Jehanne, qui fut sa soeur» une de ses tasses
unam taxearum mearum , et trois autres tasses à sa nièce Philippe,
fille de son frère Etienne Pomereu, pour Taider à son mariage, alias
meas très tasseas quas volo custodiri per nepotem meum Johannem
Pinauldi donec uxoretur, nec alteri tradi. (Archives départementales
de la Nièvre. Fonds du Chapitre.)
- 244 —
de La Platière, prédécesseur de Jacques d'Albret» fut inhumé
à la cathédrale, in medio chori ante pedes apostolorum.
Dans la relation latine des obsèques de Mgr Sorbîn,
en 1606, Michel Cotignon ajoute que les chantres se tenaient
au pupitre, devant l'aigle de cuivre, — et cantabant cantores
inpulpitro, seu suggesto prope et ante aquilam cupream ( r ).
(Relation manuscrite à la suite du Livre noir du
chapitre de la cathédrale. )
Le même auteur, dans sa relation de la première entrée
de Mgr Eustache du Lys, en. 1606, raconte aussi que
révéque, arrivé dans le chœur, dut s'arrêter j^rope imagines
cupreas apostolorum Pétri et Pauli, Là, Tarchidiacre
Paulet lui mit en main la corde d'une petite cloche parvœ
campanœ quœ est supra testitudinem dicti chori, disant en
même temps ces paroles par lesquelles il le mettait en posses-
sion du gouvernement de son église : Accipe regimen hujus
ecclesiœ per ministerium nostrum.
i3. Marie d'Albret avait donné, en 1540, les huit pièces
de tapisserie, représentant toute la légende du martyre de
saint Cyr et de sainte Julitte, qui garnissaient le chœur> au*
dessus des stalles anciennes. On trouve au second registre de
Besacier, tolio 162, que le marché fait en i5?2 pour peindre
les toiles qui devaient servir de modèle était de 40 sous par
aune. (Livre manuscrit du chanoine Parent, au 7 février,
sur les anciennes fondations du chapitre.)
Mgr Crosnîer, dans sa Monographie de la Cathédrale, a
consacré un chapitre à la description de ces tapisseries et
en a reproduit deux magnifiques fragments, dont une partie
est conservée au musée de la ville installé dans le palais
Ducal. On y voit le jeune Cyr au moment 011 le tyran c le
(i) L'aigle (pour désigner le lutrin) est ainsi indiqué dans les
rubriques du missel nivernais de 1728 : /m missa majori, subdia^
cortus». . vadit pc lotus sinistrum ad Aquilam in Feriis ac Festis
semiduplicibus et simplicibus ; aliis diebus ad A mbonem.
foict traverser du hault jusques en bas de trois grande. clous
esgus, puis cruellement le cier par le corps. »
14» En 1562, le corps de ville accepte Toffre que firent
MM. du Chapitre de vendre les Joyaulxet trésors de leur
église pour subvenir aux frais de la défense de la ville contre
les huguenots. On prit aussi les benoistiers de Saint-Cyr et
des autres églises pour faire des canons. (Notes manuscrites
de Tabbé de Forestier. Registre des délibérations de l'hôtel
de ville de Ne vers.)
15. En 1564, à la mort de Jacques de Clèves^ duc de
Nevers, inhumé à la cathédrale, dans le caveau, sous la cha-
pelle de Saint-Jacques, à côté du chœur, on fit son inventaire.
Ses joyaux et pierreries furent déposés dans le trésor de
Saint-Cyr par les soins de M. Rapine de Sainte-Marie.
(Notes manuscrites de l'abbé de Forestier.)
16. L'évéque Gilles Spifame, mort le 5 avril 1 578, avait
fait présent à son église cathédrale d'un riche ornement et
de belles tapisseries. (Parmentier, Histoire manuscrite des
évêques.)
17. Par testament du 3o mars 1580, dame Françoise du
Verne, veuve de Jehan de Fontenay, donne et lègue à
Péglise de Saint-Cyr une masse d'argent, faite pour un
bedeau, avec le bâton couvert de velours ayant quatre
pommes d'argent et semée de /leurs de lys, avec l'écusson
des armes de Fontenay, pour être icelle masse employée au
service divin d'icelle église et en processions...
Item, donne à l'église parochiale Saint-Jean dudit Nevers
(dans la cathédrale) , 3 écus et i tiers d'écu pour un tapis
d autel d'icelle église et autres ornements auxquels elle veut
être mis ses armes.
18. Le II mai 1617^ très-haute et très-illustre princesse
M^^ Catherine de Lorraine, duchesse de Nivernois et de
Rethelois, épouse de très -haut et très- illustre prince
— 246 —
Mgr Charles de Gonzague de Clëves..., pour le zèle et
affection qu'elle a en Tamour de Dieu et en particulier en
rhonneur de la vierge Marie, sa mère, fonde en Péglise
cathédrale de Nevers , en la chapelle vulgairement appelée la
chapdlQ de Notre-Dame de bonne nouvelle {x), Tentretien
d*huile et mèche d'une lampe d^argent qu'elle a donnée à
ladite église, « pour arder et brusier jour et nuit sans
discontinuation en ladicte chapelle au - devant l'image
Nostre-Dame, » moyennant la somme de 37 livres 10 sols
tournois de rente annuelle , pour laquelle a été payée aux
vénérables doyen , chanoines et chapitre la somme de
600 livres. (Archives départementales de la Nièvre. Fonds
du chapitre de Saint-Cyr.)
19. A cette époque (première moitié du dix-septième
siècle) , il convient d^attribuer deux reliquaires en forme de
pyramides , élégamment construits en bois noir, avec
armatures en cuivre doré, et divers ornements : vase sur le
sommet, têtes d'anges aux angles et, sur les trois faces
vitrées, de gracieux contours et des palmes enlacées dans des
couronnes de roses , comme pour indiquer que les reliques
qu'ils renferment sont toutes des martyrs. Nous y relevons,
en effet, les noms des saints Vincentius, Mansuetus, For-
tunatus, de Sancto Lucio, Vitalis, Agapitus, Generosus,
Agricola , Deodatus , Constantius , Primus , Benignus ,
Victor, Crescentius , Benedictus, Formosus, etc.
Mais d'où provenaient ces reliquaires , qui semblent offrir
tous les caractères d'authenticité ? Nous l'ignorons !
Les vieillards se rappellent les avoir toujours vus exposés
à la cathédrale dans la chapelle de Sainte-Julitte d'abord, où
se trouvait l'autel des reliques dont nous parlerons bientôt
{n^ 24), puis dans la chapelle absidale actuellement désignée
(i) Cest la deuxième chapelle après la tour, où Pon remarque un
curieux rétable de pierre malheureusement mutilé. (Voir notre
Mémoire sur les autels et chapelles de la cathédrale , p. 32*36 , et
Bulletin de la Société nivernaise, H* série, t. V.)
- 247 —
sous le titre de Saint- Lazare, sur le petit autel de bois
sculpté qui y fut placé durant Tépiscopat de Mgr Dufétre.
Il nous semble très-probable que ces reliquaires ont dû
appartenir à une des nombreuses communautés de Ne^ers »
et certains indices nous porteraient à désigner en particulier
Téglise de l'ancienne Visitation de Nevers, rue Saint-
Martin.
20. L'évêque Eustache Dulys, mort le 17 juin 1643,
avait donné à la cathédrale un riche ornement et deux
chandeliers d^argent servant à sa chapelle. (Parmentier,
Histoire manuscrite des évêques de Nevers.)
21. Le successeur de Mgr Dulys, Eustache de Chéry,
mort le lo novembre 1669, avait légué au chapitre, par son
testament du i3 juin 1664, c sa chapelle d^argent de
vermeil doré, avec ses deux plus belles chasubles de drap
d'or, frise et argent passé, ensemble sa chappe, outre les
ornements que ledit seigneur testateur a fait faire, qui sont
de brocart d^or pour ladite église..., de plus sa crosse
d^argent pour servir à ses successeurs évêques quand ils en
auront besoin. » (Minutes des notaires Gabillon et Huault,
notaires du roi en son Châtelet de Paris.)
22. Le doyen du chapitre, Jean-Henri Bogne, mort le
6 février 1693, « dont la charité était inépuisable», avatit fait
présent à la cathédrale de six grands chandeliers et trois
belles lampes d^ argent d'un travail exquis, pesant ensemble
171 marcs; — de la custode de cuivre doré moulu dans
laquelle le Saint-Sacrement est suspendu au-dessus du maître-
autel ; — de la balustrade qui entourait jadis le sanctuaire ;
— des tapis qui garnissaient le lambris au-dessus des
anciennes stalles; — des cinq pièces de tapisserie qui
garnissaient le rond-point du chœur, lesquelles représentent
le martyre et la levée des corps des saints Gervais et Protais
(anciens patrons de la cathédrale); — enfin du magnifique
drap mortuaire dont on se sert aux grands anniversaires et
— 248 —
aux obsèques des chandines. » {Etat des anniversaires,
messes basses et autres fondations qui s^acquittent dans
Véglise de Nevers, auquel on a joint une notice abrégée
des fonds qui ont été donnés pour chaque fondation et de
remploi qui en a été fait, rédigé par M. Chaillot, chanoine
et receveur de ladite église , suivi d'un Mémoire manuscrit
de M. l'abbé Alloury sur V origine des chanoines de Saint-
Gildard, dans l'église deNevers) (i).
Lorsqu^en 1760 le subdélégué de rintendant de la
province de Nivernais fit au chapitre une réquisition au
sujet de l'argenterie de la cathédrale, il lui fut répondu:
10 que d'après les lettres du roi, il ne semblait pas que les
intentions de Sa Majesté fussent qu^on retranchât rien de ce
qui était nécessaire à la décence du culte divin : le peu
d'argenterie qui se trouve dans l'église étant à peine
suffisant pour la décoration la plus commune...; 2® que le
chapitre ne s'est jamais cru entièrement le maître de disposer
de l'argenterie qui se conserve dans son église; il la tient
toute de la libéralité de M.Bogne, son doyen, mort dans
ces derniers temps, qui la lui a donnée, sous défense expresse
et menaçante de l'aliéner.
(Dernier registre des conclusions capitulaires du chapitre
de Saint-Cyr, aux archives de la préfecture.)
(i) Ce manuscrit, si important pour Phistoire de la cathédrale et du
chapitre de Ne vers, forme un grand registre in-folio, actuellement
entre les mains de M. l'abbé Imbert, curé-doyen de Moulins-
Engilbert.
Le scribe a signé, et il en avait bien le droit: Scripsit Antonita
MoreaUy fjTj, Nous connaissons, en effet, de ce copiste, véritable
bénédictin , un grand nombre de livres liturgiques à l'usage de la
cathédrale, un entre autres sur parchemin, orné de très-jolies vignettes
et dédié à Mgr de Séguiran, avec ce titre: Collectio capitulorum, lectio-
num et orationum quce dicuntur in officiis, processionibus et Stationibus
Festorum Annualium et Solemnium Majorum, juxta ritum insignis
eccUsiée Nivernensis, illustrissimi ac reverendissimi DD, Pétri de
Seguiran Episcopi Nivernensis de consensu facta, eidem dicata ab
obseq' et humil* servo Joanne Steph. Goussot , presbytero , canonico
Nivemensi.
— H9 —
23. Mgr Gabriel d'Osmont^ consacré pour Tévêché de
Commiages^ par Mgr Tinseau, dans la cathédrale^ le
!•■• avril 1764, fit présent au chapitre, pour le trésor, de la
chasuble précieuse et magnifique dont il était orné à la
cérémonie de son sacre, ainsi que de l'étole, du manipule et
de la ceinture , pourquoi Messieurs l'envoyèrent remercier
par deux commissaires. (Même registre des conclusions
capitulaires du chapitre de Téglise de Nevers. )
24. Le livre des fondations du chapitre rédigé par
M. Parent, et dont il est souvent parlé dans le grand
registre des anniversaires cité au n** 22 , rapportait que
M. Chamfroy fit le chapitre son légataire universel et que
partie de la succession servit, suivant son intention, à paver
à neuf le milieu de la nef , que les ailes et le contour ont été
pavés aux frais du chapitre, qui a aussi employé à cet
ouvrage le prix de Tor et de l'argent sortis d^un ornement
précieux appelé V ornement cTAuche, qu'on fit brûler, parce
qu^il ne pouvait plus servir (i).
25. Citons encore, avec le Livre noir du chapitre, à
propos des Onera sacristœ incumbentia, une espèce de
petite chaufferette pour les prêtres qui célèbrent la messe
durant les grands froids: Item, tempore frigido , tenetur
ministrare carbones in una parva patella pro illis qui
célébrant missas.
Le sacriste devait aussi , deux fois dans l'année, bis in anno,
poser des nattes dans le chœur, ministrare nattas in choro.
(i) n s^agit ici, sans nul doute, d^un ornement donné à la cathédrale
par messire Léonard Destrappes, archevêque d'Auch, né à Nevers,
et baptisé en Téglise de Saint-Arigle, le 3 octobre i558. Le pieux
prélat aimait à revoir sa ville natale où les familles enviaient
rhonneur de l'avoir pour parrain. ïkLTi& nos Archives paroissiales,
nous l'avons ainsi maintes fois rencontré en ibgS, à Saint-Martin, à
Saint- Victor, à Saint-Arigle. « En 1602, il avait fait don à la chapelle
des Destrappes des ornements noirs pour les services qui s'y font.
(Archives communales de Nevers, série GG. 10.}
T. XII, 3* série. 32
— 250 —
26. Avant de terminer ce paragraphe, oti sont énumérées
les principales reliques du trésor de Saînt-Cyr, il convient
de mentionner l'ancien Altare reliquiarum existant bien
avant le quatorzième siècle dans l'abside de Sainte-Julitte,
au-dessus de la crypte.
L'autel, reconstruit au dix-huitième siècle, tout en étant
plus habituellement désigné sous le titre de Saint -Cyr et
Sainte-Julitte, avait cependant conservé la même attribution.
Cétait toujours Tautel des reliques : elles étaient exposées au
milieu du rétable, dans une grande châsse vitrée que Ton
ouvrait à certaines fêtes. Ainsi, le 27 octobre, jour où
l'église de Nevers célébrait la fête de la Susception du bras
de Saint-Cyr, à laquelle était unie celle de la Vénération des
saintes reliques, le bras de saint Cyr était exposé entre deux
cierges allumés et Ton ouvrait la grande châsse.
Ad totum offlcium exponitur brachium Sancti Cyrici
super altare inter duos cereos ardentes et aperitur capsa
SS. Reliquiarum ad altare S. Cyrici sub organo cum
duobus cereis ardentibus. {Diurnale, EccL Nivern.^ pro
anno 178g,)
Depuis cette époque, la cop^a a été pillée en 1793, puis
on y avait réuni les fragments de reliques échappées à la
ruine. Cet autel, démoli à son tour il y a une vingtaine
d'années, fut remplacé par un autre plus en harmonie,
disait-on, avec le style roman; mais, reconnu insuffisant par
les architectes diocésains, il fut enlevé et remplacé par un
autel provisoire qui bientôt, espérons-le, fera place à un
nouvel autel des reliques où pourront , comme aux siècles
anciens, dans une châsse vitrée, être conservés les précieux
débris des saintes reliques de Tantique trésor de Saint-
Cyr (I).
(i) Voir le mémoire déjà cité sur les chapelles de la cathédrale
de Nevers, p. i3-i8, chapelle de Saint-Cyr et Sainte-Julitte, sous
l'orgue.
— 25l —
27. Enfin> il est certain qu^au musée de Ne vers, comme
dans tous les musées de province, ont dû être recueillis
quantité d'objets précieux provenant du trésor de la cathé-
drale et des différentes églises de Nevers. Et nous ne saurions
vraiment nous en plaindre, quand ces objets ont ainsi
échappé à la ruine ! Déjà nous avons signalé l'existence,
dans le musée de la ville , d'un fragment des tapisseries
de Saint-Cyr et un magnifique ivoire latin provenant
sans doute d'un coffret liturgique ayant appartenu à la
cathédrale. Mais ces belles croix de procession enrichies
d'émaux, ces encensoirs des quinzième et seizième siècles ,
suspendus contre les parois , ces splendidcs plaques d'émail
destinées à recouvrir des évangéiiaires , ce grand peigne en
buis présentant, dans ses découpures, une large croix
indiquant son usage liturgique pour la tonsure des clercs, et
quantité de bénitiers et autres objets religieux, qui nous
dira d'où ils proviennent !
Un inventaire du musée désigne seulement, comme venant
de la sacristie de Saint-Cyr : un beau cadre avec un Christ en
ivoire — et deux bénitiers en bois sculpté et doré , dont
le plus curieux offre une représentation de la sainte Vierge
et de l'Enfant-Jésus dans une couronne soutenue par deux
anges (i).
§ VI.
MANUSCRITS LITURGIQUES DU CHAPITRE DE SAINT-CYR
AVANT LA RÉVOLUTION.
Quelques années avant la Révolution, le 25 octobre 1765,
Jean-Charles-Sébastien-Bernard de Cléry de Balai nvilliers,
chanoine-diacre de la cathédrale, avait fait don au chapitre
de 160 volumes, pour aider à la formation d'une bibliothèque
(i) Commuaication de M. Bouveault, conservateur du musée
céramique.
— 252 —
capitulaire dont il avait été nommé premier bibliothécaire
avec MM. Rousseau et Alloury, aussi chanoines, pour
adjoints (i).
L^abbé de Cléry avait donné aussi beaucoup de tableaux
et, en reconnaissance de ces bienfaits. Messieurs avaient
fait ériger une belle épitaphe en marbre noir au pilier de
la tour des cloches, et ordonné qu^il serait célébré à perpé-
tuité, pour le repos de son âme, une messe basse au jour anni-
versaire de son décès.
Les livres du chapitre avec ceux des diverses commu-
nautés religieuses de Nevers forment aujourd'hui le tonds
de la bibliothèque de la ville ; nous n'avons pas autrement
à nous en occuper ici; mais il convient de rappeler au
moins le souvenir de quelques-uns des anciens manuscrits
liturgiques', véritables œuvres d'art, autrefois si nombreux
dans notre cathédrale, in armario sancti Cirici, et qui,
non moins que les objets précédemment signalés, faisaient
Tornement du trésor.
Hélas ! dès le dix-huitième siècle ils avaient commencé à
être dispersés dans les bibliothèques étrangères.
L'abbé Troufflaud, dans ses cahiers de notes manuscrites,
qu'il rédigeait à la veille de la Révolution, dit quelque part,
avec une certaine aigreur, exagérée sans doute, à propos de
recherches qu'il faisait sur les anciens chanoines obituaires
de Saint-Cyr : t Les archives du chapitre doivent en parler,
s^ il reste encore quelques lambeaux des chartes et autres
manuscrits vendus, vers 1740, aux Anglais par le cha-
pitre. •
Et en effet, dès 1724, lord Harley achetait en France, chez
un libraire nommé Noël, deux manuscrits du dixième siècle,
(1) Cette bibliothèque avait été établie au premier étage de la
maison capitulaire, située place de PEvéché, où sont aujourd'hui les
classes des sœurs de la Sainte^Famille. Au second étage était la
chambre servant d^auditoire; le grenier servait au dépôt des dîmes,
et le rez-de-chaussée était occupé, en 1790, par M. Languinier,
receveur des revenus du chapitre.
— 253 —
paginés séparément, mais ne formant qu'un seul volume,
un sacramentaire à l'usage de Téglise de Nevers.
Le noble lord avait recueilli bien d^autres manuscrits
encore. A sa mort, le comité du musée de Londres en fit
Tacquisition, et ils formèrent le fonds de la célèbre Biblio^
theca Harleiana au British Muséum^ où les deux cahiers
du sacramentaire nivernais sont classés sous les n<>* 2991
et 2992 (i).
On se souvient que V Évangéliaire nivernais, auquel nous
devons les premiers éléments de ce travail , fait aussi partie
du fonds harléicn et porte le n** 2790.
Un autre volume d'origine nivernaise, signalé également
par M. Léopold Delisle dans la Bibliothèque de l'école des
chartes (2), appartient au même fonds.
Voici en quels termes le savant directeur de la bibliothèque
nationale nous le fait connaître :
c Traités de comput et morceaux divers. Fonds harléien ,
n^ 3ogi. — Ecritures du neuvième et du dixième siècle.
1 Ce manuscrit 9 qui vient de la cathédrale de Nevers, est
surtout précieux à cause des notes historiques que différentes
mains ont ajoutées à un tableau cyclique et qui fournissent
de très-utiles renseignements sur beaucoup d'événements du
neuvième au douzième siècle. Ces notes ont été écrites à
Nevers; une première édition en a été donnée en 1881, par
M. Georges Waiiz, sous le titre d'Annales Nivemenses,
dans les Monumenta Germaniœ historica. (Scriptores, XIII,
88.) Espérons que notre confrère, M. Jules Roy, ne tardera
pas à nous faire jouir du travail qu'il prépare depuis
plusieurs années sur cet important document, et dont la
(i) Voir dans les Études sur la liturgie nivemaise de Mgr Crosnîer,
les chapitres VII et VIII, qui donnent l'analyse de ce sacra mentaire>
d'après les notes du R. P. Leforestier.
(2) Tome XLVI, i885, troisième livraison, p. 326. Page 66 du
catalogue du British Musernn.
— 254 —
base est une copie gracieusement mise en 1878 à la dispo-
sition de la Bibliothèque de V école des chartes, par
M. Thompson. »
Et plût à Dieu qu^un plus grand nombre de nos manuscrits
liturgiques eussent franchi le détroit, du moins ils seraient
sauvés !
Il est certain que, depuis le seizième siècle surtout, les
manuscrits étaient tombés en France dans un tel mépris,
— par suite de l'engouement pour les livres imprimés , —
qu'en parcourant les différents greffes oti sont conservés les
anciens registres de catholicité de nos paroisses, on rencontre
presque tous les cahiers couverts ici par un feuillet de
missel, là par un feuillet de grand bréviaire, etc., et c'est
ainsi que nous avons retrouvé Tancienne notation de l'hymne
de Saint-Cyr et Sainte-Julitte : Omîtes terrarum incolœ...
Cependant quelques années avant la Révolution, — tant
était considérable le nombre des vieux livres' liturgiques,
— il restait encore à la cathédrale bien des manuscrits.
Parmentîer, dans son Histoire des Evêques de Nevers,
écrite vers 1770, s'exprimait ainsi à la fin de Tépiscopat de
Hugues II (loi I à io65) : c II y a à la cathédrale plusieurs
livres, tant de chant que autres, qu^il avait fait écrire pour
le service de Tégiise et qui sont très-bien conservés. »
I* Parmi ces livres nous devons noter tout d'abord un
Sacramentaire que les liturgistes du dernier siècle aimaient
à consulter; témoin Tabbé Lebeuf , dans une lettre au Père
Prévost, du 7 avril 172a :
c ... Je loue fort le dessein que vous avez d^écrire sur le
sacre des rois... Il y a un beau Sacramentaire à Nevers,
dans la cathédrale. Cest là oîi Ton pourroit trouver quelque
chose , mais sans doute en conformité au sacramentaire de
saint Grégoire (i)... »
(i) Lettres de Pabbé Lebeuf publiées par la Société des sciences
historiques et naturelles de l'Yonne^ t. l**, p. 3o8.
L^abbé AUourj, devenu bibliothécaire du chapitre, après
la mort du chanoine Bernard de Qéry, avait sauvé ce
sacramentaire et le possédait encore en 1810, lorsque M. de
Saintemarie publiait ses Recherches historiques sur Nevers.
II était manifestement du temps de Hugues H , ainsi que le
prouvent ces quatre vers :
Qui Christo caram Christum veneraris ad aram ,
Christi coîe plebi prœbens pia pahuîa Christi.
Prœsulis Hugonis memor esto rogatibus almis,
Qui propter Christum Ubrum bene condidit istum.
O vous qui venez adorer Jésus-Christ à cet autel qui lui est cher.
Chargé de distribuer au peuple chrétien la nourriture sacrée du Sau-
Souvenez-vous dans vos ferventes prières de Tévêque Hugues , [veur.
Qui , par amour pour Jésus-Christ, a mis ses soins à la confection de
[ce livre.
C'était pour une église un don précieux que celui d'un
livre de cette importance, et il ne faut pas s'étonner que le
pieux donateur demande en retour à la postérité l'aumône
d'une prière (1).
Rappelons ici les vers inscrits par l'évéque Hériman dans
son Evangéliaire ; à la demande de prières, le pontife joint
la menace contre le perfide ravisseur :
Qui que tu sois qui me lis, souviens-toi^ je te prie, d^Hériman;
C'est par ses soins que ce lieu me possède.
Dans sa généreuse bonté, je le déclare, il m'a offert à son église
Ce pontife digne de mémoire ;
Oui, à Saint-Cyr il m'a donné, sous cette condition :
Que celui-là périsse qui voudrait me ravir.
2^ Un second volume de non moindre valeur, également
sauvé par l'abbé Alloury et remontant aussi à Hugues II ,
(i) Ce magnifique volume est aujourd'hui conservé à la Bibliothè-
que nationale, sous le n* 17333 des manuscrits latins. Nous renvoyons
le lecteur au chapitre XII des Études sur la Liturgie nivemaise , de
Mgr Crosnier, et surtout à la belle édition de ce sacramentaire publiée
par la Société nivernaise.
— 256 —
est le Graduel oublié encore , il y a quelques années , dans
un grenier de Moulins-Engilbert et maintenant conservé à
la fiibliothèque nationale], sous le n9 9449.
Uabbé Troufflaud , ancien organiste de la cathédrale en
1780 , en avait tiré des notes fort curieuses qui sont dans ses
cahiers manuscrits déjà cités sous le titre de : Fragments
philosophiques.
Il signalait en particulier c les proses dont le chant n'a
qu'une seule ligne en pourpre, avec des notes faites les unes
comme de petits quarrés avec des queues et les autres
comme des lozanges, etc. ; 1 puis il ajoufait cette remarque
qui mérite d^étre connue :
c On voit dans ce précieux manuscrit, entre les usages
particuliers de Téglise de Nevers, que pour trouver la clef du
chant à une seule ligne (qui est la même que celle de
Rousseau de Genève, avec des chiffres dessus, dessous et
sur la ligne) quelque musicien de l'église de Nevers, c'est-à-
dire un chanteur de plain-chant (car alors on ne connaissait
pas notre musique, qui est très-postérieure à celle-là) , a fait
trois lignes au-dessus et deux au-dessous de la ligne rouge
avec la pointe d'un couteau, pour classer les sons; surtout
il a eu soin , au commencement de chaque ligne de paroles
et de chant, de placer une clef qui porte sur Tune desdites
cinq lignes... 1
Il est intéressant de rapprocher de ces remarques la note
suivante de M. Léopold Delisle, dans son étude sur le
Mystère des rois mages dans la cathédrale de Nevers
[Romania IV, janvier 1875):
c La cathédrale de Nevers est une des églises de France
dont Pancienne liturgie est le mieux représentée dans les
collections de la Bibliothèque nationale. En 1859, ^^
collections s^enrichissaient d^un graduel noté en neumes,
dont la composition est fixée d'une façon positive aux
— 257 —
environs de Tannée 1060; il porte le n* 9449 dans le
fonds latin. En 1865, l'administration de la bibliothèque
achetait en vente publique un superbe pontifical de la
première moitié du onzième siècle (aujourd'hui manuscrit
latin 17333), dont plusieurs pages ont été reproduites dans
le grand ouvrage de M. de Bastard, et dont la Société
nivernaise vient de donner une édition complète, exécutée
avec autant de soin que de luxe. Tout récemment, nous
avons pu insérer au fonds latin des nouvelles acquisitions,
sous les n^* 17.35 et i236, deux autres monuments de la
liturgie nivernaise, un graduel et un antiphonaire, tous
deux du douzième siècle^ tous deux se recommandant par
une notation en neumes que supportent deux lignées tracées
l*une en jaune, Tautre en rouge.
» Le graduel (n® 1235) est surtout digne d^attention.
Déjà très-intéressant par lui-même , il devient encore plus
précieux quand on le rapproche du graduel du onzième
siècle. Celui-ci nous offre, notés en neumes, beaucoup de
morceaux qui se retrouvent dans Pautre graduel notés
suivant le système de Gui d'Arezzo, et comme, dans
rintervalle d'un siècle, les usages musicaux de l'église de
Nevers ne doivent pas avoir subi de grandes modifications,
on peut tirer grand parti de Texemplaire plus récent, dont
le déchiffrement est tout à fait certain, pour comprendre la
notation de Texemplaire plus ancien , dont l'interprétation
est beaucoup moins facile. Le rapprochement des deux
graduels est aussi fort instructif pour l'histoire de la liturgie
et de la littérature liturgique. Je n'en cite qu'un exemple
qui nous fait assister à la naissance et aux premiers
développements d'un des mystères qui ont eu le plus de
vogue au moyen-âge, celui de l'adoration des rois mages. »
3^ Un autre volume écrit en beaux caractères du
douzième siècle, avec des majuscules très -élégantes de
couleur rouge ou bleue , est demeuré à Nevers ; il fait partie
de la bibliothèque de la ville.
T. m, 3* série, 33
— 258 —
Cest un Evangéliaire dont nous avions fait une courte
analyse en 1868 et que Mgr Crosnier a reproduite dans
ses Etudes (i). Il ne contient aucune note liturgique ou
historique.
4'' Un grand bréviaire noté est encore signalé par labbé
Troufflaud, qui en fixe même la date.
Après avoir copié la légende de saint Patrice, au 3i août,
tirée du bréviaire de Mgr Sorbin, imprimé à Nevers en
i5oo, il ajoute: « Dans le bréviaire de Nevers , manuscrit
en vélin, de 1286, saint Patrice est aussi placé sur le
calendrier au 3 1 août et sa légende forme neuf leçons de
quatre à cinq lignes chacune.
» Elle dit seulement qu^il était d^Auvergne, qu'il avait
été moine, mais pas un seul mot de sa venue en Nivernais,
au bourg de Gentillic in pagum Nivernensem , qui
Gentilicum vocatuvy aujourd'hui appelé Saint-Parize-le-
Châtel (2). »
5** Une noie du Livre noir du chapitre, folio 24, men-
tionne en ces termes un autre bréviaire à Pusage d'une
ancienne confrérie établie à Saint- Cyr sous le titre de
confrérie de PAurore: De Breviario dato per Dominum
G. Guarreti canonicum Nivernensem, ad opus capellani
confratriœ Aurorœ y habetur in magno papirio Capituli,
folio g.
6^ Nous avons retrouvé à la bibliothèque municipale de
Nevers un grand manuscrit in-folio, inscrit sous le n* 4581
(i) Chapitre XIV des Etudes sur la Liturgie nivematse, pages ii3-
114.
(2) Malheureusement je n'ai pu retrouver que les cahiers 5, 6, 7, 8
et 9 des manuscrits de Tabbé Troufflaud. Ils contiennent, sous le
titre de Fragments philosophiques , une quantité de notes historiques
et surtout beaucoup d'observations sur la botanique.
Les quatre premiers cahiers me sont inconnus. La note relative au
bréviaire de 1286 est dans le sixième cahier, pages 60 et 61. Cest
dans le même cahier, page 29, que se trouvent les notes relatives
au graduel.
— 259 —
et destiné à l'usage d^ne autre confrérie sous le vocable du
saint nom de Jésus, établie à la cathédrale en 1594.
En voici le titre : Officium gloriosissimi nominis Jesu
quod celebratur décima quarta mensis Januarii in cujus
honore instituta fuit confratria anno Domini millesimo
quingentesimo nonagesimo quarto tempore démentis VIII
Summi Pontificis Henrico III I, Franciœ Régis et Arnaîdi
Sorbini Nivernensis episcopi, quod notatum fuit per
M. Marinum Couetoux prœdictœ con/ratriœ primum
auctorem anno Domini millesimo sexcentesimo primo.
Ce volume de vingt feuillets comprend les offices notés du
saint nom de Jésus, du Saint-Esprit, de la sainte Vierge et
des Morts. Malgré sa date relativement récente , il est fort
bien écrit et les majuscules gothiques en or sur fond bleu
sont très-élégantes. Mais, — signe des temps, — au lieu
d'être accompagnées de symboles ou d'attributs religieux,
c^est, à côié du nom de Jésus, une sorte de Bacchus tout
nu, couronné de lauriers, tenant d^une main une branche
de feuillage, de Tautre un bouquet de fleurs et se croisant
les jambes pour n'être pas trop indécent; plus loin, une
cariatide nimbée avec une double paire d'ailerons en forme
d'éventail.
Sur les feuilles de garde se trouvent des notes intéressantes
pour l'histoire de cette confrérie (i).
Le Livre noir signale encore un certain nomore d^autres
livres liturgiques conservés dans l'armoire du trésor, in
armaria thesauri, avec cette particularité que tous conte-
naient, — comme VEvangéliaire et le Traité de Comput,
(i) Un autre manuscrit de la première moitié du seizième siècle,
avec forte reliure en bois recouvert de veau chargé de dessins à
froid, coins en cuivre et cabochons entourés de guirlandes frappées'
est également conservé à la bibliothèque municipale de Nevers sous
le n* 4580.
n paraît avoir appartenu à la confrérie de la Sainte-Trinité établie,
en t3i3 dans Téglise Saint-Trohé de Nevers.
— 26o —
aujourd'hui à Londres, — des notes courantes sur l'histoire
du chapitre.
N'était-ce pas, en effet, un sûr moyen de ne les point
oublier que de les consigner dans ces livres d'usage
quotidien? Citons-en quelques-uns pour terminer:
7" Un antique collectaire contient les règlements du
procureur des anniversaires pour ses comptes annuels; hœc
habentur in antiquo collectario, in quodam folio,
i^ Un grand bréviaire noté indique de quelle façon les
nouveaux chanoines doivent faire leur stage ; vade ad
quoddam breviarium notatum in prima parte Adyentus.
90 Un statut relatif à huit muids de vin dus par l'évéque
à ses chanoines, pour certaines fêtes, se trouve dans un lipre
de chœur noté appelé le Livre des Chanoines; scriptum est
in quodam libro chori notato qui incipit: missus est et
vocatur liber canonicorum
\o^ Les nouveaux chanoines devaient jurer d'observer le
règlement fait par Robert de Moulins, de bonne mémoire, et
copié tout au long dans le Martyrologe; ad plénum scriptum
in Martyrologio,
Le statut du doyen Simon se trouvait également dans le
Martyrologe et dans beaucoup d'autres livres de Péglise;
reperitur in multis libris ecclesiœ scriptum , in Martyro^
logio et alihi (i).
II'» Un autre statut relatif aux custodes et aux mar-
guilliers est relaté encore dans le Martyrologe et autres livres,
notamment dans VOrdinaire du chapitre; reperitur in
Ordinario, Martyrologio et alibi.
12® En dernier lieu, mentionnons plusieurs tableaux
fixés dans le chœur de la cathédrale et qui contenaient
(i) L^abbé Âlloury, plusieurs fois cité, parle dans seç notes manus-
crites des deux martyrologes du chapitre et des deux nécrologes
inscrits en marge desdits martyrologes, ainsi que des trois livres des
anniversaires qui ont, dit-il, péri dans la Révolution.
Heureusement, dans son Histoire des Evéques, Parmentier en a
donné de nombreux et importants extraits.
— 26a —
les divers règlements relatifs à Tordre dudit chœur :
Ordinationes per capitulum factœ, super ordinatione
chori , scriptœ in quodam tabello existente in dicto choro
(Livre noir, folio a) ; — le règlement des deux chanoines de
Saint-Gildard, de duobus Sancti Gildardi, in tabella choro
affixa {Livre noir, folio 9); -- et pour ce qui concerne les
fautes des chanoines, comment on les punit: Pœna ab
antiquo consueta posita est et scripta in diversis chori
tabellis. [Id,, folio 16.)
Qu'on veuille bien nous pardonner ces citations, peu
importantes sans doute, mais qui ont du moins le mérite
de nous faire revivre un instant de cette vie si intéressante
des siècles passés et de nous aider à reconstituer la physio-
nomie de notre antique et vénérée cathédrale !
1 3® Sur le point de terminer cette longue énumération et
pour la rendre aussi complète que possible, nous avions pris
la liberté de recourir à Tobligeance bien connue de Téminent
directeur de la Bibliothèque nationale et de lui demander
s'il n'aurait pas à nous faire connaître quelque nouvelle
épave de notre ancien trésor de Saint -Cyr. M. Léopold
Delîsie s^empressa de nous signaler un troisième sacramen-
taire provenant de notre cathédrale et portant le n^ 1528
dans le fonds latin des Nouvelles acquisitions.
Ce manuscrit, récemment acquis à la vente de la riche
bibliothèque de notre compatriote M. Grangier de La
Marinière , porte au commencement , en caractères du quin-
zième siècle, le titre: Antiquum collectarium signatum per I,
A la suite de cette indication dont la similitude est si
frappante avec celle du n® 7, se référant à notre antiquo
collectario, M. le Directeur voulut bien ajouter les notes
suivantes qui nous donnent une idée de la composition du
volume :
« Folios I et 2. — Notes sur quelques cens.
» Folio 3. — Calendrier dans lequel sont différentes notes
relatives à des anniversaires. Treizième siècle.
— 202 —
» Folios 9-16. — Statuts et ordonnances diverses pour le
chapitre de Nevers. Treizième et commencement du quator-
zième siècle.
» Folio 18. — Incipiunt Capitula per circulum anni
currentia^ ad usum Nivernensem, Treizième siècle.
1 Folio 27. — Oraisons des messes à partir de la veille de
Noël jusqu'à la veille de la Pentecôte. Le propre du temps et
le propre des saints sont mêlés.
» Folio 86 , verso. — Préface et canon de la messe.
» Folio 94. — Oraisons des messes à partir de la Pentecôte
pour le propre du temps.
» Folio 109, verso. — Oraisons des messes pour le propre
des saints à partir du i^ juin.
) Folio 147, verso. — Oraisons des messes du commun.
» Folio 151, verso. — Oraisons de diverses messes.
1» Folio 173, verso. — Notes sur quelques cens. Treizième
siècle.
» Le sacramentaire proprement dit^ qui commence au
folio 27 et finit au folio i65, a été copié au douzième
siècle, sauf quelques parties additionnelles, telles que le
folio 3 1 , intercalé après coup pour recevoir les oraisons de
la fête de saint Thomas, archevêque de Cantorbéry.
t Volume sur parchemin, de 173 feuillets, hauts de
266 millimètres et larges de 190. Ecriture à longues lignes,
du douzième siècle, à l'exception des morceaux ajoutés après
coup. Grandes initiales rouges, vertes, jaunes et bleues.
On doit citer les miniatures qui représentent la naissance
de Notre-Seigneur (folio 27), — Tadoration des mages
(folio 28, verso), — Notre-Seigneur entouré des symboles
des évangélistes (folio 87], -* le Calvaire (folio 88,
verso). »
Après avoir lu ces notes si précieuses, il nous semblait de
plus en plus probable que le manuscrit où se trouvent , dès
les premières pages, quantité de notes relatives aux anniver-
saires fondés à la cathédrale, dut être vraiment le vieux
- 263 —
coUectaire contenant le règlement du procureur des anni-
versaires.
Aujourd'hui le fait est certain. Notre obligeant confrère
M. de Lespinasse a bien voulu nous adresser la copie d'un
statut du doyen Odon , tel qu'il se trouve au folio i6de
Tantique collectaire.
Or, en le comparant avec le texte du Livre noir (folio 8),
le doute n'est plus possible. On nous saura gré de reproduire
ces deux textes, d'ailleurs inédits, en attendant la publication
si désirable de cet important recueil :
(Texte du Sacramentaire,)
c Anno Domini millesimo trecentesimo primo, die martis
ante assencionem Domini in capitulo ecclesie nostre generali,
NosOdo, decanus (i) et capitulum ecclesie predicte Niver-
nensis pro utilitate ecclesie nostre predicte, statuimus in
perpetuum observandum quod quicunque fuerit bursarius
adniversariorum , in qualibet septimana, omni die veneris,
teneatur in capitulo pronun tiare omnia adniversaria futura
celebranda sequentis septimane ac quantitates et valorem
cujuslibet eorumdem. Item et quocienscunque invinerit
tempus vendendi bladum pro aliquo adniversario teneatur
venire ad capitulum et hoc nuntiare ut justa {sic) ipsius
capituli consilium ipsa fiât venditio vel debeat remanere.
Item et quod idem bursarius omni anno in reienda ratione
conputando de recepta et expensa debeat dicere et declarare
in fine sue rationis, peccunias, blada et cetera omnia bona
que recepit vel recipere debuit vel habet ad anniversaria
sequentis temporis distribuenda. 9
(j) Les archives du département et le Livre noir contiennent un
grand nombre d'actes du doyen Odon, de 1297 à i3i3.
— 264 —
(Texte du Livre noir»)
« Deprocuratoreanniversariorutnetcedula. Item statutum
est pro utilitate ecclesise Nivernensis quod quicumque fuerit
procurator anniveraarioruni in qualibet septimana, omni
die veneris , tenebitur in capitulo pronunciare omnia
anniversaria futura celebranda sequentis septimanae et
quantitatem et valorem cujusiibet eorumdem.
» Item et quoties imminuerit tempus vendendi bladum
pro aliquo anniversario, teneatur dictus procurator anni-
versariorum venire ad capitulum et hoc nunciare ut^ juxta
ipsius capituli consilium, ipsa venditio iiat, vel remanebit
sine vendendo.
» Item, quod idem procurator anniversariorum , quolibet
anno, in reddenda ratione et computando de recepta et
expensione, débet dicere et declarare in fine compotorum
suorum pecunias , blada et caetera alia quae recepit vel
recipere debuit, vel habet ad anniversaria sequentis temporis
distribuenda, ut haec habentur m antiquo collectario, in
quodam folio. »
On le voit, en comparant les deux textes, le rédacteur du
Livre noir, au lieu de copier servilement, a modifié quelques
termes vieillis ; mais il avait sous les yeux, dans la salle
capitulaire de Saint-Cyr, le manuscrit, qui est maintenant
conservé à la Bibliothèque nationale (i).
{i) Voici comment ce volume était décrit dans le catalogue rédigé
pour la vente du cabinet de feu M. Grangier de La Marinière, le
2 juin i883: « Ce manuscrit est très-fatigué, il est même déchiré ei
usé en quelques endroits. Il est orné de plusieurs miniatures d^uQ
style fort ancien. On remarque particulièrement celles qui précèdent
et suivent le canon de la messe. Elles ont toutes le cachet d'une
haute antiquité. La vieille couverture en bois, revêtue de peau de
mouton, est encore armée d^une partie des clous sur lesquels ce livre
reposait quand on le plaçait sur son pupitre. »
265 -
§ VII.
INVENTAIRE DE L'ARGENTERIE, ORNEMENTS, LINGE
ET AUTRES EFFETS A l'uSAGE DE L^ÉGLISR éPISCOPALE ET PAROIS-
SIALE DE SAINT-CYR, QUI SONT TANT DANS LE TRESOR QUE DANS
LA CHAPELLE A CÔTJÉ.
(Rostre pour mscrire les recettes, dépenses et actes de Téglise
cathédrale et paroissiale de Saint-Cyr de Nevers, de mai 1791 à
décembre 1792, folios 66-74, archives de Pévéché.)
Argenterie.
1. Trois ostensoirs: un d'argent doré d^environ trois
pieds, un autre idem d^environ seize pouces, le troisième
d'argent provenant de Saint-Victor.
2. Six chandeliers dVgent (i).
3. Trois lampes d'argent (2).
(1) Etaient-ce les six grands chandeliers de cuivre argenté, de plus
d'un mètre de hauteur, accompagnés d'une croix monumentale, qui
garnissaient autrefois (jusqu'en 1870, où fut commencée l'érection du
ciborium) l'ancien maître-autel de la cathédrale, dernier souvenir des
Ck>nzagues?
Très-gracieusement décorés, ces chandeliers offrent sur leur pied
triangulaire trois médaillons d'une belle exécution représentant, l'un :
saint Benoît, tenant le livre de la règle monastique et la crosse
abbatiale; les deux autres: sainte Madeleine avec une croix et le
▼ase aux parfums, son attribut ordinaire.
Peut-être ces chandeliers proviennent-ils de l'abbaye Notre-Dame
ou du prieuré de Saint-Etienne!
(2} Parmi les charges du sacriste (onera sacristie incumbentia), le
Livre noir du chapitre marquait:
Item tenetur sustinere très lampades in dicta ecclesia , quorum una
étrdet die ac nocte , et alice duce tantum de nocte, et pro hoc faciendo
expendit sexaginta potos olei.
Une feuille annexée à l'inventaire porte que les commissaires-
administrateurs de l'hôtel-Dieu de Nevers ont reçu, le 3 février 1793,
T. m, 3* série. 34
- 266 -
4- Une croix d'autel argentée.
5. Trois croix processionnelles : une d'argent doré et son
bâton, une autre d'argent et son bâton, la troisième de
cristal de roche (i ) et son bâton d'argent.
6. Une croix d'argent sans bâton , qui a été donnée par le
district, et une lampe d'argent très-mince pour le service de
l'église Saint-Victor.
7. Le chef de saint Cyr, argent doré, orné de plusieurs
diamants différents.
8. Le bras de saint Cyr, argent doré {2).
9. Le chef de saint Victor, d'argent (3).
Pan II de la République, du citoyen Bonnot, sacristain de la paroisse
de Saint-Cyr, et des commissaires-fabriciens de ladite paroisse, six
flambeaux d^argent et trois lampes aussi d^argent, donnés audit
hôtel-Dieu par testament de feu Henri Bogne , vivant doyen de la
cathédrale , dont Tusage avait été accordé au chapitre par ledit
testament. (Voir plus haut, § V, n* 22, les donations de M. Bogue à
la cathédrale.)
(i) Nous avons eu déjà, dans V Histoire de la Verrerie et les
Gentilshommes verriers de Nevers (page 99), Toccasion d^eipliquer
que cette croix de cristal, qui a malheureusement disparu, avait été
donnée sans doute à la cathédrale par le chanoine Pierre de fiorniol»
fils de Bernard de Borniol , directeur de la verrerie de Nevers au siècle
dernier.
(2) A une procession faite en i455, le 4 décembre, pour la paix et
r union du royaume de France, fut porté a le chief et bra^ monsieur
saint Cire et ung ygnocent ». (Archives communales de Nevers, 1455,
ce. 52.)
Le jour de la fête de la Susception du b^as de saint Cyr (27 octobre)
qui concordait avec celle de la Vénération des reliques de la cathé-
drale, non-seulement le bras du saint patron était exposé, mais la
grande châsse de Tautel de Saint-Cyr sous Torgue était ouverte: Ad
totum officium, exponitur Brachium S. Cyrici super altare inter duos
cereos ardentes, et aperitur, porte le Diurnal de 1789, capsa S, Reli*
quiarum ad altare S, Cyrici sub organo cum duobus cereis arden-
tibus.
(3) Qans l'inventaire de l'église Saint-Victor, fait le 23 mai 1791,
par les commissaires du district, outre le buste de saint Victor, en
argent^ porté à Saint-Cyr, il est aussi fait mention d^un ostensoir
monté sur un ange et sur un pied d'argents
— 267 —
10. Le chef de saint Siméon (1} et celui de saint Silvestre,
en bois doré.
11. Deux représentations en bois doré: Tune de saint
Laurent, l'autre de saint Thibault, ermite (2).
12. Un bassin d'argent doré avec les burettes.
i3. Une patène d'argent qui sert le jeudi-saint pour les
saintes-huiles.
14. Trois calices: deux d'argent doré et un en argent (3),
avec une petite clochette.
i5. Cinq ciboires: trois dans le tabernacle du grand
autel, deux d'argent doré, un d'argent et une custode
d'argent; les deux autres ciboires sont dans le tabernacle de
la chapelle de la Vierge.
16. Un bénitier d'argent^ un plat d'argent et les
burettes.
(i) Un buste en bois doré, figurant un pape couronné de la tiare,
était encore exposé à la cathédrale, dans une des chapelles de Tabside,
avant les dernières restaurations. Il est aujourd'hui conservé dans la
maison du Chapitre et désigné sous le nom de reliquaire de saint
Siméon.
Les reliques étaient placées dans une petite cavité , à l'endroit de
Tagrafe de Tétole.
(2) Ces deux statues venaient de l'église paroissiale de Saint-Laurent
de Nevers, sur remplacement de laquelle on a récemment établi un
marché.
Dans une autre copie de Tinventaire, au lieu de : deux représenta-
tions, on lit : deux petits saints de bois doré...
(3) La cathédrale possède plusieurs calices d'argent doré de Tépoque
de la Renaissance. L'un entre autres, de très-grandes dimensions
(id centimètres de diamètre au pied), est orné de bas-reliefs d'une
remarquable exécution. D'abord, sur le pied : le mariage de la sainte
Vierge, l'Annonciation, la Visitation ; — sur le nœud : le grand-prêtre
Aaron balançant l'encensoir, David jouant de la harpe, Moïse avec la
verge et les tables de la loi; -— sur la coupe: la Présentation, l'Ado-
ration des Mages, Jésus au milieu des Docteurs. Tous les sujets, au
pied comme au nœud et sur la coupe du calice, sont séparés par des
têtes d'anges, et sur la bordure du pied est une gracieuse guirlande
semée de douze têtes d'anges. C'est vraiment le calice des anges. Le
revers de la patène offre la représentation de la Cène.
— 268 —
jj. Trois paix, dont deux d'argent doré et une petite
d^argent (i).
18. Une petite coquille d'argent pour mettre le sel
lorsqu'on fait Teau bénite (2).
19. Deux croix de messe, argent doré, dans Tune
desquelles il y a de la vraie croix (3).
(i) Il n^est pas inutile de rappeler ici les anciens usages relatifs à
rinstrument de paix^ tels que les indique le Missale insîgnis ecclesiœ
Nivemensis de 1728, et comme ils ont été observés à la cathédrale
sous le rite parisien jusqu'au retour à la liturgie romaine en i85i :
a In missa majori, dum Celebrans dicit primam Orationem, Diaconus
acci pi tu nu m ^âci5 instrumentum,.. et genuflexus offert ei instrumentum
pacis ad osculum, et mox ab eodem dicente Pax iecum , accipit pacem,
respondens Et cum Spiritu tuo,,.
» Deinde vadit ad D. Episcopum... eique nihil dicens offert instru-
mentum pacis... Tune subdiaconus et duo pueri discedunt ab altari
et accedunt versus Aquilam in choro , dum Diaconus vadit ad
Decanum; ei porrigit instrumentum pacis dicens...; quo facto
Diaconus rediens ad Altare cum est prope Aquilam , osculatur
instrumentum pacis, et illud porrigit subdiacono, et subdiaconus
duo instrumenta pueris ibi consistentibus. . Intérim pueri v.idunt
in chorum et offerunt cantoribus instrumenta pacis, deinde Clero in
superioribus et inferioribus stallis... deinde simul redeant ad Altare,
super quo reponunt instrumenta pacis. n (Riius in missa servandus ,
p* 10.)
(2} Un ancien inventaire de saint Donatien à Bruges en 1488 cite
de même: Una conca argentea^ cui sal imponitur ad benedictionem
aquœ. {Traité pratique de la construction, de l'ameublement, etc., des
églises, t. I*% par Mgr Barbier de Montault.)
(3) Voici, d'après le même missel nivernais de 1728 ce qui concerne
l'usage des croix de messe ou croix de main (voir plus loin les n*' 96
et 97J :
a In missa majori , cum celebrans , Diaconus deferens parvam
crucem, et subdiaconus pervenerint ad infimum gradum Altaris,
illud salutant...
» Si Episcopus sit prœsens, incipit missam. . et facit confessionem ;
qua peracta Episcopus osculatur crucem, quam deinde osculatur
Celebrans qui ascendit ad Altare, Episcopo revertente ad sedem
suam in choro. 1
A la fin de la messe, après l'évangile, le diacre reprenait la croix:
— 269 —
20. Un bâton de chantre, au haut duquel est représenté
saint Cyr et sainte Juiitte en argent (i).
21. Deux chandeliers d'acolytes, argent.
22. Six encensoirs d'argent et cinq navettes.
23. Une couronne oti est un morceau de la vraie croix et
c Quo dîcto (Evangelîo), ù'i^conus parvam crucem accipit... deinde in
vestiarium redeunt... »
Que signifiait cette coutume? demande Mgr Barbier de Montault,
dans une notice sur les Croix à main du diocèse de Poitiers. Et le
savant liturgiste répond : Elle était un vestige de la liturgie ancienne.
Au moyen-âge , le crucifix n^était pas à demeure sur l'autel, qui ne se
parait que pour le temps de la célébration des saints mystères. Les
acolytes y déposaient leurs chandeliers et le crucigère la croix qu'il
avait enlevée de la hampe processionnelle; au départ , ils les repre-
naient et Pautel restait nu^ comme on a vu, jusque sous Grégoire XVI,
Tautel papal de la basilique Vaticane.
Aux solennités, la croix était portée par le célébrant lui-même. Ce
n'était pas une croix ordinaire, ses dimensions étaient moindres et
elle contenait un morceau de la vraie croix. Ajoutons cependant que
l'usage commençait à s'établir de laisser la croix sur l'autel. Dans le
chapitre X des Rjubricœ générales de notre missel, caput X, de prapa-
ratione altaris, on lit :
Ex usu nunc recepto super Altare coUocatur Crux, ad cujus pedem
apponitur tabella secreiarum , quœ dicitur Canon , et hinc inde cande^
làbra cum cereis,
(x) Parmentier, dans son Histoire manuscrite des Evéques de Nevers
(épiscopat de saint Jérôme) , mentionne le bâton du chantre au bout
duquel était représentée la vision de Charlemagne; ce bâton était de
l'année x53o.
Il ajoute que M. l'abbé de Damas, alors grand-chantre, en avait
fiiit faire un autre en 1773, et qu'en 1271 le bâton était surmonté
d'une colombe, comme nous l'avons, dit-il, vérifié par le sceau du
chantre Jean Belini.
Le bâton dont il est ici question était bien sans doute celui de
M. l'abbé de Damas, mort en 1829, âgé de quatre-vingt-neuf ans.
Dans la sacristie de la cathédrale , il reste encore le sommet du
dernier bâton dont le grand-chantre se servit jusqu'au retour à la
liturgie romaine. Venait-il de l'ancienne église Saint -Pierre.^ On
peut le penser. Il est, en effet, surmonté d'une petite statuette en argent
doré figurant l'apôtre debout tenant une clé.
— 270 —
une épine de la sainte couronne , enrichie de quelques
diamants (i).
24. Un cœur d'argent dans lequel est renfermé celui du
ci-devant duc de Nevers, Barbon Mancini, mort en 1707 (2).
25. Des cartons d'autel en bois doré avec leurs vitres.
26. Trois missels: un en maroquin rouge doré sur
tranche, l'autre pour les épîtres et évangiles, aussi en
maroquin rouge, garni de plaques de cuivre jaune (3), et
un' commun.
(i*) Le jour de l'Exaltation de là sainte Croix, 14 septembre, après
roffertoire de la gra nd* messe , marquait le Diurnal de 178g, fit
adoratià S. Crucis a clero et populo.
(2) Pârmentier, dans ses Archives de Nevers (t. H, p. 328-329',
raconte ainsi Phistoire de la translation de ce cœur de Paris à
Nevers, diaprés le Mercure d'octobre 1707. Nous ignorons ce qu'il
est devenu depuis 1792:
« Le cœur de Mgr Philippe-Jules Mancini-Mazarini a été apporté
de Paris à Nevers; par le sieur abbé Le Bourgoing de Sichamps,
prêtre, natif de Nevers, et petit-neveu du fameux père Bourgoing,
général de rOratoirc. Il fut déposé à son arrivée dans le monastère
des PP. Minimes, d'où le vendredi 26 août, à dix heures du soir,
l'abbé Le Bourgoing alla le reprendre dans un carrosse à six chevaux,
accompagné du président de la Chambre des comptes de Nevers , et
précédé des chevaliers de la compagnie de Saint-Charles, des gardes,
officiers, pages et domestiques de la maison du défunt, tous à pied
et en deuil. D'autres gardes suivaient le carrosse, et leurs officiers
étaient aux portières. Plusieurs autres carrosses venaient ensuite, et
tout le cortège était éclairé par un grand nombre de flambeaux. Le
cœur fut porté à Saint-Cyr, où Mgr TEvéque le reçut à la tête de son
Chapitre. L'abbé Le Bourgoing fit un compliment auquel le prélat
répondit. On' entra ensuite dans l'église, qui était tendue de noir,
puis au chœur, qui l'était du haut en bas. Le lieu où l'on mît le
cœur du défunt était entouré de chandeliers d'argent, garnis de
cierges. Le maître- autel et tout le pourtour du chœur étaient
illuminés de cierges de trois livres chacun. Le lendemain , la messe
fut célébrée pontificalement et chantée en musique, avec oraison
funèbre. »
(3) Voici encore la rubrique du Missale Nivernense de 1738. {Ritus
in missa servandus^ caput V):
« In Dominicis, in Duplicibus et supra, cantato Et homo foetus est.
— 271 —
27- Trois livres de pasUon, nx^îés.
28. Une fonuine et la cuveitte en jcuiyre rpugp.
29. Quatre tableaux et une petiote gliape.
30. Trois petits cadres poqr l6$ prêtre ^ fji.acrf et ^ous-
diacre.
3i. Une boite de fer-blaqc pour mettre le pain 4^9Utel.
32. Deux pelottes, deux cadres pour se préparer 4 1# ta^s^
et pour l'action de grâces.
33. Deu:;^ flambeaux pour seryir à Télévation.
Ornements.
34. Ornement à galon d^or fond damas blanc, orné de
fleurs or et soie , composé de cinq chapes , chasuble ,
dalmatiques, étoles, manipules, voile et bourse (i).
35. Ornement de sept chapes en damas blanc à galon
d^or, broché en or et soie, la chasuble, les dalmatiques,
étoles , manipules, voiles et bourse (2}.
subdiaconus (quem thuriferarius cum thuribulo et duo ceroferarii
prscedunt) defert codicem Evangelii clausum osculandum D. Cantori
et chori custodibus, deinde ceteris de choro... et cuilibet dicit, kcec
sunt verba sancta; cui quisque respondet, Corde credo, et ore
eonfiteoT,
(i) Un statut qui était nouvellement porté lora de la rédaction du
Livre noir du chapitre, au commencement du quatorzième siècle,
obligeait tout nouveau chanoine à donner une bonne chape de soie,
unam cappam de serico bonam de la valeur de 10 livres tournois, ou
à payer cette somme, à la charge qu*elle serait employée à cet unique
usage, decem libras ad usum capparum tantummodo convertendas.
On s'explique ainsi le nombre considérable de chapes, plus de
soixante-dix, indiquées dans Tinventaire, et Ton comprend cette
rubrique du missel nivernais qui, dans les processions des grandes
solennités, permettait Tusage de la chape à tous ceux du choeur, les
seuls enfants exceptés : In A nnuaîibus Solemnibus mqjoribus, Omnes
de choro sunt in cappis ad processionem, exceptis pueris chori, qui
semper suni in albis,
(2) Précédemment, dans le § V, n** 16, zo, 21, ^3, 24, nous avona
mentionné plusieurs ornements donnés par les évêques de Nevers à
leur cathédrale; mais, — comme dans le présent inventaire, ^ cm
— 272 —
36. Ornement de damas rouge à galon d'or^ de cinq
chapes parsemées de fleurs en or, la chasuble, les dalma-
tiques, étoles, manipules , voile et bourse.
37. Une chape de drap d'or.
38. Une chape en moire d*or brodée sur le devant.
39. Une chape blanche et violette brodée des deux côtés,
très-passée.
40. Une magnifique chasuble relevée en bosse d'or, sur
laquelle est représentée la croix ; les deux dalmatiques sont
différentes avec les étoles et manipules.
41. Cinq chapes violettes or et soie, parsemées de fleurs
d'or; une chasuble, les dalmatiques, manipules, étoles,
voile et bourse.
42. Une chasuble violette et rouge, brodée des deux côtés,
une étole, un manipule, la bourse et le voile.
43. Quatre chapes de damas blanc à fleurs en soie, or (roi
en or, sans chasuble, dalmatiques, etc.
mentions ne sont accompagnées d^aucune description; c'est là
pourtant ce qui offrait le principal mérite. Aussi, pensons-nous
qu'on lira avec intérêt Textrait suivant du testament de « feu maistre
Jehan d'Estampes, évesque de Nevers >, décédé le 24 décembre 1461.
Ledit testateur ordonne qu'il lui soit fait un anniversaire solennel
et perpétuel en l'église Saint-Cyr de Nevers le lendemain de Sainte-
Catherine, et pour ce faire a il donne à Messeigneurs du Chapitre et
à Tesglise ses vestemens blantz estans en lad. esglise. C'est assavoir
chasuible, tunicque et dalmaticque avecques deux chappes.
9 Item deux au I très chappes de veloux sur veloux brochés d'or à
tristes.
■ Item deux aultres chappes de drap d'or à rosetes ausquelles
naguères a fait mettre orfiraiz neufz |aux armes et devist du roy et
les siennes semées parmy.
> Item deux aultres chappes de satin vermeil figurées d'or où sont
les armes et devist de feu Monseigneur de Berry et celles dudit
testateur.
■ ... Item donne à ladite esglise pour mettre en la lihrarye ung
livre de vita Christi qu'il a naguères fait faire... 1» {Recueil de
documents nivemais manuscrits, collection de M. le comte G. de
Soultrait.)
— 273 —
44- Quatre chapes de damas rouge à galon d'or, orfroi
parsemé d^or, chasuble, dalmatiques, étoles, manipules^
bourse et voile difTérents.
45. Cinq chapes blanches à galon faux , dont trois parse-
mées de fleurs bleues , les orfrois en soie et quelques fleurs
en or; les deux autres brochées en fleurs de soie.
46. Trois chapes vertes à galon faux, orfrois roses
parsemés de fleurs en soie de toutes couleurs, chasuble,
dalmatiques, étoles, manipules, bourse et voile.
47. Trois chapes violettes en damas à galon faux, orfrois
en fleurs de toutes couleurs, chasuble, dalmatiques, etc.
48. Quatre chapes blanches de velours d^Utrecht à galon
faux, orfrois en fleurs de soie de toutes couleurs, cha-
suble^ etc.
49. Quatre chapes blanches à galon d^argent , orfrois
bleus à fleurs argent et soie, chasuble, etc.
50. Quatre chapes violettes de velours d^Utrecht à galons
faux, orfrois relevés en fleurs jaunes, chasuble, etc.
51. Quatre chapes de dsimsis rouge k galon /aux ^ orfrois
en fleurs de toutes couleurs, dalmatiques, chasuble, etc.,
qui seront avec les chapes de damas rouge à galon d'or.
(No 44.)
52. Six chapes noires : trois à galons de soie, très-mau-
vaises, les trois autres à galon faux, leurs chasuble, dalma-
tiques, etc.
53. Une chasuble de velours noir, à petit galon d^argent ,
la croix en moire d'argent, l'étole, le manipule et voile
brodé en argent, sans bourse.
54. Deux chapes seules de damas blanc à galon de soie
jaune, orfrois rouges à fleurs en soie.
55. Deux chapes violettes en velours de coton et à galon
de soie, qui ne servent plus.
56. Petit dais de drap d'or à frange d'or.
57. Un ornement de velours cramoisi parsemé de fleurs
de lys en or, pour garnir le brancard lorsqu'il faut porter le
Saint-Sacrement ou saint Cyr.
T. m, 3* série, 35
— 274 —
58. Deux draps mortuaires : un parsemé de larmes d'ar-
gent, l'autre très-grand et très-mauvais, aux armes du
ci-devant chapitre, lesquels ont été enlevés depuis la mort
de M. Sion ville.
59. Un carreau de vieux velours noir parsemé de larmes
d'argent.
60. Un vieux tapis violet avec son carreau et un petit
tabouret pour garnir le siège épiscopal.
61. Deux tapis rouges en velours d'Utrecht, pour l'autel.
62. Quatre housses de cadis noir pour les banquettes du
chœur.
63. Un dais en drap d'or, quatre rubans , les aigrettes et
les quatre bâtons garnis de velours cramoisi entourés d'un
galon d'or avec le plafond (i).
64. Huit chasubles en moire d^argent , la croix en moire
d^or, garnies de dentelles d'or avec leurs étoles et manipules
(i) Parmentier {Inventaire historique des archives de Nevers, t. !•',
p. 293J dit à ce sujet :
« De tout temps c^est la ville qui fournit le dais pour la processsîon
générale de la Fête-Dieu. Celui dont on se sert aujourd'hui (c*est-à-dire
vers 1770) est fort ancien, et je ne doute pas qu'il ne soit encore le
même que celui dont il est parlé dans le troisième compte de Droîn
de La Marche, de l'année i5i2; du moins la broderie d'or et le
caractère de l'écriture qui se lit dans l'intérieur des soupentes font-ils
présumer qu'ils pourraient être de ce temps-là. Les mots sont : Corpus
Christif salva nos; et je ne connais personne qui s'en soit encore
aperçu. >
A la joyeuse entrée de la comtesse de Nevers Marie d^Abret dans
sa bonne ville, en 1458, les coutres de Saint-Cyr avaient prêté le
drap d'or « à faire pesle » (poêle, dais) pour mettre sur madite
dame; il leur fut alloué par les échevins 2 sols 6 deniers. (Archives
communales, CC. 54.)
Le Livre noir (folio 3), dans la formule de serment des nouveaux
custodes et marguilliers de la cathédrale, mentionnait un tapis doré
qu'ils doivent placer sur le grand pupitre les jours où il y a sermon:
c Juratis quod quoties fit sermo in ecclesia, in signum sermonis ad
altum pulpitrum pallium deauratum ponetis. n
— 275 -
destinées pour porter le Saint-Sacrement, le jour de la
Féie-Dieu ( i ).
65. Deux corporaux garnis en dentelle pour mettre
dessous le Saint-Sacrement le jour de la Fête-Dieu.
66. Un « pied d'estal > en bois, pour tenir le bâton de chantre.
67. Quatre flambeaux à ressort pour le jour de la Fête-Dieu.
68. Un chandelier pascal avec son ressort et son piédestal
en bois (2).
(1) Voici, en effet, ce que marque le Diurnal de 1789 pour le jour
de la solennité du Très-Saint-Sacrement à la procession : Defevtur
SS, Sacramentum in ostensorio super tensam solide fixo quant humeris
suslinent octo canonici aliematim bini et bini casulis pretiosis induti ;
baldachini vittas tenent urbis œdiîes.
Les quatre échevins tenaient à honneur de porter le dais et huit
chanoines soutenaient sur leurs épaules le riche brancard sur lequel
était fixé Tostensoir.
Nous avons fait remarquer dans une étude précédente sur les
Drames liturgiques dans Péglise de Nevers [Bulletin de la Société
nivernaise, 2* série, t. VIII, p. 49 O, que cette pompe dramatique est
absolument contraire aux règles liturgiques.
L^ostensoir doit être portatif et porté par le célébrant, comme il se
pratique dans la liturgie romaine.
(2) Le cierge pascal, figure symbolique de Notre-Seigneur Jésus-
Christ lui-même, avait anciennement aux yeux mêmes des simples
fidèles une importance trop méconnue de nos jours. Nous avons eu
déjà l'occasion de foire connaître, diaprés les notes du manuscrit de
Londres provenant de la cathédrale de Nevers et publiées sous le
titre d'' Annales nivemenses dans les Monumenta Germaniœ historica
de Pertz, les deux inscriptions en grec et en latin qui devaient être
placées au onzième siècle sur le cierge de notre église. (Bulletin de la
Société nivemaise, Drames liturgiques, page 479, t. VIII.) On aime à
rappeler ce touchant symbolisme :
Hoc débet scribi in Pascha, in cereo: Fox . Lux; Zoé . Vita. C'est-
à-dire: Je suis la lumière et la vie.
On ne sMtonnera pas dès-lors du poids de 12 livres que devait avoir
le cierge pascal. Le Livre noir du chapitre le spécifiait ainsi dans les
charges du sacriste:
Item tenetur solvere quolibet anno , pro cereo paschali , duodecim
libras cerœ.
L'oubli des règles liturgiques et du symbolisme avait fait remplacer
— 276 —
69- Trois brancards avec leurs garnitures , savoir: celui
de saint Victor, saint Siméon, saint Arigle, et celui de saint
Cyr.
à la cathédrale, dès le siècle dernier, le beau cierge de cire par une
souche à ressort d'une hauteur démesurée, qui ne pouvait être
allumée qu'à grand'peine.
L'inventaire de l'église Saint-Ârigle de Nevers, dressé le 21 mai 1791
par les officiers municipaux, mentionnait aussi un grand cierge
paschal à ressort et son chandelier, le tout de la hauteur de vingt
pieds. (Archives communales de Nevers.)
La cathédrale a conservé l'ancien chandelier pascal en bois doré,
à pied triangulaire; il mesure un mètre soixante-cinq centimètres de
hauteur. L'écusson des Damas, à la croix de gueules ancrée sur
champ d'or, qui s'y retrouve deux fois élégamment sculpté et sur-
monté de la crosse et de la mitre des abbés, rappelle tout naturelle-
ment le souvenir du donateur, M. de Damas, grand-chantre, puis
doyen du chapitre, en même temps abbé de Saint-Léon jusqu'en 1786
et abbé d'Elau jusqu'à la Révolution.
Nous avons déjà, plusieurs fois, à propos du candélabre et du
cierge pascal, parlé des charges du sacriste de la cathédrale à l'endroit
du luminaire. Il est intéressant d'ajouter encore plusieurs textes
curieux, extraits du Livre noir, sur le même sujet :
o Item tenetur dictus sacrista fiacere et sustinere unum cereum
ardentem die, noctuque, ante magnum altare pro quo expendit
quolibet hebdomada très libras cers et aliquando plus, et débet esse
de cera nova.
• Item solvere unam candelam semper ardentem in quodam
stillicido prope magnum altare.
)) Item tenetur tradere candelas pro matutinis communibus; in
solemnitatibus tamen curatus tradere débet medietatem.
» Item tenetur ministrare duos cereos qui portantur per pueros
ante presbiterum officium divinum facientem.
» Item débet in Purificatione B. M. Virginis distribuere cereos ccrti
ponderis canonicis et ministris dictae ecclesise : communiter hoc
potest fieri pro novem libris cerae.
» Item est de antiqua consuetudine in ecclesia observatum quod
Episcopus, Thesaurarius et sacrista debent quilibet eorum unum
cereum de una libra cerœ, nocte, dieque, per totum annum ardentem,
ratione denariorum beati Cyrici ; necnon et unam candelam etiam
per totum annum nocte et die ardentem ante majus altare quam débet
idem sacrista. » {Livre noir, folio 21.)
J
— 277 -
70. Un drap mortuaire de cadis noir tout neuf , la croix
de cadis blanc.
71. Une niche avec trois aigrettes pour exposer le Saint-
Sacrement.
72. Six grands cierges à ressort avec ceux des lampes pour
les grandes fêtes , etc.
73. Deux chandeliers de bois doré à cinq blanches.
74. Deux bougeoirs argentés pour Y aigle (i).
75. Une boîte pour mettre l'encens.
•jS. Deux mitres violettes: une brodée en argent, l'autre
bordée d'un petit galon d'or. — 11 y avait à l'évéché une crosse
d^argent doré et deux mitres qui ont été prêtées à M. Tollet,
évéque du département. Les mitres et la crosse ont leur
étui (2).
(i) Dans le { V, n* 12, on a vu mentionné Taigle de cuivre du
pupitre.
{1) On lit dans le Registre des arrêtés du Directoire du département
de la Nièvre, à la date du 18 mars 1 791, au tnatin:
« M. Tollet , nouvellement élu évéque de ce département , a repré-
senté au Directoire qu'ayant reçu ce matin la confirmation canonique
de M. Laurent, évéque du département de TAUier, il se disposait à
partir pour la capitale afin de se faire sacrer; que, comme il lui faut
pour cette cérémonie des mitres, une crosse et un Pontifical, il
demandait que le Directoire ordonnât provisoirement la levée des
scellés apposés le 1 1 décembre dernier sur le trésor de la cathédrale
de cette ville, où sont déposés les divers ornements à Tusage des
évéques de ce diocèse, afin d'en extraire les mitres, crosse et Pontifical
ci-dessus, à la charge de les réintégrer à son retour dans ledit trésor,
s^îl est nécessaire. La matière mise en délibération, les administra-
teurs, considérant qu^il n^y a pas d^nconvénient à faire extraire du
trésor de cette cathédrale lesdits objets, arrêtent que demain, à dix
heures du matin, il sera procédé à la reconnaissance et levée des
scellés... >
La crosse, remise à M. Tollet, est demeurée depuis dans sa famille;
nous Pavons vue à Nevers chez M. Lucien Gueneau.
Elle est assez bien conservée et ressemble à la plupart des crosses
du treizième siècle. La volute est formée par un serpent enroulé
tout revêtu de belles écailles d'azur; un personnage debout le foulait
— 28o —
— une croix de main, ^ quatre chandeliers d'acolytes, —
huit flambeaux de table pour les messes en hiver, -— deux
encensoirs et une navette, «- quatre bénitiers, dont deux ne
sont pas argentés.
Ornements à Saint* Victor.
98. Un ornement composé de trois chapes, deux tuniques,
une chasuble fond blanc et rouge, galon d'argent.
99. Trois chapes violettes et trois vertes.
100. Cinq chasubles, dont une blanche, une rouge, une
verte, une violette, une noire.
loi. Un dais, un graduel, un psautier, un antiphonaire,
deux missels.
c Je soussigné, vicaire épiscopal, reconnais que tous les
effets énoncés dans le présent inventaire sont dans ma
possession, ensemble ceux de Saint-Victor, et déclare me
charger de les représenter aux premières réquisitions. A
Nevers, le huit décembre mil sept cent quatre-vingt-douze.
— GoussoT, vie. >
102. Bien d'autres objets précieux, provenant des églises
paroissiales ou des communautés, avaient été portés au trésor
de Saint-Cyr. Les inventaires dressés par les commissaires
du district signalent, en particulier, un reliquaire en forme
de croix, renfermant des reliques de saint Arigle, provenant
de la ci-devant paroisse Saint- Arigle , qui était très-riche; et
plusieurs croix d^argent, Tune dorée et ornée de quatre
pierres bleues , une autre aussi d'argent ayant un Christ ,
d'un côté, et saint Vincent, de l'autre.
io3. Dans presque toutes les églises se trouvaient deux
grands plats ou bassins de cuivre, Tun servant aux fonts
baptismaux, pour recevoir Teau des baptêmes, l'autre à
distribuer le pain bénit.
104. De même, dans toutes les églises il y avait des croix
à main d'argent, quelquefois en vermeil; ainsi à Saint-
Martin. Dans cette dernière église, qui était aussi très-
— 28l —
richement décorée^ les commissaires notent deux paix
d'argent, un bâton de chantre couvert d^argent, deux lampes
d^argent, deux reliquaires envoyés à Saint-Cyr; huit pièces
de tapisserie dans le chœur, représentant la vie de saint
Martin , une niche fond rose urgent et le chapeau en soie
fond or, garnie de frange en or, avec ses quatre aigrettes en
émail, ce qui nous rappelle une de nos vieilles industries
nivernaises, etc.
Terminons donc en exprimant, encore une fois, le regret
de n'avoir pu retrouver qu'un si petit nombre d'objets ayant
appartenu à notre beau trésor de Saint-Cyr; mais on ne
saurait s'en étonner dans une cité qui eut pour proconsul
le trop célèbre Fouché, de sinistre mémoire.
Le 29 vendémiaire (20 octobre 1793), il envoyait une
députation déposer au tribunal révolutionnaire de Paris
1,091 marcs en or et en argent, provenant, disait-il, de la
dépouille des églises et des offrandes patriotiques des
citoyens.
Le 21 brumaire (i i novembre), les députés de la Nièvre
apportaient à la Convention pour un million d'ornements
d'église et 900,000 livres en numéraire, échangé contre des
assignats.
Et, en quittant Ne vers, le même Fouché écrivait encore à
la Convention : € Les offrandes continuent d'abonder à
Nevers sur l'autel de la Patrie; je vous fais passer un
quatrième envoi d'or et d'argent, qui s'élève à plusieurs
millions (i). n
L'abbé BOUTILLIER.
Erratum. — A la 3« ligne de la note 4 de la page 234, le lecteur ne
manquera pas de remplacer le mot accessoires par encensoirs, tra-
duction de turribulos.
(1) Moniteur universel du 8 novembre 1793.
T. m, 3« série. 36
— 282* —
DES
ANCIENNES CORPORATIONS OUVRIÈRES
DE NEVERS.
Notre érudit vice-président nous a demandé de présenter
à la Société une notice sur les anciennes corporations
ouvrières de Nevers , dont il ne peut se charger lui-même,
en raison du repos qu'exige l'état accidentel de sa santé.
Nul ne pouvait traiter ce sujet avec plus de supériorité que
lui, et c'eût été une bonne fortune pour tous de voir sortir de
sa plume l'étude vivante, colorée, approfondie, des arts et
métiers à Nevers avant 1789.
L'espoir que la Société ne nous refuserait pas son indul-
gence et voudrait bien oublier quel auteur aurait dû
attacher son nom aux recherches dont nous présentons ici
la modeste esquisse , cet espoir seul a pu nous déterminer à
ne pas résister aux prières d^n ami.
Nevers était au nombre des villes en jurande, c'est-à-dire
où il y avait apprentissage et maîtrise dans les corps d'état
des arts et métiers.
C^était Torganisation légale du travail au dernier siècle
encore: la grande industrie, bien que datant de Louis XI ,
n'était pas à beaucoup près ce qu'elle est aujourd'hui. Mais
cette organisation ne s^appliquait pas, loin de là, à tous les
villages, bourgs ou villes du royaume (nous l'avons établi
ailleurs) (i), et dans un grand nombre de villes, du reste,
tous les métiers n'étaient pas jurés. Citait le cas de Nevers.
(0 Unions de la paix sociale dans le Eerry, le Bourbonnais et le
Nivernais, fascicule de 1887.
— 283 —
On y voit les orfèvres établis en 141 9 (i) et pourtant
ÏAlmanach des monnoies de 1787 (2) nous apprend que
leur communauté fut érigée seulement en 1757.
Le régime des jurandes remonte dans notre cité à une
haute antiquité. Dès le quatorzième siècle, la boucherie est
qualifiée dt jurée (3) ; il est vraisemblable que ce n^était pas
là une exception.
Les copies prises par M. le Curé de Coulanges des contrats
d^apprentissage et des procès - verbaux de réception à la
maîtrise , copies qu'il a bien voulu nous communiquer (4) ,
permettent, à défaut des statuts que nous n*avons pas ^ de
reconstituer les traits principaux de la physionomie des
anciennes corporations ouvrières de Nevers.
Constatons d^abord l'existence de la confrérie, forme
religieuse de Tassociation professionnelle. Indépendamment
des confréries de piété , les métiers avaient la leur : — saint
Côme et saint Damien, pour les chirurgiens^ à Saint- Arigle ;
— saint Jacques et saint Christophe , pour tous les artisans
porteurs à col, à Saint-Victor; — saint Claude, dans la
même paroisse, érigée sur la demande de Claude Bédot,
taillandier, de Claude Jean, boulanger et pâtissier, et de
plusieurs autres boulangers; — saint Pierre-ès- Liens , pour
les serruriers, en l'église Saint-Pierre; — sainte Anne, pour
les tonneliers et menuisiers, en la même église (5) ; — saint
Simon et saint Jude, pour les corroyeurs (6).
La confrérie se présente à nous avec les caractères observés
partout. Elle est l'âme du métier ; les membres des cor-
porations versent une cotisation pour subvenir à ses
(i) Boutillier, InvenU som. des arch. com., CC. 23.
(2) Page 169.
(3) Boutillier, Inveni» som> des arch» com,, HH. 5.
(4) Nous les citons sous la rubrique des minutes du notaire qui
avait reçu les actes.
(5) Boutillier, Arch, par, de Nevers, p. 329, 285, 209 et 206.
(6) Parmentier, Arch. de Nevers, I. 295. — Boutillier, Jnvent.
som, des arch, com,, BB. 26.
/
— 284 —
dépenses (i); ils apportent la plus grande sollicitude à
embellir leur chapelle. En i685, l'autel de la confrérie
de Sainte-Anne, en Téglise de Saint- Pierrc-ès- Liens, est
ornée de nouveaux parements par les soins des maîtres
tonneliers (2). Les métiers sont jaloux de porter les insignes
de la confrérie à la procession de la Fête-Dieu. Dans ce but
les corroyeurs a ont fait faire un bâton où est placé la figure
des SS. Simon et Jude et une enseigne blanche et bleue avec
deux torches », et ils supplient Mgr TEvêque de leur
permettre de porter le tout à ladite procession « comme font
les maîtres des autres métiers», et d'y c tenir le rang qui leur
sera ordonné (3) ».
La confrérie exerçait une action moralisatrice sur les
membres de tous les métiers , par suite de la confraternité
naturelle qui règne entre gens de même situation sociale, et
il n^y a pas lieu d^étre surpris de voir Christophe de Rossel,
apprenti orfèvre, âgé de dix-sept ans, mourir religieuse-
ment parce qu'il se confessait fort souvent (4). L'instruction
laïque, gratuite et obligatoire, ne nous a pas encore amené là.
La famille professionnelle se composait du maître, du
compagnon et de Tapprenti. Parlons d'abord de celui-ci et
voyons la nature des relations qui s'établissaient entre lui et
le patron :
— Noble homme Diedes, maître émailleur, promet de
prendre Etienne Faulquier comme apprenti durant six ans,
« plus le nourrir, loger et habiller d'habits honnestes selon
son état (5) ».
— Clerc, maître boulanger, s'engage à « tenir en sa
maison » son apprenti Martin Gaudet, c le nourrir, coucher
et exercer pendant deux ans (6) ».
(i) Minutes Taillandier, 27 avril et 12 mai 1679,
(2) Boutillier, Arch. par, de Nevers, p. 206.
(3) Parmentier, Ouv. cit., I, p. 293.
(4) Boutillier, Arch» par,, p. 67.
(5) Minutes Brisson, 3 juin 1596.
(6) Minutes Casset, 27 août i655.
ï
— 285 —
— Pierre Jermeau, maître charron, prend c en sa
maison >, pendant trois ans pour apprenti, Etienne Pluvost,
et s'engage à lui « enseigner l'art et mestier de charron et à
le nourrir, loger et blanchir (i} ».
— Honorable homme Jean Petit, marchand poeslier et
chauderonnier, c s^oblige à nourrir, loger, chau£fer et blanchir
en sa maison » Sébastien Lesort, son apprenti (2).
— Charles Carimentrand, chaudronnier, prend pour
apprenti René Randon et promet le loger, nourrir et faire
blanchir pendant ses cinq années d^apprentissage (3).
— Dame Hélène Gauclair, maîtresse couturière, prend
pour apprentie Marie Tixier et s'engage, pour trois ans, à
la nourrir à sa table, la coucher, blanchir, luy apprendre à
lire et à écrire et enseigner la couture (4}.
— Jacques Guillaumin , maître cuisinier, s'engage envers
messire Pierre de Jaucourt, chevalier, seigneur, baron
Despeuilles, Hubon, Brinon-les- Allemands, à prendre pour
apprenti Hugues Chevon, serviteur dudit sieur Despeuilles,
et à le nourrir, loger et blanchir, à ce titre pendant dix-huit
mois , et ledit Chevon est tenu de loger chez son patron (5).
— Michel Dumont, marchand, maître faïencier, prend
en sa maison Etienne Martin pour apprenti, et sVngage à le
nourrir, loger et faire blanchir pendant la durée de son
apprentissage, fixé à quatre années (6).
— Dhéré, marchand, prend en apprentissage pendant trois
ans Jean Mouillefer, fils d'un notaire de Saint- Péreuze ,
pour lui apprendre à vendre et débiter les marchandises dont
il fait commerce, et sera tenu de le nourrir, coucher,
blanchir et chausser (7).
(i) Minutes Taillandier, tome III, 19 août i68a.
(2) Minutes Taillandier, 12 mai 1679.
(3} Minutes Taillandier, 21 décembre 1699.
(4) Minutes Taillandier, 18 octobre 1680.
(5) Minutes Taillandier, 3o décembre i653.
(6) Minutes Taillandier, tome LU, 5 mai 1684.
(7) Minutes Taillandier, 28 mai 1672.
-* a86 —
^ Nicolas Bourgoing prend Pierre Clerc pour apprenti
pendant deux ans , et s'engage à lui montrer c Testât et
mestier de mégissier, esgalletier et boursier, et pendant ce
temps à le coucher, lever, blanchir et nourrir, selon sa
qualité (i) >.
— Qaude Chevalier, menuisier, prend le jeune Lhermitte
pour apprenti pour quatre années, et stipule qu^il le nourrira,
couchera et blanchira (2).
— Claude Bertault, savetier, prend pour apprenti pendant
deux années Jehan Rat, et sbblige pendant ce temps à le
nourrir, coucher et lever (3).
— Léger Simonneaut, maître sellier, s'engage envers
Mgr de Chéry, évéque de Nevers, à prendre pour apprenti
pendant deux années François de Marienne, domestique du
prélat, et pendant ce temps à ( le nourrir, coucher et
reblanchir, selon sa qualité (4) >.
— Même contrat, au profit du jeune Juste, passé entre
messire Paul-Louis de Rumigny et Pierre Bûché, maistre
sellier (5).
— Guillaume Thilloux, maître tailleur de pierre, prend
pour apprenti pendant trois années le nommé Girard et
s^engage tout le temps à « luy administrer en son hostel
lieu , feu et nourriture (6) >.
De tous ces exemples , il résulte que Tapprenti prend place
à titre de fils au foyer du maître, et que celui-ci remplit à
son égard les fonctions de père en même temps qu'il lai
enseigne le métier, c'est-à-dire qu'il lui donnait Téducation
morale et Tinstruction technique.
La durée de l'apprentissage , dans la totalité des contrats
que nous avons eu sous les yeux , varie entre dix-huit mois ,
(1) Minutes Casset, 3o mai i635.
(2} Minutes Taillandier, 27 avril 1679.
(3) Minutes Casset, i5 mars i635.
(4) Minutes Taillandier, II, 47 (i656-i66o).
(5) Minutes Taillandier, LIV, 22 mai 169 1.
(6) Minutes Taillandier, XLIV, 4 août i635.
— 287 -^
deoi, trois^ tjuatre) cinq et six annte; toujoim eonaécuthres
et continues.
Dans ces mêmes contrats on remarque deux fois qu'il osi
dit expressément que Tapprenti paye pour le droit de
chapelle ou de la cire pour la confrayrie [\), Nous
ferons remarquer que, prévue ou non dans les contrats
d'apprentissage, la contribution de Papprenti aux dépenses
de la confrérie était de règle dans les métiers en jurande, par
la raison que l'apprenti faisant partie de la confrérie comme
le maître et le compagnon participait aux mêmes charges
qu^eux pour le service du culte.
L^apprenti ne gagnait rien de fixe; toutefois, dans le
contrat par lequel Dièdes , maître émailleur, prend Faulquier
pour apprenti, il est convenu que celui-ci recevrei la dernière
année, c'est-à-dire la sixième, un écu par mois, soit douze
écus par an (2).
L^obéissance de Tapprenti vis-à-vis du patron était exigée
panout; on en rappelle néanmoins Tobligation dans nos
contrats, en celqui est civil et honnête {% en tout ce qui lui
sera commandé de civil et honnête ^4), en ce qui sera de
la raison (5], en ce qui sera pour le bien et avantage de la
profession (6) ; toutes formules qui rappellent un principe
invariablement en vigueur.
Les /olours txjoliveteT^ de Tapprenti, ses escapades en un
mot, que le bon Etienne Boileau dans le Livre des mestiers
regardait d'un œil si paternel, se produisaient à Nevers
comme à Paris, les enfants sont les mêmes partout. Aussi,
quelques contrats obligent-ils le père à représenter et
réintégrer (7) Fenfant pour continuer l'apprentissage ; mais
•
(i) Minutes Taillandier, la mai 1679 et 17 avril même année.
(2) Minutes Brisson, 3 juin iSgô.
(3) Minutes Taillandier, 12 mai 1679.
(4) Minutes Taillandier, LU, 5 mai 1684.
(5) Minutes Taillandier, LIV, 18 mai 1692.
(6) Minutes Taillandier, 22 mai 1691.
(7} Minutes Taillandier, 27 avril et 12 mai 1679; LU, 5 mal 1684.
— 288 —
la coutume devait suppléer au silence des engagements
sur ce points sans cela les ateliers se seraient désorga-
nisés.
Les contrats d'apprentissage étaient passés devant notaire,
parfois en présence de témoins (i), et moyennant un prix.
Généralement, ce prix était payé en argent; toutefois, dans
la convention aux termes de laquelle le sieur Gousin,
chirurgien, prend pour apprenti Etienne Berthault, le prix
fixé est de soixante livres tournois et deux porcs (2);
ailleurs, le prix convenu est de trente-deux boisseaux de
froment, mesure de Nevers, payable par semaine, et dans le
cas oîi le maître ne se contenterait plus du blé , la caution
de Fapprenti est tenue de payer chaque semaine seize sols
par boisseau de blé.
Parfois des épingles sont ajoutées au prix (3) pour
madame la femme du maître (4J. Enfin , lorsque le prix est
payé d^avance, on prévoit Téventualité de la mort de
Tapprenti pendant l'apprentissage, de manière à ce que
fraction du prix calculée au prorata de la durée effective
de l'apprentissage soit sujette à restitution par le maître (5).
Du moment que Papprentissage n^était pas gratuit, bien
des enfants issus de familles pauvres se seraient trouvés dans
Pimpossibilité de suivre la carrière des arts et métiers. Cette
situation inspira en leur faveur des dispositions charitables.
En 1566, Jean Tenon, bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier,
fils de Guillaume Tenon , marchand à Nevers, léguait une
somme pour la construction d^un hôpital joignant le collège...
c pour y estre instruits et nourris les enfants mâles des
pauvres habitants de ladite ville et fauxbourgs de Nevers et
(i) Minutes Taillandier, XLIV, 25 mai i638; — minutes Casse(,
i5 mars i633.
(2) Minutes Taillandier, XLIV, 25 mai i638.
(3) Minutes Casset, 27 août i655 ; — > minutes Taillandier, 18 octobre
1680.
(4) Minutes Casset^ 3o mai i635.
(5) Minutes Taillandier, 18 octobre 1680; — XLIV, 4 août i635.
de la paroisse de Nanvigne , et ce à la formalité de rhôpiud
de la Trinité, à Paris (i). >
La ville étant trop obérée pour pouvoir construire à neuf
un hôpital, elle convint avec les héritiers du sieur Tenon
qu'une maison proche Thôtel-Dieu, appelée la maison de
Saint^Louis, servirait d'hôpital. Mais que se passait-il donc
dans celui de la Trinité, à Paris, pour qu'on Timitât à
Nevers? En vertu de Tédit de Henri II de juin i554, le^
enfants pauvres qui y étaient admis gagnaient la maîtrise en
y travaillant un certain nombre d'années. Différentes villes^
Thiers entre autres , adoptèrent, à l'exemple de Paris, les
mêmes dispositions au profit des enfants pauvres de la cité
placés dans leur hôpital. Cest à cet ordre de faits pour
Nevers que se rapporte le passage suivant de Parmentier (2) ;
• Selon Tétat actuel des choses , Phôtel-Dieu est obligé,
moyennant ces 406 livres de rente , de faire apprendre tous
les ans un métier à trois pauvres enfants, dont deux doivent
être de la ville ou des faubourgs de Nevers, et le troisième
de Nanvigne, aujourd'hui Menou, à la nomination des
seigneur ou dame du lieu. Outre le prix de l'apprentissage
on leur fournit à chacun une chemise, habit, bas, souliers
et chapeau en entrant chez le maître (3), et un habit complet
lorsqu'ils ont fini leur temps.
» Ces enfants doivent être légitimes, instruits de la
religion catholique, âgés de quatorze ans et véritablement
pauvres...
» La cérémonie de l'élection des trois enfants se fait tous
les ans, le jour de Saint-Louis, à trois heures après midi,
(1) Parmentier, Ouv. citéjill. p. 38.
(2) Ouv. cité, II, p. 43.
(3) Ce passage indique que Tenfiant travaillait chez un maître de la
ville. Il ne pouvait en être autrement, puisque trois enfants seulement
chaque année entraient en apprentissage. A Paris , le nombre des
enfanta étant très-considérable, les maîtres qui les formaient dans
rhdpital de la Trinité y résidaient.
T. 111, 3* série. 37
— 290 —
dans Péglise de Saint-Didier, en présence de MM. les Maire
et Echevins. Elle commence parle Vent Creator. On appelle
ensuite les enfants qui ont été auparavant convoqués dans
les paroisses de la ville. On fait autant de billets qu^il y a
d^enfants, parmi lesquels billets il y en a deux sur lesquels
sont écrits ces mots : Dieu fa élu , et sur les autres : Dieu te
console. On met tous les billets dans un chapeau et les
enfants tirent Pun après Pautre, puis on chante le TeDeum.
Après quoi on lit l'acte de nomination du troisième
enfant, taite par le seigneur ou la dame du marquisat de
Menou.
» On conçoit que ces enfants ont reçu le nom d'Enfants
de saint Louis, ou du jour de la cérémonie de leur élection
ou de ce que la maison de Saint-Louis était destinée pour
rhabitation de ceux qu'ils représentent. On les appelle aussi
enfants de la Trinité, ou parce que leur premier établisse-
ment devait être conforme â' celui de Phôpital de la Trinité,
à Paris, ou parce qu'on doit les habiller de bleu en les
mettant en apprentissage. »
L'élection se fit pour la dernière fois en 1790 (i).
On trouvera peut-être que nous nous sommes étendu
longuement sur ce qui concerne l'apprenti ; mais l'appren-
tissage étant la base du métier, il était nécessaire d'entrer
dans des détails qui sont inutiles pour les autres membres de
la famille professionnelle.
Le compagnon, comme l'apprenti, prenait part au foyer do
maître. Honorable homme Boursier, maître émailleur à
Nevers, s'engage envers Simon Broddeur, garson (2)
émailleur y c à lui apprendre Tart et estât d'émailleur sans lui
cacher ni celler aucunes choses pendant deux années », et sera
c tenu le coucher et lever honnêtement et (le fournir), selon
sa qualité, d'habits, de solliers, bas, haults-de-chausse,
(i) Boutillier, Arch, par,, p. 85.
(2) Terme équivalante celui de compagnon.
— 29' —
pourpoint, manteaux etchappeaux pendant ledit temps(i). %
Ce qui constituait de véritables gages. Nous avons du même
maître, sauf ce qui touche le vêtement, un engagement
analogue vis-à-vis Nazare Berthier, compagnon émailleur,
qui reçoit pour gages la somme de soixante-douze livres
tournois (2).
On voit par ces deux exemples que le compagnon jouissait
des mêmes avantages que l'apprenti dans la maison du
maître.
La vie à son foyer était la règle de la famille profession-
nelle, nous Tavons établi déjà pour plusieurs points de la
France (3), et voici un contrat passé à Tours, en i6o3, qui
corrobore ces piemières indications : Jehan Bredin entre à
titre de compagnon chez Pierre Courtoys, maître peintre-
émailleur de cette ville, pour durant une année c se
gouverner avec ledit G>urtoys comme un compagnon doit et
est tenu faire », et celui-ci c le logera, le nourrira, le fournira
de feu et lumière comme en tel cas appartient à un de sa
qualité (4) ».
Ces traditions se sont prolongées ici même jusqu^à nos
jours. Il y a peu d'années, un industriel de Nevers, aujour-
d'hui retiré des afifaires, nous racontait, en parlant de ce qui
se passait chez lui vers 1860: c Nos jeunes gens, disait-il,
étaient logés à la maison et nourris à notre table. Ils rece-
vaient 3o fr. par mois, et pourtant à la fin de Tannée ils
avaient plus mis d'argent decôtéque les ouvriers d'aujourd^hui
payés 5 fr. et 6 fr. par jour. » Cela n'a rien de surprenant,
La vie de famille] ne laissait pas contracter l'habitude du
café ou du cabaret; elle garantissait le compagnon et
Tapprenti des dangers de l'isolement, elle établissait entre le
(i) Minutes Pelle, 26 octobre 161 1.
(2) Minutes Pelle, i3 décembre 1612.
(3) Voir L'Atelier dans les anciens corps de métiers publié dans
VAssociation catholique, numéro du i5 mars i885.
(4) Giraudet, Les Artistes tourangeaux, p. 48.
maître et ses subordonnés une union , disons mieux , une
affection que nos temps actuels ne connaissent plus et qui
était le garant de la paix de Tatelter.
Le premier devoir du maître était de donner Texcmple. Il
n^y manquait pas. Les documents qui précèdent permettent
de rinférer sans qu'il soit nécessaire pour le constater d entrer
dans un ordre de preuves qui auraient l'inconvénient
d^ajouter à la longueur de cette notice. Nous nous abstien-
drons donc de détails à ce sujet ; mais il est un point pour-
tant que nous tenons à mettre en lumière. Nous voulons
parler de la vigilance que Ton apportait, dans cet ancien
régime si décrié par un certain monde, à pousser Taspirant
à la maîtrise à augmenter la somme de ses connaissances
techniques. On voulait que Tatelier local fût à la hauteur du
travail général du royaume , afin d'éviter une infériorité qui
autait placé la cité dans des conditions économiques défavo-
rables. De là le tour de France pratiqué dans les métiers
jurés. En 1419, les compagnons cordonniers de Troyes c de
plusieurs langues aloient et venoient de ville en ville ouvrer
pour apprendre, congnoistre^ veoir et savoir les uns des
autres (i) > Chez les maréchaux-ferrans et plusieurs aultres
mestiers d'Alsace, le compagnon ne pouvait parvenir à la
maîtrise qu'à la condition d'avoir roulé trois ans et travaillé
deux ans à Saverne (2). A Nevers, <]tans le métier de
tannerie (de 1637 à 1646) le candidat ne pouvait se présenter
à la maîtrise s'il n'avait « veu et couru le f>ain et bonnes
villes du royaùlme pendant une, deux ou trois années (3) >.
L'obligation de parcourir la France dans le bm de s'instruire
Assurait l'apprenti du futur maître qu'il serait au fait des
meilleures méthodes de travaiL
Pour celui-ci, rentré à Nevers, il demandait aux maîtres
(i) Ord. roy. de mars 1419.
(2) Hanauer, E(ud. écon, sur V Alsace anc. et mod., !I, p. byS,
(3} Minutes Taillandier, XLIV, 4 déc. 1637; — XLïV. 8 fév. 1639 ; -
i3 nov. 1646.
— 2g3 —
de sa corporation à faire lechef^d^osuvre, et alors, en présence
d^un notaire royal , assisté de témoins , ses maîtres lui en
concédaient l'autorisation. Le récipiendaire recevait un garde,
qui avait pour mission de veiller à ce qu^il ne commît
aucune fraude dans ses opérations, puis, le ciaef«d'œuvre
terminé, les maîtres Texaminaient; s'il était admis le candidat
obtenait le titre de maître sur-le<bamp et, sans désemparer,
prêtait c le serment en cas requis et accoustumé de bien et
fidèlement exercer ledit art et mestier, conformément aui
statuts et privilèges (i) ».
Ce qui se passait pour la tannerie indique évidemment
ce qui avait lieu pour les autres métiers.
En résumé, la religion était, sous la forme de la confrérie,
U base de Tassociation professionnelle, et les gens de métier
manifestaient volontiers leur amour pour elle.
Les engagements passés entre maître et compagnons ou
apprentis témoignent du dévouement du premier envers ses
inférieurs , du respea et de Taffection des seconds pour leur
aapérieur.
Le maître, préoccupé de ses devoirs vis-à-vis de ses subor-
donnés, se faisait une loi de ne les point divertir à autre
pacation (2) qn^à leurs travaux professionnels.
Enfin , de laccord existant entre les membres de Patelier
et de leur vie en commun au même foyer naissaient la paix
et la concorde entre eux.
Nous pourrions nous arrêter ici.
Mais nous nous reprocherions , à propos des gens de
métiers , de ne pas emprunter deux dernières citations aux
Archives paroissiales de Nevers, oix nous avons déjà si
largement puisé. Cet important recueil, en faisant passer
sous les yeux les grands actes de la vie humaine , met en
relief des mœurs et des coutumes encore peu connues de
l'ancienne France. En ce qui concerne les travailleurs, on y
(i) Minutes Taillandier, XUV, 4 décembre 1637.
(2} Miautes Taillandier, XLIV, 4 août i635.
— 294 —
voit deux choses curieuses. La première , c'est que les gens
des métiers jurés occupant une place officielle dans TEtat
affirment sans honte leur situation chaque fois que besoin
est. On ne faisait pas alors suivre comme aujourd'hui de la
sotte qualification de propriétaire le nom propre qui rougit
de sa profession présente ou passée. Quiconque est poeslier'
chauderonnier sait qu'il a des privilèges, une place dans les
cérémonies publiques, et il se dit nettement poe^/ier-cAoïi-
derormier. La seconde observation, c'est que dans cette
société si rigoureusement hiérarchisée , les cœurs n'étaient
pas séparés; Pévéque servait de parrain au fils du tailleur
de pierre (i). Etaient encore parrain et marraine de la fille
d'un maître à danser : noble François Tenon de Fonfay,
écuyer, baron de La Guerche, et haute et puissante princesse
Anne de Gonzagues, duchesse de Nivernois et de Rethe-
lois (2). Ce mélange des classes avait la plus heureuse
influence sur les rangs inférieurs de la population. Il élevait
les cœurs, les portait aux nobles sacrifices, les enflammait
pour les grandes causes , et c'est pourquoi les milices
ouvrières de Nevers se signalèrent par leur attitude martiale
à Bouvines; en sorte qu'un historien a pu dire d'elles avec
vérité, à propos de cette bataille : Nevers, dont les hautamts
VALAIENT DES CHEVALIERS (3).
Hâtons de tous nos efforts de pareils rapprochements,
la classe ouvrière y verra oîi sont ses véritables amis, nous
n'entendrons plus les sauvages revendications qui jettent la
société dans l'efifroi, la paix sociale renaîtra sur notre sol et
la France retrouvera sa grandeur.
HippoLYTE BLANC.
(/) Archives par. de Nevers, p. i55.
(2) Archives par,^ p. SSg.
(3) Capefique, Hist, de Philippe'Aug.y 3* édit., II, p. 143.
SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1887.
Présidence de M. le comte db Soultrait, président.
Étaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président ; Roubet , président honoraire ; Tabbé
Boutillier, vice-président ; E. de Toytot, secré-
taire ; Duminy, archiviste ; Rogçr de Quirielle,
le docteur Subert, Adolphe de Villenaut, Octave
de Villenaut, Langellé, de Flamare, H. Blanc,
de Lespinasse.
M. le Président annonce à la Société qu'il a
reçu, par Tinterai édiaire de la préfecture et de la
mairie de Toury, la réponse aflSrmative du maire
de Corbigny au sujet des sculptures qui avaient
été demandées. La Société pourra donc les faire
prendre quand elle le voudra.
Lecture est donnée du programme du congrès
des sociétés savantes pour 1888. La Société a reçu
aussi le discours de M. SpuUer, ministre de Tins-
truction publique et des beaux-arts, au congrès
des sociétés savantes, le 4 juin 1887.
La Société nouvelle d'histoire naturelle d'Autun
sollicite la faveur de devenir correspondante de la
Société nivernaise.
Cette demande est favorablement accueillie.
M. H. Blanc fait hommage à la Société d'un
mémoire qu'il vient de publier sur les corporations
ouvrières avant 1789. Ce mémoire a été lu à la
réunion régionale de Bourges le 21 avril 1887.
M. l'abbé Marillier, vicaire général, offre à la
— 39^ —
•
Société son importante monographie de Corbigny.
M. le Président le remercie et lui adresse ses
félicitations pour ce beau travail.
M. Tabbé Boutillier lit une notice biographique
sur notre regretté confrère M. Tabbé Clément,
curé de Châtillon-en-Bazois, décédé en juillet 1887.
M. Tabbé Boutillier signale ensuite deux impor-
tants travaux insérés dans le tome XIV (1886-87)
des Mémoires de la Société des antiquaires du
Centre. Dans le premier, relatif aux seigneuries
de Jussy - Champagne et de Quinquempoix ;
Tauteur, M. le baron Thierry de Brimont , publie
des documents très-importants sur la famille de
Gamaches et concernant le Nivernais. Dans le
second, M. Pierre Dubois donne la biographie du
Père Terrasse Desbillons , Jésuite , ancien profes-
seur au collège de Nevers, de 1729 à 1751, connu
surtout par son recueil de fables latines. Sa biblio-
thèque de 20,000 volumes est aujourd'hui conservée
à Manheim, où il s'était réfugié à la dispersion
de la Société.
M. l'abbé Boutillier signale aussi dans le procès-
verbal de la Société historique du Cher (séance
du 5 août 1887) une note sur les vases de phar-
macie du dix-septième siècle, article d'ailleurs
très-court et dont voici le texte :
VASES PHARMACEUTIQUES DU DIX-SEPTIÈME SIÈCLE.
M. Francis Pérot, de Moulins, membre correspondant de
la Société, fait connaître la découverte assez récemment taite,
dans une cave de la rue Bourbonnoux, à Bourges» d^une
- S97-
cenaine quantité de vases en terre commune qu^il estime
avoir été employés au dix-septième siècle à des usages
pharmaceutiques. Six dessins au crayon permettent d'appré-
cier les formes de ces vases, qui représentent ce qu'on désigne
communément par les noms d'aiguière, de pot-au-feu, de
pot à confiture et d'écuelle à anses.
Des fragments de poterie nivernaise polychrome trouvés
en compagnie de ces céramiques, et que notre correspondant
juge en être contemporains, lui ont permis de leur assigner
la date qu'il leur attribue.
La destination des vases en question lui paraît indiquée
par la nature des substances desséchées qui s^y trouvaient
encore lorsqu'on les a découverts. C'était, lui a-i-il semblé,
le benjoin, la manne, le tannin, les résines parfois liées par
l'axonge.
D'après ces appréciations, cette découverte offre cet intérêt
qu'elle nous met en présence de vases de la vieille apothi-
cairerie, remplacés depuis par la pompeuse faïence aux
riches couleurs, importée d'Italie en France par les ducs de
Nevers.
Ajoutons que plusieurs de ces vases ont été
achetés par M. Montagnon.
M. de Flamare propose à la Société Timpression
de Tinventaire des archives du château de liman-
ton y qui renferme une pièce du treizième siècle et
plusieurs très - importantes du quatorzième et
surtout du. quinzième siècle, notamment un
inventaire de la verrerie de la Boue y dont il cite
quelques passages.
M. Léopold Delisle, dans une lettre adressée à
M. de Flamare, exprime le désir de voir les
sociétés de province entrer dans cette voie de
publications.
T. ui, 3* série. 38
M. Octave de Villenaut insiste pour qu'on
imprime d'autant plus ces sortes de travaux que
ce sont les .seuls pour lesquels on reçoit des
subsides du ministère.
La Société décide qu'il y a lieu de faire
imprimer le travail de M. de Flamare, en le lais-
sant libre de choisir les pièces qu'il croira les plus
intéressantes à publier en outre de l'inventaire,
sans d'ailleurs imprimer tout in extenso.
M. le docteur Subert donne lecture d'une
communication dans laquelle M. V. Gueneau
annonce qu'il a eu la satisfaction de trouver dans
les archives de Loudun bon nombre de familles
nivernaises, dont il cite seulement deux : les
Frezeau de La Frezelière et les Doublet de
Persan, qui ne figurent ni dans le Moroand de
M. l'abbé Baudiau ni dans V Armoriai du
Nivernais de M. de Soultrait. M. Gueneau entre
dans de longs détails sur la famille Frezeau et
parle aussi de la famille Doublet de Persan, qui
aurait possédé au dix-huitième siècle la seigneurie
de Dun-les-Places.
M. de Soultrait répond à cette communication,
dans laquelle il est mis en cause ainsi que feu
M. Baudiau, en s'étonnant que M. Gueneau,
ordinairement si exact dans ses petites monog^-
phies , ait classé parmi les familles nivernaises les
Frezeau de La Frezelière qui, au dire même de
l'auteur de la lettre, n'ont jamais rien possédé en
Nivernais. En eflFet, M. Gueneau, qui cite bon
nombre de membres de la famille Frezeau avec
— 299 —
lenrs titres et qualités , n'en mentionne pas un seul
qui ait habité notre province. Ajoutons toutefois
que, au commencement du dix-septième siècle,
Anne Frezeau épousa René de Rousselé, baron
de La Roche-Milay, alliance dont, en eflFet, ne
parle pas M. Baudiau.
Mais cette alliance ne constitue pas pour les
Frezeau la moindre nationalité nivemaise.
M. Gueneau aurait, à plus juste titre, reproché
à C Armoriai du Nivernais d'avoir omis les
Rousselé, qui possédèrent l-a Roche-Millay pen-
dant trois générations. Mais l'auteur dudit Armo-
riai n'a pu mettre dans son ouvrage que les
familles qui ont habité la province assez longtemps
et y ont eu des alliances en certain nombre. Or,
tel n'est pas le cas des Rousselé, sur lesquels, du
reste , les livres et les archives se taisent, et dont
on ne connaît ni l'origine ni les armoiries.
Quant aux Doublet de Persan, aucun document
nivernais ne leur attribue le fief de Dun-les-Places,
qui passa des Montmorillon aux Montsaulnin,
lesquels le possédaient encore en 1758. M. l'abbé
Baudiau, si longtemps curé de Dun-les-Places,
connaissait parfaitement l'histoire de sa paroisse, et
il n'eût pas manqué de mentionner les Doublet
de Persan dans la liste des seigneurs de ce lieu , si
réellement ils devaient être comptés au nombre
de ces seigneurs, ce qui est pour le moins douteux.
Dans la généalogie des Doublet, donnée par le
Dictionnaire de la noblesse^ généalogie en grande
partie fausse, comme beaucoup de celles que
— 3oo —
rédigea La Chesnaye des Bois, Anne-Nicolas
Doublet, marquis de Persan, vivant au milieu du
dix-huitième siècle, est qualifié de seigneur de Saint-
Aubin-sur-Yonne, fief qui ne faisait pas partie du
Nivernais, et comte de Dun et Crosan, fiefs qu'il
faut aussi chercher ailleurs que dans notre pro-
vince. Ce Doublet, conseiller au Parlement de
Paris , était le fils d'une Frezeau de La Frezelière ;
mais cette descendance d'une famille nullement
nivernaise ne pouvait lui donner la nationalité
provinciale que lui attribue M. Gueneau.
M. de Soultrait ajoute que s'il a aussi longue-
ment réfuté M. Gueneau , c'est que ce dernier,
tout en se servant des ouvrages de ses devanciers
dans l'étude du Nivernais, recherche avec soin,
et relève vivement les erreurs ou les omissions qui
peuvent se remarquer dans ces premiers travaux
faits sur la province.
Voici le texte de la notice de M. Gueneau :
La châtellenie de Monts-sur-Guesnes ^ en Loudunais, fut
érigée en marquisat en i655. Elle relevait du roi , à cause
de son château de Loudun , au devoir d'une maille d'or à
muance de seigneur, et avait dans sa dépendance les
paroisses de Saint- Vincent -de- FOratoîre, de Saire, de
Berthagon, de Dercé et de Prinçay. Des Odart, premiers
seigneurs connus, Monts passa par alliance à la famille de
Brillac d'Argy. Vers 1600, les du Bellay possèdent celte
seigneurie, qui passe ensuite aux Frézeau de La Frézelière,
très-probablement à cause d'une alliance avec la famille de
Savonnière, alliée des du Bellay.
En 1662 , Magdeleine de Savonnière, veuve en premières
noces de messire Isaac de Frézeau, vivant marquis de La
— 3oi —
Frézelière, maréchal des camps et armées du roi, et en
deuxièmes noces de messire René de Chaumejan , marquis
de Fourille, grand-maréchal-des-logis de Sa Majesté, est
dans son château de Monts et y passe différents actes. Isaac
Frézeau était fils de Jacques, seigneur de La Frézelière et
d'AmailloUj gouverneur de Poitiers, maréchal de camp, et
de Suzanne Berruyer, dame deTafonneau, enTouraine,
sa première femme. 11 épousa en 1615 Magdeleine de
Savonnière, fille de Jean et de Jacqueline de Menon, sa
belle-mère. Il en eut deux filles :
fo Charlotte-Marie qui, en 1648, épousa son cousin
François Frézeau ;
2^ Anne, femme de René de Rousselé, baron de Sache et
de Larochemillay, en Nivernais.
François Frézeau, fils de Jacques et de Marguerite de
Montmorency, lieutenant-général de Partillerie de France,
gouverneur de Salins, devint marquis de Monts par son
mariage avec sa cousine. D'après un acte du 3i janvier
1673, il était à cette époque en Hollande pour le service
du roi. Il mourut à Page de quatre-vingts ans, en 1702,
après avoir eu sept enfants, parmi lesquels Jean-François-
Angélique.
Jean - François - Angélique Frézeau, marquis de La
Frézelière et de Monts, lieutenant-général de l'artillerie
de France, mort en 171 1, épouse, le 11 mars 1690,
Paule- Louise-Marie Briçonnet, fille de Bernard, marquis
d'Oysonville, et de Françoise Le Prévost (i). Les Archives
de Maine-et-Loire , E. 2526, contiennent divers actes sur
les Frézeau; je citerai seulement celui-ci: < Traité passé
entre Jean-François-- Angélique Frézeau ^ chevalier, mar-
quis de la Frézelière et de Mons , baron de Germigny, en
Bourbonnais, seigneur de la Chaussée, maréchal des camps
et armées du roi , premier lieutenant-général de l'artillerie
(i) Voir Bulletin de la Société nivemaise, t. VI, Epigraphie histo^
riale du canton de La Guerche, par M. Roubct.
de France , tant pour lai et en son nom que pour Anne
Frézeau, sa sœur, épouse de Georges-Henri de Maillé,
marquis de La Tour- Landry et de Solesmes, et Louis,
comte de La Vieuville, au nom de messire Simon, milord
Fra:{er de Louet, premier baron et pair d'Ecosse, et
messire Jean Frayer ^ ses frère et cousin , en présence des
ducs de Luxembourg et de Chastillon, de Jean Gustave >
sire de Rieux ; du marquis de Sache et du comte de Laro-
cbemillay, du colonel Frédéric de Cuningham et de Jean
de Cuningham, tous parents et alliés desdites parties,
contenant reconnaissance dos filiations respectives dudit
seigneur Simon Frayer de Louet, baron et pair d'Ecosse,
desdits seigneurs ses frère et cousin et dudit seigneur
marquis de La Fré\elière et des parente^ et aliances qui
sont entre eux... pour empescher^ autant qu^à eux est, un
si ancien et illustre nom de tomber dans l'incertitude de
son origine.,. » Je n'insiste pas sur ce curieux traité.
Jean-François-Angélîque Frézeau de La Frézelière laissa
plusieurs enfants, parmi lesquels François-Isaac Lancelot ,
qui fit hommage pour Monts en 171 7.
A partir de 1733, les actes indiquent messire Nicolas
Doublet , marquis de Persan , comme seigneur du marquisat
de Monts. Il avait épousé Marîe-Magdeleine Frézeau de La
Frézelière. Depuis cette époque tous les titres que j'ai
parcourus désignent Nicolas Doublet de Persan comme
seigneur de Saint-Aubin-sur-Yonne et de Dun-les- Places et
le qualifient de conseiller du roi en ses conseils et maître des
requêtes ordinaires de son hôtel.
Claude Doublet était marchand joaillier à Paris en 1572.
Louis Doublet devint secrétaire du roi le i5 mars i655;
c'est de lui que sortirent les marquis de Persan et de
Baudevilie qui avaient pour armes: D'azur, à trois
demoiselles à doubles ailes d'or volant en bande {Armoriai
du bibliophile, par Joannès Guigard), ou Ua\ur, à trois
doublets ou papillons d'or volant en bande {Armoriai de
l'Yonne, par Aristide Dey). Aimé-Nicolas Doublet, marquis
- 3i>3 -
de Pcrsao, souscrivit le 18 mai 1789 un contrat d'union
avec ses créanciers et abandonna ses biens.
Les Doublet de Persan , sur lesquels les Bulletins de la
Société nivernaise sont muets, possédèrent donc Dun-les-
Places. Il appartient à mes chers collègues de rechercher
qaand et comment ils devinrent propriétaires de cette
seigneurie. Je serai très-heureux de lire un jour le fruit de
leurs recherches et les prie d« recevoir le témoignage de mes
meilleurs sentiments de confraternité.
Victor QUENEAU.
Issoudun, le 3o juillet 1887.
- M. le Président rappelle ensuite que M. Girerd,
notre ancien député, possède un manuscrit dont
il a été déjà question dans Tune de nos séances , à
propos de la fameuse inscription ande camulos,
et qui renferme des notes d'ailleurs fort courtes
relatives à des faits en partie déjà connus, mais
qui lui ont paru offrir un certain intérêt. Ces notes
ont trait à divers faits de la vie des ducs de
Nevers et au personnel de la Chambre des Comptes
de cette ville de 1 505 à 1 779. Le manuscrit , du
quinzième siècle, mais renfermant certaines parties
d'une écriture plus moderne, des premières années
du seizième siècle sans doute , était une sorte de
barème à l'usage de la Chambre des Comptes
de Nevers fondée, on le sait, en 1405, par le
comte Philippe , troisième fils de Philippe le
Hardi, duc de Bourgogne. Elle se composait d'un
président, de quatre maîtres des comptes et d'un
procureur général*
Les notes du manuscrit nous font connaître une
partie < de ce& officiers.
_\
— 3o4 —
Outre le barème, le livre de M. Girerd ren-
ferme un calendrier, puis un règlement pour les
monnayeurs royaux qui serait fort intéressant pour
rhistoire numismatique dé la France s'il était
inédit ; mais il en existe de nombreuses copies et
il est connu depuis longtemps.
Les notes sont inscrites^ comme dans les
obituaires, à la date du mois où se produisaient
les faits dont elles devaient garder le souvenir
A la page 64 du manuscrit se lit^ d'une écriture
du seizième siècle, le texte du serment que prê-
taient les officiers de la Chambre des Comptes en
entrant en charge. Bien que ce texte ait été publié
dans UInventaire des titres de Nevers (col. 509,
note i) je crois devoir le reproduire ici :
<!: Serment et jurement du président, maistres
des comptes à Nevers, clercz et concierge d'icelle,
faiz à la personne de Monseigneur le Conte sur le
Hure des euuengilles et remembrances de Dieu,
escript et paint sur et au liure ordonné.
30 Vous jurez aux sainctes euuengilles par la figure
et remembrance que voyez de Jesucrist , que me
seruirez en Testât et office de conseiller et maistre
des Comptes à Neuers; naurez nul maistie et
pension que de moy et garderez mes Chartres et
mon trésor. Nen direz, ne comuncquerez que a
moy sy ce nest pour mon honneur et proufit , et
nenbaillerez ne distrairez aucune chose que nen
soye aduerty, et si dauenture par inaduertance ou
importunete de requerans vous deiz ou commande
- 3o5 -
par lettres ou autrement faire le contraire , diffé-
rerez jusques men ayez aduerty la ou verrez que
seray interesse ou mon domaine dyminue, et ne
vérifierez aucune chose qui soit a mon dommage
que par raoy ne vous soit expressément ordonne
de bouche en men aduertissant. Ainsi le jurez et
promectez, et dabondant tout que je seray tenu et
deuray a aultruy quelque don que je face nen
allourez que la moictie, et Tautre moictie pour
nous acquicter dont ferez tenir bon et loyal
.compte aux chastellains , receueurs et officiers
comptables. En quoy faisant vous feray contenter
et garder votre auctorite ou je vous mectz et
reçoybz. Fait à Nevers le XIX* jour de raay
Tan mil cinq cens et cinq, d
Avant de terminer la séance, M. de Soultrait
communique encore à la Société l'empreinte
d'un sceau de la prévôté de Clamecy, dont
la matrice en bronze, fort bien conservée, se
trouve au musée de Grenoble. Ce sceau , qui date
du treizième siècle, est rond; il a quarante-sept
millimètres de diamètre. Voici sa légende, en
lettres capitales gothiques, entre filets, qui est
interrompue par la pointe de Técu :
f s' (igillum) prepositvre de : clameciaco.
Dans le champ, un écusson ogival, à un semé
de billettes et un lion brochant sur le tout, armes
des comtes de Nevers de la première race, qui
sont aussi celles des villes de Clamecy et de
T. ui, 3* série. 39
— 3o6 —
Nevers. Trois points se remarquent sur le champ :
un de chaque côté et un autre au-dessus de Fécu.
Un sceau de cette même prévôté , appendu à
une charte de la fin du treizième siècle , conservée
aux archives de T Yonne, porte un écu pareil à
celui du sceau décrit ci-dessus, seulement un
croissant se trouve au-dessus de Técu ; la légende,
en grande partie brisée, n'ofire plus que quelques
lettres du mot Preposiiure. Le contre-sceau,
beaucoup mieux conservé , oflSre un écu à un lion ,
chargé d'un lambel à cinq pendants, armes du
comte de Nevers Louis P** de Flandre.
M. Tabbé Boutillier et M. l'abbé Marillier pro-
posent comme membre de la Société M. Alexandre
Teste, de Lormes.
M. Teste est admis.
La Société fixe à 6 fr. le prix du Cartulaire de
La Charitéj par M. de Lespinasse.
Puis la séance est levée.
NOTE NÉCROLOGIQUE SUR M. L'ABBÉ CLÉMENT
Pendant les vacances qui viennent de s'écouler, au surlen*
demain de notre dernière réunion de juillet, la Société
nivernaise a perdu un de ses membres fondateurs aussi
modeste que distingué, M. Tabbé Clément, curé-doyen de
Châtillon-en-Bazois.
La Semaine religieuse du diocèse et plusieurs journaux
de Nevers ont rendu compte de la cérémonie de ses obsèques
et retracé sa vie sacerdotale si bien remplie ; qu'il nous soit
permis de rappeler brièvement, aujourd'hui , les principaux
— 3o7 —
souvenirs que ce confrère a lui-même inscrits dans nos
annales.
Ami dévoué de Mgr Crosnîer, il avait répondu à son
premier appel, lors de la fondation de la Société nivernaise,
en 1 85 1, et, à défaut de longs mémoires, il saisissait toutes
les occasions de nous signaler les découvertes archéologiques
faites dans son voisinage ; son nom se retrouve maintes fois
dans nos Bulletins.
En 1853, étant alors curé de Saint-Amand, il s^empresse,
avec son confrère de Bouhy, Pabbé Meyniel , d^nformer la
Société de la magnifique découverte des deux autels votifs
à Mars-de-Bouy-le-Tertre , Marti Bolyinno et Duna , qui
sont aujourd'hui les principaux monuments de notre musée
lapidaire.
Devenu, en 1855, curé-doyen de Châtillon-en-Bazois , où
il devait mourir, il signale à Mgr Crosnier l'existence , dans
la commune d'Achun, de curieuses bornes dimales, servant
autrefois à la délimitation du territoire où dîmait le chapitre
de Saint-Cyr.
Lors de la reconstruction de son église , en 1864, ayant
découvert une magnifique pierre tombale à l'effigie de Jehan
de Chastillon qui trespassa l'an mil CCCLXX, il en
informe la Société et nous envoie un dessin de cette tombe ,
qui a été reproduit au Bulletin (11^ série, t. II, p. 3og). Il
avait eu Theureuse pensée de faire dresser ce monument
contre le mur, à l'intérieur de son église, donnant ainsi un
exemple qui, en pareil cas, devrait toujours être suivi.
L'abbé Clément n'aimait pas seulement Tarchéologie et les
souvenirs historiques ; les membres de la Société qui ont eu
la bonne fortune de faire partie de la charmante Excursion
dans le Morvand , au mois d'août 1872 ^ se souviennent de
ses appareils ingénieux, en particulier de son pentographe,
qui donnait d'un seul coup cinq épreuves d'un écrit ou d'un
dessin dont on avait tracé le premier exemplaire. (Bulletin ,
[p série, tome VI , page 486.) Depuis longtemps déjà, dans
la séance du 9 juillet 1857, ^^ ^^^^^ soumis à la Société des
— 3o8 -
épreuves typographiques obtenues au moyen d'une autre
machine dont il avait gardé le secret, et sans être obligé de
composer, à Tavance, les planches. Il espérait obtenir un
brevet, mais l'appareil lui fut ravi par un visiteur peu
délicat demeuré inconnu.
Enfin, le bon et si modeste curé de Châtillon aimait la
rime joyeuse et fine, dans les réunions de confrères en parti-
culier. S'agissait- il d^une cinquantaine k célébrer, on était
sûr, à la fin du repas, de le voir se lever prestement , sa
petite feuille de papier à la main , et de l'entendre lire et
chanter quelques gracieux couplets; ainsi, aux noces d^or de
notre président , en 1878 : Qu'il me soit permis de rappeler
cette fête et de vous en faire entendre un écho :
Quand cinquante ans de sacerdoce
Au lieu de conduire au tombeau
Ainsi conduisent à la noce,
En chœur nous disons : Que c'est beau !
Ces cinquante ans ont bien pu faire
QuMl soit tombé quelques cheveux
Au vénéré proto notaire :
Mais le ciel le garde à nos vœux.
Crosnier, pour nous, est une gloire.
Et je proclame avec bonheur
Qu'un jour on lira dans Thistoire :
Au Nivernais il fit honneur!
Son nom est entouré d'hommages
Auxquels nous applaudirons tous :
Il revivra dans ses ouvrages
Ainsi qu'à la porte du Croux.
Et les quatrains continuaient... mais terminons.
Nos Bulletins, d'ailleurs, gardent aussi le souvenir de
ses essais poétiques. Naguère, en 1880, lors de la découverte
du trésor carlovingien d'Alluy, Tabbé Clément, tout enthou-
siasmé, inventait une gracieuse légende; et antérieurement,
en 1872, à l'occasion du comice agricole tenu dans sa bonne
— 3o9 —
ville de Châtillon , il adressait à l'agriculture un toast tout
plein d^originalité^ dans lequel il met en scène sept interlo-
cuteurs : un meunier, un boulanger, un charron, un
maréchal, un tisserand, un tailleur, un cordonnier, qui
tous terminent par ce cri : Gloire à l'agriculture ! elle est
notre soutien,
QuMl nous soit donc permis de dire^ à notre tour, de
l'excellent curé de Châtillon, de Thomme aimable aux goûts
si variés, de notre excellent confrère enfin , que^ lui aussi,
au Nivernais il fit honneur !
Uabbé BOUTILLIER
SEANCE DU 14 NOVEMBRE 1887.
Présidence de M. le comte db Soultrait, président.
Étaient présents : MM. de So\x\trditj président ;
l'abbé Boutillier, vice- président ; Canat, conser-
vateur du musée) E. de Toytot, secrétaire;
Octave de Villenaut, l'abbé Pot, Langellé, de
Lespinasse, A. Julien, Guillerand, Hippolyte
Blanc, de Flamare, Duminy^ archiviste ; Chemi-
nade, Henri Marandat, le docteur Subert, le lieu-
tenant-colonel de Maumigny, Ch. Col.
M. Caquet adresse à la Société une notice agri-
cole sur le canton de Fours et une autre petite
brochure intitulée les Parcs forestiers ; par la
même lettre, M. Caquet informe M. le Président
qu'il donne sa démission de membre de la Société.
M. l'abbé Boutillier lit une lettre que lui a
adressée M. le docteur Warmont , l'un de nos
membres correspondants de Paris, relative à un
— 3io —
plat à barbe de Nevers , revêtu d'un riche décor
polychrome de style rouennais.
Ce plat provient, ainsi que l'indique l'inscrip-
tion, d'un jardinier du château de Langeron.
Voici la description qu'en donne M. Warmont :
d Sur les bords s'étale, puissante, une guirlande
de fleurs ; l'œillet y domine ; dans la coloration de
ces fleurs interviennent : un jaune orange, qui
voudrait imiter le rouge de Rouen, un bleu
sombre et le violet que vous connaissez bien.
3) Au centre , un encadrement rocaille, surmonté
d'une corne d'abondance écourtée , entoure un
paysage avec petit château campagnard, bien
nivernais de tournure.
» Au-dessus de l'échancrure du plat à barbe
sont couchés symétriquement deux rameaux bleus,
à feuillages épais et gras, franchement nivernais,
eux aussi.
ï> Enfin, sur le contour interne de ce vase
domestique, on lit l'inscription suivante, qui ne
laisse aucun doute sur son origine.
3) Je respecte l'orthographe :
1755. — 3) 3)» PIERE f PINIET f JARDINIET f
AU CHATOS DE LONGEROND J> 1755-
M. Perrier aîné , bijoutier à Nevers > demande à
la Société de vouloir bien examiner un petit
trésor de monnaies romaines récemment trouvées
près du vieux château de Guffy et dont il a fait
l'acquisition.
— 3ii -
M. l'abbé Boutillier est invité à en faire une des-
cription sommaire avant le départ de M. Perrier
pour Paris, où il compte porter ces monnaies-
Elles ont pour la Société l'intérêt spécial qu^
s'attache à la localité où elles ont été découvertes.
M. le Président donne lecture d'un extrait du
manuscrit de M. Girerd, pour servir à l'histoire de
la Chambre des Comptes de Nevers.
M. le comte de Soultrait mentionne également
un extrait des inventaires des églises de Nevers
fait par son trisaïeul, M. Pierre Richard de Soul-
trait, en 1722.
Une autre pièce passe sous les yeux des mem-
bres du bureau ; elle est intitulée : Rôle de la
monstre et revue en la court du château de
NeverSj le huitième jour du mois de mars 1594,
des 210 hommes de guerre tenant garnison en
la mile de Nevers sous la charge du capitaine
Hector Hoppoho.
Nous, Victor Hoppoho, capitaine-comtnandant pour le
service du roy à 210 Suisses estans en garnison en la ville
de Nevers; Christophe de La Chassaigne, baron de Cours-
les-Barres, et Jacques Caillot, commissaires des guerres
soussignés , certifions au roy et à messieurs les maistres des
Comptes ce qui s'ensuit , qu'ils les ont trouvés rangés en la
cour du château en rang de bataille et qu^ils leur ont paru
en équipage suffisant pour faire le service du roi en la garde
et conservation de la ville et partout ailleurs oti on les vou-
drait employer, et après avoir prix et receu d'eux le serment
de faire ledit service durant trois mois de la présente année
1594, composés de trente-six jours chacun , commencés le
premier jour de janvier et finissant le 1 8, jour du mois
— 3l2 —
d'avril en suivant aud^t an, nous avons ordonné à M. le
trésorier général et extraordinaire des guerres maistre Pierre
de Charron ou à son commis en Nivernois de faire payement
de la somme de ?,i35 écus pour leurs gages ^ solde état et
appointements pendant les susdits trois mois commençant
et finissant comme dessus ces dits, savoir est à raison de
40 écus pour le capitaine par mois et pour ses deux lieu-
tenants 3o, aux sergents chacun 10 écus^ deux juges chacun
10 escus, les caporaux chacun 6 écus, aux deux phiires
chacun 5 écus 40 sols, tambours 4 écus 20 sols, à chaque
soldat I écu 40 sols, à raison de 4 écus 20 sols chacun, le
tout par mois ; en touct par mois à la somme de 1,061 écus
40 sols que nous certifions avoir payés.
M. le Président a obtenu de prendre en photo-
graphie divers reliquaires du trésor de l'église de
Varzy ; il fait passer ces photographies sous les
yeux des membres de la Société.
M. le docteur Subert consacre quelques lignes
émues à une notice nécrologique sur notre
regretté confrère, M. Amédée JuUien.
M. Amédée JuUien, fondateur et directeur du musée de
Clamecy, est décédé dans cette ville le 6 novembre dernier,
à Tâge de soixante-huit ans. Sa dépouille monelle a été
transportée à Tannay, où il repose au milieu des siens. Les
allocutions prononcées à ses obsèques ont rendu un hom-
mage bien mérité à ce charmant artiste et à cet homme de
bien. La Société nivernaise des lettres, sciences et arts s'as-
sociera aux légitimes regrets qu'une fin si cruelle a suscités
de la part de tous ceux qui s^intéressent dans notre dépar-
tement aux travaux historiques.
Les circonstances de cette fin prématurée doivent être
rappelées dans les quelques mots que nous traçons aujour-
d'hui en souvenir de notre ami. Arrivé de Paris à Clamecy
— 3i3 —
depuis quelques jours, dans le but de classer dans le mUsée
de nouvelles acquisitions qu'il avait trouvé moyen de faire,
M. Jullien, cette besogne matérielle achevée, se disposait à
rendre compte à la Société scientifique et artistique , dont il
était vice-président d'honneur, du travail quMl venait d^ac-
complir et des lacunes qu'il Jésirait voir combler dans
l'agencement des collections.
En pleine séance, une congestion cérébrale se déclarait
brusquement et Tenlevait au bout de quelques heures.
Il a donc été frappé au moment précis oti il exprimait
l'espoir de voir se réaliser bientôt Tidée quUl avait conçue
d'un catalogue raisonné qu^il rêvait pour son cher musée.
Il avait mis dix ans à créer ce dernier, et son œuvre restera
comme un témoignage de sa louable persévérance et de ses
soins éclairés.
M. Juliien laisse un livre important : la Nièvre à travers
le passé , qui lui a coûté sept années d^un labeur
soutenu. L'exemplaire que possède notre bibliothèque est
une marque de sa libéralité que nous conserverons avec
déférence. Il était également l'auteur d'une Carte de la
Nièvre et du Nivernais, et il s'occupait très-activement d'un
autre ouvrage concernant le département et qu^il se proposait
de nommer : les Châteaux de la Nièvre. Ses gracieuses
eaux-fortes l'avaient fait connaître avantageusement comme
graveur, et ses tableaux l'avaient classé au bon rang parmi
nos peintres locaux. Le musée de Nevers possède de lui une
toile remarquable, connue sous la dénomination du Coup de
vent après Forage.
Bien qu'il soit incomplet, ce rapide exposé suffira , nous
Tespérons, pour justifier Thommage que nous rendons ici
à notre compatriote, qui fut non-seulement un artiste et
un savant , mais qui restera dans notre mémoire comme
un homme exceptionnellement aimable et généreux.
D' SUBERT.
T. ni y 3* série. 40
- 3i4-
SÉANCE DU 29 DÉCEMBRE 1887.
Présidence de M. le comte de Soultrait, président.
Sont présents : MM. le comte de Soultrait,
président; l'abbé Boutillier, vice - président ;
Ernest de Toytot, secrétaire; Canat, conser-
vateur du musée: de Flamare; Duminy, archi-
viste; le docteur Subert, Octave de Villenaut,
Tabbé Soyer, Langellé, Tabbé Pot, Cheminade,
H. d'Assigny, le lieutenant -colonel vicomte de
Maumigny, Col , Ad. de Rosemont.
M. le comte de Chabrol adresse, par lettre, sa
démission de membre de la Société.
M. Tabbé Boutillier donne lecture du rapport,
dont il a été chargé à la dernière séance, sur les
monnaies romaines, au nombre de quarante-deux,
toutes de petit module, en argent, et d'une très-
bonne conservation, trouvées de la manière la
plus fortuite, près du vieux château de Cufl^,
qui faisait autrefois partie du Nivernais.
I. Sept pièces, les plus anciennes, sont de Tempereur
Antonin-le-Pieux, proclamé César le 25 février i38 et mort
le 7 mars i6i.
Sur la face, on lit : iifp. antoninvs . prvs . avg., une seule
fois, le qualificatif brit (annicus) est ajouté.
Les légendes du revers sont , comme d^babitude pour les
mpnnaies romaines, très-variées: Marti Propugnatori;
— Salus Antonini Aug.; — Invictus Sacerdos Aug.;
— Abundantia Aug.
II. Cinq pièces de lempereur Septime-Sépère , proclamé
Tan 193, mort en 211.
Face : severys . pivs . avg.; une fois^ comme pour les
monnaies d^Antonin, avec le qualificatif brit [annicus).
Revers : Indulgentia Augusta, avec les mots in carth, en
exergue ; — Restitutor urbis, etc.
III. Quatre pièces de Timpératrice Julie, femme de
Sévère.
Face : ivua . avgvsta.
Revers: Hiiaritas; — Pietas publica; — deux fois,
Sœculi félicitas.
IV. Une pièce de la mère de Sévère.
Face : ivlia uammaea. Revers : La déesse Vesta.
V. Deux pièces de Gêia, fils de Sévère et de Julie, et frère
de Caracalla, par qui il fut poignardé en 212, à Tâge de
vingt-trois ans.
Face : La tête du jeune prince imberbe et sans couronne :
p. SEPT. GETA.
Revers : Pr inceps juventutis,
La seconde pièce offre une légende plus complète : p.
sEpnirvs . GETA . CAEs. — Sur le revers est représentée
Minerve.
VI. Une seule pièce de Macrin, successeur de Caracalla ,
qu^il avait fait assassiner en 217. Il fut assassiné lui-même
après un an et trois mois de règne.
Face : imp. g. u{arcus) op{ilius) s{everus) macrinvs . avg.
Revers : Un Jupiter foudroyant, avec ces mots : Joyi
conservatori.
VII. Point de pièces du successeur de Macrin, le hideux
personnage du nom d'Héliogabale , surnommé le Sarda-
napale de Rome, élevé à Tempire à l'âge de quatorze ans,
et asssassiné quatre ans après, en 222, — mais deux jolies
monnaies à l'effigie de son aïeule Mœsa.
Face : ivlia . maesa . avg. — Revers : Pudicitia.
Deux autres de sa mère, Sœmias, nièce de Caracalla.
Face : ivua . soabuias . avg. — Revers : Venus cœlestis.
- 5i6 —
Deux autres encore de sa temme Paula , fille de Paulus ,
préfet du Prétoire.
Face : ivlia . pavla . avg. — Revers : Concordia Augg.
VIII. Du successeur d'Héliogabale, Alexandre Sévère^
lui aussi assassiné à rage de vingt-six ans^ en 2351 treize
pièces fort jolies^ plusieurs à fleur de coin.
Sept ont pour légende sur la face : m p . c . if(arai5)
Kyvi[eliii$) SEv{erus) ALEXAND(er) avg., avec des revers très-
variés : Victoria Aug.; — Annona Aug,; — Saltis publica.
Les six autres ont seulement ces mots sur la face : imp.
ALEXANDER . pivs . AVG,, et sur Ics revers on lit : Mars ultor;
— Jovi Ultori; — Providentia Aug.; — Spes publica.
IX. Enfin, quatre pièces du successeur de Sévère,
Maximin, d'abord simple berger, élevé par son courage aux
premières dignités militaires, et enfin devenu empereur,
après que Sévère, son bienfaiteur, eut été assassiné dans une
émeute que lui Maximin avait excitée.
Face : imp. maximinvs . pivs . avg.
Revers : Salus Augusta ; — Fides militum.
L'épithète Germanicus est ajoutée sur une des pièces, qui
porte au revers la figure de TAbondance, avec le mot
Providentia.
Ce prince cruel avait reçu le titre de Germanique à la suite
d^une victoire par lui remportée sur les Germains. Il fut
assassiné par ses soldats en 238. C'est de lui que Thistorien
Capitolinus a écrit que jamais bête plus cruelle n*a marché
sur la terre.
En résumé , les monnaies de la petite cachette de Cufi'y
appartiennent à la deuxième moitié du second siècle de
notre ère et à la première moitié du troisième siècle, rem-
plissant ainsi Pespace d^environ cent années dont elles rap-
pellent toute l'histoire si. agitée et si honteuse pour Thuma-
nité.
On peut présumer que ce petit trésor avait été déposé à
la hâte, sous la pierre qui Ta si longtemps recouvert, par
— 3i7 —
quelque colon effrayé, lors dos guerres iéroces qui ont rempli
le régne de Maximin. On lit en effet que dans une de ses
expéditions contre les Germains, il fit couper tous les blés,
brûla un nombre infini de bourgs, ruina près de cent cin-
quante lieues de pays et en abandonna le pillage à ses
soldats.
M. l'abbé BoutiUier signale ensuite une pierre
gravée antique, découverte près de Decize
(Nièvre), et donne lecture d'une note de M. Héron
de Villefosse lue à la Société des Antiquaires de
France, dans la séance du 6 février 1884.
Le propriétaire du château de Saulx, près Decize,
M. Gandoulf, a découvert cette pierre dans une fouille qu'il
a dirigée au milieu d'une prairie voisine de son habitation.
Une source d'eau minérale avait été remarquée dans cette
prairie. M. Gandoulf résolut de la dégager et de la capter. Il
put constater que la source avait été utilisée à l'époque
romaine et il retrouva l'aménagement antique de la fon-
taine.
Le bassin était formé de trois cuvettes carrées superposées;
celle du haut était la plus large et celle du fond la plus
petite ; deux poutres placées en biais servaient à soutenir les
terres.
On a recueilli dans cette fouille plusieurs ex-voto en terre
blanche, des poteries , une clé en fer, dont le manche en
bronze représente une panthère et une pierre gravée en jaspe
vert sanguin, sur laquelle on lit très-distinctement :
COGCEIAN
VS EDOVIT
vs.
Cocceianus Edomitus.
Ce sont probablement les noms d'un malade qui, ayant
ressenti les effets bienfaisants de ces eaux, avait voulu laisser
— 3i8 —
un témoignage de sa reconnaissance à la divinité protectrice
de la fontaine. Les monnaies recueillies vont depuis Domi-
tien jusqu^à Claude-le-Gothique.
(Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de
France, cinquième série, tome V (1884}, page 82 du
Bulletin, qui tait suite aux Mémoires)
M. le Président rend compte à la Société des
démarches qu'il fait au ministère des beaux-arts
pour faire reconnaître notre compagnie d'utilité
publique.
M. le comte de Soultrait donne connaissance à
la Société de diverses pièces intéressant notre
province, entre autres :
i^ Un contrat de mariage signé du maréchal
de Vauban et de Mesgrigny, de Louis de
Mesgrigny et demoiselle Charlotte Le Prestre,
24 décembre 1681 ;
2^ Une pièce de vers lue à la tribune du temple
delà Raison : Nevers, le 10 nivôse, pour la fôte
civique célébrée en mémoire de la prise de Toulon,
par N oël Pointe , représentant du peuple dans les
départements de la Nièvre, de TAUier et du Cher.
Cette pièce est intitulée : Le Masque de l'erreur
et de l'hypocrisie déchiré.
SEANCE DU 26 JANVIER 1888.
Présidence de M. Roubbt. président honoraire.
Etaient présents : MM. Roubet, président
honoraire; Fabbé Boutillier, vice - président ;
Ernest de Toytot , secrétaire ; Duminy, archi-
viste; Canat, conseroatenr du musée; de
Villefosse, Octave de Villenaut, le docteur
Robert Saint -Cyr, le baron de Berthier Bizy,
Langellé, de Flamare, Massillon Rouvet, Aug.
Le Blanc-Bellevaux.
M. Roubet donne lecture d'une notice histo-
rique sur Magny. Ce travail, de M. Morellet,
notre ancien confrère , aujourd'hui décédé, a été
reproduit par M. BuflFet, de Châteauroux.
M. de Flamare présente à la Société un plan
sur parchemin (datant du milieu du dix-septième
siècle) de la vallée du Nohain, trouvé au château
de Chassy.
Ce plan montre le château de la Rivière et
plusieurs moulins fortifiés.
MM. de Soultrait et Teste proposent comme
membre de la Société M. Henry de Chabannes.
M. Henry de Chabannes est élu à l'unanimité.
M. Tabbé Boutillier, qui avait réuni de nom-
breux documents sur les anciennes corporations
ouvrières de Nevers, annonce qu'il les a remis
entre les mains de M. Hippolyte Blanc. Notre
confrère , si compétent en ces sortes d'études , et
qui a publié tant de notices sur les corps de
métiers en France , voudra bien , dans une pro-
chaine séance , donner une lecture sur ce sujet.
M. Massillon Rouvet expose sur le bureau un
plan en relief de l'église de Jailly et en particulier
de son beau portail roman qu'il a spécialement
étudié. Un des caractères les plus remarquables
— 320 —
de cette église est que chacune des travées s'élève
depuis le portail jusqu'au chœur.
-«•
SÉANCE DU 23 FÉVRIER 1888.
Présidence de M. le comte db Soultrait, président.
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président ; l'abbé Boutillier , mce -président ;
Canat) conservateur du musée; Duminy, archi-
viste; E. de Toytot, secrétaire; le docteur
Subert^ Tabbé Soyer, le docteur Robert Saint-
Gyr, Langellé, Aug. du Verne, Léon de Barrau,
d'Assigny, le comte de Montrichard, de Flamare,
A. de Villenaut, de Villefosse, le vicomte de
Maumigny.
Lecture est donnée par M. le Président :
1° D'une circulaire ministérielle concernant la
création d'une collection nationale d'estampages
d'inscriptions romaines recueillies] soit en France,
soit dans le nord de l'Afrique. Tous les érudits
sont invités à participer à cette œuvre d'utilité
générale ;
2^ D'une instruction ministérielle relative à
l'organisation du comité des sociétés des beaux-
arts des départements et à la réunion annuelle de
ces sociétés ;
3^ D'une lettre du président de la Société
d'émulation de Montbéliard , adressant à la Société
nivemaise une plaquette relative au catalogue
— 3âf -
d'aotogr^hes que ML A. Bovet , président de la
Société , vient de publier.
M. Tabbé Boutillier lit le travail de M. Hippo-
lyle Blanc , annoncé à la dernière séance , sur les
anciennes corporations ouvrières de Nevers (i).
M. le comte de Soultrait communique à la
Société une longue lettre de Guyot Sainte-Hélène,
résumant les différentes explications données sur
la fameuse inscription : Ande Camulos. Cette
lettre , que nous croyons inédite , sera insérée au
Bulletin.
M. le Président donne aussi lecture d'une lettre
des plus curieuses , en date du 7 août 1791, écrite
par Chaumette, le futur procureur de la Com-
mune, au sieur Thomas, jeune ecclésiastique, qui
avait eu la singulière idée de lui demander des
conseils pour ses discours et aussi pour ses études
de théologie. La Société demande que cette lettre
soit également insérée au Bulletin.
Une autre lettre du P. Théodore de Blois,
capucin , datée de Nevers en 1 739 et adressée à
M. de La Rue, docteur en médecine à Nevers^
contient des vers relatifs à Tenvoi de l'histoire de
Rochefort et mérite également d'être publiée.
La séance est terminée par la présentation de
trois membres : M. Lafuge , directeur des enfants
assistés de Prémery, présenté par MM. Subert et
Henry Ferrier; M. Roger de Soultrait, présenté
par MM. Tabbé Boutillier et de Toytot ; M. Flo-
(i) Voir plua haut, pages .282-294.
T. m, 3* série. 41
— 322 —
rimond Gautheron , présenté par MM. Robert
Saint-Cyr et de Toytot.
MM. Lafuge , Roger de Soûl trait et Florimond
Gautheron sont admis à Tunanimité comme mem-
bres de la Société nivernaise.
La séance de mars devant tomber le jour du
Jeudi-Saint, est avancée de huit jours et fixée au
jeudi 22 mars.
I.
Lettre de Guyot Sainte-Hélène à P. Gillet, l'auteur
des Annuaires de la Nièvre de iSoi à i8og.
Paris, 25 septembre i8o6.
Monsieur,
Quoique sorty de Nevers depuis plus de quarante ans,
mon grand plaisir n'en est pas moins , dès que j*ai un ins-
tant à moi, de promener mes idées sur le natale solum^
d'en parcourir Thisioire , examiner mes petites collections et
feuilleter mes petites notes.
Dernièrement, je lisois avec autant de curiosité que de
satisfaction Tun de vos Annuaires dont le premier me
manque et, à la page 62 de celui de l'an XI , je trouvai que,
le 2 septembre 1492, en travaillant aux fondations d'une
cave, dans le haut de la rue de la Coutellerie, vis-à-vis celle
de la Cité, au lieu même où étoit la porte de la Cité, on
avoit découvert une pierre que Ton conserve dans la maison
de M. Vialay, apothicaire, et dont l'inscription présente les
mots :
AN DE CAMULOS TOVTIS SIGNOSIB VRV.
— 323 —
Je n^ai jamais vu cette pierre, ne m'occupant guères d'ins-
criptions, lorsque j'étois à Nevers; mais, diaprés votre
Annuaire, j^ay cherché et me suis trouvé tous les livres que
vous indiquez : Cotignon, les Mercures et les Mémoires de
M. rabbé Lebeuf, imprimés en 2 vol. 1738.
De mon examen il résulte : i^ que Cotignon, les Mercures
et VAbbé Lebeuf i^twcoisstni être les seuls qui ayent parlé de
notre pierre ;
2^ Que rinscription qu elle présente n'a reçu que la moitié
de son explication ;
30 Que cette moitié d'explication due à M . Lebeut est si
bien faite, que Ton ne peut concevoir comment ce savant n'a
pas , sur-le-champ, deviné le surplus qui étoit si aisé. Cela
prouve que lorsque les gens sont parvenus à un certain degré
de connoissances, ils ne sont plus faits pour les petites diffi-
cultés et que, pour eux , c^est une espèce de privilège.
Vous dites. Monsieur, qu'en 1492, la pierre dont il s'agit
a été trouvée dans une cave; sans doute que, depuis, elle fut
mise en évidence, placée dans un lieu distingué oti elle se
trouvoit encore en septembre 1748; puisqu'à cette époque
un habitant de Nevers, mécontent de l'explication de
Cotignon, en demandant une autre à toute l'Europe, par la
voye du Mercure, impatienta M. Lebeufqui, comme s'il
eût crû que tout le monde devoit acheter et lire exactement
ses savants écrits , à mesure qu^ils paroissaient , le renvoya ,
en décembre 1748, à la page 271 du 2® volume de ses
mémoires. Voicy d'abord comme cet habitant s'exprimoit :
ceux qui n'ont pas les livres que vous citez ne seront pro-
bablement pas fâchés d'en trouver des extraits, si vous jugez
à propos de faire usage de cette lettre.
c Cette inscription est placée sur un corbeau , environ à
» dix pieds d'élévation, à Pendroit où étoit autre-fois la
» principale porte de la Cité et où on doit aller recevoir
> MM. nos Evéques lorsqu'ils font leurs entrées solennelles.
> Cette inscription est gravée sur une pierre beaucoup
— 324 ~^
> plus longue que large , de laquelle elle ne remplit qu^en-
> viron la moitié. Une bordure en relief sert d'ornement à
» cette même pierre et lui donne la figure d'un tableau. »
L'habitant de Nevers en fait ensuite la copie servile,
observe qu'il y a des lettres plus grandes les unes que les
autres; qu'un O enjambe sur un V; il s'élève contre le
Noxius de Cotignon et finit sa lettre par ces mots : c II
» n'est pas vrai que les lettres de l'inscription soient presque
> toutes effacées; elles sont très-entières et Cotignon ne les
» annonce défigurées que pour faire adopter l'explication
» qu'il y donne. Au reste, il auroit dû nous apprendre en
> quel tems la ville de Nevers brûlée a été réédifiée et la
» pierre trouvée dans les fondemens et les garans sur lesqueb
» il appuyé ces faits. >
Vous ferez là-dessus , Monsieur, telles observations que
bon vous semblera. Voicy toujours, en attendant^ ce qu'avoit
écrit G)tignon en son Catalogue historial des Evêques de
Nevers, dédié et imprimé en i6i6, page 6 de sa préface ;
< Qui ne sait que Nevers a été autrefois appelle Noxius ,
> nom qui lui étoit approprié, voire même dès le temps de la
» dictature de Furius Camillus , qui fut environ Fan du
» monde 3577, et de la ville de Rome bâtie 365 et avant
» la venue de Jésus-Christ en terre , depuis ladite ville de
» Rome édifiée 413. Selon que l'on peut conjecturer, faisant
» supputation des tems : car la ville de Nevers ayant été
» brûlée et édifiée derechef ,^ on rencontra dans les fonde-
» mens une table de pierre presque carrée, contenant cer-
» taines lettres écrites à la façon ancienne des Romains»
> mais presque toutes effacées à cause du laps de tems ,
» desquelles, toute-fois, on peut lire assez facilemenl celles-
> cy : AN . DE . CAM[LLos . TOTi SIC . NOXiE vRi , par où il
> appert que, pour lors, elle étoit sous la puissance des
> Romains et appellée Noxius, en ce même temps con-
» sommée du feu. Laquelle pierre se voit aa mur de la
— *25 —
» maison qui fait le commencaDent de la Cité où étaient les
> morailles de ladite ville du tems dudit Camillus et de
» Jules César; devant laquelle maison les échevias reçoivent
> messieurs les Evéquesà leur psremiàre et solennelle entrée
» et où iceux Evéques font jetterde Fargent* en signe de
» libéralité* La raison de ce nom de Noxius peut être pour
> ce que les Gaulois étoient ennemis jurés des Romains et
> leur faisoient cruelle guerre, d'où arriva que Furius
» Camillus , homme fort valeureux^ fut créé dictateur pour
3 arrêter leurs courses et les. chasser de Fltalie. En mémoire
» de ce nom , il j a encore pour le présent , au milieu du
» Nivemois, un château qui est dit Mons Noxius, en autre
9 langage Montnoison^ appartenant à Messeigneurs ks ducs
» de Ncvers, etc. »
Personne n^ayant été de Favis de Codgnon, \KÛcy main-
tenant. Monsieur, ce qu'en a dît Tabbé Lebeut ;
€ Passons d^une inscription en caractères grecs à une
9 autre inscription qui est en caractères romains,, mais qui
» paroit être mêlée de mots grecs. Elle se trouve à Nevers ,
9 dans un endroit des anciens murs qui regarde de Porient
» au midy, sur une pierre haute d'un pied et demi , large
9 d^un pied , ornée de moulures en haut et en bas et aussi
» un peu par les côtés , de manière qu^on voit quelle n'est
3 point mutilée; en voici la teneur :
ANDE
GAinr
LOS TOVTI
SSIC MOS
lEVRV
9 Les caractères de la première, seconde et cinquième
> lignes sont plus gros que ceux des deux autres lignes et on
9 n'y voit aucune séparation de mots. Cependant il paroit
* qu'on doit lire ainsi : Andcgûmulo sancÈo utissians lûuru.
- 326 —
» La plus grande difficulté ne consiste pas dans Ande-
gamulo ; ce mot équivaut à Andecamulo, et Ton trouve
déjà dans Gruter le mot Andecamulenses , pour signifier
une certaine association de gens qui bâtirent un temple à
Pluton : Numinibus Aug, fanum plutonis Andecamu-
lenses posuerunt. Mais comme le mot d^ Andecamulenses
est dérivé d^Andecamulus , il faut d'abord interpréter le
plus simple des deux.
> Ce terme me paroît renfermer le nom que les Gaulois
donnoient à Mars, c^est-à-dire le nom de Camulus; nom
qui servit quelquefois à composer celui d'un homme tel
que le fameux Camulogenus, lequel défendit la ville de
Lutèce contre les Romains, conduits par Labiénus, du
tems de César, et quelquefois à former le nom d'une ville
telle que Camulodenum dans les Isles Britanniques. Quant
à la première partie du mot Andecamulus, je la regarde
comme une épithète donnée à Mars : c'est celle de Victor
qui lui convient parfaitement et qui lui étoit donnée com-
munément; ]et une preuve q\i*Ande signifioit en langage
gaulois la même chose que Victor, c'est qu'Andate , qui
en est dérivé , signifioit chez eux Victoria. Andate étoit la
victoire ou la déesse de la victoire chez les Bretons, au
rapport de Dion , et, selon César, bien des choses étoient
communes aux Gaulois et aux Bretons. Je croirois docc
que cette inscription étoit pour quelque monument érigé
à Mars victorieux et saint.
» A l'égard du mot Vtissicno, j'avoue mon ignorance: il
y a quelque mistère du paganisme caché sous ce terme et
peut-être de la religion même des Gaulois; car je soup-
çonne que si la dernière ligne n^est pas composée de lettres
initiales, elle représente, en mauvais grec, le nom des
prêtres et des sacrificateurs. SUl est permis cependant de
proposer quelque chose dont Ton puisse tirer des conjec-
tures sur le mot VtissicnOj je ferai remarquer que la
liaison de sa première lettre avec la lettre O finale du mot
Sancto signifie quUl faut doubler cette lettre et lire Ande^
— 327 —
> camulo sancto outissicno. Ce dernier mot aînsy écrit
3 représente les trois premières syllabes du nom celtique
» Autissiodorum : car on trouve de très-anciens manuscrits
> où il y a non pas Autissiodorum, mais Vtissiodorum^ et
> Ton sçait que TV des anciens se prononçoit ou. La conjec-
» ture qui se présente est que le voisinage du pays Auxerrois
» et du Nivernois peut avoir donné occasion au mot Outis--
» sîcno v mais quel sens doit-on y trouver ? c^est ce que le
» tems seul peut éclaircir. >
Ainsi , Monsieur, l'abbé Lebeuf n a expliqué que le plus
difSciledeTinscription^ VAndegamulo sancto; il reste encore
ce qu'il appelle /' Fr2>jicno5 yei^ri/ qui me paroissent pour-
tant bien déchiffrables si Ton considère i* que Vtissicnos
présente quatre mots latins ut, is, sic, nos; 2^ si Ton fait
attention que le mot jeuru n^est autre chose que l'ancienne
prononciation du mot Jésus, dont se trouvent encore de fortes
traces chez les gens de la campagne , surtout du côté des
Amognes et du Morvand ; à moins que depuis quarante ans
que je ne les ay entendus, ils ne se soient beaucoup appli-
qués à corriger leur langage.
Notre pierre avec son inscription nous reporte au tems où
nos pères, abjurant le paganisme pour embrasser la foi de
Jésus -Christ, bâtirent Nevers sur les ruines même de
Noviodunum et eurent un évéque qui fit , ainsy que ses
successeurs 9 son entrée par la porte où cette pierre étoit ori-
ginairement placée.
Nouveaux chrétiens, leur foy étoit peu robuste, puisque
l'inscription nous prouve qu'au moment même où ils se
vouaient à Jésus-Christ, ils s'occupoient de leur dieu Mars,
et qu^en quelque façon ils ne se livroient à Jésus-Christ
qu^à la charge par lui de les défendre comme le dieu Mars
les avoit jusques-là défendus.
Ce sont les murs de Nevers dont notre pierre faisoit
partie qui parlent et disent :
Nous étions autre-fois dédiés au dieu Mars victorieux et
saint, qtie Jésus à qui nous sommes matuieiiant dédiés,
noBs prot^ et défende comme a fait le dieu Mars.
Andegamûlo sancto, ut isj sic nosjeuru.
Persuadé que cette pierre est le témoin d'un fait encore
plus vénérable qu'il n'est ancien, je crois bonnement,
Monsieur, qu'elle appartient au public et que sa place doit
être dans un lieu public. Je n'ai pas besoin de vous en dire
les raisons.
Excusez le mauvais ordre de cette lettre; lepeudetems
dont je puisse disposer, le départ de la personne qui veut
bien s^en charger, ne me permettent pas de la tirer ny faire
tirer au net.
Il me manque le premier de vos Annuaires ^ )*en suis
désolé. Ne pourriez-vous pas me le procurer à quelque prix
que ce soit? M. Garilland père voudra bien se charger de
me le faire passer.
J^ay l'honneur d'être avec la plus parfaite considération ,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
GuYOT SAnrrfi-HâjbrB.
IL
Lettre de Chaumette à monsieur Frébault, chirurgien^
rue du Rivage, pour remettre à M, Thomas , che\
Af. Frébault, à Chevannes, — A Nevers, département
de la Nièvre.
J'ai reçu vos deux lettres, mon cher Thomas; la multi-
plicité de mes occupations m'a empêché jusqu'ici d^y
répondre. Je suis très-sensible à votre souvenir; je voudrais
être à portée de vous être utile, ]e le ferais de tout mon
cœur; 'Hïafs le diable est à mes trousses, la politique me
— 329 ^
tourne la tête; à peine m^aperçois-je de mon existence, car
je ne vis plus pour moi , mes jours et mes nuits sont consa*
crés à la-chose publique.
Vous me demandez un discours ; mettez- vous bien dans
la tête que les choses apprêtées ne valent jamais rien. Dittes
tout uniment à votre curé :
Les nouvelles loix n'ont changé ni Tordre , ni la mission
des prêtres, ni le culte, ni la morale; elles n'ont rien changé
à l'harmonie intelligente; elles n'en ont changé que le
mode vicieux et Font rapproché des principes de la raison
universelle. La France n^a pas démoli son église, elle en a
repoli les pierres , elle Ta rappellée à son origine et à la sim
plicité patriarchale. Le serment décrété par l'Assemblée
nationale a été comme le crible qui sépare Tivraye du bon
grain ; ceux qui ne s'y sont pas soumis ont décelé un cœur
avare et perfide , ils ont montré qu'ils étaient indignes de
leur mission.
Vous qui n'avez pas séparé vos intérêts de ceux du peuple,
Jouissez du spectacle d'une famille de frères qui vous confie
ses plus chers intérêts ; vos vertus vous ont fait choisir pour
la guider dans les voies du salut et la consoler dans ses
peines , vos vertus vous en feront chérir.
Cela suffira, mon cher Thomas; évitez les grandes phrases
si vous ne voulez pas tomber dans le phébus ; surtout n'y
mêlez pas de latin , il n'est rien de plus détestable que cette
manie ; d'ailleurs, il faut que tout le monde vous entende.
Si vous voulez ajouter quelque chose , vous en êtes le maître ;
je ne vous ai donné que quelques idées qui me sont venues ;
mais gardez-vous d'entrer dans de grands détails sur la
constitution civile du clergé, cela vous entraînerait dans des
discussions où ni votre curé ni vous ni vos auditeurs n'en-
tendriez rien. Un langage simple et sans aprêt, voilà ce
qu'il faut. Quant à mon avis sur votre nouvel état , je crois
qu'il vous convient. D'ailleurs là-dessus on ne consulte que
soi-même.
Vous me demandez comment il faut étudier la théologie.
T. III, 3' série* 42
— 33o -
Ah ! mon Dieu ! tenez , mon ami , le meilleur moien de
réussir à cette étude c'est de se charger la mémoire de ce fatras
insignifiant et se donner de garde de le soumettre aux
lumières du bon sens. La théologie Bone Deus ! Apprenez
votre leçon et puis c'est tout ; mais lisez Loke , Rousseau ,
Voltaire et Bernardin de Saint-Pierre, voilà ce qui vous
formera le cœur et l'esprit , voilà les lectures qui vous ren-
dront heureux dans quelque situation que vous vous
trouviez.
Ne m'oubliez pas, tâchez d'être bientôt curé; mais ne
sortez jamais de votre caractère, je serai toujours votre ami,
car je saurai bien distinguer Thomme d'avec Thabit.
Adieu^ paix, santé et liberté.
Chaumette.
Paris, 7 aoust 1791.
Je vis dans mon ménage. Je suis ennuyé d'être volé par les
traiteurs. J^ai oublié votre addresse. J^addresse cette lettre à
tout hazard.
III.
A monsieur de La RUe, docteur en médecine à Nevers.
Je vous envoyé, monsieur, l'histoire de Rochefort : ie
prens la liberté de vous en faire un présent, mais ie vous
prie de le regarder plutost comme une marque des senti-
mens de mon cœur, que comme un ouvrage de mon esprit :
Je me suis souvent apperceu
Qu'ouvrage de l'esprit que bon auteur sçait fieiire
N'a pas touiours le don de plaire ,
Mais ce qui vient du cœur est touiours bien receu.
En lisant l'ouvrage dont ie vous fais part, vous verres que
le sujet n'est pas fort intéressant, il est même assés stérile et
— 33i —
peu susceptible des beautés de Phistoire. Si i'avois été maitre
de choisir une matière pour travailler, j^en aurois pris une
plus heureuse : mais c^est le hasard qui m'a décidé pour
celle-cy ; elle vous donnera cependant une légère idée d'un
des plus beaux ouvrages de Louis XIIII :
Recerés ce petit volume ,
Nouveau fruit de ma vieille plume;
Qu'il ait part aux bontés que vous avés pour moy.
S'il ne mérite pas, ami, votre suffrage.
Si vous n'y trouvés point pièces de bon alloy.
D'un grand historien le stile , ni l'ouvrage ,
Vous y verres du moins Touvrage d'un grand Roy.
Mais que va devenir, monsieur, le livre que ie vous
donne? En quelle compagnie Tallés-vous mettre? le tremble
déjà pour lui. Vous allés l'associer aux plus grands hommes
de Tart, et il fera dans votre bibliotèque une pitoyable
figure : il y paroîtra bien étranger parmi des auteurs farcis
de grec, de latin et d^arabe. De quel étonnement ne sera-t-il
pas saisi au milieu des Isagogues , des aphorisme^ de Tan-
geiologie et de la splanchnologie :
Parmi tous vos doctes volumes
Enfiins des plus scavantes plumes ,
Quelle figure y fera donc le mien ?
Tiendra-t-il quelque rang auprèsM'un Hipocrate
De Willis, Vankelmont, d'EtmuUer galien
Et de ces grands auteurs qui connoissent si bien
Les allures du cœur, du foye et de la rate.
Il tremblera près de Diemerbroeck :
Stenon , Malphigius , le tiendront en échec :
L'Arabe Averroès , son confère Avicenne
Luy feront bientost perdre halène
Et garder le tacet :
Devant ces deux sçavans nés pas loin de la Mèque
Et le< autres qui font votre bibliotèque
Il ne sera qu'un marmouset.
Enfin, monsieur, tel qu^il est et qu^il vous paroîtra,
- 332 -
recevés-le avec autant de bonté qu'a de respect pour vous
celui qui est très-sincèrement,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
F. Théodore de Blois, cap.
A Nevers, ce 29 juillet 1739.
Vous voulés bien que M«» de La Rue trouve ici l'assu-
rance de mes respects.
SÉANCE DU 22 MARS 1888.
Présidence de M. le comte de Soultiu.it, président
Etaient présents : MM. le comte de Soultrait,
président 'y Roubet, président honoraire ; Ernest
de Toytot , secrétaire ; Canat , conservateur du
musée] Tabbé Soyer, de Villefosse, de Charant,
Col, Le Blanc-Bellevaux, Gautheron, Octave de
Villenaut, A. de Rosemont, Arthur de Rosemont,
le vicomte de Maumigny, de Flamare.
La Société reçoit de M. Alfred Bovet le magni-
fique ouvrage en deux volumes des lettres auto-
graphes composant sa collection.
Le Président exprimera à M. Bovet, au nom de
la Société, nos sentiments de gratitude. II est
décidé qu'en échange il sera envoyé à M. Bovet le
Sacramentaire nioernais.
— 333 —
Lecture est donnée :
I* D'une lettre-circulaire du ministre de Fins-
truction publique relative à la réunion des sociétés
savantes qui se tiendra le 22 mai 1888 ;
2^ D'une lettre de l'Association pour Tavan-
cement des sciences , dont le congrès se tiendra à
Oran du 29 mars au 3 avril.
M. Roubet offre à la Société une étude sur
la paroisse de Magny, par M. BuflFet , et une autre
plaquette intitulée : Une visite au prieur de
Saincaize ^ par M. Louis Roubet.
M. de Flamare lit un curieux mémoire sous ce
titre : U exécution des frères de Chastel-Chassy y
26 juillet 1726.
M. de Rosemont termine la séance par la lec-
ture d'un travail intitulé : Origine de r homme. Il
fait précéder cette communication de quelques
détails intéressants sur l'organisation et l'instal-
lation du congrès catholique des sciences.
SÉANCE DU 26 AVRIL 1888.
Présidence de M. Roubet, président honoraire.
Etaient présents : MM. Roubet, président
honoraire; l'abbé Boutillier, vice-président; de
Toytot, secrétaire; Canat, conservateur du
musée; Duminy, archiviste; l'abbé Soyer, Aug.
du Verne, le vicomte de M?iumigny, de Villefosse^
— 334 —
le comte de Maumigny, de Charant, Langellé,
Octave de Villenaut , Julien , de Flamare , Tabbé
Pot.
M. Roubet communique à la Société une lettre
de M. Minoret, de Paris, lequel est détenteur
d'un manuscrit de Tabbé Berthier, prieur de Sain-
caize. M. Roubet se mettra en rapport avec lui
pour prendre connaissance dudit manuscrit, qui
peut intéresser à un si haut degré la Société.
Lecture est donnée :
I® Du programme du congrès archéologique de
France, qui se tiendra le 12 juin 1888, à Dax ;
2^ De la circulaire du ministre des beaux-arts
relative à la réunion annuelle des sociétés savantes.
M. le président Roubet lit à la Société quel-
ques pages intitulées : Un extrait des auto-
graphes de M. Alfred Booet.
Mention est faite par M. l'abbé Boutillier d'une
notice de M. Anatole de Charmasse : Les Pèle-
rinages à Saint-Sébastien d'Uchon. M. l'abbé
Boutillier insiste à ce sujet sur cette question :
Pourquoi saint Sébastien est-il invoqué contre la
peste ? et il ajoute quelques nouveaux témoignages
empruntés à l'ancienne liturgie nivernaise.
Le même membre donne ensuite lecture de
quelques extraits intéressants d'une lettre de
M. Teste, de Vésigneux, relative aux livres de
raison dans le Morvand :
c II n^y a pas ici , à proprement parler, de livres de raison
ou de famille dans la forme indiquée par M. de Ribbe»
— 335 —
mais il y a des livres de comptes qui s'en rapprochent. L'un
de ces livres concerne les affaires d'un membre de la famille
Déports ou de Pons , dont un descendant exerçait à Nevers ,
il y a quelques années, les fonctions d'inspecteur des forêts.
Ce livre est intitulé : Livre de conte et joumalle de mes
affaires à quoyfoy doy aytre ajouté. Depons.
» Il comprend une trentaine d'années à partir de 1742. En
dehors des aCTaires proprement dites concernant les domes-
tiques, les domaines, les réparations, le boucher, etc., il y a
peu de notes intéressantes. La plupart sont en hors-d'œuvre
sur la couverture du registre ou en papiers volants.
M. Depons y donne les noms de ses enfants, la date de leur
naissance, l'entrée de sa fille au couvent. Il y a le chapitre
des Pauvres et un billet du curé de la paroisse pour en recom-
mander. Dans l'une des feuilles volantes, M. Depons
récapitule ses revenus, qui s'élèvent à 6,648 fr., et indique
ensuite ses charges, s'élevant à 5,696 fr. 10 c, et qui com-
prennent les pensions faites à sa mère, à ses quatre frères,
à sa sœur, etc. Et après avoir trouvé qu'il ne lui reste plus
que 949 fr., il ajoute mélancoliquement : c Sur quoi il y a
l'entretien de douze domaines, cinq maisons de maître,
deux locateries, les voyages en Bourgogne, les affaires et
procès à soutenir. On ne fera pas valoir les agréments de ce
bien-cy, etc. • Cette famille Depons, attachée primiti-
vement à la maison de Bourbon-Busset , contracta des
alliances à Saint-Martin-du-Puy et dans les environs.
» L'autre livre de comptes concerne les dépenses particu-
lières de FrançoiS'LouiS' Antoine de Bourbon, comte de
Busset et de Chalus , baron de Saint-Martin-du-Puy , et de
Puy agut, etc., etc., lieutenant-général. Il ne comprend que
l'espace d'environ cinq ans, à partir de la fin de ij86.
Grâce aux minutieux détails dans lesquels entre son auteur,
on peut se rendre compte très-facilement de la vie d'un
grand seigneur d'alors à la cour, à Paris, aux e^ux, en
voyage, dans ses terres, dans des circonstances particulières,
telles que le baptême de ses petits-enfants , etc. Seulement il
— 336 —
est regrettable qur ce livre n'embrasse qu^ua si court espace
de temps.
» En somme , ces deux livres de comptes pourraient former
Tobjet d'une étude ne manquant pas d'un certain intérêt. »
M. de Toytot signale la présence à la biblio-
thèque de la ville d'un livre d'heures ayant appar-
tenu à la famille de Changy. Les marges du livre
renferment la date et la mention des naissances
des enfants de la famille, avec les noms des
parrains et marraines et des mentions touchantes,
telles que celle-ci par exemple : € Dieu lui fasse
la grâce d'être homme d'honneur et de bien, d
M. Octave de Villenaut donne lecture d'une très-
intéressante notice sur le Sceau de Jehannette
de Pomayy qu'il pense être le premier sceau
authentique de la maison féodale de Lamoignon.
Ce travail sera inséré au Bulletin,
MM. Auguste du Verne et de Villenaut pré-
sentent à la Société comme membre titulaire
M. Paul Robert , qui est admis à l'unanimité.
Avant de terminer la séance, M. l'abbé Bou-
tillier demande au nom du R. P. dom Noël, de
l'abbaye de Solesmes, l'échange de V Inventaire
des titres de Nevers, de l'abbé de MaroUes,
contre divers ouvrages publiés par les Pères de
Solesmes. Cette proposition est favorablement
accueillie.
*x
— 337 —
EXTRAIT
DES AUTOGRAPHES DE M. ALFRED BOVET.
Les autographes qui composaient la collection Alfred
Bovet ont, avant leur vente, été publiés en deux volumes
par M. Etienne Chavaray, qui en a offert un exemplaire à la
Société nivemaise.
Nous avons été chargé d^en faire un extrait en tant que
quelques-uns de ces autographes pourraient intéresser les
chroniques locales de notre province.
Nous apportons aujourd'hui notre modeste travail.
Tout d'abord , nous ferons observer que la publication de
M. Chavaray n'offre qu'une énonciation très-sommaire du
texte des autographes collectionnés.
Quels qu'ils soient , aucun d'eux nous a paru devoir être
rejeté comme apocryphe.
Sans doute, les antiquaires eussent aimé à rencontrer dans
leur nombre quelques épaves plus archaïques, quelques
monuments plus rares que ceux qui nous sont offerts.
Mais tous les chercheurs n'ont la chance exceptionnelle de
M. Michel Charles, de l'Institut, qui crut un jour avoir mis
la main sur une lettre autographe de Marie-Madelaine et sur
un laisse^'passer de Vercingétorix.
Parmi les plus anciens collectionneurs , nous devons citer
Philippe de Béthune, frère du grand Sully, dont les des^
cendants détiennent encore aujourd'hui le château nivernais
d'Apremont. A l'aide des archives de la maison de Nevers,
il était parvenu à constituer la première collection d'auto-
graphes proprement dits.
Hélas ! que sont devenus beaucoup de ces précieux docu-
ments qui n'ont pu trouver la place qu'ils devaient prendre
dans Y Inventaire des titres de Nevers^ djressé par l'abbé
de MaroUes?
T. Ht, 3* série. 43
- 338 -
Nous mentionnerons aussi M. Grangierde La Marinière,
qui avait assemblé un grand nombre d'autographes niver-
nais , tous dispersés après sa mort.
Cest là le pire destin de toutes les collections qui ne trou-
vent point de sociétés assez favorisées pour en devenir dona-
taires.
Voici donc le petit nombre d^autographes émanant de
personnages qui, à un titre quelconque, intéressent notre
Nivernais :
I.
Marie- Louise de Gonzague, née en 1612, fille de Charles,
duc de Nevers, et de Catherine de Lorraine, reine de
Pologne, femme du roi Ladislas, 1645, puis de Jean
Casimir, 1648, décédée en 1667.
Lettre dans laquelle elle remercie en italien Piccolomini ,
duc d'Almalfi.
IL
Anne de Gonzague, princesse palatine, amie du grand
Condé, célèbre par la part qu'elle prit aux troubles de la
Fronde, née en 16 16, morte au palais de Luxembourg, en
1684.
Bossuet a prononcé son oraison funèbre.
Nous nous permettrons de taire observer à cette occasion
que Bossuet a commis une erreur en attribuant aux prin-
cesses Marie et Anne Tinstitution dans leurs Etats des filles
aumônées. La dotation dévolue à perpétuité et annuellement
à cinquante filles a été créée par Louis de Gonzague et
Henriette de Clèves.
Notre maître Adam a maintes fois célébré les princesses
Anne et Marie. Nous possédons leurs signatures au bas d^un
acte de foi et hommage donné par Etienne Rousset , avocat
du roi au présidial de Saint-Pierre, comme acquéreur du
fief des Réaux, qui relevait de la châtellenie de CuSy.
— 339 —
III.
Le cardinal Mazarin, né à Rome^ le 14 juillet 1602, mort
au château de Vincennes, le 9 mars 1661.
c Instruction diplomatique pour gagner à la cause de
France les électeurs de Cologne, de Trêves et l'électeur
palatin. La lettre, du 20 juillet 1 657, est adressée au maréchal
de Grammont, ambassadeur extraordinaire. On y lit : Nous
n'avons point d'argent ; mais quand je devrais vendre ma
vaisselle et rester en chemise, il faut pas perdre l'occasion
d'acquérir ledit électeur, >
Le cardinal ne vendit point sa vaisselle et fit deux années
après, l'acquisition du duché du Nivernais.
IV.
Bussy-Rabutin (Roger, comte de), lieutenant-général pour
le roi de la province du Nivernais , né à Epiry, le 3 avril
1618, mort à Autun le 9 avril 1693.
Dans Tannotation faite par M. Chavaray, Epiry est indi-
qué comme se trouvant dans la Nièvre. Il paraît que le lieu
d*Epiry qui a vu naître le trop fameux Bussy n^est pas dans
la Nièvre, mais dans le département de la Côte-d^Or.
L'autographe relaté est d^autant plus intéressant qu'il
contient un post^scriptum de la main de sa fille Louise-
Françoise, qui épousa en premières noces le marquis de
Coligny. Elle convola en secondes noces avec Henri de La
Rivière; ce mariage eut lieu au château de Lanty (Nièvre),
à Tinsu du comte de Bussy, qui, par tous les moyens
possibles, en attaqua la validité, notamment sur ce fait quUl
avait été contracté à minuit, heure indue.
Dans un travail que nous avons publié après l'avoir lu à
la Société, nous avons rendu un compte fidèle des débats qui
résultèrent de cet étrange procès La cour confirma le
mariage , mais la fille de Bussy ne retourna point auprès de
— 340 —
son mari. Abandonnant sa qualité de marquise de Coligny,
elle prit le nom de comtesse de Dalet, et publia la vie de
MmedeChantaK
V.
Vauban (Sébastien) Le Prestre (de), né à Saint-Léger-du-
Fougeret, le 15 mai 16? 3, mort à Paris, le 3o mars 1707.
c Une lettre approuvant Padmission aux Invalides de
Nicolas Sarton, dit La Ramée. >
VI.
Louis-Jules-Barbon Mancini-Mazarini, duc de Niver-
nais :
c Poète fabuliste, habile diplomate, traducteur distingué,
membre de TAcadémie, 1743, né à Paris, le 16 décembre
171 6, mort en la même ville, le 25 février 1798.
1 Lettre où il remercie Voltaire de Pintérét qu'il prend à
sa santé, et parle de la souscription aux œuvres de Corneille.
11 rengage à écrire aux membres de l'Académie.
» La lettre est signée : Le duc de Nivernois. »
VII.
Saint-Just (Louis-Antoine), poète, député de TAisne à la
Convention, membre du comité du Salut public, ami de
Robespierre, né à Decize (Nièvre), 25 août 1767, décapité le
28 juillet 1794.
c Lettre d'affaires personnelles. »
VIII.
Chaumctte (Pierre-Gaspard), procureur de la Commune
de Paris, créateur des fêtes de la Raison, né àNevers, 21 mai
1763, décapitée Paris, le i3 avril 1796.
— 341 —
« Lettre à Uaubigny, ami de Danton, du i6 novembre
1 793. Il recommande le citoyen Barrie, qui demande à entrer
dans les 3o,ooo hommes qui vont être formés. Cest un vrai
sans-culotte qui se battra jusqu^à la mort contre les ennemis
de la République.
I Daubigny était adjoint au ministre de la guerre
Bouchotte. >
II nous souvient d^avoir entendu raconter par un Niver-
nais contemporain de la Révolution qu'il avait vu la mère
de Chaumette se promener fièrement dans les rues de Nevers
en criant : c Voici le sein qui a porté le bonheur de la
France. >
IX.
Enfin, nous trouvons un autographe du marquis de
Dupleix , le célèbre gouverneur des Indes.
Sa lettre est datée du 12 février 1753.
Elle nous a paru intéressante , parce qu'elle contient la
signature légalisée de frère Sébastien de Nevers, capucin
missionnaire apostolique, seul curé de Pondichéry. Cette
signature nivernienne était apposée à un acte de naissance
de Pierre de Bausset, employé supérieur de la Compagnie
des Indes et frère de Louis- François, qui devint cardinal et
fut rhistorien de Bossuet et de Fénelon.
L. ROUBET.
— 342 —
POURQUOI SAINT SÉBASTIEN EST-IL INVOQUÉ
CONTRE LA PESTE ?
Quel rapport la vie et la mort de saint Sébastien peuvent*
elles avoir avec la peste ?
Un de nos savants confrères de la Société éduenne,
M. Anatole de Charmasse, pose ainsi cette question dans
une notice pleine d'érudition qu'il vient de publier sur les
Pèlerinages à SainUSébastien d'Uchon (i).
Et il répond : « Aucun , si on s'attache seulement à la
forme extérieure de son supplice.
» Les savants auteurs des Acta Sanctorum se sont posé la
même question y et ne trouvant rien dans les actes de saint
Sébastien qui motivât son intercession contre les maladies
épidémiques : Nul lis extantibus in ejusdem gestis hujus rei
yestigiis(2), ils ont émis à ce sujet la supposition que le
sens métaphorique et figuré de certains passages de l'Ecriture
avait été interprété dans le sens réel et que cette interprétation,
assez conforme au génie populaire, avait pu associer le nom
de saint Sébastien percé de flèches à la crainte des maladies
pestilentielles. Ces maladies, disent-ils, sont appelées les
flèches les plus ardentes de la colère divine, d'oti la piété
chrétienne a choisi parmi les bienheureux Sébastien, assailli
de flèches , comme un protecteur contre le mal de la peste :
Ubi contagia ardentissima divinœ irœ sagittœ nuncupantur,
ideo christiana pietas e divorum numéro Sébastianum
sagittis impttitum adversus pestiferum morbum sibi tute-
larem eîegit.
» Cette dévotion envers saint Sébastien était déjà en usage
au septième siècle, puisque, au témoignage de Paul Diacre,
la peste qui sévissait à Rome depuis trois mois, en 680
cessa subitement après le vœu fait par les habitants d'ériger
un autel à saint Sébastien.
(i) Autun, imprimerie Ûejussieu {ïère et fils, 1888.
(2) Acta Sanctorum, tome U, p. 624.
— 343 —
1 Elle se manifesta de même lors de la célèbre peste de
Milan, en 1576, et dans plusieurs autres villes. C'est donc
une preuve, disent encore les auteurs des Acta Sanctomm^
que saint Sébastien est invoqué contre la peste par la prière
générale des chrétiens.
» Enfin , la liturgie avait elle-même souscrit à la coutume
d^invoquer saint Sébastien contre la peste, i
M. de Charmasse en produit plusieurs témoignages
empruntés à un ancien collectaire de Tabbaye de Saint- Victor
de Marseille et, en particulier, au missel autunois de
Philibert d'Ugny, publié en 1556.
Nous avons eu la curiosité d'ouvrir aussi nos anciens
livres nivernais. Il n'est personne, en effet, qui ne sache
combien saint Sébastien était en grand honneur à Nevers,
dans sa chapelle publique, sur la place qui porte encore
aujourd'hui son nom. Que de fois, depuis le seizième siècle,
des vœux de bougies de cire c du gire et long de cette
ville (i) > lui avaient été faits par les échevins c pour apaiser
rire de Dieu qui menace de peste et contagion , n^y ayant
d'autre remède (2). Lors de la démolition de cette chapelle
en 176 1, la bougie fut solennellement transportée en Téglise
Saint-Arigle; elle y brûlait tous les jours pendant la messe,
et cela encore en 1789.
La cathédrale avait aussi sa chapelle de Saint-Sébastien ,
attenante à la grande tour de Saint-Cyr où, dès 1439, Ton
venait également en pèlerinage (3). Or, nous avons rencontré
dans le beau Processionnal nivernais y édité en i535 par
Mgrd'Albret, un long Oremusen l'honneur du bienheureux
martyr Sébastien , dans lequel se retrouvent précisément les
expressions employées par les auteurs des Acta Sanctorum.
il) Arch. communales de Nevers, série CC, 285.
fi) Arch. communales de Nevers, série BB., ii.
(3) Voir dans le Bulletin de la Société nivemaise^ tome V, 187s,
notre mémoire sur les anciens vocables des autels et chapelles de la
cathédrale de Nevers.
— 344 —
Ni les glaives, ni les flèches des bourreaux n'ont pu
ébranler le bienheureux Sébastien ; et, pour cette raison, on
le supplie de secourir, de consoler, de guérir les malheureux
atteints des flèches de la peste.
Voici cette prière extraite du Processionaîe secitndum
ritum et morem insignis ecclesie cathedralis Nivemensis.,,
anno i535.
c Orbmus. — Deus qui beatum Sebastianum martyrem
tuum in tua fide et dilectione tam ardenter solidasti , ut
nuUis carnalibus blandimentis, nullis tyrannorum minis,
nullisque carnificum gladiis sive sagittis a tua cultura potuit
revocari, da nobis miseris peccatoribus dignis ejus meritis
et intercessionibus, in tribulatione auxilium, in persecu-
tione solatium et in omni tempore contra pestem epidimie
remedium : quatinus possumus contra omnes dyabolicas
insidias viriliter dimicare : mundum et ea que in eo sunt
despicere : et nuUa ejus adversa formidare : ut ea que te
inspirante desideramus valeamus obtinere. Per Christum
Dominum nostrum. Amen. »
f O Dieu qui avez si ardemment confirmé dans votre foi et
votre dilection le bienheureux Sébastien, votre martyr, que
ni les tendresses de la chair, ni les menaces des tyrans , ni
les glaives ou les flèches des bourreanx n^ont pu le retirer
de votre ardent amour !
1 A nous misérables pécheurs, par ses dignes mérites et ses
intercessions, donnez le secours dans la tribulation, l'assis-
tance dans la persécution , et en tout temps le remède contre
le fléau de Tépidémie ; — autant que nous le pouvons , —
donnez-nous aussi de virilement combattre contre les
embûches diaboliques, de mépriser le monde et ses suppôts,
sans craindre aucune de ses adversités, afin que tous les
désirs inspirés par vous nous puissions les obtenir. Ainsi
soit-il I »
Ajoutons, en terminant , que l'interrogation relative au
— 345 -
culte spécial de saint Sébastien pourrait être faite avec autant
de curiosité pour un grand nombre d'autres saints.
Combien de saints , en effet, invoqués dans différentes
maladies ou comme patrons de confréries de métiers, et pour
lesquels il serait assez difficile de préciser la raison plus ou
moins sérieuse ou naïve qui a déterminé leur choiz I
Il nous souvient d^avoir lu dans les cahiers de notes
manuscrites de l'abbé TroufBaud, intitulés : Fragments
philosophiques, quelques lignes qui répondent bien à notre
pensée et que nous transcrivons sans autre commentaire :
c Saint Claude voyait s^adresser à lui les boiteux , parce
que claudicare signifie boiter ;
» Saint Genou , les goutteux , parce que la goutte prend
ordinairement au genou;
» Saint Crépin^ les cordonniers, parce que crepida veut
dire soulier ou pantoufle, etc.;
» La Conversion de saint Paul, les cordiers, parce qu'ils
travaillent à reculons pour filer leur corde, et que saint Paul,
à la voix de Dieu , se convertit sur le chemin de Damas et
retourna en arriére. »
Avril 1888.
L'abbé BOUTILLIER.
SÉANCE DU 31 MAI 1888.
Présidence de M. Roubbt, président honoraire.
Etaient présents : MM. Roubet, président
honoraire; Canat, conservateur du musée;
Dumîny, archiviste ; Octave de Villenaut , Henri
d'Assigny, Tabbé Soyer, Gautheron , Langellé , de
Flamare.
T. ui, Z* série. 44
- 346 -
M. Roubet donne lecture d'une lettre de notre
confrère M. le chevalier de Pierredon , directeur
des usines d'Imphy, relative au don par lui fait au
musée de la porte du Croux de deux grandes
statues en bois de saint Arigle et sainte Catherine,
trouvées dans la cave de la cure d'Imphy et datant
du dix-septième siècle.
M. le Président propose ensuite à la Société de
faire Tacquisition pour notre musée d*une statue
tumulaire en pierre, représentant une femme
agenouillée en costume du seizième siècle, qui
faisait autrefois partie du monument funéraire de
la famille de Beaujeu, en la paroisse de Bitry, et
qui se trouve maintenant hors de l'église , ainsi que
l'a constaté M. de Soultrait dans son Répertoire
archéologique de la Nièore.
M. Roubet termine la séance par la lecture d'un
travail intitulé : Document inédit sur la Réoo--
lution dans le canton de La Guerche. — Un
roi inconnu.
SÉANCE DU 28 JUIN 18Ô8.
Présidence de M. Tabbé Boutilliek, vice-président.
Etaient présents : MM, l'abbé Boutillier, vice-
président ; E. de Toytot, secrétaire ; Duminy,
archiviste; Henry d'Assigny, de Villefosse,
l'abbé Foucher, Florimond Gautheron , l'abbé
Soyer, l'abbé Sery, Blanc, de Charant, Col, de
— 347 -
Lespinasse , Ad. de Villenaut , le comte de
Maumigny, Langellé , de Pierredon.
M. le Président fait part à la Société d'une lettre
de M. de Soultrait dans laquelle il' exprime le
regret de ne pouvoir assister à notre réunion , et
manifeste la résolution de se démettre de ses
fonctions de président si son état de santé ne
s'améliore pas.
Sur la proposition de M. Ad. de Villenaut, la
Société prie M. Tabbé Boutillier d'adresser à notre
Président ses sentiments de condoléance pour la
mort de M™® de Soultrait et ses vœux pour le
rétablissement de sa santé.
M. l'abbé Boutillier donne ensuite lecture d'une
lettre de dom Albert Noël , par laquelle le docte
religieux remercie la Société de l'envoi de V Inven-
taire de Marolles , où il dit avoir trouvé plus de
pièces qu'il ne comptait en rencontrer ; mais où se
trouvent les originaux de ces documents ? ce II se
pourrait , dit-il , que les archives actuelles du
prince de Monaco gardassent un bon nombre de
titres concernant notre Rethelois; du moins c'est
ce que j'ai appris de M. Saige , à qui en est confiée
la garde. La Revue des questions historiques ^
tome XXXVIII , pages 605-606 , donne une note
intéressante à ce sujet , et tout porte à croire que
la plupart des chartes relatives au Nivernais y ont
été placées, d
Les BoUandistes, qui publient actuellement les
Analecta BoLlandiana , demandent qu'on veuille
bien faire avec eux l'échange de nos publications
- 348 —
réciproques. Cette demande est favorablement
accueillie.
M. le Président donne connaissance , à titre de
curiosité, d'un extrait du Giornale araldico-
genealogico-diplomatico , publié à Pise par les
soins de l'Académie héraldique italienne (numéro
de janvier 1888), concernant Vorigine prétendue
italienne de Jeanne d'Arc. Elle sortirait de la noble
famille Ghisilieri, à laquelle appartient saint
PieV.
En terminant, l'auteur a soin d'ailleurs, avec
une parfaite courtoisie , d'observer que s'il a tenté
de prouver l'origine italienne de Jeanne d'Arc , il
n'a eu, en aucune façon, la pensée d'offenser
Tamour-propre de la très-noble nation française
(non abbiamo avato in animo di qffendere V amor
proprio délia nobillissima nazione francese...)
ni de diminuer sa gloire ; son but a été de pro-
voquer des recherches de la part des travailleurs
des deux nations.
Au surplus, ajoute-t-il, la France est assez riche
en gloires militaires ; et alors même qu'il pourrait
être prouvé, avec évidence et sans crainte de
contradiction, que Jeanne d'Arc est d'origine
italienne , l'héroïne d'Orléans n'en demeurerait pas
moins une gloire française, tout en étant une
gloire de la patrie italienne.
- 349 -
SÉANCE DU 26 JUILLET 1888.
Présidence de M. Roubbt, président honoraire.
Etaient présents : MM. Roubet, président
honoraire; Canat, conservateur du musée;
A. de Villenaut , E. Cheminade, Tabbé Foucher,
Tabbé Pot, H. Blanc, de Maumigny, FÏorimond
Gautheron, Langellé, Tabbé Soyer, le docteur
Suberty de Lespinasse.
M. le Président donne lecture d'une lettre de
M. de Soultrait, s'excusant de nouveau de ne
pouvoir présider cette séance; étant toujours
très-souflFrant.
M. Hippolyte Blanc offre à la Société une bro-
chure intitulée : Louis XVI et les conquêtes de
89, dont il est l'auteur. Il donne ensuite lecture de
plusieurs lettres très-intéressantes , extraites de la
correspondance de Colbert avec Mazarin, et
toutes relatives au duché de Nivernais. Le travail
de M. Blanc sera inséré au Bulletin dès que
Tauteur l'aura terminé.
M. FÏorimond Gautheron donne lecture de
plusieurs notes concernant VA Ibum du Nivernais^
par le commandant Barat, et communique plu-
sieurs dessins inédits, du même auteur, contenus
dans l'exemplaire qui était à son usage. Il donne
ensuite communication d'une poésie autographe
du poète nivernais A. Du vivier, dédiée au com-
mandant Barat.
— 35o —
M. le Président termine la séance par la lecture
d'un travail dont il est Tauteur, intitulé : Notice
locale. La Chapelle Saint - Biaise de La
Guerche.
SÉANCE DU 25 OCTOBRE 1888.
Présidence de M. Roubet, président honoraire.
Etaient présents : MM. Roubet, président ;
Tabbé Boutillier, vice - président ; Ernest de
Toytot, secrétaire; Canat, conseroateur du
musée; Duminy, archiviste; le docteur Subert ,
Tabbé Soyer, Col, E. Maraudât, Octave de
Villenaut, Henri Maraudât, Tabbé Pot, de Lespi-
nasse , de Flamare , Cheminade ,' A. de Villenaut ,
Langellé.
Lecture'est donnée de la Notice biographique
et bibliographique sur M. le comte Georges de
Soultraity publiée dans les Annales bourbon-
naises, par M. Roger de Quirielle, neveu du
défunt.
M. le président Roubet ajoute quelques détails
très-intéressants sur les débuts archéologiques de
M. de Soultrait ; Tinsertion en est demandée au
Bulletin.
La Société émet en outre le vœu qu'une notice
nécrologique spéciale soit faite par un membre de
la Société. M. René de Lespinasse est désigné et
accepte cette mission.
- 35i -
M. l'abbé Boutillier donne lecture d'une com-
munication qui lui a été adressée par M. le comte
Gaspard de Soultrait , sur les dernières intentions
de son père relativement à sa bibliothèque niver-
naise et à sa collection de documents originaux sur
le Nivernais, qu'il désirait vivement n'être pas
dispersées...
La Société décide que, malgré la mort de notre
président , il n'y a pas lieu de procéder immédia-
tement à la nomination de son successeur jusqu'au
mois de mai 1889, époque régulière du renouvel-
lement du bureau. Jusque-là M. Roubet, pré-
sident honoraire , continuera ses fonctions, et en
son absence M. le vice - président Boutillier le
remplacera.
SÉANCE DU 29 NOVEMBRE 1888.
Présidence de M. I^abbé Boutillier , vice-président.
Etaient présents : MM. l'abbé Boutillier, E. de
Toytot, secrétaire; Canat, conservateur du
musée; Duminy, archiviste; de Charant, le
docteur Subert , Henri et Edouard Marandat , le
vicomte de Maumigny, l'abbé Foucher, l'abbé
Guillemenot, Octave et Adolphe de Villenaut ,
l'abbé Soyer^ de Flamare, de Lespinasse, Col,
Langellé.
M. le Président donne la parole à M. de
Lespinasse pour la lecture de la notice sur la vie
— 352 —
et les œuvres de M • le comte de Soultrait, dont il
a été chargé à la dernière séance. L'insertion de
cette notice au Bulletin est votée à l'unanimité.
On y joindra le portrait de notre regretté pré-
sident, dessiné par M. Leprat pour les Annales
bourbonnaises et dont M. de Quirielle a bien voulu
nous procurer le cliché.
M. l'abbé Boutillier lit ensuite une lettre écrite
par M. le marquis de Montlaur à M. Roger de
Quirielle, et publiée dans le numéro des Annales
bourbonnaises de ce mois. L'auteur se plaît à
rappeler l'époque des congrès archéologiques
organisés par M. de Caumont. M. de Soultrait ,
dit-il, s*y retrouvait chaque année; il y était
écouté avec plaisir et l'on applaudissait sa parole
chaude et entraînante
Sont présentés pour faire partie de la Société :
M. le vicomte de Gaulm3ni, à Rimazoir, par
Souvigny (Allier), par M. Adolphe de Villenaut
et M. de Lespinasse ; — M. A. Baudot, à Lan^
(Nièvre), par M. l'abbé Soyer et M. le docteur
Subert; — M. Dugué, professeur honoraire au
collège Rollin, à Saint - Saulge , par M.Charles
Deton et M. l'abbé Boutillier.
MM. le vicomte de Gaulmyn, Baudot et
Dugué sont admis à l'unanimité.
C" DE SOULTRAIT
PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ NIVBRNAISB
DES LETTRES, SCIENCES ET ARTS.
NOTICE
SUR LA VIE ET LES ŒUVRES
DU
C" DE SOULTRAIT
PRÉSIDENT DE LA SGOÉTÉ NIVERNAISE DES LETTRES) SOENCES ET ARTS,
Loe à la séance da S9 novembre 1868
fin.
René DE L. E S PI N A S S £
ARCUIVISTE-PALioORAPHE
Messieurs,
Comme toutes les assemblées humaines, notre
Société voit avec peine disparaître ses membres
les plus aimés ; elle déplore et redoute ces vides
qui se font dans ses rangs; mais, sans abandonner
sa mission utile de conserver les précieux restes
du passé, sans ralentir son zèle pour l'histoire et
pour la science , elle doit chercher dans les mal-
heurs mêmes qui la frappent un redoublement de
travail et une confiance nouvelle.
C'est votre pensée à tous. Messieurs, c'est
Tobjet de vos conversations depuis que le comte
de Soultrait n'est plus parmi nous. J'ose dire que la
Société nivernaise représentait pour lui une famille
scientifique ; il avait été l'un des promoteurs de la
T. III, 3» série. 45
— 354 —
Société en 1 85 1 ; de près et de loin il restait tou-
jours notre confrère, enrichissant notre biblio-
thèque de ses importantes publications, et dans
son pays qu'il aimait tant , nous étions la principale
préoccupation de son esprit.
Il appartenait presque à la génération de ces
savants qui ont fixé la vraie méthode de Téru-
dition historique , en se servant des chartes, des
monnaies, des monuments pour prouver les faits,
pour redresser les dates , pour consigner les évé-
nements si curieux de nos histoires provinciales.
II a vu ce progrès grandir sous ses yeux, avec la
satisfaction d'y avoir quelque peu contribué dans le
cercle de ses nombreuses études locales. Plusieurs
réunions savantes le comptaient avec honneur
parmi leurs membres : la Société française
d'archéologie, fondée par M. de Caumont; les
Antiquaires de France , la Société des bibliophiles^
le Comité des travaux historiques et diverses aca-
démies et sociétés de province. Ses fréquentes
publications lont constamment fait remarquer
dans ces associations ; mais si quelques-uns de ses
écrits concernent d'autres provinces et principa-
lement le Bourbonnais et le Lyonnais, où il passa
de longues années , la plus grande part de ses
travaux revint toujours à sa chère province du
Nivernais, dont il vivait forcément séparé et
qu'il revoyait chaque année avec un nouveau
plaisir.
Avant la fondation de la Société de la porte du
Croux il y avait peu d'ouvrages imprimés sur notre
— 355 —
histoire locale , et, parmi eux, les articles histo-
riques des Almanachs de Gillet, parus de 1800 à
1809, étaient les plus intéressants. L'auteur avait
compris rintérêt et la méthode de Thistoire, et
encore aujourd'hui ses études sont consultées avec
fruit; il devait suivre tous les cantons et peut-être
les communes ; mais Gillet cessa ses publications
et en même temps disparurent les précieuses
notices.
M. de Soultrait, s'inspirant évidemment de la
même idée » voulut réaliser la continuation de ce
grand travail sur le plan indiqué par Gillet, et,
avec tous les moyens en son pouvoir, l'activité
prodigieuse de son talent et la passion de l'éru-
dition historique, il commença ses courses à
travers la province , fouillant les coins et recoins
d'une commune en chercheur et en curieux, notant
tous les détails sur les constructions , les familles ,
les armoiries.
Ces notes prises sur place et complétées ensuite
par des recherches dans les archives et les biblio-
thèques, furent le point de départ d'une série de
publications qui occupèrent sa vie entière. Ces
publications se ressentent de la hâte qui y pré-
sidait. L'auteur convenait le premier en toute
franchise des imperfections et des omissions qui se
glissaient dans ses nomenclatures et ses filiations.
Son étude était bien différente des travaux ordi-
naires; celui qui dépouille un dépôt public
d'archives peut prendre son temps, sans grands
déplacements et sans grands frais; celui qui doit
- 356-
parcourir un pays regarde davantage au temps et à
la peine , et il doit faire vite.
George de Soultrait se trouvait en face de
monuments inexplorés, de faits inédits pour la
plupart ; il releva tout et fit imprimer ses notes
avec une étonnante rapidité. Ceux qui ont écrit
savent seuls combien il faut de persévérance et de
labeur pour mettre un livre en état d'impression ;
aussi devons-nous lui savoir le plus grand gré de
tous ces éléments historiques qu'il a mis entre nos
mains. Sans lui nous n'aurions probablement pas
encore ces premiers fonds de travail réunis dans
les ouvrages qu'il a eu le courage de publier.
Les premiers résultats de ses tournées archéo-
logiques furent condensés dans une série de notices
sous le titre de Statistique monumentale du
département de la Nièvre et insérés chaque
année dans la partie littéraire des A Imanachs de
Bégat, depuis 1848 jusqu'à 1871. Chaque fascicule
comprend environ 40 à 50 pages in- 12, ce qui
donne une idée de l'importance de ce travail.
Tous les cantons et communes y sont passés en
revue : l'église, les monuments et châteaux, les
ruines avec les détails archéologiques de quelque
intérêt ; çà et là un souvenir de famille , un fait
historique sur les seigneurs, sur les hommes
remarquables, sur la population. Il y a beaucoup à
prendre et à retenir dans ces descriptions; chaque
jour voit disparaître des pièces et des monuments
dont la seule mention restera désormais. Ajoutons
que ces publications dispersées par le hasard sont
-357-
devenues fort rares et presque introuvables (i).
L'un des fascicules, paru en 1856 et consacré à
Nevers, a été tiré à part sous le titre de Guide
archéologique dans Nevers , et relève les monu-
ments et inscriptions susceptibles d'attirer l'atten-
tion des étrangers de passage dans notre ville.
Sans penser à analyser de semblables ouvrages,
il suffit de les indiquer pour se rendre compte de
la somme de travail qu'ils ont exigée.
M. de Soultrait collaborait en même temps aux
Annales archéologiques et au Bulletin monu^
mental de M. de Caumont, dont il fut un des
disciples les plus actifs. Il faisait paraître un
Armoriai du Nivernais avec nombreuses plan-
ches de blasons , et , pour établir encore mieux sa
réputation d'érudit, il publiait en 1854 un Essai
sur la numismatique nivernaise , édition de luxe
enrichie de gravures dans le texte, tirée à
200 exemplaires (2). U Armoriai fut l'objet d'une
édition plus récente ; mais la Numismatique est
restée dans sa forme primitive, et si elle est la
première œuvre , elle est aussi la meilleure et la
plus originale.
Les études des monnaies en étaient encore à
leurs débuts; l'auteur avait l'avantage d'arriver
premier sur un terrain à peine exploré : il devait
donc réussir à faire un livre curieux et utile. Après
(i) L'ensemble des notices forme un tirage à part d^un nombre
trls-restreint distribué en trois volumes.
(2) Paris, Didron, 1834, in-8* de 225 pages.
' .1
- 358 -
les médailles romaines qui se rapportent au
Nivernais , il prend les monnaies des deux pre-
mières races et, arrivé aux Capétiens, il montre»
par une série de pièces successives , la déformation
du sigle royal aussi marquée que dans les autres
provinces ; puis viennent les monnaies baronales
des diverses maisons qui ont occupé le comté de
Nevers.'_ L'existence des pièces donne lieu très-
souvent à des discussions historiques, des recti-
fications de faits et de dates ; nous le savons
aujourd'hui, grâce à l'élan donné alors par les
maîtres de la science, et nous nous estimons heu-
reux si nous pouvons découvrir encore quelque
pièce qui a échappé à leurs investigations.
L'époque moderne est représentée par des jetons
de toute beauté frappés sur l'ordre des ducs de
Nevers, et enfin par des mandats de villes et
divers billets de confiance mis en circulation dans
le département pendant la Révolution.
Quelque temps après son apparition, M. Morellet
rendit compte de la Numismatique nicernaise en
termes assez vifs ; la critique était un peu sévère
et imprimée dans le Bulletin de la Société (i) ;
elle réclama de la part de l'auteur une réponse
justificative qui ne se fit pas attendre. Ces luttes
à armes aussi courtoises que savantes furent l'occa-
sion d'une note insérée dans la Revue des Sociétés
savantes, où il est dit que M. deSoultrait, « esprit
juste et solide, avait fait de tous les monuments
(i) Tome II, p. 199 et 352.
— 359 —
du Nivernais, monnaies^ médailleSi jetons , sceaux,
chartes, une étude spéciale, et qu'il n'avait rien
négligé ni affirmé sans preuves (i) ».
Né le 27 juin 1822, George de Soultraît avait
alors trente-deux ans, il venait d'être nommé
membre non résidant du Comité des travaux
historiques, titre qui le rangeait définitivement
parmi les hommes de science ; il avait deux bons
livres imprimés et une quantité considérable de
notes manuscrites.
Il nous faut remonter quelques années pour
retrouver notre regretté confrère dans son rôle
de sociétaire. La Statistique monumentale ^
\ Armoriai et la Numismatique avaient paru en
dehors de nos publications , la Société n'en étant
encore qu^à ses débuts. Sa fondation avait été
décidée dans le congrès réuni à Nevers par M. de
Caumont en mai 1851, et, dès le mois suivant,
George de Soultrait, déjà membre du conseil
général de la Nièvre, accompagnait à la séance
d'inauguration l'évêque et le préfet, qui ouvrirent
solennellement la session de nos pacifiques débats,
témoignant par leur présence l'intérêt que tous
les administrateurs zélés et intelligents doivent
porter aux progrès des sciences et des études
historiques.
La situation de sa famille, ses talents per-
sonnels, son bagage littéraire, déjà important,
plaçaient George de Soultrait parmi nos membres
(i) Bulletin, tome III, p. i65.
— 36o -
fondateurs les plus distingués ; il fut aussi des
plus actifs.
M, Tabbé Crosnier avait proposé comme pre-
mier travail le Catalogue chronologique des
monuments du Nivernais , s'inspirant en cela de
rimpulsion donnée aux études archéologiques par
le congrès de Cau mont, qui venait de tenir à
Ne vers une session brillante.
Le Gouvernement encourageait l'initiative
privée ; il accueillait avec bienveillance les indi-
cations qu'on lui donnait ; il accordait des sous-
criptions aux sociétés, des récompenses aux
>
auteurs, des allocations pour réparations des bâti-
ments signalés comme intéressants au point de
vue de Tart.
Il fallait se montrer digne d'une si haute solli-
citude , et la Société nivernaise désigna son pré-
sident, Mgr Crosnier, pour la description des
monuments religieux et M. de Soultrait pour les
constructions civiles et militaires , sur lesquelles il
avait déjà écrit deux articles.
Nous avons vu dans la suite comment ces deux
archéologues remplirent la mission qu'ils avaient
acceptée. Mgr Crosnier, dont la mémoire est tou-
jours vivante dans nos cœurs , achevait son beau
livre de la Monographie de la cathédrale de
Saint-Cyr et tant d'autres études archéologiques
qui ornent notre Bulletin ; son compagnon de tra.
vail poursuivait sans relâche les ouvrages que je
continue de faire passer sous vos yeux.
Dans la séance du 21 août 1851, il fM'oposa un
— 36i —
mode de publication double du Bulletin : les
procès-verbaux à part et les documents et autres
travaux d'une certaine étendue également à part
et même dans un format différent. Cette propo-
sition, insignifiante en apparence, contenait la
bonne organisation de nos publications, objet
principal, je dirai même seule raison d'être de
notre Société ; elle fut adoptée pour les deux
premiers volumes, puis abandonnée pour la
deuxième série. Ce n'est pas ici l'occasion d'in-
sister ; je me borne uniquement à rappeler l'intérêt
que notre regretté président témoignait aux déci-
sions de la Société dès ses débuts.
Pour compléter et accorder entre eux les ren-
seignements recueillis au hasard dans ses tournées,
il avait puisé largement dans VInventaire des
titres de Neoers , rédigé en 1 636 par l'abbé de
Marolles. Peu de personnes connaissaient les
volumineux manuscrits appartenant à la Biblio-
thèque nationale , et George de Soultrait , séduit
de suite par cette accumulation de noms, de
faits et d'indications de tout genre, écrivait à
Mgr Crosnier, dès le printemps de 1855 : a: Plus
je parcours ces volumes, plus je me persuade que
leur publication serait du plus haut intérêt ; ce
serait un beau monument historique que notre
Société s'élèverait (i). 3>
Quelques mois auparavant, à la séance du
9 novembre 1854, notre vénéré confrère, M. le
(t) BUace du 19 ayril i855.
T. m, 3« série. 46
— 362 —
comte de Maumigny, dont nous admirons autant
le talent que la verte vieillesse, appuyait chaleu-
reusement ce projet de publication ; enthousiasmé
par rimportance et le nombre des pièces ana-
lysées, qui revenaient en quelque sorte sous la
main des travailleurs après la perte irréparable de
nos archives, il voyait dans Vlnoentaire de
Marolles un trésor de recherches et une abon-
dance de renseignements utiles à toutes les bran-
ches de noire histoire. On écouta les appréciations
judicieuses de M. de Maumigny, sans toutefois
donner suite à une entreprise trop onéreuse à ce
moment pour les ressources de la Société. L'affairé
devait être reprise plus tard et , pour son utilité
personnelle comme dans un intérêt quelconque,
George de Soultrait se mit bravement à prendre
copie de toutes les pièces qui touchaient au
Nivernais. Si la publication n'eût pas eu lieu , les
notes seraient restées quand même à notre dispo-
sition dans cette collection locale qu'il nous destine,
et ses travaux manuscrits lui survivaient, aussi
précieux peut-être que les documents qui y sont
joints. Combien d'entre nous prennent aussi des
notes ^ des copies, des analyses incomplètes pour
eux, et ne méritant pas les honneurs de Timpression,
tnais qui, réunies à d'autres, acquièrent tout d'un
coup une importance réelle* Le confrère dont
lions déplorons la perte aujourd'hui nojis avait
donné l'exemple des recherches et des copies ;
imitons-le, fouillons les papiers et les monuments,
la plume ou le crayon à la main ^ et notre œuvre
- 363 -
collective s'imposer^ d'elle* môme aii^ çsprits
éclairés*
Ses excursions archéologiques étaient presque
terminées vers 1860, et les matériaux amassés eii
grand nombre lui permettaient de suivre régu-
lièrement par année ses articles de statistique
monumentale. Cette première partie , qu'on pour-
rait appeler partie active j la plus facile et la plus
agréable , convenait surtout à son caractère scru-
tateur et enjoué. Il se sentait porté de préférence
vers les particularités de l'histoire locale , origines
et filiations de familles , armoiries de seigneurs , çt
cent autres sujets qui intéressent les pays et leur$
habitants.
S'arrétant dans une commune , il demandait et
visitait tout par lui-même, prenant sur ses feuilles
les inscriptions, les tombes, les clocheS; les
diverses parties curieuses d'un monument ; aussi ,
longtemps après lui ^ nos ciceroni de campagnç
ne manquaient pas de dire à tout visiteur que
M. de Soultrait avait déjà vu et consigné l'objet
en question. Ce seul point suffirait à rendre notre
confrère un des hommes marquants de notre proT
vince, et il gagnait encore en considération par
ses services administratifs comme conseiller
général et par l'honorabilité de sa famille, si
connue en Nivernais. Devant tant de titres aux
égards de ses compatriotes, soutenu par une
affabilité et un don de persuasion qui ne l'aban-
donnaient jamais, toutes les portes lui étaient
ouvertes ; d'un abord très-facile, il se liait à pre-
— 364 —
mière vue , profitant de cette entrée en matière si
commode et qui lui coûtait si peu pour s'assurer
des communications de documents que d'autres
n'auraient jamais pu obtenir. Chercheur et homme
charmant, maniant la plaisanterie encore mieux que
la science , mais revenant promptement à son goût
favori de l'archéologie, il séduisait son hôte et
laissait chez celui qui l'avait vu , même une seule
fois, le souvenir de sa conversation vive et
piquante.
Parmi les gens du monde qui, comme lui , ont
la passion des études historiques ^ il y a de grandes
différences , des types très- variés , selon le tempé-
rament de chacun et les circonstances où il se
trouve. Les uns lui sacrifient tout, les autres la
traitent en compagne docile , qui cède souvent et
à laquelle on commande. Dans notre siècle dur et
pratique , où les choses ne vont pas toutes seules ,
des préoccupations d'affaires , des obligations de
famille nous en détournent souvent. George de
Soultrait ne connaissait pas ces difficultés ; tous les
siens respectaient ses goûts , l'admirant et lui lais-
sant la liberté de les satisfaire ; mais il ne négligeait
pour cela aucun des côtés utiles de l'existence.
Menant tout de front à la fois, les affaires, le
monde, la science, il ne pouvait s'absorber dans
une étude suivie ou une thèse générale réclamant
nne application constante et régulière. Il travaillait
par saccades , par journées volées à d'autres occu-
pations y comme la plupart d'entre nous auxquels
les nécessités de la vie interdisent ces séances de
— 365 —
longues heures y si calmes, si douces, si précieuses
à ceux qui aiment Tétude et n'ont pas de soucis
étrangers à la tâche littéraire qu'ils se sont
imposée.
Il eût semblé que ces listes de documents, ces
nomenclatures interminables, comme en exige
l'érudition moderne, ne dussent pas s'accorder
avec la tournure d'esprit dont il faisait preuve à
tout propos, et pourtant c'était chez lui une sorte
de contraste entre sa personne et ses écrits. Autant
il brillait en conversation par des répliques spiri-
tuelles et des narrations élégantes, autant dans
ses livres il se montre réservé jusqu'à la sécheresse
et effacé dans sa manière d'écrire et même de
penser. Le genre d'ouvrages qu'il a choisi ne
prêtait aucunement à l'expansion de ses idées, et
ceux qui l'ont connu peuvent s'étonner qu'il n'ait
pas au moins préféré les études curieuses de
mœurs , les biographies de grands hommes et tant
d'autres questions où les qualités brillantes de son
esprit auraient pu se produire mieux que dans les
copies d'inventaires et les descriptions d'armoiries
ou de monuments. Cette remarque de ma part est
un éloge bien plus qu'un reproche , ici dans notre
société qui fait l'accueil le plus flatteur aux lettres
et aux arts , mais qui s'efforce d'être avant tout le
sanctuaire de l'histoire et de l'archéologie.
George de Soultrait, qui aurait pu écrire comme
il parlait, avait cependant compris l'histoire de
son pays selon la méthode rigoureuse de la cri-
tique historique, et, comme les livres de première
— 366 —
tnaiû faisaient presqne défaut, il s'était mis coura-
geusement à les entreprendre. Ses sujets, aussi
arides que spéciaux , sont justement placés dans le
champ le plus exposé à la critique. Le Diction-
naire topographique de la Nièvre , déjà si riche
en forme de noms , recevrait encore des complé-
ments importants ; le Répertoire archéologique
ofl&re bien des inexactitudes ; \ Armoriai a con-
fondu bien des familles; mais quelle érudition,
quelle mémoire, quelle persévérance il fallait pour
accomplir de si longs travaux ! Qui de nous les eût
terminés avec plus de succès et moins d'imper-
fections ? Les corrections , les additions viendront
d'elles-mêmes. s'ajouter à ces textes, et il aura eu
l'honneur d'indiquer la voie en guidant ceux qui la
suivront après lui.
Imprimé en 1862 à l'imprimerie nationale, le
Dictionnaire topographique est un des premiers
ouvrages de ce genre exécuté sur les plans du
ministère de l'Instruction publique : préface expo-
sant sommairement la situation administrative,
naturelle et industrielle du département, puis le
dictionnaire par ordre alphabétique des nonis de
lieu actuels suivis de toutes les formes anciennes
du même lieu aux diverses époques de notre
histoire. Il est inutile de s'appesantir sur l'intérêt
d'un travail de ce genre pour les études histo-
riques, personne n'a le droit de toucher un
des points de nos localités sans Id citer et y
recourir.
Sur la circulaire du ministre de l'Instruction
- 367 -
pilbliqne, la Société nivernaise avait désigné
M. de Soultrait pour Texécution de ce diction*
naire. Le travail fut de longue durée , ingrat et
aride plus que toute autre partie. Les registres-
terriers, les pouillés du diocèse, les quelques
cartulaires connus, un bon nombre d'archives
publiques et particulières , enfin divers inventaires
furent suivis et compulsés avec soin« Tous ces
documents, étant encore à Tétat de msuiuscrits,
demandaient beaucoup plus de temps et de con-
naissances spéciales* Une commission, nommée
dans le sein de votre Société , examina le travail
et l'adressa au ministre avec une chaleureuse
approbation, et, dans sa séance du ii avril 1863,
le Comité des travaux historiques accordait une
médaille à Tauteun
Vers cette époque, le comte Gaspard de
Soultrait, receveur général du Rhône, mourait
entouré des soins affectueux de ses enfants et
laissant à son fils les traditions d'honneur et d'hos-
pitalité qui l'avaient rendu si sympathique. Son
hôtel de Lyon , à cette époque Où il y avait encore
des salons, était le rendez- vous des esprits déli«
cats, des hommes distingués , qui s'y trouvaient à
Taise, parce qu'ils rencontraient, dans ces char-»
mantes réunions, les agréments de la société alliés
aux affections intimes de la famille. La maison
n'était point changée , le fils remplaçait seulement
le père ; les parents et amis y recevaient toujours
le même accueil bienveillant et gracieux. George
de Soultrait obtenait en même temps la placo
— 368 —
de receveur - percepteur à Lyon, qui devait le
fixer pour longtemps dans la seconde ville de
France.
Il y a un arrêt dans ses publications , du moins
en ce qui concerne le Nivernais. Eloigné de nos
contrées, retenu par ses fonctions et ses obli-
gations de famille, il vit encore dans le passé,
mais d'une autre manière moins absorbante, et qui
lui plaisait beaucoup aussi : la recherche des objets
d'art, des livres et des chartes. Avec le temps, il
réunit un nombre considérable de faïences niver-
naises, parmi lesquelles se trouvent quelques
pièces rarissimes qui ont pris aujourd'hui une
grande valeur. On se procurait encore à cette
époque de beaux objets à des prix abordables, et
les ventes de quelque importance le voyaient tou-
jours parmi les plus fidèles clients. C'est ainsi qu'il
amassait au château de Toury des curiosités d'un
grand intérêt, recherchées dans un but spécial
d'études locales ou de productions artistiques rela-
tives à notre pays.
Sa belle bibliothèque lui valut l'honneur d'être
admis dans la célèbre Société des Bibliophiles,
présidée par M. le baron Pichon, cet amateur
érudit et obligeant entre tous, et sa collection
nivernaise de livres et de pièces manuscrites
reviendra prochainement à notre Société. C'est
alors que nous comprendrons l'importance de ce
don généreux, en appréciant par nous-mêmes
l'intervention utile et intelligente de notre cher
compatriote.
- 569 —
Pattnî sM notes manusctif es , celles qnif av^aît
le plus à cœur de voir publiées étaient les copies
de VInventaire de Marolles. Dans ses rares
apparitions en Nivernais, il en parlait souvent, et
la proposition fut de nouveau présentée à la fin de
Tannée 1866; on discuta la disposition de l'ou-
vrage, le mode d'impression, le format. La valeur
intrinsèque du manuscrit fut examinée avec d'au-
tant plus de liberté qu'il s'agissait d'un travail fait
en 1636 et que l'éditeur ne venait qu'au second
plan. Il se fit un courant d'opinions diverses ; cette
question engageait les ressources de la Société
pour plusieurs années et méritait réflexion. J'avais
compulsé Y Inventaire de Marolles pour des
actes du treizième siècle, et mon appréciation pou-
vait être d'un certain poids ; j'y trouvais des dates
incertaines, des noms estropiés, des traductions
défectueuses. Il eût fallu refaire tout un nouvel
ordre de documents, et c'était un trop grand
travail, impossible même en bien des parties.
U Inventaire fut publié avec toutes réserves,
laissant à l'abbé de Marolles la responsabilité des
inexactitudes et des erreurs ; il est accompagné de
quatre tables des fiefs, des localités, des noms
d'hommes et des matières. Malgré les imperfec-
tions de VInventaire, cette publication, d'une
étendue considérable (i), fournit des éléments de
recherches qui peuvent être utilement ajoutés à
d'autres sources plus sûres. « C'est à l'abbé de
(t) En 753 colonnes in-4*.
T. m, 3* série. 47
— 370—
MaroUes , dit M. de Chambure , et à lui seul que
nous devons l'œuvre que j'appellerai le sauvetage
des titres de la province. 3) Ce rapport au Conseil
général (i), très-élogieux pour M. de Soultrait,
concluait à la demande d'une subvention de
2,500 fr., qui fut accordée en cinq annuités , à partir
de 1868. L'impression, retardée par les malheurs
de la guerre de 1870, fut reprise avec les subven-
tions annuelles , et le volume entièrement terminé,
augmenté de deux belles cartes , Tune du diocèse
et Tautre des trente-quatre châtellenies du Niver-
nais, porte la date de 1873.
L'importance de VInventaire n'arrêtait pas
George de Soultrait ; ses articles de Statistique
monumentale n'étaient pas achevés qu'il saisissait
l'occasion de les refondre dans le Répertoire
archéologique, publication officielle du ministère,
destinée à grouper, sur un plan uniforme, les
richesses artistiques de la France.
La Société nivernaise n'hésita pas à proposer à
notre confrère d'accepter ce travail, comme il
avait accepté le Dictionnaire topographique ^ et
les lignes suivantes de sa préface nous montrent
avec quelle scrupuleuse attention il l'avait établi :
^ En terminant ces quelques mots de statistique
archéologique, nous nous permettons de dire que
nous avons tout visité par nous-même, et dans le
plus grand détail , toutes les communes du dépar-
tement. Nous tenions essentiellement à ne parler
(i) Bulletin t t. V, p. 196.
— 3/1 —
que de ce que nous aurions vu ; nous voulions tout
voir, et nous espérons de n'avoir rien omis d'im-
portant.
i> Le Répertoire de la Nièvre est un travail
consciencieusement fait, quelle que puisse être
d'ailleurs la valeur des appréciations archéolo-
giques qu'il renferme. C'est , sans nul doute , au
mérite d'une exactitude rigoureuse , bien plus qu'à
tout autre, que notre ouvrage a dû la haute
récompense dont le Comité des travaux historiques
Ta honoré.
D Est-il besoin de dire que nos courses dans la
Nièvre ont duré plusieurs années ; bien des monu-
ments décrits par nous , depuis notre visite , ont
été modifiés ou remplacés par des constructions
modernes ? Notre Répertoire conservera le sou-
venir de ces monuments disparus, tout en faisant
connaître ce que fut l'art de bâtir dans l'ancien
duché de Nivernais. 3)
L'ouvrage, en manuscrit, avait été couronné
dans un concours ouvert au ministère en 1 868 ; il
ne fut imprimé qu'en 1875 (i).
M. de Soultrait se réservait comme derniers
travaux les sujets des études favorites de toute sa
vie , les origines des familles et les armoiries parti-
culières. Les articles qu'il publia dans la Revue
nobiliaire, sous le titre d'Epigraphie héraldique
de la Nièvre y et signés du pseudonyme de
Jacques de Sornay, sont le résumé des nom-
Ci) In-4* de iv-220 p., impr. nat.
— 372 —
breuses notes réunies sur ce sujet dans ses excur-
sions. On le retrouve, comme partout, d'une
abondance étonnante de renseignements sur les
fiefs I les diverses familles qui les ont possédés, les
monuments qui signalent leur séjour. Il a pris
pour division de son travail les circonscriptions
administratives actuelles, plus pratiques et plus
faciles pour les recherches. L'ensemble de ce
travail forme un volume (i) qui a paru en 1882.
L'autre ouvrage est \ Armoriai du NicernaiSy
deuxième édition, superbe publication en deux
volumes , avec nombreuses planches de blasons et
de jetons armoriés (2). Le luxe et l'étendue de
cette œuvre méritaient la plus grande attention de
la Société nivemaise , qui devait en faire tous les
frais. Plusieurs de nos confrères désiraient vive-
ment une nouvelle édition; de son côté, M. de
Soultrait avait ajouté un nombre considérable de
blasons qui lui permettaient d'espérer un ensemble
presque complet. Une simple citation, empruntée
à l'introduction, indiquera le plan de l'ouvrage :
a Etablissons nettement la différence qui existe
entre un nobiliaire et un armoriai : un nobiliaire
recherche et apprécie la condition aristocratique
des familles, leur ancienneté, leur illustration ; un
armoriai est au blason d'une province ce qu'un
dictionnaire est à langue d'un pays, rassemblant
(i) Grand în-S* de 368 pages.
(2) Deux beaux volumes grand in-8' de xxxv-28: et 3i2 pages,
1879.
— 373 —
toutes les armoiries sans distinction , afin de faci-
liter leur attribution, comme le dictionnaire réunit
tous les mots littéraires , scientifiques , vulgaires ,
pour en élucider le sens et en déterminer l'em-
ploi... La complaisance extrême de presque tous
les généalogistes et héraldistes anciens et modernes
a quelque peu déconsidéré les ouvrages héral-
diques. U Armoriai du Nivernais y comme du
reste quelques travaux analogues modernes, se
distingue, nous croyons pouvoir Taffirmer, des
livres auxquels nous avons fait allusion, en ce
qu'il n'a point été écrit pour flatter les vanités
aristocratiques , mais bien dans le but de servir à
l'histoire et à l'archéologie. j>
L'ouvrage se divise en quatre parties :
I® Description des armoiries des comtes et ducs
de Nevers et de leurs femmes. Les jetons repro-
duits sont particulièrement intéressants.
2^ Blasons des évoques de Nevers et de
Bethléem et des communautés religieuses.
y Blasons des villes et des corporations.
4^ Blasons des familles nobles et bourgeoises ,
avec les noms des fiefs et châtellenies et leurs
diverses alliances, comprenant la fin du premier
volume et le deuxième tout entier.
Les armoiries, gravées en 31 planches, sont au
nombre de 694 ; plusieurs articles sur les notions
générales des armoiries , des noms de famille et de
fief, un dictionnaire héraldique et une biblio-
- 374 ^
graphie des ouvrages relatifs au Nivernais appor-
tent une source de preuves assez utiles pour
l'histoire locale.
Je me borne à tracer les grandes lignes de ce
travail. Beaucoup de provinces ont entrepris la
publication des recueils de leurs armoiries y et le
Nivernais, grâce à M. de Soultrait, ne sera pas
resté en retard. Cétait une grande hardiesse de sa
part d'essayer ce point d'histoire très-intéressant ,
mais aussi très-scabreux , en ce qu'il touche à la
situation des familles existantes ou représentées
de nos jours. Aussi nos voisins du Berry ont-ils
habilement évité cet écueil en publiant simple-
ment le texte de V Armoriai général de d'Hozier,
en 1696, pour la généralité de Bourges. M. des
Gozis, qui s'est chargé de ce travail pour le
Bulletin des Antiquaires du Centre (i), s'est
conformé strictement au texte de ce document
officiel, et il a fait un travail d'érudition historique
contre lequel personne n'a le droit de s'élever.
C'est la principale mission de nos sociétés histo-
riques de province de publier des chartes, des
inventaires j des catalogues qui formeront, à côté
des monuments et des objets d'art, d'abondantes
sources de preuves pour la connaissance des
siècles passés. M. de Soultrait nous avait encou-
ragés dans cette voie l'année dernière, et, sur la
proposition de plusieurs membres , la Société avait
(i) Mémoires de la Société des antiquaires du Centre , t. X[I^ i*' et
2" fascicules, 1883-84; in-8* de 413 pages, avec introduction, tables
des noms et des pièces figurant dans les blasons.
~ 375 —
décidé la publication des inventaires de pièces
d'archives nivernàises dressés autrefois par dom
Villevieille et dom Caffiaux , qui ont travaillé dans
plusieurs châteaux du Nivernais ; l'exécution de
ces travaux sera certainement Tceuvre la plus utile
et la plus appréciée du public.
L'exposé des ouvrages de M. de Soultrait sur le
Nivernais ne comprend qu'une partie de ses études
historiques, et je n'ai ni le temps ni la faculté de
vous parler de ses autres publications. Le Bour-
bonnais, qui le considérait aussi à bon droit comme
un des siens, lui est redevable d'articles et de
livres importants. Il a publié pour cette province,
comme pour la nôtre, V Essai sur la Numis-
matique, V Armoriai du Bourbonnais (i) et la
Statistique monumentale pour l'arrondissement
de Moulins. Il a fourni de nombreuses notes à
V Histoire des comtes de Fores, par La Mure,
éditée par M. de Chantelauze, et récemment il
écrivait une notice très-intéressante sur le château
de la Bâtie et ses seigneurs. Je passe les diverses
revues historiques auxquelles il donnait fréquem-
ment des articles; le catalogue de ses œuvres
mérite d'être fait, pour honorer sa mémoire et pour
guider les érudits dans leurs recherches.
Nommé trésorier-payeur général à Chaumont,
puis à Besançon, il y terminait brillamment ses
fonctions administratives en 1885. La retraite si
(1) Une nouvelle édition de cet Armoriai est en voie de préparation
et confiée aux soins de M. Roger de Quirieile.
— 376 —
redoutée des hommes occupés^ qui n'ont plus la
ressource du travail habituel , fut pour lui une
sorte de délivrance , parce qu'il put dès*lors con-
sacrer tous ses loisirs à Tétude. Il retrouvait ses
goûts aussi vivaces que dans sa jeunesse, et, atteint
de la maladie qui l'emporta, il me parlait encore,
cette année, à Paris, de Tépigraphie du Bour*
bonnais qu'il préparait. Après son retour définitif
en Nivernais , vos suffrages se portèrent sur M. de
Soultrait lors du renouvellement du bureau, en
mai 1886. En le nommant président, vous lui
accordiez la juste récompense de la grande part
qu'il avait prise à vos publications , et vous aviez
Tespoir d'une longue et habile direction pour les
séances et les travaux. Vous vous rappelez les
projets qu'il avait formés pour notre Société,
projets d'avenir et de progrès, qui assuraient notre
durée en grandissant notre situation. Son œuvre
est restée ébauchée ; l'aimable savant que nous
avions plaisir à voir et à entendre, et que Dieu
nous a enlevé trop tôt , n'a pu assister à la réali-
sation de ses désirs. Cette Société, qu'il avait
fondée avec Mgr Crosnier, dont il était le colla-
borateur le plus assidu , devait lui adresser, presr
qu'en même temps que l'hommage de bienvenue,
l'expression de son dernier adieu. Que la vie de ce
charmant confrère, de cet ami sincère et obli-
geant, de ce compatriote si savant et si remar-
quable, nous inspire une fois de plus la pensée
qui rappelle un bien précieux privilège des
hommes de travail. Au milieu des joies de la
— 377 —
famille , des distractions du monde , des honneurs
de la situation , sa plus grande satisfaction était de
se livrer à l'étude. D'autres, moins favorisés que
lui des circonstances , ont trouvé aussi dans l'étude
une consolation à leurs chagrins. J'ai déjà vu dis*
paraître beaucoup d'amis, hommes laborieux, tels
que George de Soultrait ; tous ont gardé comme
meilleur et dernier soutien dans la vie cette occu-
pation intellectuelle et ce même attrait pour les
questions historiques.
T. ut, 3« série. 43
SUPPLÉMENT A LA NOTICE
SUR
LE TRÉSOR DE LA CATHÉDRALE DE NE VERS.
Quelques erreurs se sont glissées dans le texte des deux
inventaires des pages 225 à 23o, par suite d'une lecture
fautive des copies communiquées par M. Edmund Bishop.
. Ces erreurs, que notre docte correspondant veut bien
mettre sur le compte de sa c fâcheuse écriture qui fait lire les
T comme les F », nous ont été signalées aussi , avec la plus
exquise courtoisie, par Téminent directeur de la Biblio»
thèque nationale.
On nous saura gré de reproduire ici, sans autre commen-
taire, la lettre de M. Léopold Delisle :
« Paris, 26 décembre 1888.
» Monsieur le Curé^
> Peu de documents pouvaient m'intéresser plus vivement
que ceux dont vous venez de nous donner le texte avec un
très-instructif commentaire. Je vous remercie bien de
m'avoir compris dans la distribution de ce précieux opus»
cule.
• Comme je Tai lu attentivement, je me permets d^appeler
votre attention sur quelques mots dont la lecture m'a semblé
douteuse.
» Dans le premier inventaire ^ article 5, il doit y avoir
c Topice différent te 1.
> La note 2 de la page 18 est à supprimer. L'article 22 se
rapporte à Avien, l'auteur bien connu d'un recueil de
fables.
- 38o —
» Art. 23. — Lisez : c Tabula abbaci. >
> Art. 39. — c Super péri hermenias. »
» Art. 41. — c Contra Arrianos. 1
» Second inventaire.
» Art. 10. — c Cum Foca. 1 Nom d'un grammairien
connu.
» Art. II. — c Prisciani de duodecim versibus. »
( Il s'agit du Traité de Priscien sur les douze vers qui
commencent les douze livres de VEnéide. )
» Art. 17. — L'ancienne bibliothèque de Corbie ren-
fermait un volume qu'un Inventaire du douzième siècle (?)
désigne ainsi : c Sedulius et Prosper, et Beda de metrica
arte, et Franco et Saxo, et ortographia Bede. »
» Art. 23. — c Cum comento [commentario) Boetii. »
» Art. 27. — € Topicarum. »
» Pardonnez-moi, Monsieur le Curé, la liberté que je
prends de vous soumettre mes doutes, et soyez assez bon pour
recevoir, avec mes remercîments et mes félicitations, l'assu-
rance de mes sentiments les plus dévoués.
> L. DELISLE. »
Ajoutons encore qu^à la dernière ligne de la note qui
termine le deuxième inventaire et se rapporte aux textes à
couverture d^argent, il faut lire que ce fragment paraît être
non pas antérieur, mais postérieur à celui du troisième
inventaire.
— 38i —
L'EXÉCUTION
DM
FRÈRES DU CHASTEL-CHASSY.
28 JUILLET 1526.
Dans le Lii^re de raison de mditre Nicole Versoris,
avocat au Parlement de Paris y récemment édité (i), on lit
le passage suivant, à Tannée 1526 :
c Le samedi vingt-ungniesme jour de juillet, troys frères,
gentilzbomes, natiz du pays de Nyvemois, nomez, par ordre
delenraage, Françoys, Joachin et Charles du Castel^ led.
François aisné, seigneur de Chassy, commirent et perpé*
t[rè]rent un merveilleux et admirable cas, accompaignez
d^un paige et d'un laquez, ja aagez et tous homes, car les
dessusdiz, à la succis[t]ation et requestes dud. Françoys du
Castel, led. jour desamedy, allèrent espier le Seigneur {2)
beau-frère desd. du Castel, logé au Grand-Cornet, près
Saint-Gervais, en ceste ville de Paris, et luy près dud. logis,
lequel alloit au Palays, luy donnèrent plusieurs coups,
(i) Par M. Fagniez, tome XII, des Mémoires de la Société 4e
l'Histoire de Paris et de Vile de France (i885), p. 187 et 188.
(2} Vefsoris a laissé le nom ea blanc et M. Fagniez met en nPte :
« Nous n'avons trouvé trace de cette affaire ni au Parlement ni au
Chàtelet , et nous avons dû laisser en blanc le nom de la victime ,
que Versoris n'a pas connu au moment même et qu'il a négligé de *
rechercher plus tard, n
T. III, 3* série. 49
— 382 —
desquelz sur-le-champ alla de vie à trespas. A ceste cause,
le peuple, voyant ung mertre sy criminel et si inhominieux,
firent telle poursuite, accompaignez du procureur du
Roy et plusieurs sergens, que lesd. frères et satalites meur-
triers furent prins près Sainte-Geneviefve , en l'ostel de
Guillaume Boucher, lesquelz jà avoient passé la rivière de
Saisne, pençant gaigner la porte Saint- Victor, où jà avoient
envoyez leurs chevai^x, et furent de si prez poursuiviz,
comme Dieu vouUut, qu^ilz ne se peurent saulver. A ceste
cause , eulx menez prisoniers à Chastellet , fust leur procès
fait en diligence et par icelluy furent convincuz et actinctz
tant par leur confession que aultrement par tesmoings, que
il y avoit bien troys ans que led. Françoys du Castel, le
frère aisné, avoit conceu hayne sur led. deffunct au contant
de quelque question qu'il avoient eu ensamble et depuys
pour ung procès que led. deffunct avoit gaigné par arrest
contre ses be[a]ux-frères du Castel. Le procès fait furent tous
troys frères condempnez à avoir les testes tranchez à Grève ,
les testes portés et affichez au bout de troys lances à leur
chasteau et lieu de leur nativité, et le paige pendu et
estranglé , joignant l'eschataud où ses maistres avoient eu la
teste tranchée, et le laquez, lequel avoit baillé le premier
coup aud. deffunct par traïson et Ta voit guecté deux ou troys
jours pour le tuer, condempné fust avoir le poing coupé où
je deffunct avoit esté occis, de là mené en Grès ve avec les
aultres et bruslé tout vif. Lad. sentence fut confermée par
arrest et fust telle la justice faicte le samedy séquant du
meurtre, au jour de la faiste S. Anne, le XXVI* jour dud.
moys de juillet. Cecy fait bien à noter, car la pugnition fust
grosse, aussy le cas fust odieux, car il fust fait de guect
apencé. i
Il est regrettable que les recherches faites dans les archives
du Châtelet de Paris et dans celles du Parlement aient été
vaines, et que tout le dossier de cet intéressant procès ait
disparu ou se trouve égaré. Cependant, grâce à la commu-
— 383 —
nication que M. le vicomte de Marcy a bien voulu nous faire
de ses archives , dans lesquelles nous avons trouvé bien des
documents intéressants^ nous pourrons, sinon compléter les
renseignements donnés |par Versoris, du moibs les rectifier
sur quelques points, et soulever quelques-uns des voiles qui
rendent si mystérieux ce sanglant drame nivernais.
Tout d^abord , les trois frères sont : François , Joachim et
Charles du Chastel, écuyers, seigneurs de Chassy (et non
pas dudu Castel, comme les appelle Versoris ) ; ils étaient
fils de Miles du Chastel , écuyer, seigneur de Chassy et de
Villiers-sur- Yonne en partie et de demoiselle Marguerite
Visière. François du Chastel, l'aîné des trois frères, avait
épousé, par contrat du i3 novembre îSz^, Louise Potin,
fille d'Emery ou Méry Potin, écuyer, seigneur de Maulléon,
et de demoiselle Anne de Nancray (i), et il en avait un fils.
La victime des frères du Chastel , dont Versoris n^a pas
connu le nom, était François Andras, écuyer, seigneur de
Changy, leur beau-frère, fils de noble homme Jean Andras,
seigneur de Changy, et de dame Gervaise du Gué, sa femme;
il avait épousé, par contrat du 4 mars 1520 (nouveau style),
Louise du Chastel (2). Quatre enfants étaient nés de ce
mariage : Annot , Jean et autre Jean , et un quatrième dont
nous ignorons le nom.
L'arrêt du Parlement de Paris, rendu le 28 juillet 1526,
qui est l'une des pièces que nous ont fournies les archives de
M. le vicomte de Marcy, ne nous donne aucuns renseigne-
ments sur les mobiles du crime; à ce sujet, il renvoie à la
sentence du Châtelet : « Ainsi que plus à plain est déclaré
aud. procès. > Mais, s^il ne nous éclaire guère à ce sujet, cet
arrêt nous permet de rectifier le récit de Versoris. Ce n'est
pas le 26 juillet que Texécution a pu avoir lieu , puisque la
(i) Bibliothèque nationale, cabinet des titres, n* I234. Dom
Caffiaux , Extraits d'archives, Bourgogne, Nivernais, Picardie.
(1} Original sur parchemin, archives de M. le vicomte Andras
de Marcy.
- 384 —
date de la sentence est du 28 ; mais le crime ayant eu lieu
un samedi et l'exécution le samedi suivant , jour de la fête
de sainte Anne, ces dates concordent bien avec le 28 juillet,
date de Tarrét, qui était un samedi, et la fête de sainte
Anne, qui est le 26 juillet généralement, ne se célébrait que
le 28 dans le diocèse de Paris , ce qui a causé l'erreur de
notre chroniqueur, qui très-probablement n'écrivait pas son
journal au jour le jour. Cette date fixée reporte la date de
l'assassinat au 21 juillet, qui était le samedi précédent.
Les circonstances du crime sont racontées dans les plus
grands détails par Versoris : « Lesdessusdiz « led. jour
de samedy, allèrent espier le seigneur , beau-frère desd.
du Castel, logé au Grand-0>rnet, près Saint-Gervais, en
ceste ville de Paris, et luy près dud. logis, lequel alloit au
Palays, luy donnèrent plusieurs coups, desquelz, sur-le-
champ, alla de vie à trespas. > La sentence n^ ajoute que
peu de renseignements ; elle nous fait connaître seulement
que le meurtre eut lieu auprès de l'église Saint-Jean, en
Grève, qui notait séparée de celle de Saint-Gervais que par
une rue. Pour aller de l'église de Saint-Gervais, auprès de
laquelle il était logé, au Palais, François Andras devait
nécessairement passer, en effet , devant l'église de SaiQt«-Jean
en Grève. Après Tassassinat, le corps de la victime fut
apporté et enterré dans Téglise de Saint-<jervais, diaprés ce
qui est rapporté dans Parrét ; cependant le nom de François
Andras ne figure pas dans la liste très-longue et détaillée
qui nous a été conservée des personnes de toute condition
inhumées dans cette église (i). L^arrét du Parlement n^ajoute
rien à ce que nous connaissons par le Livre de raison sur la
poursuite et l'arrestation des prisonniers, ni sur les mesures
qu^iU avaient prises d'avance pour assurer leur fuite ; mais elle
permet de rectifier quelques-unes des assertions de Versoris
au sujet de la condamnation. D'après le chroniqueur, les
(1) Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paria, par Tabbé
Lebsuf, éd. Hippolyte Cocheris, tome I*% p. 338-343.
— 385 —
trois frères auraient été condamnés à avoir la tête tranchée
en Grève, puis leurs trois têtes portées et affichées au bout
de trois lances à leur château et lieu de leur nativité ; le page
à être pendu auprès de l'échafaud où ses maîtres auraient
été exécutés, et le laquais , qui avait porté le premier coup,
à avoir le poing coupé à Pendrcnt même où le meurtre avait
été commis, et de là mené en Grève avec les autres et brûlé
tout vif. La condamnation, d'après le texte officiel (i>, diffère
en quelques points : les coupables devaient être menés des
prisons du Châtelet jusque devant l'église de Saint Jean, en
Grève dans trois tombereaux, et là, François du Chastel ,
nu-tête , à genoux , une torche de cire ardente du poids de
deux livres à la main, faire amende honorable; de là
les condamnés devaient être menés en Grève, les trois frères
du Chastel y être décapités sur un échafaud, leurs têtes
mises sur trois poteaux, celle de François devailt THôtel-
de-Ville de Paris, celles des deux autres hors des portes
Saint«-Antoine et Saint-Jacques ; le page Guillaume QoseaUi
pendu à une potence élevée auprès de l'échafaud où ses
maîtres auraient été décapités, son corps et ceux des frères
du Chastel portés au gibet de Paris, enfin François Yssot,
le laquais, attaché à un poteau, étranglé, et son corps
ensuite brûlé.
L'arrêt du Parlement déclare les biens des coupables
confisqués ^ prélève sur ces biens une somme de huit mille
livres parisis, plus trois cents livres parisis de rente en terres
pour la veuve et les enfants de la victime. Il ordonne
que sur les huit mille livres seront préalablement pris les
deniers nécessaires pour fonder deux messes qui seront
dites tous les samedis, jour où le crime a été commis, Tune
en réglise de Changy, dont le défunt était seigneur, Tautre
en réglise de Saint-Gervais, où il éuit inhumé. Sur la même
somme seront fournis les livres, calices, chasubles et orne*
ments d'église nécessaires pour ces messes, les chapelains
(i) Pièos iuitifioitiTe n* i.
- 386 —
chargés de les dire devant être nommés et présentés par les
enfants du défunt. En outre, il sera encore prélevé sur cette
somme les frais nécessaires pour deux grands tableaux de
cuivre qui seront mis et affichés , Tun en Téglise paroissiale
de Changy, Pautre contre et au dehors de Téglise Saint-Jean,
en Grève, au lieu le plus proche de l'endroit où le défunt a
été tué, c es quelz seront insculpez et escriptz le cas et forme
de rhomicide, et le dictum de ce présent arrêt. »
Cet intéressant document ne nous renseigne nullement sur
les précédents du crime, et nous en serions réduits aux asser-
tions de Versoris, si une seconde sentence du Parlement de
Paris n^y ajoutait quelques données bien insuffisantes encore.
D'après cet arrêt, qui est du 19 août 1527 (i), François du
Chastel, en entreprenant ce meurtre, n'aurait fait que suivre
les instigations de demoiselle Marie Bouteron, qui aurait
conçu uife haine mortelle contre François Andras. Elle
aurait fait des dons considérables aux frères du Chastel pour
les engager à agir, et notamment aurait donné à François,
qui n'était ni de ses parents ni de ses alliés (qui non
erat de sua cognatione aut consanguinitate) , les terres et
domaines de Serre et de Breuillotte, dont elle ne se serait
réservé que l'usufruit sa vie durant. Et, en effet, dans le
résumé du contrat de mariage de François du Chastel avec
demoiselle Louise Potin, du i3 novembre i524, nous
voyons que Marie Bouteron, veuve de Jean dé Boisrousseau,
écuyer, donne à François du Chastel les terres de Serre et
de Breuillotte, à la réserve de l'usufruit, et dans cet aae
elle se dit tante du futur (2).
L'arrêt du Parlement du 19 août 1627 adjuge à demoiselle
Louise du Chastel , veuve de feu François Andras, et à ses
enfants mineurs , une somme de mille ou douze cents livres
parisis, plus l'usufruit et les autres droits que demoiselle
(i) Pièces justificatiyes, n* II.
(2) Bibliothèque nationale, cabinet des titres, n* 1234. Dom
Caffiaux, Extraits d'archives, Bourgogne, Nivernais, Picardie,
— 387 —
Marie Bouteron , reconnue coupable d'être Tinstigatrice du
meurtre de François Andras, 8*était réservés lors de la
donation par elle faite à François du Chastel , des terres et
domaines de Serre et de Breuillotte. Cette attribution est faite
par la cour à demoiselle Louise du Chastel , à charge de
payer annuellement à Marie Bouteron, sa vie durant , la
somme de trente-<ieux livres parisis de pension. Les biens
des frères du Chastel étaient en effet grevés de rentes et
d^bypothèques qui rendaient illusoire Tassignation faite sur
eux par la première sentence de huit mille livres parisis et
de trois cents livres de rente au profit de Louise du Chastel
et de ses enfants.
Parmi les seigneuries que possédaient les frères du Chastel
était celle de Cougnant(i): un procès s'engagea entre Louise
du Chastel , qui prétendait faire comprendre cette seigneurie
dans les terres sur lesquelles devaient être assignées les trois
cents livres de rente en terre, et Louise Potin, veuve de
François du Chastel, qui réclamait la même terre pour ses
droits de douaire. Pendant les débats, Guillaume de La
Platière saisit féodalement cette terre, faute d'homme, et
Méry Potin , père et curateur de Louise Potin, dut faire déli-
vrer coinmission par le Parlement de Paris pour faire lever
cette saisie, féodale (2). Nous ne savons ce qu'il advint pour
le moment de la terre de Cougnant que nous trouvons au
dix-septième siècle dans la famille Andras ; est-ce à la suite
du procès entre Louise du Chastel et Jeanne Potin qu'elle y
entra ? est-ce seulement à la suite d^un mariage dont il nous
reste à parler? Ce qu^ily a de certain, c'est que la terre et
seigoeurie de Chassy fut rendue au fils de François du
Chastel que Ton en voit en possession lors de son mariage.
Louise Potin se remaria en secondes noces à noble et
puissant seigneur Robert d'Estampes, écuyer, seigneur de
La Ferté-Imbault, second fils de Jean d^Estampes, seigneur
(i) Cognants, commune d'Ouroui^r (Nièvre).
(a) Pièces iustificatives, n* m. -, i
— 3SS —
de La Ferté-Imbault et de Salbris, et de Blanche de Sains,
sa première femme. Louise da Chasel^ tveuve de François
Andras, épousa en secondes noces Français de ViUaines,
écuyer^ seigneur d« la Motte et de Presle.
François du Cfaastel laissait, comme nous Tayons vu, im
fils, aussi nommé François. Il épousa, par contrat du 8 maxs
1546 (nouveau style) (i), Marie de Lange, fille de Bon de
Lange, seigneur de Qiâteau-Regnault , et d'Isabeau de
Château-Regnault, sa première femme. Bon de Lange étant
alors remarié à Catherine du Chastel, tante du futur. Au
contrat de mariage on voit assister Annot Andras , écuyer,
seigneur de Changy, cousin germain du futur, Tiâné des
fils de feu François Andras. Annot Andras avait lui^-méme
épousé, par contrat du 12 août fsSç, au lieu de la Motte,
paroisse de Sagonne, demoiselle Catherine de Villaines,
fille de François de Villaines, écuyer^ seigneur de la Mone
et de Presle, son beau-père, et de feu demoiselle Louise de
Bault, sa première femme (2).
La présence d'Annot Andras au mariage de son cousin
germain indique que la réconciliation entre les enfants de la
victime et le fils du principal auteur de sa mort était dès-lors
une chose faite; aussi ne nous étonnerons-nous pa« outre
mesure de voir François Andras , fils de noble homme Annot
Andras , écuyer, seigneur de Changy et de Serre , demeu-
rant à Changy, diocèse d^Auxerre, pays de NivernoiSf et
de défunte demoiselle Catherine de Villaines, épouser, par
contrat du 3 décembre f 582, passé au château de Chassy«
aux-Amognes (3) , demoiselle Jacqueline du Chastel, fille de
feu noble homme François du Chastel^ écuyer, seigneur de
Chassy, et de demoiselle Marie de Lange, alors veuve en
secondes noces de feu noble homme Pierre Berthier, icuyer,
seigneur de Vannay.
(i) Archives de M. le vicomte de Marcy, original en parchemin.
(2) Ibid., original en parchemin.
(3) Ibid.f original en parchemin.
- 389-
Eq faveur de ce mariage Annot Ândras^ père du futur^
donna à son fils tout ce qui lui appartenait dans les paroisses
de Sagonne et de Véro, en Bourbonnais, à lui advenu par la
succession de feu demoiselle Louise du Chastel, sa mère.
En terminant , il nous semble utile de taire remarquer la
manière expéditive dont justice fut faite ; le crime a lieu le
21 juillet, une première sentence intervient, à une date que
nous ne pouvons préciser, au Châtelet de Paris, Tarrét
définitif du Parlement a lieu le 28 juillet, et le jour même
recevait son exécution juste huit jours après Tassassinat.
H. DE FLAMARE.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
I.
1526 , 28 juillet. — Arrêt du Parlement de Taris condam
nant François, Joachim et Charles du Chastel, écuyers,
frères, à avoir la tête tranchée en place de Grève, le
nommé Guillaume Closeau à être pendu, et le nommé
Yssot dit le Laquais à être brûlé après avoir été étranglé
sur la même place, et en outre à avoir leurs biens confis^-
qués, après prélèvement d^une somme de 8,000 livres
parisis et de 3oo livres de rente en terre attribuées
à Louise du Chastel, leur sœur, veuve de feu François
Andras, écuyer, seigneur de Changy, assassiné en tra^
hison à Paris par eux, et aux enfants dudit défunt et de
ladite Louise du Chastel.
EXTRAICT DES REGISTRES DE PARLEMENT.
Veu par la court le procès faict par le prévost de Paris ou
son lieutenant criminel à rencontre de François , Joachin et
T. III, 3* série, 5o
— 390 —
Charles du Chastel, escuyers , frères , Guillaume Closeau et
Françoys Yssot dict Laquaie , prisonniers en la Consiergerie
du Palais, à Paris, appellant de la sentence contre eulx
donnée par led. prévost ou sond. lieutenant, par laquelle et
pour raison de Phomicide par eulx proditoirement , de guet-
apens et propos délibéré commis en la personne de fen
Françoys Andras, en son vivant escuyer, seigneur de
Champ {sic), ainsi que plus à plain est déclaré aud. procès,
il auroit esté ordonné que led. Charles du Chastel ne joyra
du privilège de cléricature et auroient esté condennez lesd.
prisonniers à estre traynés sur clayes depuis le Chastellet
jusques devant le grant portail de l'église Sainct-Jehan-en-
Grève, en ceste ville de Paris, où led. meurtre a esté commis,
et illec faire amende honnorable à genoulz, nues testes, led.
Françoys du Chastel estant au milieu d'eulx, tenant une
torche de cire ardant du poix de deux livres, et requérir
mercy et pardon à Dieu, au Roy et à justice; et dud. lieu
estre traînés sur lesd. clayes en lad. place de Grève, et en
icelle, lesd. Françoys, Joachin et Charles du Chastel estre
décapitez sur ung eschauffault et au lieu plus convenable ,
leurs bras et jambes couppées, la teste et les membres dud.
Françoys du Chastel mis et attachez à une potence hors la
porte Sainct-Jaques , la teste et les membres dud. Joachin à
une autre potence hors la porte Sainct-Anthoine, et la teste
et membres dud. Charles à une autre potence hors la porte
Sainct-Denis, ès-lieux plus convennables , et lesd. Yssot dict
Laquaie et Closeau estre guindez à potences en lad. place de
Grève et au-dessoubz d^icelles estre faict du feu , et , après
ce qu'ilz auroient senti led. feu par aucune espace de temps,
estre gettez oud. feu et bruslez tous vifz, et les corps desd.
Françoys , Joachin et Charles du Chastel gettez et ars en
iceluy feu: et auroient esté tous et chacuns leurs biens
déclarez confisquez, sur laquelle confiscacion auroit esté
adjugé aux veufve et enfans dud. défunct la somme de dix
mil livres parisis pour une foys, et, oultre, à lad. veufve
seule, la somme de cent livres parisis de rente qui sortiroit
nature de propre à elle, ausd. entans dud. défunct et d'elle
et aux hoirs d'iceulx enfans du costé paternel seule-
ment; et d'avantage, ausd. enfans deux cens livres parlsis
de rente sortissans nature de propre pour eulx et leursd.
hoirs du costé paternel ; et semblablement la somme de mil
livres parisis ou autre somme de deniers pour fonder en
l'église et parroisse dud. Changy une chappelle ou nom de
sainct Françoys, duquel led. défunct portoit le nom, du
revenu de soixante livres parisis admorties, dont la présen-
tation et droit de patronage appartiendroit ausd. enfans et
leursd. hoirs du costé paternel, en laquelle chappelle le
chappellain d'icelle seroit tenu dire une basse messe par
chacun jour de Tan et ung obit par chacun an à tel jour que
led. défunct fust occis à troys grandes messes, laudes et
recommendaces pour Tame d'iceluy défunct ; et, pour faire
édifier et construire ou cymetière de lad. paroisse dud.
Changy une croix de pierre en laquelle seroit ung épitaphe
ou quel seroient insculpez et protraictz les personnes desd.
défunct et prisonniers, et au-dessoubz ung escripteau conte-
nant la manière dud. meurtre et homicide, etaussypour
faire asseoir en Téglise Sainct-Gervays à Paris , sur la fosse
oti led. défunct a esté inhumé une tumbe de pierre en
laquelle seroient semblablement insculpez et protraictz les
personnes desd. défunct et prisonniers, et à costé de lad.
fosse, au lieu plus convennable, ung épitaphe de pierre con-
tenant la manière dud. meurtre et homicide; et oultre, pour
assigner à Tœuvre et fabricque de lad. église Sainct*Gervays
rente suffisante et admortie pour faire dire et célébrer chacun
an en lad. église , à tel jour que led. défunct a esté occis ung
obit solennel et accoustumé, livrer la cire, luminaire,
aornemens et autres choses neccessaires, et ce pour perpé-
tuelle mémoire dud. meurtre et homicide. Et oyz et inter-
rogez par lad. court lesd. prisonniers sur leurd. cause d^appel
par laquelle led. Guillaume Closeau s^est allégué clerc et
comme tel a requis estre rendu à son ordinaire et tout
considéré ; dict a esté que la court a mis et met Pappellacion
— dgz —
et ce dont a esté appelle au néant sans amende, et néant-
moins a ordonné que lesd. Charles du Chastel et Guillaume
Closeau ne seront renduz comme clercs et ne joyront du
privilège de cléricature, et pour toute réparation civile,
amendes y dommages et intérestz , a condenné et condenne
lesd. prisonniers et chacun d'eulx seul et pour le tout en
huyt mil livres parisis envers les veufve et enfans dud.
défunct Françoys Andras et en troys cens livres parisis de
rente et revenu en assiette de terre , desquelz troys cens livres
appartiendront à lad. veufve cent livres parisis et aussy la
moictié de lad. somme de huyt mil livres parisis , et les deux
autres cens livres de rente , et Tautre moictié de lad. somme
de huyt mil livres parisis ausd. enfans venans à la succession
dud. défunct pour à iceulx sortir nature de propre du costé
paternel; sur laquelle somme de huyt mil livres parisis
seront préalablement pris les deniers neccessaires pour fonder
à tousjours en rente ;et revenu perpétuel deuement admorty
deux messes par chacune sepmaine au jour de samedy que
led. défunct fut tué et occis, cVst assavoir : l'une en Téglise
de Changy, dont iceluy défunct estoit seigneur, et Tautre en
Téglise Sàinct-Gervays ob led. défunct est inhumé, et aussy
pour fournir esd. églises de livres, calices, chasubles, aorne-
memens d^église et autres choses neccessaires à dire et célé-
brer lesd. messes 9 pour lesquelz dire et célébrer les enfans
masles dud. défunct et, en défault de masles, les femelles et
les descendans d^eulx du costé paternel nommeront et pré-
senteront les chappellains; et pareillement y sur lad. somme
de huyt mil livres parisis seront pris les frays neccessaires
pour deux grans tableaux de cuyvre qui seront mises et
affixées : Tune en l'église parrochial dud. Changy, Tautre
contre et au dehors de l'église Sainct-Jehan, en Grève, plus
proche et convenable du lieu où led. défunct a esté occis,
esquelz seront insculpez et escriptz le cas et forme de l'homi-
cide et le dictum de ce présent arrest. Et , pour l'intérest et
réparacion publicque dud. homicide, icellecourta condenné
et condenne lesd. prisonniers estre menez depuis le Chas-
— 393 —
tellet de Paris jusques devant l'église Sainct*Jehan, en
Grève : c'est assavoir : lesd. Françoys et Charles du Chastel
en ung tumbereau , lesd. Joacbin du Chastel et Guillaume
Closeau en ung autre tumbereau, et led. Yssot dict le
Laquaie âussy en ung autre tumbereau, et devant lad.
église Sainct-Jehan faire par led. Françoys amende hono-
rable nue teste , à genoulz , ayant une torche de cire ardant
du poix de deux livres et requérir mercy et pardon à Dieu ,
au Roy, à justice et aux veufve et enfans dud. délunct; et
dud. lieu, estre menez esd. tumbereaulx en la place de
Grève, devant la maison de la ville de Paris, et illec lesd.
Françoys, Joachin et Charles du Chastel estre décapitez sur
ung eschauffaulty leurs testes mises sur troys posteaux qui
seront mis et plantez : la teste dud. Françoys devant Thostel
de la ville et les deux autres hors les portes de Sainct-
Anthoine et Saint-Jaques, et led. Closeau à estre pendu et
estranglé à une potence mise et affixée en lad. place de
Grève , son corps illec demourer l'espace de deux heures et
après, les corps desd. Françoys, Joachin et Charles du
Chastd, ensemble dud. Closeau portez et penduz au gibet
de Paris, et led. Yssot dict le Laquaie, à estre attaché et
lyé à ung posteau en lad. place de Grève, et après avoir esté
estranglé, son corps estre ars et bruslé et converti en cendres
en ung feu qui sera faict à Tentour dud. posteau. Et si a
déclaré et déclare lad. court le résida des biens desd. prison-
niers confisqué à qui il appartiendra. Et, pour faire exécuter
lesd. prisonniers selon la forme et teneur de ce présent arrest,
icelle court a renvoyé et renvoyé iceulx prisonniers en Pestât
qu'ilz sont pardevant led. prévost ou sond. lieutenant. Faict
en Parlement, le vingt-huytiesme jour de juillet,* Tan mil
cinq cens vingt-six.
Collation est faicte.
(Copie contemporaine en parchemin, — Archives de M. le
vicomte de Marcy, à Nevers.)
— 394 —
II.
1527. •" ^9 ^oût. — Arrêt du Parlement de Paris qui
adjuge à damoiselle Louise du Chastel, veuve de
François Andras, vivant écuyer^ seigneur de Changy,
et à ses enfants mineurs (les biens sur lesquels la somme
de huit mille livres parisis et les trois cents livres de
rente en terre à eux attribuées par la sentence du
2S juillet i526^ étant grevés d^hypothèques et de rentes
de telle sorte que cette partie de la sentence eût été illu-
soire) y la somme de mille ou dou^e cents livres parisis ,
Vusufruit et les autres droits que demoiselle Marie
Boutherony instigatrice du meurtre de feu François
Andras s'était réservés lors de la donation qu'elle avait
faite, pour l'engager à commettre cet assassinat, à Fran-
çois du Chastel, qui n'était ni de ses parents ni de ses
alliés, des terres et domaines de Serre et Breuillotte;
ladite attribution faite à charge par ladite Louise du
Chastel de payer annuellement à ladite Boutheron , sa
vie durant , la somme de trente-deux livres parisis en
quatre termes.
Franciscus Dei gratia Francorum rex universis présentes
litteras iaspecturis, salutem. Notum facimus quod, cum
ratione bomicidii in personatn defuncti Francisci Andras,
dum viveret scutiferi et domini de Changy, per Franciscum,
Joachinum et Carolum du Chastel fratres et alios eorum
complices, ante hacfultimo supplicio affectos, domicelle Marie
Bouteron mandato, ut fertur, commissi, eadem Bouteron in
nostre palatine consiergerie carceribus, visis informacio-
nibus super hoc nomine et ad prosecutionem domicelle
Ludovice du Chastel, dicti defuncti vidue, suo nomine et
tanquam tutricis suorum et ejusdem defuncti liberorum
annis minorum factis , mancipata et exinde per certos nostre
Parlamenti curie consiliarios ad id per eam commissos inter-
rogata fuisset, oneraque sibi imposita negavisset, predicta
— 395 -
nostra curia testes in dictis informacionibus recolari et eidem
Bouteron confrontari, et deinde visis per eam ipsorum tes-
tium recolaminibus et confrontacionibus, dictam Bouteron^
ad latius eruendam, et proprio ore, premissi hotnicidii veri-
tatem, question! et torture, visitatione super ipsius persone
dispositione primitus facta, subdi ordinaverat. Quamquidem
ordinationem insequento supradicta Bouteron in dictam
torturam duntaxat ob sue persone indispositionem per dicte
nostre curie cyrurgum juratum assertam sublata et extensa
fiierat. Quo in statu existente processu, supradicta Ludovica
du Chastei predictis nominibus suam petitionem et conclu-
siones contra prenominatam Boteron tradiderat et per eas
dixerat et proposuerat quod eadem Bouteron immerito capi-
tale odium contra supranominatum defunctum Franciscum
Andras conceperat, et ut huic odio finis per ipsius defuncti
mortem imponeretur, ipsa Boutheron prefatos Franciscum ,
Joachinum et Carolum du Chastei pluribus donis et mune-
ribus donaverat et plura promiserat, et presertim inter
cetera, prenominato Francisco du Chastei, seniori, qui non
erat de sua cognatione aut consanguinitate, terras et dominia
de Serre et Breulotte , retento earum terrarum usufructu ,
tantisper dum viveret retento (5fcJ, dederat et concesserat me-
diocujusquidem donationis, que alias minime facta fuisset.
Predicti du Chastei fratres et eorum complices scientes jam
dictum defunctum in nostra urbe Parisiensi esse, ad eandem
nostram urbem Parisiensem se data opéra contulerant et
ipsum defunctum proditorie ac pensatis insidiis trucida-
verant. Cujus delicti ratione supradicta nostra curia dictos
du Chastei fratres cum eorum duobus famulis capite trun-
catum iri, ipsorum bonis ad quos pertineret publicatis et
confiscatis condemnaverat, et summam octo milium libra-
rum parisiensium semel solvendam , necnon trecentes {sic)
libras parisienses annui et perpetui redditus et proventus
dicte Ludovice du Chastei vidue et ejus liberis pro suo inte-
resse civili adjudicaverat : et, pro hujuscemodi adjudica-
tione exequenda^ dilectus et fidelis in dicta nostra curia
consiliarius noster Magister Johannes Tronson commis-
- 396-
s[arius ad i]d per eam commlssus se ad patriam contuierat,
ubi coram eo multi creditores dictam condemnationem i[Q
ordine] précédentes comparueraat et dicti arresti exécution!
se opposuerant suasque opposicionis causas p[resentaYerant;
i}deoque bona immobilia et hereditagia dictorum ad mortem
[condemnatorum] ad continuationem redditu[uin et hipo*
the]carum super eadem hereditagia ante hujuscemodi [con*
demnationem a]ssignatorum non suilicer[ent, et predi]cta
adjudicatio apud prenominatam domicellam quatuor [parvos
liberos] habentem illusoria renian[eret, nisi illa pro]pter
ipsa débite certior facta quod predictum homicidium man-
dato dicte domicelle Marie Bouteron commissum [extiterat]
super hoc informaciones fieri et plures testes ei confrontari
fecerat. Quare, mediis predictis, supr[adicta domicjella
Ludovica du Chastel, nomine predicto, memoratam
Boutheron ad emendam honorificam secundum dicte nos[tre
curie di]scretionetn faciendam , necnon ad unum soUemne
servicium in parochia dicti defuncti ceiebrari faciendum , ac
in octo [miliiutn] librarum parisiensium summa et ad car-
cerem usque ad ejusdem summe integram solutionem tenen-
dam condemnari; quodque usufructus et omnia alia jura
per diaam Bouteron in dictis terris et dominiis de Serre et
BreuUete et earum appendicibus et penînenciis pretensa
^um ipsarum terrarum proprietate consolidarentur et sibi
adjudicarentur expensasque, damna et interesse petebat et
requirebat. Supradicta Boutheron omnia negante et a delicto
sibi imposito absolvi, dictamque domicellam Ludovicam
du Chastei nomine predicto in suis expensis et interesse
condemnari petente et requirente. Tandem^ visis per jam
dictam nostram curiam premissis oneribus et information
nibus^ ad prosecutionem dicte domicelle Ludovice du
Chastei^ suo nomine et tanquam tutricis suorum et dicti
defuncti liberorum annis minorum, contra dictam Bou-
theron factis , ejusdem Boutheron interrogatoriis et confes-
sionibus, recolamine et testium confrontacionibus in eam
factis, nostri procuratoris generaiis et dicte du Castel condu-
sionibus , arresto contra diaam Bouteron nona die presentis
I
— 397 —
mensis augustî dato, per quod dictum extiterat quod pre-
dicta Boutheron in eam torturam et questionem quam ipsa
pati posset^ ut dicti delicti sîbi impositi veritas erueretur, .
mitteretur, ' relatione et visitatione de ipsius Boutheron
persona per tonsorem et cyrurgum juraium curie tacta;
eadem que Boutheron in caméra ques^ionis, in qua ipsa ob
sue persone indispositionem extensa et sublevata duntaxat
extitit, audita et interrogata; ac consideratis considerandis et
que curîam nostràm movere poterant et debebant. Prefata
nostra ctiria, per suum arrestum , pro reparatione premissi
casus et pro omnibus emendîs, expensis, damnis et intéresse,
supranominatam domicellam Mariam Boutheron usufructu
et summa mille aut duodecies centum librarum omnibus
allîs juribus quîbuscunque per eam super terris et dominiis
predictis de Serre et Breullote earumque pertinentiis et
dependenciis privavît; hujuscemodi usum fructum dena-
rîorum summam et omnia alia jura que predicta Boutheron
în eisdem terris et dominiis de Serre et Breulloie earumque
pertinentiis et dependentiîs prétendit aut preiendère posset
supradîcte domîcelle Ludovice du Chaste!, dîcto nomine,
solvendo per eam dicte Bouteron, tantisper dum vixerit,
quolibet anno tringinta duarum librarum pafisiensium
summam quatuor terminis : videlicet diebus festis sancti
Remigii, Navitatis et ResurrectionîsDomini, ac Nativitatis
Sancti Johannîs Baptiste solvendam primo termino dicto die
festo sancti Remigii incipîehte, adjudicavit et adjudicat. In
cùjus rei testimonium nostrum his presentibus fecimus
apponi sigillum. Datum Parisius in Parlamento nostro
décima nona die Augusti, anno Domini millesimo quin-
géntesimo vlcesimo septimo et nostri regnî tredecimo.
Sur le replis :
Per arrestum curie.
Matôk.
(Original en parchemin sur deux morceaux, scellé autre-
fois. — Archives de M. le vicomte de Marcy, à Nevers.)
T. m, 3* série. 5 x
- 398 —
III.
1S28 (n. st.) — 22 janvier, — Paris. — - Commission du
Parlement de Paris pour faire ajourner devant le bailly
du Nivernois Guillaume de La Platière , chevalier, sei*
gneur de Prie, à la requête de Méry Potin, écuyer,
seigneur de Mauléon , en son nom et comme curateur de
Louise Potin, sa fille ^ au sujet de la saisie du fief de
Cougnant par ledit de La Platière; ledit fief de CoU'
gnant ayant appartenu à François , Joachin et Charles
du Chastel, exécutés pour avoir assassiné François
Andras , écuyer, seigneur de Changy, et étant en litige
entre Louise du Chastel, veuve dudit Andras y avec
d'autres biens, comme faisant partie des terres sur
lesquelles les 8,000 livres et les 3oo livres de rente ^
adjugées par sentence du Parlement à elle et à ses enfants
mineurs, devaient être assises, et ladite Louise Potin à
cause des droits qu'elle réclamait, demandant une pro^
vision sur lesdits biens, [Elle était veuve de François du
Chastel; voir le contrat de mariage de son fils du 8 mars
1546^ n, st,)
Françoy3, par la grâce de Dieu Roy de France, au premier
huissier de nostre court de Parletneat, ou nostre sergent sur
ce requis, salut. Nostre amé Méry Potin, escuyer, seigneur
de Maulléon, en son nom et comme curateur de Loïse Potin,
damoiselle, sa fille, nous a exposé que par devant nostre
amé et féal conseiller en nostre court de Parlement de Paris,
maistre Jehan Tronson, commis à l'exécution de certain
arrest de nostre court de Parlement donné en icelle le
XXVIII* jour de juillet Pan mil cincqcent vingt-six, se seroit
meu procès entre Loyse du Chastel, damoiselle, deman-
deresse en lad. exécution et requérant que, sur les terres et
biens qui auroyent appartenu à Françoys, Joachin et Charles
du Chastel, luy fussent délivrez troys cent livres parisis de
— 399 —
rente en assiette, et le résidu de tous les biens fussent venduz
pour venir au payement de huit mil livres parisis à elle
adjugez par ledit arrest, d^une part, et ledit Potin ou nom
et comme curateur de sad. fille , Guillaume de La Plautière
{sic)y chevalier, seigneur de Prie, et plusieurs autres expo«
sans (sic) à lad. exécution; sur lequel procès et débat, après
lesd. parties avoir plainement esté oyes et respectivement
en leurs demandes , oppositions, réplicques et duplicques,
elles auroient esté appoinctées à informer et produire sur
icelles par devers nostred. conseiller, pour, par luy, en faire
son rapport en lad. court. Et, pendant led. procès, du con-
sentement desd. parties, et mesmementdud. de La Plautière,
furent commis led. exposant et maistre Florent de La Barre
au gouvernement desd. biens contencieulx ; aussy aud.
exposant oud. nom de curateur de sad. fille, pour les droiz
par elle prétenduz, fust adjugée certaine provision sur lesd.
biens à plain mentionnez oud. procès, lequel est ancoires
pendant et indécis et les parties produict en icelle par devant
nostred. conseillier ou nostred. court à son support. Et
néantmoins, led« de La Plautière, entreprenant sur nostred.
court et contrevenant à ce que, si de son consentement avoit
esté ordonné, a faict mettre sa main féodalle en la terre de
Cougnant par faulte d^homme, comme il disoit, estant des
terres comprinses ou débat et procès de lad. exécution, et
jx)ur laquelle icelluy de La Plautière s'estoit opposé. A
laquelle mainmise led. exposant, voyant que c'estoit contre-
venir à la commission à luy et aud. de Barre {sic) baillée
du consentement dud. de La Plautière et autres parties oud.
procès à la provision adjugée à sad. fille, se seroit opposé;
nonobstant laquelle opposition et remonstrance quelconque
à luy faicte par led. exposant, a prins et levé par force les
iruictz de lad. terre, en commectant par luy rébellion à
l'ordonnance de lad. court ou de nostred. conseillier maistre
Jehan Tronsson. Et, pour procéder sur lad. opposirion, a
fait bailler jour aud. exposant par devant son bailly de
Franay-les-Chanoines, par devant lequel ledit exposant.
— 400 —
pour luy et comme curateur de sad. filles a remonstré que,
pour lad. terre de Coignant et autres qui auroient appartenus
ausd. Françoys» Joachin et Charles du Chastel, avoit esté
eacommancé procès entre lesd. parties par devant led.
Tronson, lequel estait ancoires pendant et indécis en
nostred, court ou par. devant led. Tronson, exécuteur, et
pourtant la procédure qui cust esté faicte par devant led.
bailly en lad. matière de mainmise et la sentence qui sur ce
interviendroit, pourroit préjudicier oud. procès d exécution
pendant en nostred, court et à Tarrest d^icelle qui sur ce
interviendra; parquoy a requis que lad. matière de main*
mise estre renvoyée en nostre court ou par devant led.
Tronson ou autre conseillier commis à lad. exécution;
lequel renvoy led. de La Plautière a empesché. Et, combien
que, ce considéré, icelluy bailly ne son lieutenant ne deust
prendre cognoissance dud. renvoy, mais deust renvoyer le
débat sur icelluy en nostred. court pour en décider, néant-
moins, auroit sur led. débat appoincté les parties en droit et
à produire: ce que led. exposant auroit fait. Et, quant aud.
de La Platière , il auroit pris plusieurs délaiz et subterfuges,
au moyen que, cependant, comme dit est, il joissoit par
violence des choses contencieuses. Finalement, led. bailly
ou sond. lieutenant, en favorisant aud. de La Plautière,
auroit interloqué qu'ilz informeront des faitz baillez en ung
intendit par luy fourny, combien que les parties n'eussent
esté appoinctées à bailler intendit, et que lesd. parties pro-
duiront plus amplement dedans quinzaine pour, au mardy
enssuivant, faire droit sur led. renvoy par les pièces qui se
trouveroient par devers led. bailly à lad. quinzaine; à quoy
led. exposant auroit satisfait de sa part, et au jour enssui-
vant , auroit requis que suivant led. interlocutoire et veuz
les délaiz, procédures donnez aud. de La Platière, droit fust
tait sur led. renvoy par les pièces qui auroient esté fournyes
à lad. quinzaine; à quoy, combien que icelluy de La
Plautière ne montrast d aucune dilligence, et que tant il eust
eu autant de délaiz sur led. renvoy comme il eust peu avoir
— 4X)i —
en la matière principalle et ordinaire, touteflFoys, auroit
requis ancoires ung délay tout au moins par absence, à quoy
iccUuy bailly ou sond. lieutenant, combien qu'il deust taire
droit sur led. renvoy par les pièces trouvées par devers luy,
suyvant lad. interlocutoire, ce néantmoins, veue icelle sa
sentence, et les commations {sic) et injunctions contenuz en
icelles, et les délaiz précédens baillez aud. de La Platière,
auroit appoincté qu'il auroit ancoires ung délay pour satis-
faire à lad. sentence à certain jour enssuivant pour tous
délaiz saus délay d'absence et sans plus de (i) ;
duquel appoinctement jaçoit que fust tousjours à Tadvan-
taige et faveur dud. de La Platière et grief dud. exposant,
ce néantmoins, icelluyde La Platière, soubz couUeur de
ce que, comme dessus est dit, il joïst et liève par force les
fruitz de lad. terre, et voyant que par subterfuges quel-
conques ne povoit plus empescher led. renvoy estre fait en
nostred. court, et craingnant icelle, pour la rébellion et
contravention par luy commisse à nostred. court et exécuteur
des arrestz d'icelle, s'en seroit porté pour en appellant, à
intencion de esgarer par luy la principalle matière, et
empescher que d'icelle nostred. court n'ayt congnoissance,
par le moyen dud. appel, lequel il n'entend relever que à
jour loingtain et par devant le bailly de Nyvernoys, juge de
ressort dud. bailly de Franay et autres terres subalternes ;
en nous humblement requérant sur ce noz lettres de pro-
vision. Pourquoy Nous, ces choses considérées, vouUans
subvenir à noz subjectz selon l'exigence des cas, te mandons
et commectons par ces présentes que led. Guillaume Pla-
tière, cfaeyalier et autres appellans, s'aucuns en y a, tu
adjournes et actiones à certain et compectent jour par devant
icelluy bailly de Nivernoys ou sond. lieutenant ou autre
juge par devant lequel led* appel ressortist, en le certiffiant
suffisamment aud. jour de ce que fait auras sur ce, auquel
nous mandons et pour ce que led. appel ressortist dirrec-
(i) Un blanc dans la pièce.
— 402 —
tèment par devant luy en ses assises , commectons par ces
présentes que , lesd. parties présentes ou appcUées par devant
luy ou procureur pour elles, il face procéder et aller avant
par devant, par briefx et compectens intervalles et délaiz, en
assise et dehors , et sans attendre d^assistance , et à icelles
oyes face bon et briet droit; et néantmoins mandons à
nostred. conseiller Jehan Tronson que, se lesd. parties, pré-
sentes ou appellées par devant luy ou procureur pour elles,
et lesquelles à ceste fin nous voulions par toy estre ajournées,
il luy appert sommèrement et de plain , et sans figure de
procès, desd. arrestz de nostred. court, de Texécution
dUceulx par luy, comme commis par nostred. court, encom-
mencé à faire que, avecques led. de La Platière, ied.
exposant ait esté comniis au régime et gouvernement desd.
terres et seigneuries, que nostred. conseillier, par sa sentence,
ait faicte mainlevée ausd. vefves et autres quelzconques desd.
fiefzy terres et seigneurie , et mesmesde la terre de Cougnant,
avecques led. de La Platière, dont n'ait esté appelle ne
réclamé, et que néantmoins depuis, icelluyde La Platière
ait fait saisir icelle terre et seigneurie de Cougnant, faict
commettre commissaires et faict les autres attemptatz
dessusd.y ou de tant que souffire doye, il, oud. cas, reçojrve
led. exposant à requérir que tout ce qui a esté fait ou pré-
judice desd. arrestz, exécutions dMceulx y procès et instance
pendant par devant nostred. conseillier maistre Jehan
Tronson, soient révocquez, cassez et adnuUez et mis du
tout au néant, en recevant led. exposant à prendre, sur ce et
les deppendences , telles conclusions pour ses dommaiges et
intérestz, à cause desd. attemptatz et entreprinses quMl verra
estre à faire; et oultre, appelle avecques toy ung notaire ou
tabellion de court laye, informe toy dilligemment, secrète-
ment et bien, de et sur lesd. actemptatz et entreprinses, qui
plus à plain seront baillez par déclaration, se mestier est;
l'information , ensemble ce que fait en auras , envoyé féable^
ment et bien séellée par devers nostred. conseillier maistre
Jehan Tronson pour, par, lui oy, nostred. court, sur son
— 4^3 —
rapport , en estre ordonné comme de raison. Car ainsi- nous
plaist il estre fait, nonobstant usage, stille et coustume de
pays quant à actendue d^assise et lettres subreptices à ce
contraires. Mandons et commandons à tous noz justiciers,
officiers et subjectz que à toy, en ce faisant, soit obéy.
Donné à Paris, le XXII* jour de janvier, Tan de grâce mil
cinq cent vingt-sept, et de nostre règne le quatorziesme.
Par le conseil :
Regnault.
(Original sur parchemin, — Archives de M. le vicomte
de Marcy-y à Nevers,)
UN SCEAU
DE JEHANNETTE DE POMAY.
Ce sceau a été trouvé sur le territoire de Lurcy-le-Bourg
et remis à la famille des anciens seigneurs de cette paroisse ,
la famille de Charry, qui a eu Tobligeance de me le com«
muniquer. C^est un élégant cachet en bronze, admira-
blement conservé , et dont tous les détails , la forme de Pécu
comme le caractère des lettres, dénotent la fin du qua-
torzième siècle. Uécusson, parti au t de,., à trois bandes
de.... au 2 échiqueté de... et de...^ chargé en cœur d'un
chevron de..., porte en légende: + S' Jehanete d' Pomay,
c^est-à-dire : Scel de Jehanete de Pomay.
Il s'agit ici d'une dame de Pomay, dont le fief était situé
entre Magny et Aglan , dans la châtellenie de Châteauneuf-»
sur -Allier. Hugues d'Angeron, chevalier, seigneur des
Granges, en fit hommage en 1288, et la mémeannée^ ayant
vendu la maison-forte de Pomay à Agnès, veuve de Pieire
Lamoignon, il requérait Robert, comte de Nevers, de
recevoir ladite dame Agnès à foy et hommage pour cette
maison^forte que lui et sa femofie Alix avaient vendue»
(Marolles, 195^ 196, 522.)
Cependant Parmentier, dont les observaticHis sont babi*
tuellement très-sûres, place la maison- forte de Pomay dans
la paroisse de Saint- Péraville. Au chapitre des événements
remarquables, il rapporte en effet qu^en c 1288, Agnès, veuve
de Pierre Lamoignon de Ville, achète de Hugues Dangeron
la maison - forte de Pomay, en la paroisse de Saint-
Péraville. » L'interprétation de Parmentier n'est pas admis-
sible; elle est démentie par le texte des hommages fournis
pour ce fief pendant le cours du quatorzième siècle, ainsi
que par diverses pièces conservées aux archives de la Nièvre,
qui établissent péremptoirement la situation de la seigneurie
de Pomay dans la paroisse de Magny. Voici Fanalyse d^une
des pièces les plus concluantes : c 1 344, 3 mai , acte de
présentation par noble homme Charles dit Lamoignon,
chevalier, seigneur de Pomay, à vénérable et discrète per-
sonne messire Pierre Barrères, trésorier de l'église de Nevers,
de messire Pons de Bannevaus, prestre et curé de Saint-
Genest de Nevers , pour être par ledit trésorier présenté à
révéque de Nevers, pour lui donner la chapelle de Notre-
Dame de Pomay, assise en la paroisse de Magny, diocèse de
Nevers, vacante par la mort de messire Gautier de Namur,
chapelain de ladite chapelle Ou chapellenie, laquelle présen-
tation à faire au trésorier appartient audit Lamoignon, et la
présentation à faire à Tévéque de Nevers, au nom dudit
Lamoignon , appartient audit trésorier, comme patrons de
ladite chapelle ou chapellenie. » (Arch. de la Nièvre, G.)
Toutefois , la note de Parmentier porte à croire que la
veuve du premier Lamoignon résidait i. Saint-Péraville,
tandis que La Chesnaye-des-Bois , copiant Moréri, qui lui-
même suivait Blt^nchard , affirme que cette famille tire son
nom d^un fief de Lamoignon situé dans le faubourg de
— 4^5 —
Donzy, et cela parce que les Lamoignon de Basville possé-
daient une seigneurie de ce nom proche Donzy au moment
où Blanchard écrivait son Histoire des présidents à mortier,
et qu^il entrait dans son plan de rattacher la famille parle-
mentaire des Lamoignon à ^ancienne famille féodale de ce
nom. La même préoccupation Ta conduit à transformer les
Lamoignon , seigneurs de Pomay^ en Lamoignon, seigneurs
de Lamoignon , bien que tous les actes concernant ces sei-
gneurs les nomment Pierre ou Charles dit L'Amoignon,
qualification qui exclut certainement Pidée de la possession
d'un fief Lamoignon.
Le surnom Lamoignon s^est fixé dans la branche de Viel-
mannay, dont il est devenu le nom de famille^ tandis que la
branche des seigneurs de Pomay me parait y avoir renoncé
de bonne heure pour adopter le nom de Pomay. En i385,
Odet de Séry et Jean de Pomay, damoiseaux, font hommage
pour la maison de Montorge, paroisse de Magny. En 1407,
Jehan de Pomay, écuyer, seigneur dudit lieu, fait une vente
à Jean Clerc ; fils de Hugues, clerc de Magny. (Mar., 196^
197.) Ce Jean de Pomay n'est autre que Jean Lamoignon^
fils de Pierre et de Jeanne de Mornay. Sa mère, devenue
veuve, s'était remariée avec Odet de Sénac (lisez de Séry) ,
d'où rhommage que Jean fait en commun avec son beau-
père. Il a abandonné le surnom que portait son père Pierre
et son grand-père Charlet dit L'Amoignon , chevalier, sei-
gneur de Pomay; il s'appelle maintenant Jean de Pomay.
Mais Michel, autre fils de Charlet, se qualifie Michel ou
Michelet Lamoignon, écuyer, seigneur de Mannay (i33o et
1 35o), et transmet à ses descendants le surnom, qui devient
le nom de famille des seigneurs de Vielmannay.
A la fin du quatorzième siècle , le nom de Pomay était
ainsi devenu le nom de famille des Lamoignon , seigneurs
de Pomay. Jehannette de Pomay serait donc une Lamoignon
issue des seigneurs de Pomay. Les armes de son mari vien-
nent à Tappui de cette conjecture. La seigneurie de Pomay
n'avait pas été acquise en entier par Agnès , veuve de Pierre
T. m, 3* série. 52
— 4o6 —
L'Amoigûon. Hugues Dangeron ne lui avait cédé que la
maison-forte et ses dépendances. Une autre partie de la terre
de Pomay était entre les mains de la famille de Semur,
comme le démontrent tous les hommages rendus pour cette
seigneurie par Jean de Semur, fils de Hiérardin de Semur;
par Robert de Semur, écuyer, seigneur de Pomay; par
Guyot de Semur, écuyer, seigneur de Pomay et de L'Etang,
au cours des années i?23, 1327, ^^5^, 1^719 1 383, 1 398,
1405, 1437. Or, d'après V Armoriai du Ntpemais, la maison
de Semur portait : D^ argent, à trois bandes de gueules; ce
sont précisément les armes gravées au premier parti du sceau
de Jehannette de Pomay, c'est-à-dire celles de son mari. Elle
aurait ainsi épousé son voisin, seigneur en partie de Pomay.
Parla on s'explique comment, au quinzième siècle, le fief
se trouve entièrement dans la maison de Semur, d'oii il passe
aux Letort avant Tannée 1464.
La légende de notre sceau désigne donc une Lamoignon de
Pomay, femme ou mieux veuve de N. de Semur, seigneur de
Pomay. Si, comme je le pense, cette interprétation est exacte,
le sceau de Jehannette de Pomay présente le plus ancien et
probablement l'unique blason authentique de la race féodale
qui avait pour surnom Lamoignon. C'est un échiqueté : or,
l'échiqueté devient facilemant un losange , quand les armoi-
ries sont copiées ou décrites d'après un écu penché. On cite
plusieurs exemples de mutations semblables, et, par la même
raison, le losange attribué partout aux Lamoignon peut
dériver d'une forme primitive en échiqueté. Quant au che-
vron posé en cœur, ce n'est sans doute qu'une brisure propre
à la lignée issue du deuxième mariage de Charlet dit
L'Amoignon avec Agnès de Saisy, nom que je serais tenté
d'identifier avec celui de Séry ou de Sénac, attribué au
beau-père de Jean de Pomay. La véritable leçon de Saisiaco,
de Saisy, aurait été traduite par de Sairiaco, de Séry, et par
de Sainaco, de Sénac; d'autant que les noms cités dans les
diverses généalogies de Lamoignon sont fréquemment estro-
piés, au point de les rendre méconnaissables* Rien que dans
— 407 -
la branche de Vielmannay on trouve Madelaine de Sargines
pour Madelaine de Chargères, Jeanne de Mulor^ fille de
François de Mulor, écuyer, et de Claude de Corquiller, pour
Jeanne de MuUot, fille de François de Mullot, écuyer, et
de Claude de Corquilleray ; Catherine de Leuvault pour
Catherine de Lanvault, Jeanne de MeuUot pour Jeanne de
MuUot, Edmée CoUesson pour Edmée Collion.
Quoi qu*il en soit , les Lamoignon , seigneurs de Pomay,
s'éteignirent dès les premières années du quinzième siècle,
et le nom de Lamoignon se perpétua par la descendance de
Michel, deuxième fils de Charlet dit L'Amoignon, et de
Jeanne d'Anlezy, dame du Champ-de-Sancy, en la châtellenie
de Montenoison. Ce fief entra dans le lot de Michel, dont le
fils Guillaume (1376) et le petit-fils Pierre (141 2) étaient
seigneurs d^Arthel, ainsi que d^autres localités voisines de
Lurcy-le-Bourg ; et si je ne craignais pas d^abuser des induc-
tions , je tenterais d'utiliser cette circonstance pour expliquer
la trouvaille faite sur le territoire de cette paroisse. Les
derniers descendants de ces seigneurs ont été baptisés et
inhumés à Varzy de 1647 à 171 3. Enfin, Claude de
Lamoignon, baptisé à Marcy le 11 septembre 1665, ^^^
unique de Jean de Lamoignon et de Jeanne de Violaines,
mourut sans postérité dans les premières années du dix-
huitième siècle. Avec lui s^éteignit la maison féodale de
Lamoignon.
Telle n'est pas Popinion de M. de Soultrait ; d'après lui ,
cette maison se serait encore perpétuée par les Lamoignon
de Basville, qu'il considère, sur ]a foi de Blanchard, comme
une branche détachée des Lamoignon de Vielmannay. Mais
le système de Blanchard est trop contesté, ses filiations sont
trop suspectes et trop peu sincères pour mériter le crédit que
lui accorde V Armoriai du Nivernais; et je croîs qu'il con-
vient de s'arrêter à une opinion tout à fait contraire à celle
qui a été proposée par cet ouvrage dans les passages sui-
vants : c ... Les auteurs de notre illustte famille parlemen-
taire étaient originaires du sud du Nivernais, où se trouvait
— 4o8 —
le fief de Pommay, le premier qu'ils aient bien authentU
quement possédé. » Et plus loin : « Il semble bien plus
naturel de rattacher les contrôleurs de la maison des comtes
de NeverSy officiers importants du reste, à la lignée des
anciens seigneurs de Pommay, comme Tout fait les généa-
logistes accusés de complaisance por Laine. » {Armoriai du
Nivernais, tome II, p. 42 et 43.)
L'auteur du Dictionnaire véridique n'a pas été seul à
signaler ces complaisances. Il existe à la Bibliothèque natio*
nale, parmi la collection des titres originaux, et sous le
n<> 390I9 un volume dont je citerai, à la cote 232, les notes
et généalogie par M. de La Cour : c La branche de Basville
portait anciennement pour armes : D^ argent , à trois mou-
chetures d'hermines de sable, deux et une; mais ils ont pris
les armes de MM. de Lamoignon, seigneurs de Mannay.
Blanchard , dans ses Présidents à mortier du Parlement de
Paris, a donné la généalogie de cette famille, et il en a £ait
une branche qu'il fait sortir d'une ancienne famille noble
du même nom, originaire de Nivernois, oti elle a possédé
les fiefs et seigneuries de Lamoignon, de Mannay, Pom-
may, etc. Mais cette prétendue jonction n'a pour toute
authenticité que la seule envie que Blanchard a eue de flatter
la vanité de ceux de cette famille et de cacher la petitesse de
leur origine, ainsi que l'usurpation qu'ils avaient faite des
armes des seigneurs de Mannay; c'est sur le même plan que
l'on a donné la généalogie de la même famille, dans la
dernière édition du Dictionnaire de Moréri.
.m
)» Jean Lamoignon, duquel Blanchard et Moréri font des-
cendre les seigneurs de Basville, n'a eu aucune des qualifi-
cations de noblesse que ces deux auteurs lui prêtent. Il étoit
originaire d^une famille bourgeoise de Nevers, où il épousa
Jeanne Dourde, et non pas Jeanne Erard, fille de Guillaume
Dourde, bourgeois de Nevers, et il ne vivoit plus Tan 1477,
lors du mariage de son fils. Il eut :
» L Jean II, qui suit.
» IL Huguette épousa, suivant Blanchard, Pierre de
— 409 —
La Salle, duquel elle étoit veuve le 27 mars 1483 , qu'elle
vendit aux tuteurs de François et de Jean Lamoignon, ses
neveux y fils de Jean Lamoignon , une maison en la ville de
Nevers.
» On trouve Jean Lamoignon qualifié contrôleur de la
dépense de Jean, duc de Brabant.
1 Jean Lamoignon , lieutenant du prévôt de la ville de
Bourges en 1462, ne Pétoit plus en 1463, que Jean de
Reuilly étoit pourvu du même ofiice. (La Thaumassière, 54.)
Il fut depuis secrétaire de Jean de Bourgogne, duc de Bra-
bant.
> Il avoit épousé à Nevers, le 25 novembre 14771 Marie
de L'Estang, qui décéda le 17 mai 1482. Elle étoit sœur
d'honorable homme Jean de Lestang, demeurant à Nevers
en 1464 et 1471, qui fut tuteur des enfans de sa soeur, et
d'honorable homme Pierre de Lestang, bourgeois de Nevers,
mort avant le 19 juin I5i9> sans enfants de Catherine
Poivreau , sa femme.
» Jean II eut pour enfants : I. François ^ qui suit.
III. Marie. (V. plus bas.)
> II. Jean III, né le 6 novembre 1481, qualifié honorable
homme et sage maître Jean Lamoignon, licencié ès-loix,
demeurant à Nevers, dans un bail à bourdelage qu'il passa
tant en son nom qu^en celui de François Lamoignon, son
père, bourgeois de Nevers , le i«' juillet i5o5, de quelques
héritages à Nevers. Il étoit lieutenant du prévôt de Bourges
en i5i5 (La Thaumassière, p. 54), conseiller de Marguerite
d'Orléans, duchesse de Berry, en ses grands jours de Berry
à Bourges, et échevin de cette ville en i52i. Il portoit pour
armes : D'agent, à trois mouchetures d'hermines de sable.
{Id., p. 177.) Il mourut le 28 juin i53o, et fut inhumé en
l'église Saint-Âustrille de Bourges. Il avoit épousé Anne
Alabat. (Alabat : De gueule, à trois sonnettes d'or.) Elle est
qualifiée d'honneste femme Anne Alabat, veuve d'honorable
homme et sage maître Jean Lamoignon, licencié ës-loix,
demeurant à Bourges, dans une reconnaissance qui lui fut
— 4^0 —
passée, le 19 arril 1532, d^une tannerie à Nevers, en la rue
de la Vieille-Chevrye. Elle ne vivoit plus le 6 avril 1537 que
ses enfans étoient sous la tutelle de maître Gilbert Boador,
son beau-frère, mari de Marie Lamoignon. Ledit Boudor,
avocat à Bourges, comme tuteur desdits enfans, passa baux
à bourdelages d'héritages assis à Nevers, les 6 avril 1537 et
26 novembre 1549. Il partagea, le 19 mars i538, avec pru-
dent homme Pierre Lullier, comme curateur des enfans de
feu François Lamoignon, les biens qui avoient été communs
entre les défunts Jean et François Lamoignon frères , et qui
étoient restés indivis entre leurs enfants. Comme tuteur
desdits enfans de Jean Lamoignon, il reçut, le 16 novembre
1553, de Pierre Caulier, nouvelle reconnaissance de la rente
de 8 sols 4 deniers sur la troisième partie d'une tannerie qui
estoit alors en teinturerie, sise à Nevers, en la rue de la
Vieille-Chevrerie.
> Ils avoient eu :
» I. Jean, vivant en 1532 et 1538. — IL Claude, mar-
chand et bourgeois de Bourges, échevin de cette ville en
i563 et 1564. Il portoit les mêmes armes que son père.
(La Thaumassière , p. 188.) En qualité d*un des notables
marchands de Bourges, il assista, le 29 septembre i566,
à rassemblée pour Félection du prévôt de cette ville. -—
IH. François, vivant en 1538. — IV. Georges étoit marié,
le 28 septembre 1570, avec Françoise du Ban, fille
d^Estienne du Ban, seigneur de Bonnay et de Saint-Ger*
maintes-Bois en partie, et de Guillemette Vesse. — V.
Espérance. — VI. Françoise, mineures en i538.
» François, né le 17 mai 1480 (Moréri), le 3o juin (Blan*
chard), est qualifié bourgeois de Nevers dans un bail à bor-
delage fait par Jean , son frère , se faisant fort pour lui , le
1"* juillet 1505. Secrétaire de Fançoise d'Albret, en 1508. Il
est dit honorable homme dans une reconnaissance qui lui fiit
donnée à lui et à son frère, le 19 juin 15 19, comme héritiers
de feu Pierre de L'Estang, leur oncle. Il épousa le 14 janvier
150^ Marie au Coing, qui mourut le 21 décembre iSio, et
- 4" -
4toit fille de Vincent du G>ing, bourgeois et marchand de
Nevers, et de Marguerite Bourgoing. Il ne vivoit plus le
19 mars i538 (V>S')queG. Boudor, son beau-frère , par-
tagea avec Pierre Luillier, curateur de ses enfants. Il avoit
eu :
1 I» Charles, qui suit; — 2^ Hélin, vivait en 1570; —
3^ Françoise, née le 23 février 15 10 (V* S'), épousa Pierre
Luillier, qualifié prudent homme et marchand à Bourges
dans le partage de i538; » i? Marie, épousa François du
Broc.
» Charles Lamoignon, né le i*' juin t5i4, ^^^ docteur
à Ferrare le 3o juillet 1543. Avocat au Parlement de Paris
le 16 décembre 1544. »
Charles avait épousé en 1 547 Charlotte de Besançon , fille
d'un conseiller au Parlement, et de Marie Potier. Cette
alliance achemina les Lamoignon vers les hautes charges du
Parlement de Paris. Dix ans après son mariage, Charles
Lamoignon recevait les provisions de conseiller au Parle-
ment, et procurait ainsi Tanoblissement de cette illustre
famille.
A ce moment commencent les usurpations signalées par
M. de La Cour. On lit au n9 240 du volume précité :
c Positions imprimées d'une thèse soutenue le 10 août 1627
en Sorbonne, par Jean Le Nain de Cravant, dédiée à
Chrétien de Lamoignon, président aux enquestes, et à ses
armes: Ecartelé: aux i et 4 d'argent, à trois mouche^
tures d'hermines; aux 2 et 3, losange d'argent et de sable.
Supports : deux palmes. » Au n* 249 : c Thèse analogue
soutenue le 25 juillet 162 1, dédiée au même, conseiller au
Parlement, mêmes armes. »
Les deuxième et troisième quartiers marquent bien la
prétention de se rattacher à la famille homonyme; mais cette
prétention se manifeste d'une façon assez timide et même
assez illogique. Ici le losange des anciens Lamoignon n^oc-
cupe pas la situation habituelle aux armes familiales:
Chrétien de Lamoigûon a blasonné comme si une famille
portant trois mouchetures avait voulu rappeler une alliance
avec une autre famille portant un losange. En tout cas , la
timidité et la bizarrerie ont été de courte durée : les
Lamoignon de Basvilley devenus riches, puissants, bien
alliés, ne tardèrent pas à porter uniquement un losange
d^argent et de sable, chargé du franc canton d'hermines,
qui rappelait Palliancede Charlet dit L'Amoignon, seigneur
de Pomay, avec Jeanne d*Anlezy. Telles sont les armes que
leur attribuent Blanchard et les divers armoriaux du Par-
lement de Paris. C'était, du reste, une conséquence natu-
relle et forcée du système de cet auteur; car la communauté
d'origine entraînant Tidentité des armoiries , il fallait faire
disparaître les armes des bourgeois de Nevers et des mar-
chands de Bourges, pour y substituer celles des anciens
gentilshommes du nom de Lamoignon.
La vérité est que notre illustre famille parlementaire n^a
rien de commun que le nom avec la famille issue des sei-
gneurs de Pomay, et que sa jonction avec les Lamoignon
de Vielmannay n'est ni prouvée, ni probable.
O. DE VILLENAUT.
— 4*3 —
CORRESPONDANCE NIVERNAISE
DE J.-J. ROUSSEAU (i).
V Emile, le Contrat social , la Nouvelle Héloïse venaient
de paraître, lorsqu'une jeune dame du Nivernois , fascinée
parle génie décevant de Jean-Jacques Rousseau, entreprit
avec lui un échange de correspondance. La plupart des
réponses du philosophe ont été conservées dans la famille ,
de vieille souche nivernaise, à laquelle nous en devons
l'obligeante communication; elles reflètent si exaaement les
qualités, les défauts, la doctrine de Jean-Jacques que nous
avons pensé intéresser notre Société en lui en soumettant
quelques extraits.
La première lettre, adressée de Monquin, près Bourgoin,
28 octobre 1769, à M"** la comtesse de X..., au château de...,
en Nivernois, indique vaguement l'origine de ces relations :
Rousseau y parle du c désir qu'il a de mériter et cultiver la
correspondance qu'elle daigne lui offrir >; et plus tard :
c Notre correspondance a commencé de manière à me la
rendre à jamais intéressante : un acte de vertu dont je con«
nois bien le prix ; un besoin de nourriture à votre âme qui
me fait présumer de la vigueur pour la digérer Ce vide
interne dont vous vous plaignez ne se fait sentir qu'aux
cœurs faits pour être remplis. Les cœurs étroits ne sentent
jamais le vide parce qu'ils sont toujours pleins de rien
Si la nature vous a fait le rare et funeste présent d'un cœur
trop sensible au besoin d'être heureux , ne cherchez rien au
dehors qui lui puisse suffire : ce n'est que de sa propre subs*
(t) Nous avons respecté scrupuleusement la ponctuation et Tortho-
graphe des manuscrits.
T. m, 3* série. 53
tance qu^il doit se nourrir. Madame, tout le bonheur que
nous voulons tirer de ce qui nous est étranger est un bon-
heur faux. Les gens qui ne sont susceptibles d'aucun autre
font bien de s'en contenter ; mais si vous êtes celle que je
suppose, vous ne serez jamais heureuse que par vous-même.
Ce sens moral si rare parmi les hommes, ce sentiment exquis
du beau du vrai du juste, qui réfléchit toujours sur nous-
mêmes , tient Tâme de quiconque en est doué dans un ravis-
sement continuel qui est la plus délicieuse des jouissances.
La rigueur du sort, la méchanceté des hommes, les maui
imprévus , les calamités de toute espèce peuvent Tengourdir
pour quelques moments mais jamais l'éteindre « et presque
étouffé sous le faix des misères humaines, quelque fois une
explosion subite peut lui rendre son premier éclat. On croit
que ce n'est pas à une femme de votre âge qu'il faut dire ces
choses-là, et moi je crois au contraire que c'est à votre âge
qu^elles sont utiles , et que le cœur s'y peut ouvrir : plus tôt
il ne les sauroit entendre ; plus tard son habitude est déjà
prise; il ne peut plus les goûter. >
. Comment ce ton sermonneur et déclamatoire pouvait-il,
malgré la perfection du style ^ enthousiasmer une jeune
femme de vingt- trois ans, douée de tous les avantages
sociaux, recherchée du beau monde, tant en Nivernois qu^à
Paris, à une époque où le plaisir était la préoccupation la
plus sérieuse de la vie? C^est que quelques grandes dames,
la maréchale de Luxembourg, la comtesse de BouiHers, la
marquise de La Marck, etc., ont mis la philosophie à la
mode, et que Rousseau est à son apogée. Après les bergeries,
les madrigaux et les jolis vers, ces palais blasés par les
fadeurs cherchent des sensations nouvelles, fussent -elles
âpres et dures ; et dans cette fête permanente de comédies et
de soupers, quand on eut épuisé le répertoire des choses
aimables, des attitudes charmantes, des compliments gra-
cieux, un retour à la nature, au spectacle de Thomme
primitif et sans culture, une critique amère de la civili-
sation, du luxe et des grandeurs ne furent pas pour déplaire;
I
- 415 -
on ne craignit pas d'être quelque peu flagellé soi-même par
le Contrat social et le Discours sur V inégalité des condi*
fions. Dans cette société^ la plus spirituelle qui fut jamais,
pareil prodige se renouvela au Mariage de Figaro , où ceux
qui ne c sMtaient donné que la peine de naître » éclatèrent
en bravos inconscients.
L'humeur altière de Rousseau n'a pas à descendre à la
flatterie pour plaire à ce beau monde; il reste Thomme
bourru et mal élevé que Ton sait. Il écrit brutalement à cette
jeune femme : t Un rendez-vous au spectacle ne sauroit me
convenir ; » ou bien, une autre fois : c Je ne puis,
Madame^ vous allez voir cette semaine Je tâcherai que ce
soit mardi, mais je ne m'y engage pas, encore moins pour le
diner Je déjeune toujours en me levant, mais cela ne
m'empêchera pas si vous prenez du caffé ou du chocolat d'en
prendre encore avec vous. Ne m'envoyez pas de voiture ,
j'aime mieux aller à pied Bonjour, Madame, voilà votre
laquais qui entre >, et pas un mot de remerciement. Et
ne croyez pas que ce ton dégagé soit l'indice d'une intimité
suspecte; les relations restent sévères, et la morale la plus
pure fait le fond de toute la correspondance. La comtesse
s'était probablement plainte du vide de sa vie ; il lui répond
par cette page qu'on dirait tirée de VEmile : t Je vous offre
un mobile que votre état me suggère. Nourrissez votre
enfant. J'entends les clameurs, les objections. Tout haut :
les embarras, point de lait, un mari qu'on importune
Tout bas : une femme qui se gêne, Tennui de la vie domes-
tique, les soins ignobles, l'abstinence des plaisirs Des
plaisirs? je vous en promets et qui rempliront vraiment
votre âme. Ce n'est point par des plaisirs entassés qu'on est
heureux, mais par un état permanent qui n'est point composé
d'actes distincts. Si le bonheur n'entre pour ainsi dire en
dissolution dans notre âme, s'il ne fait que la toucher
l'effleurer par quelques points, il n'est qu'apparent, il n'est
rien pour elle. L'habitude la plus douce qui puisse exister
est celle de la vie domestique qui nous tient plus près de
— 4i6 —
nous qu'aucune autre ; rien ne s'identifie plus constamment
avec nous que notre famille et nos enfants
» J'ai beau chercher oti Ton peut trouver le vrai bonheur
s'il en est sur la terre , ma raison ne me le montre que là.
Les comtesses ne vont pas d^ordinaire l'y chercher, je le sais;
elles ne se font pas nourrices et gouvernantes, mais il faut
aussi qu'elles sachent se passer d^étre heureuses; il faut que
substituant leurs bruyans plaisirs au vrai bonheur, elles
usent leur vie dans un travail de forçat pour échapper à
Pennui qui les étouffe aussitôt qu^elles respirent, et il faut
que celles que la nature doua de ce divin sens moral qui
charme quand on s'y livre et qui pèse quand on l'élude, se
résolvent à sentir incessamment gémir et soupirer leur cœur
tandisque leurs sens s^amusent Jeune femme voulez-vous
travailler à vous rendre heureuse , commencez d'^abord par
nourrir vos enfans. Ne mettez point votre fille dans un cou-
vent. Elevez-la vous-même. Votre mari est jeune, il est d'un
bon naturel Vous passerez la vie la plus simple il est
vrai, mais aussi la plus douce et la plus heureuse dont j*aye
ridée. Mais encore une fois si celle d'un ménage bourgeois
vous dégoûte et si Popinion vous subjugue, guérissez-vous
de la soif du bonheur qui vous tourmente, car vous ne
l^étancherez jamais. >
Voilà Jean-Jacques directeur de conscience I Vit-on jamais
des pensées plus saines sous une plus magnifique enveloppe,
mais aussi une contradiction plus flagrante entre l'esprit et
le caractère ? L'auteur de ces lignes porte comme stigmate
infamant l'accusation d'avoir mis tous ses enfants à l'hôpital.
Je ne sais si, dans ses œuvres imprimées, il a fait quelque
part l'aveu de sa faute; sinon, toute controverse sur ce point
demeure désormais superflue après sa lettre authentique du
17 janvier 1770; il écrit à la comtesse à propos de ses
enfants : c Madame, plaignez ceux qu^un sort de fer prive
d'un pareil bonheur. Plaignez-les s'ils ne sont que mal
heureux, plaignez-les beaucoup plus s'ils sont coupables.
Pour moi jamais on ne me verra falsifier les saintes loix de
- 417 -
la nature et du devoir pour atténuer mes fautes. J'aime
mieux les expier que les excuser, et quand ma raison me dit
que j'ai fait dans ma situation ce que j'ai du faire ^ je Ten
crois moins que mon cœur qui gémit et qui la dément.
Condamnez-moi donc, Madame» mais écoutez-moi. Vous
trouverez un homme ami de la vérité jusque dans ses fautes
et qui ne craint point d'en rappeler lui-même le souvenir
lorsqu^il en peut résulter quelque bien. Néanmoins je rends
grâce au ciel de n'avoir abreuvé que moi des amertumes de
ma vie et d'en avoir garanti mes enfants. J^aime mieux
qu'ils vivent dans un état obscur sans me connoitre que de
les voir dans mes malheurs bassement nourris par la traî-
tresse générosité de mes ennemis , ardens à les instruire à
hair et peut-être à trahir leur père, et j'aime mieux cent fois
être ce père infortuné qui négligea son devoir par foiblesse
et qui pleure sa faute ^ que d'être Tami perfide qui trahit la
confiance de son ami, et divulgue pour le diffamer le secret
qu'il a versé dans son sein. :»
On se sent un instant désarmé par de tels accents. Nous
ne croyons pas qu'il y ait dans la Nouvelle Héloïse de pas-
sages plus pathétiques, plus émus. Un retour de la raison
perce vite ces sophismes qui ne pouvaient avoir de prise que
sur un cœur de femme. Rousseau a fui toute sa vie les occu-
pations utiles j et son orgueil immense, d'accord avec sa
paresse native, lui fit dédaigner de se créer une position
danç cette société objet de ses rancunes. De quoi se plaint-il?
Cette société ne lui a-t-elle pas oifert ses faveurs ? Valet dans
son enfance, vagabond, M°* de Warens lui donne une
éducation qui lui permet d'être précepteur chez le grand-
prévôt de Lyon, puis secréuire d'un ambassadeur, commis
d'un fermier général. Rien n'est à sa taille; l'orgueil et
l'envie le font chasser de partout ; il rebute successivement
par son ingratitude tous ses protecteurs : M»* d'Epinay,
Hume, le prince de Conti, etc. Pour lui, pas de Mécène ! la
seule pensée de la reconnaissance lui est un fardeau insup-
portable.
— 4ï8 —
Au fond de son plaidoyer élégiaque, il n^y a que
régoïsme.
On a souvent parlé de son orgueuil , en voici un reflet : il
écrit à la date du i6 mars 1770 : « Vous m^avez accordé de
Pestime sur mes écrits, vous m^en accorderiez davantage
sur ma vie si elle vous étoit connue, et davantage encor sur
mon cœur s'il étoit ouvert à vos yeux. Il n'en fut jamais un
meilleur un plus tendre un plus juste; la méchanceté ni la
haine n'en approchèrent jamais Tous mes malheurs ne
me viennent que de mes vertus. > Et ailleurs : c Mes
ennemis peuvent tout^ hors de faire que la poitrine de J.*J.
Rousseau vivant cesse de renfermer le cœur d'un homme de
bien. »
Ses ennemis... > Ce mot revient sans cesse sous sa plume ;
il en voit partout; il est hanté du spectre de la persécution :
« Je ne puis suivre dans leurs manœuvres souterraines ces
troupes de noires taupes qui se fatiguent à me jeter de la
terre sur les pieds » Et une autre fois, pris d^un de ces
accès de noire mélancolie qui lui montraient l'univers entier
conjuré à sa perte et qui finirent par confiner à la toliey il
s*écrie : c Je suis entre les mains des hommes , ces hommes
ont leurs raisons pour craindre la vérité Je n'ai pu
malgré tous mes efforts percer le mystère aflreux des trames
dont je suis enlacé ^ elles sont si ténébreuses on me les cache
avec tant de soin que je n'en aperçois que la noirceur les
frivoles clameurs de la calomnie sont bien différentes dans
leurs effets des complots dont les développements suc-
cessifs, dirigés par la ruse^ opérés par la puissance, se font
lentement sourdement et avec méthode. Ma situation esc
unique , mon cas est inouï depuis que le monde existe, selon
toutes les règles de la prévoyance humaine je dois succomber,
et toutes les mesures sont tellement prises qu'il n'y a qu'Hun
miracle de la Providence qui puisse confondre les impos^
teurs Jeune femme écoutez-moi : quoi qu'il arrive, et
quelque sort qu'on me préparc souvenez-vous des trois
mots par lesquels ont fini mes adieux. Je suis innocent. >
— 4ï9 -
Pan$ cç Rousseau morose , levant au ciel des bras armés
de prosopopées fulgurantes , il y a par éclaircies quelques
pensées gracieuses et naturelles. Il sait être aimable, moins
pourtant que son siècle, dont il n^a ni la finesse, ni la gaieté^
ai Tesprit : c Vous m^oiFrez, Madame, dans la douceur de
m'entretenir quelquefois avec vous un dédomagement dont
je sens déjà le prix « mais qui ne peut pourtant qu*à Paide
d*une imagination qui vous cherche, suppléer au charme de
voir animer vos yeux et vos traits par ces sentiments vivi-
fiants et honnêtes dont votre cœur me paroit pénétré »
Ou bien , après lui avoir conseillé d'éviter < le tourbillon
des plaisirs bruyans de ne pas s'en laisser subjuguer »,
il ajoute ce madrigal : c Votre âge, Madame, vos sentiments,
vos résolutions vous donnent tout le droit d'en goûter les
plaisirs sans allarmes^ et tout ce que je vois de plus à
craindre dans ces sociétés où vous allez briller est que vous
ne rendiez beaucoup plus difficile à suivre pour d'autres
Tavis que je prends ici la liberté de vous donner. » Il essaye
même , au début , le ton galant :
c Je crains bien. Madame, que l'intérêt peut-être un peu
trop vif que vous m'inspirez ne m'ait fait vous prendre un
peu trop légèrement au mot sur ce ton de pédagogue que
vous m'invitez en quelque sorte de (sic) prendre avec vous.
Si vous trouvez mon radotage impertinent ou mausade, ce
sera ma vengeance de la petite malice avec laquelle vous êtes
venue agacer un pauvre barbon ^ qui se dépêche d'être
sermoneur pour prévenir la tentation d'être encor plus ridi-
cule Dites-moi si je dois parler ou me taire, etsoye^
sure. Madame» que dans Tun et dans Tautre cas, je vous
obéirai , non pas avec le même plaisir peut-être , mais avec
la même fidélité i. Pourquoi iaut-il qu'une douche d'eau
(roide de sa correspondante, soit venue nous priver du régal
— littéraire j'entends — de voir le vieux Jean-Jacques en
coquetterie réglée ! Avec quelle bonne grâce ce pauvre carlin
éclaboussé s'excuse un autre jour : « Je vous sais gré de me
reprocher mon air gauche et embarassé , mais si vous voulez
que Je m'en défasse, il faut que ce soit votre ouvrage. Un
naturel d^une insupportable timidité, surtout auprès des
femmes , me rend toujours d^autant plus maussade que je
voudrois me rendre plus agréable. De plus, je n^ai jamais su
parler, surtout quand j'aurois voulu bien dire, et si vous
avez la préférence de tous mes embarras , vous n^aurez pas
trop à vous en plaindre. »
Malheureusement ce n^est que par échappées que le prédi-
cateur doublé du rhéteur oublie son apostolat. La tâche
qu'il s'est tracée : c vitam impendere vero , » pourrait se
traduire: Renverser la société; et ce charmeur y parvient ,
dans le domaine spéculatif d'abord, par la science du
sophisme , le crescendo des effets et l'éclat des déductions.
Il a ensorcelé son siècle, et l'esprit d'une petite comtesse a
dû n'être qu'un jeu pour lui. Mais si la méditation, la
concentration de la pensée ont donné à son style un nerf et
une puissance qui subjuguent, la tension et l'effort y sont
néanmoins apparents. Rousseau n'a pas la facilité; et en
examinant ses lettres à notre Nivernaise, on se rend compte
une fois de plus que cet admirable arrangement des périodes,
cette concision, cette propriété de l'expression, sont le
résultat d'une étude préliminaire pour chaque épître un peu
importante. Celles qui sont courtes et ne traitent pas de
philosophie sont d'une écriture plus cursive, avec ratures,
répétitions de la même expression, voire même quelques
fautes d'orthographe et de grammaire; les autres sont d^une
écriture un peu plus droite, plus serrée, absolument régu-
lière, sans ratures malgré la densité de la pensée et sa tension
vers le trait final; elles doivent n'être qu'une mise au net de
brouillons laborieusement enfantés. C'est du reste ce quUl
confesse : c Mes idées s'arrangent dans ma tête avec la plus
incroyable difficulté Une lettre sur les moindres sujets
me coûte des heures de fatigue. >
Le caractère de cet homme étrange n^était guère fait pour
des amitiés de la valeur de celle qui nous occupe. Sa vie et
son œuvre ne sont qu^un tissu de contrastes et de contra-
— 4^1 —
dictions choquantes. La musique, dit-il, n'est bonne qu'à
efiéminer Tâine, et il donne le Devin de village; la litté-
rature corrompt les mœurs, sauf peut-être Julie, et les
Confessions. Il déclame contre le factice et le convenu ; et
ses conceptions de l'homme et de la société en sont la quin-
tessence. Nous vante-t-il la nature? tout chez lui est étudié
et voulu; la morale? la vertu? la bonté? la fraternité? ses
enfants, ses vices, sa haine « sa misanthropie, ses invectives
contre ceux mêmes qui cherchent à être ses amis, sont une
réponse accablante. Le loyal Hume en vient à écrire :
c Rousseau est un scélérat » ; et la comtesse de Boufflers , à
Gustave III : c Je ne reviens pas du culte que je lui ai
rendu, car c^en étoit un. »
Il est probable que la désillusion survint aussi chez notre
héroïne nivernaise; la correspondance cesse à partir du
i3 août 1770. Il était temps ! non pas qu^elle fût de celles
dont Jean-Jacques dit avec outrecuidance dans ses Confes*
sions : c II y en avait peu , même dans les hauts rangs , dont
je n'eusse fait la conquête si je l'eusse entreprise ; > mais les
doctrines de l'auteur de la lettre venimeuse à Parchevêque
de Paris eussent fini par étouffer ses croyances , dessécher
son âme et n^y laisser que le vide, en guise d^un bonheur
irréalisable.
Ad. de VILLENAUT.
•r. m, 3» série.
— 4^2 —
PROGRAMME
DU CONGRÈS DES SOCIÉTÉS SAVANTES A LA SORBONNE
EN 1889.
SECTION d'histoire ET DE PHILOLOGIE.
Mode d'élection et étendue des pouvoirs des députés aux
Etats provinciaux.
Transformations successives et disparition du servage dans
les différentes provinces.
Origine et organisation des anciennes corporations d'arts
et métiers.
Histoire des anciennes foires et marchés.
Anciens livres de raison et de comptes. — Journaux de
famille.
Vieilles liturgies des églises de France.
Etude des anciens calendriers.
Origine et règlements des confréries et établissements
charitables antérieurs au dix-huitième siècle.
Textes inédits ou nouvellement signalés de chartes^ de
communes ou de coutumes.
Recherches sur les mines et les salines en France avant la
Révolution.
De Torganisation et du rôle des milices et des gardes
bourgeoises avant la Révolution.
De la piraterie avant le milieu du dix-septième siècle.
Etudier l'origine, la composition territoriale et les démem-
brements successifs des fiefs épiscopaux au moyen-âge.
Rechercher à quelle époque, selon les lieux, les idiomes
vulgaires se sont substitués au latin dans la rédaction des
— 4^' —
documents administratifs. Distinguer entre Temploi de
ridiorpe local et celui du français.
Etudier les cadastres ou compoids antérieurs au seizième
siècle.
Jeux et divertissements publics ayant un caractère de
périodicité régulière et se rattachant à des coutumes
anciennes, religieuses ou profanes.
Etablissements ayant pour objet le traitement des maladies
contagieuses, et mesures d ordre public prises pour en pré-
venir la propagation.
Histoire de l'alimentation en France jusqu'à la fin du
dix-septième siècle.
Etudier quels ont été les noms de baptême usités suivant
les époques dans une localité ou dans une région; en
donner, autant que possible , la forme exacte et rechercher
quelle peut avoir été la cause de leur vogue plus ou moins
longue.
Etude sur le culte des saints, la fréquentation des pèle-
rinages et l'observation de diverses pratiques religieuses au
point de vue de la guérison de certaines maladies.
Indication et critique des travaux imprimés ou manus-
crits qui ont été faits sur l'histoire des diocèses de la France
antérieurement à la Gallia christiana des Bénédictins et qui
ont pu servir à la rédaction de cet ouvrage.
Les anciens ateliers typographiques en France.
Renseignements historiques ou autres qu'on peut tirer des
privilèges accordés aux auteurs et aux libraires.
SECTION d'archéologie.
i^ Signaler les inventaires des collections particulières
d objets antiques, statues, bas-reliefs, monnaies, formées
en province du seizièrhe au dix-huitième siècle.
Nos musées, tant ceux de Paris que ceux de la province ,
sont remplis d'objets dont la provenance est inconnue ou
tout au moins incertaine; or, tout le monde sait de quelle
— 4H —
importance il peut être de connaître l'origine des objets que
l'on veut étudier; tous les archéologues se rappellent les
étranges bévues dans lesquelles des erreurs de provenance
ont fait tomber certains savants. Les anciens inventaires
sont d^une grande utilité pour dissiper ces erreurs : ils nous
apprennent en quelles mains certains monuments ont passé
avant d^étre recueillis dans les collections oii ils sont aujour-
d'hui; ils nous permettent parfois, en remontant de proche
en proche, de retrouver lorigine exacte de ces monuments,
ou , tout au moins , ils servent à détruire ces légendes qui,
dans bien des musées, entourent les monuments et qui sont
la source des attributions les plus fantaisistes. On ne saurait
donc trop engager les membres des sociétés savantes à
rechercher dans les archives de leur région , en particulier
dans celles des notaires, les inventaires de ces nombreux
cabinets d^amateurs formés depuis le seizième siècle, et dont
on peut retrouver des épaves dans nos musées provinciaux.
On ne demande pas, bien entendu, d^apporter au Congrès
le texte même de ces inventaires, mais de signaler les docu-
ments de ce genre qui peuvent offrir quelque intérêt , en en
dégageant les renseignements qui paraîtraient utiles à
recueillir.
2* Indiquer, pour chaque région de la Gaule, les sarco-
phages ou fragments de sarcophages païens ou chrétiens non
encore signalés. En étudier les sujets, rechercher les données
historiques et les légendes qui s'y rattachent.
Il ne s'agit pas de faire un travail d^ensemble sur les
sarcophages antiques conservés en Gaule, ce qui offrirait à
coup sûr un grand intérêt. Mais ce serait une entreprise diffi-
cile et de longue haleine. Le comité invite simplement ses
correspondants à rechercher les monuments encore inconnus
qui pourraient plus tard prendre place dans un corpus ana-
logue à celui que M. Le Blant a consacré aux sarcophages
chrétiens. Il souhaite surtout qu'on recherche la provenance
des monuments ou fragments de monuments de ce genre qui
se sont conservés dans divers musées ou églises de province.
- 4^5 —
et qu'on étudie les légendes qui fort souvent se sont atta-
chées à ces monuments et dont il est si difficile aux savants
étrangers à la région de retracer les détails et de découvrir
l'origine.
3» Signaler les nouvelles découvertes de bornes milliaires
ou les constatations de chaussées antiques qui peuvent servir
à déterminer le tracé des voies romaines en Gaule ou en
Afrique.
4® Etudier dans une région déterminée de l'Afrique les
édifices antiques, tels que arcs de triomphe, temples, théâtres,
cirques, portes de ville, tombeaux monumentaux, aqueducs,
ponts, basiliques, etc., et dresser le plan des ruines romaines
les plus intéressantes.
Les savants qui , dans ces dernières années, se sont livrés
à la recherche et à Pétudedes antiquités du nord de l'Afrique,
ont, pour la plupart, consacré la meilleure part de leurs
efforts à Tépigraphie. Le comité pense que Tétude des
monuments d'architecture, dont les ruines se dressent encore
en si grand nombre en Algérie et en Tunisie, pourrait
fournir des résultats non moins intéressants. Il appelle
notamment l'attention des travailleurs sur les édifices chré-
tiens des premiers siècles dont les restes ont pu être signalés
jusqu'ici par divers explorateurs, mais qui n'ont point fait
Tobjet d'une étude archéologique détaillée.
5<> Signaler les actes notariés du quatorzième au seizième
siècle contenant des renseignements sur la biographie des
artistes, et particulièrement les marchés relatifs aux pein-
tures, sculptures et autres œuvres d'art commandées soit par
des particuliers, soit par des municipalités ou des commu-
nautés.
Il est peut-être superflu de faire remarquer que la meil-
leure façon de présenter les documents de ce genre au
Congrès serait d'en faire un résumé , oii Ton s'attacherait à
mettre en relief les données nouvelles qu'ils fournissent à
l'histoire de Part, et à faire ressortir les points sur lesquels
— 4^6 —
ils confirment, complètent ou contredisent les renseigne-
ments que Ton possédait d'autre part.
6** Signaler les objets conservés dans les musées de pro-
vince et qui sont d'origine étrangère à la région où ces
musées se trouvent.
Par suite de dons ou de legs, bon nombre de musées de
province se sont enrichis d'objets que l'on est souvent fort
étonné d'y rencontrer. Dans nos villes maritimes en parti-
culier, il n'est pas rare que des officiers de marine ou des
voyageurs aient donné au musée de la localité des antiquités
parfois fort curieuses qu'ils avaient recueillies en Italie, en
Grèce, en Orient. Quelques villes ont acquis de la sorte de
fort belles collections dont elles sont justement fières. Un
beaucoup plus grand nombre ne possèdent qu'un petit
nombre de ces antiquités étrangères à la région , et ces objets
isolés au milieu des collections d'origine locale échappent
bien souvent à Tattention des érudits qui auraient intérêt à
les connaître. C'est donc surtout ces objets isolés qu'il est
utile de signaler avec dessins à l'appui et en fournissant tous
les renseignements possibles sur leur provenance et sur les
circonstances qui les ont fait entrer dans les collections où
on les conserve actuellement.
7" Etudier les caractères qui distinguent les diverses écoles
d'architecture religieuse à l'époque romane, en s'attachant à
mettre en relief les éléments constitutifs des monuments
(plans, voûtes, etc.).
Cette question , pour la traiter dans son ensemble, suppose
une connaissance générale des monuments de la France qui
ne peut s'acquérir que par de longues études et de nombreux
voyages. Aussi n'est-ce point ainsi que le comité la com-
prend. Ce qu'il désire, c'est provoquer des monographies
embrassant une circonscription donnée, par exemple, un
département, un diocèse, un arrondissement, et dans
lesquelles on passerait en revue les principaux monuments
compris dans cette circonscription , non pas en donnant une
description détaillée de chacun d'eux , mais en cherchant à
— 427 —
dégager les éléments caractéristiques qui les distinguent et
qui leur donnent entre eux un air de famille. Ainsi , on
s^attacherait à reconnaître quel est le plan le plus fréquem-
ment adopté dans la région; de quelle façon la nef est habi-
tuellement couverte (charpente apparente, voûte en berceau
plein-cintré ou brisé, croisées d'ogives, coupoles} ; comment
les bas-côtés sont construits, s^ils sont ou non surmontés de
tribunes; s'il y a des fenêtres éclairant directement la nef,
ou si le jour n'entre dans l'église que par les fenêtres des
bas-côtés; quelles sont la forme et la position des clochers;
quelle est la nature des matériaux employés ; enfin , s'il y a
un style d^ornementation particulier, si certains détails
d'ornement sont employés d^une façon caractéristique et
constante, etc.
8** Rechercher dans chaque département ou arrondissement
les monuments de l'architecture militaire en France aux
diverses époques du moyen -âge. Signaler les documents
historiques qui peuvent servir à en déterminer la date.
La France est encore couverte de ruines féodales dont
l'importance étonne les voyageurs en même temps que leur
pittoresque les séduit. Or, bien souvent de ces ruines on ne
sait presque rien. C'est aux savants qui habitent nos pro-
vinces à décrire ces vieux monuments , à restituer le plan de
ces anciens châteaux, à découvrir les documents historiques
qui permettent d^en connaître la date et d'en reconstituer
rhistoire. Les monographies de ce genre, surtout si elles
sont accompagnées des dessins si nécessaires pour leur intel-
ligence, seront toujours accueillies avec faveur à la Sorbonne.
9^ Signaler les constructions rurales élevées par les
abbayes ou les particuliers, telles que granges, moulins,
étables, colombiers. En donner autant que possible les
coupes et plans.
Cet article du programme ne réclame aucune explication.
Le comité croit seulement devoir insister sur la nécessité de
joindre aux communications de cet ordre des dessins en plan
et en élévation.
— 4*8 —
100 Indiquer les tissus anciens , les tapisseries et les bro-
deries qui existent dans les trésors des églises, dans les
anciens hôpitaux et dans les musées.
On peut répondre de deux façons à cette question : soit en
faisant un catalogue raisonné de tous les tissus anciens exis-
tant dans une ville ou dans une région déterminée , soit en
donnant la description critique de tapisseries ou de tissus
inédits. Dans ce dernier cas, il importe tout particulièrement
de donner des renseignements précis sur le dessin^ la largeur
et le style des bordures , s'il y en a , et de signaler avec soin
les signatures y marques ou monogrammes existant dans la
lisière ou galon. Enfin, on devra donner autant que possible
des dessins ou des photographies des objets décrits et des
calques des monogrammes ou signatures.
ii<» Signaler dans chaque région de la France les centres
de fabrication de l'orfèvrerie pendant le moyen-âge. Indiquer
les caractères et tout spécialement les marques et poinçons
qui permettent de distinguer leurs produits.
Il existe encore dans un grand nombre d^gliseS; princi-
palement dans nos petites églises du Centre et du Midi, des
reliquaires, des croix et autres objets d'orfèvrerie qui n^ont
pas encore été étudiés convenablement, qui bien souvent
même n'ont jamais été signalés à l'attention des archéologues.
C^est aux savants de province qu'il appartient de rechercher
ces objets et d'en dresser des listes raisonnées. Cest à eux
surtout qu'il appartient de retracer l'histoire de ces objets^
de savoir où ils ont été fabriqués, et, en les rapprochant les
uns des autres, de reconnaître les caractères propres aux
différents centres de production artistique au moyen-âge.
12* Indiquer des pavages ou des carreaux à inscriptions
inédits.
Voilà longtemps qu'aucune communication de ce getire
n^a été faite à la Sorbonne. Il ne manque point cependant
dans nos collections provinciales de spécimens inédits de ces
curieux et élégants carrelages qui garnissaient jadis le sol de
nos chapelles et l'intérieur de nos châteaux. En les signalant
— 429 -
à Tattention des archéologues, on devra s'efforcer toujours
de rechercher les centres de fabrication d*où ces carrelages
proviennent.
SECTION DBS SCIENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES.
10 De la propriété en pays musulman.
2^ Rechercher s'il y aurait lieu de modifier la législation
relative à la juridiction commerciale.
3^ Rechercher quelle était, pour Tancien régime dans les
diverses régions de la France, la nature des fonctions des
procureurs du roi auprès des autorités locales d'ordre
municipal.
4P Examiner s'il ne conviendrait pas d'étendre la capacité
civile de la femme mariée ; étudier les emprunts qui pour-
raient être faits à cet égard aux législations étrangères.
5® De l'utilité d'éviter les courtes peines d'emprisonne-
ment pour les mineurs de seize ans , et de la nécessité de les
envoyer dans des maisons de correction.
6^ Des inconvénients du casier judiciaire appliqué aux
condamnés mineurs de vingt-un ans.
7* Etudier dans une province ou une circonscription plus
restreinte la succession des différents modes d'amodiation
dés terres. A quelle époque et dans quelle mesure le bail à
ferme ou le métayage a-t-il remplacé les anciennes tenures?
— Recueillir tous renseignements sur les redevances, prix,
services accessoires et durée des baux, aux différentes
époques. Indiquer, selon la localité, la substitution, au
dix-huitième siècle ou au dix-neuvième siècle, du fermage
à rente fixe au métayage, ou inversement.
8» Faire l'histoire, dans une province ou une circons-
cription plus restreinte, des contrats intéressant l'ouvrier
apicole au faire-valoir du propriétaire, tels que le glanage
dans l'Artois , l'engagement des maîtres valets dans les pays
toulousains.
g^ Etudier l'influence exercée par la crise agricole au
T. III, 3* série. 55
— 43o —
uiple point de vue de la division de la propriété, du mode
d'exploitation des terres (faire-valoir direct, métayage «
fermage) et de la culture.
lo^* Rechercher, par voie d^observations directes portant
sur une ou plusieurs communes, la fécondité comparative
des diverses catégories sociales, notamment celles du paysan
propriétaire ou non propriétaire.
ii<^ Recherches locales sur la statistique des accidents,
des maladies et des décès dans les diverses professions.
12. De l'assistance publique. Ses avantages et ses incon-
vénients.
i3o L'enseignement professionnel au point de vue du
commerce et de l'industrie. Ses formes diverses. Leurs avan*
tages et leurs inconvénients.
SECTION DES SCIENCES.
i« Etude du mistral.
2® Méthode d'observation des tremblements de terre.
30 Electricité atmosphérique.
4® Recherches sur la présence de la vapeur d'eau dans
l'air par les observations astronomiques et spectroscopiques.
5® Comparaison des climats du midi et du sud-ouest de la
France.
60 Des causes qui semblent présider à la diminution
générale des eaux dans le nord de l'Afrique et à un chan-
gement de climat.
7» Etudes relatives à Taérostation,
8^ Etude du mode de distribution topograpbique des
espèces qui habitent notre littoral.
9« Etude détaillée de la faune âuviatile de la France. Indi-
quer les espèces sédentaires ou voyageuses et, dans ce dernier
cas, les dates de leur arrivée et de leur départ. Noter aussi
l'époque de la ponte. Influence de la composition de l'eau.
10® Etudier, au point de vue de la pisciculture^ la faune
— 4^r — f .
des animaux invertébrés et les plantes qui se trouvent dans
les eaux.
1 1" Études des migrations des oiseaux. Indiquer ritiné-
faire, les dates d'arrivée et de départ des espèces de la faune
française. Signaler les espèces sédentaires et celles dont la
présence est accidentelle.
12* Etude du vol des oiseaux.
i3® Etude des insectes qui attaquent les substances ali-
mentaires, biscuit, etc.
14'» Etude des phénomènes périodiques d'e la végétation;
date du bourgeonnement, de la floraison et de la maturité.
Coïncidence de ces époques avec celle de l'apparition des
principales espèces d'insectes nuisibles à l'agriculture.
i5« Etude de l'apparition des cétacés sur les côtes de
France. Indiquer l'époque et la durée de leur séjour.
16* Epoque, marche et durée des grandes épidémies au
moyen-âge et dans les tenlps modernes.
i7<> Comparaison des espèces de vertébrés de l'époque
quaternaire avec les espèces similaires de l'époque actuelle.
180 Etude des gisements de phosphate de chaux au point
de vue mînéralogique, chimique, géologique et paléon-
tologique.
i^^ Comparaison de la flore de nos départements méri-
dionaux avec la flore algérienne.
20<» Etude des arbres à quinquina, à caoutchouc et à gutta-
percha , et de leurs succédanés. Quelles sont les conditions
propresà leur culture? De leur introduction dans nos colonies.
2!« L'âge du creusement des vallées dans les diverses
régions de la France.
22* Faire la statistique détaillée des grottes, abris sous
roches ^t terrains d'alluvion oîi ont été découverts des osse-
ments humains et des restes d'industries remontant à
répoque quaternaire, soit pour la France entière, soit pour
une ou plusieurs de ses principales régions; préciser la
nature des objet$ et indiquer les principaux fossiles qui leur
étajçnt associés,
23<> Dresser la carte détaillée des monuments mégali*
thiques et des sépultures néolithiques pour une de nos
principales régions, en l'accompagnant d'un texte explicatif.
24* Rechercher, dans le plus grand nombre possible de
têtes osseuses néolithiques, celles qui reproduisent à des
degrés divers les caractères des races de Tépoque précédente ;
signaler les faits de fusion et de juxtaposition de caractères
qu^elles peuvent présenter.
250 Préciser, surtout par Tétude des têtes osseuses^ le type
ou les types nouveau-venus, dans une région déterminée,
aux époques de la pierre polie, du cuivre, du bronze et du
fer.
26<' Déterminer les éléments ethniques dont le mélange a
donné naissance à une de nos époques actuelles.
27® Etudier et décrire avec détail quelqu'une de nos popu-
lations que Ion peut regarder comme ayant été le moins
atteinte par les mélanges ethniques.
28<< Rechercher et décrire les îlots de population spéciale
et distincte qui existent sur divers points de notre territoire.
29* Rechercher l'influence que peut exercer sur la taille et
les autres caractères physiques des populations la nature des
terrains {calcaire et terrains primitifs).
3o<> Etude des animaux et des végétaux qui vivent dans
les mines et dans les houillères.
. SECTION DE GÉOGRAPHIE HISTORIQUE ET DESCRIPTIVE,
i<* Anciennes démarcations des diocèses et des cités delà
Gaule conservées jusqu^aux temps modernes.
2" Exposer les découvertes archéologiques qui ont servi à
déterminer le site de villes de Tantiquiié ou du moyen-âge,
soit en Europe, soit en Asie, soit dans le nord de l'Afrique,
soit en Amérique.
3* Signaler les documents géographiques curieux (textes
et cartes manuscrits) qui peuvent exister dans les biblio-
thèques publiques et les archives des départements et des
— 433 -
communes. — Inventorier les cartes locales manuscrites
et imprimées.
4* Biographie des anciens voyageurs et géographes fran-
çais.
5* De l'habitat en France, c'est-à-dire du mode de répar-
tition dans chaque contrée des habitations formant les
bourgs y les villages et les hameaux. — Dispositions parti-
culières des locaux d'habitation, des fermes, des granges, etc.
Origine et raison d'être de ces dispositions. — Altitude
maximum des centres habités.
6^ Tracer sur une carte les limites des différents pays
(Brie, Beauce, Morvand, Sologne, etc.), d'après les cou-
tumes, le langage et Topinion traditionnelle des habitants.
— Indiquer les causes c(e ces divisions (nature du sol, ligne
de partage des eaux , etc.).
7* Compléter la nomenclature des noms de lieux, en
relevant les noms donnés par les habitants d'une contrée
aux divers accidents du sol (montagnes, cols, vallées, etc.)
et qui ne figurent pas sur nos cartes.
8* Chercher le sens et Torigine de certaines appellations
communes à des accidents du sol et de même nature (cours
d^eau, pics, sommets, cols, etc.).
9^ Etudier les modifications anciennes et actuelles du
littoral de la France.
10^ Chercher les preuves du mouvement du sol, à Tinté-
rieur du continent , depuis répoque historique; traditions
locales ou observations directes.
11^ Signaler les changements survenus dans la topo-
graphie d'une contrée depuis une époque relativement
récente ou ne remontant pas au-delà de la période histo-
rique, tels que : déplacement des cours d'eau ^ brusques ou
lents; apports ou creusement dus aux cours d'eau; modi-
fications des versants, recul des crêtes, abaissement des
sommets sous l'influence des agents atmosphériques; chan-
gements dans le régime des sources , etc.
i2«> Forêts, marais, cultures et faunes disparus.
PROGRAMME
POUR l'Étude de l'habitat en frange, c'est-
à-dire LES DISPOSITIONS QUE PRÉSENTENT LES
BOURGS, VILLAGES, HAMEAUX